Le Nouvel Educateur n° 139

Mai 2002

Direction d'école

Mai 2002

 

Direction d’école.

Parmi les nombreux problèmes posés à l’école restant sans solution faute de réelle volonté politique, celui de la direction d’école figure toujours en bonne place malgré, les actions syndicales (grève administrative des directeurs), les déclarations de J. Lang a son arrivée au Ministère et le malaise toujours présent de celles et ceux chargés, volontairement ou non, des tâches liées à la direction d’école qui se sont diversifiées et alourdies ces dernières années.

Nous devons considérer la tentation de vouloir faire évoluer la fonction de direction d’école vers un statut de chef d’établissement comme toujours potentiellement présente dans l’esprit de certains y compris des directrices ou directeurs en poste qui agissent comme de « véritables petits chefs » ou qui abusent d’un pouvoir despotique usurpé, encouragés par une hiérarchie qui verrait d’un bon œil la directrice ou le directeur transformé en courroie de transmission. Faut-il le rappeler, parce que l’école primaire devrait idéalement être une communauté éducative, la fonction de direction telle qu'elle est organisée y compris par l'administration n'est pas un échelon hiérarchique.

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Il existe des différences entre les circonscriptions, les académies, entre les écoles en milieu rural et en milieu urbain, les R.P.I., les classes uniques et les écoles d’une bonne dizaine de classes… La question ne se pose pas de la même façon lorsqu’on est seul dans une école, lorsqu’il existe une véritable équipe ou lorsqu’on est dans une école « Freinet ». Pour autant, équipe et décision prise démocratiquement n’impliquent pas forcément pédagogie Freinet, ni respect des droits de l’enfant.

L’ICEM a déjà pris position en proposant une alternative à la direction d’école par la gestion coopérative en avançant d’autres logiques et organisations dans le sens d’une meilleure coopération au sein des équipes et, par conséquent, d’une réelle appropriation par chaque enseignant du projet de son école.

Nous appuyant sur de nombreuses années d’expérience dans nos équipes pédagogiques et conformément à la plate-forme des équipes Freinet, nous affirmons que la gestion coopérative ou collégiale d’une école est une alternative particulièrement efficace et dynamisante à la direction reposant sur une seule tête. 

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Elle permet  une responsabilisation de tous les acteurs de l’école, le partage des responsabilités dévolues traditionnellement au seul directeur, le renforcement du rôle du conseil des maîtres.

Ce projet suppose la mise en œuvre de dispositions adéquates : une décharge de direction à disposition de l’équipe pédagogique et non du seul directeur, une indemnité de direction à envisager au niveau de l’équipe, du temps d’animation et de concertation, une formation des enseignants au travail en équipe… 

Pour la mise en place de ce mode de gestion des écoles, nous demandons une facilitation administrative partout où il y a une volonté d’y procéder. Nous sommes prêts à communiquer nos expériences en la matière et à nous associer à une réflexion sur les aménagements administratifs et légaux induits par ce type d’organisation.  

Gérard Rigaldo

Membre du C.A. de l’ICEM.

 

Doucement mais sûrement le marché tente de nous séduire !

Mai 2002

 

Doucement mais sûrement le marché tente de nous séduire ! 

Ces derniers mois, deux exemples d’offensive nous le rappellent concrètement. 

TF1 propose un jeu « le grand concours » destiné aux collégiens de 5ème. Les collèges volontaires devant sélectionner cinq élèves avec un quiz  « portant sur le programme de 5ème et la culture générale » organisé par ces mêmes établissements. La société de production (celle de « Qui veut gagner des millions ») récupère ainsi cent jeunes pour un test télévisé prévu le 16 février. Cette demande de TF1 a été appuyée par un courrier de Jean-Paul de Gaudemar (directeur de l’enseignement scolaire). 

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Les syndicats d’enseignants ont protesté et se sont indignés (l’image et le nom des enfants sélectionnés pouvant être utilisés pour tous produits dérivés et tous supports sans salaire, ni dédommagement) et n’ont eu aucune difficulté à se faire entendre de Jack Lang (Porto Alegre oblige).  

TF1 maintient son jeu mais en changeant son mode de sélection. 

La prévention routière en région parisienne propose, aux enfants de CM2, un film sur la sécurité. Il est composé de plusieurs séquences avec, pour chacune d’elles, un dessin animé et  un film « en réalité ». Les enfants devant être « très attentifs », car le film est suivi d'un questionnaire donné par les deux policiers qui le présentent. Or, dans chaque dessin animé, la situation de départ se déroule devant la vitrine d'un Quick, on ne voit jamais d'autre magasin, de même dans les passages « en réalité », le seul commerce apparaissant est encore un Quick. Donc sur 20 minutes de projection, la moitié fait de la publicité pour le restaurant. Le film touche ainsi beaucoup d'enfants (à cette époque de l'année, ces deux policiers en ont déjà vu 2100 dans notre seul département). 

Dans le premier exemple, TF1, en utilisant l’Éducation nationale pour sélectionner, joue sur plusieurs tableaux : elle économise les coûts, assure à son émission une aura éducative favorable à l’audimat et donc aux retombées publicitaires et, subrepticement, tente d’apprivoiser les enseignants. On ne peut que penser aux privatisations où la concurrence utilise et utilisera les infrastructures existantes (Télécoms, EDF et  SNCF…).  

Dans le deuxième exemple,  les visées sont identiques mais plus discrètes, plus pernicieuses : 

-L'enfant  objet de consommation : on utilise le fait que les enfants soient obligés de regarder le film sans zapper, dans un projet éducatif, guidé par leur enseignant. Effet puissant pour un coût de production minimum et un circuit de distribution gratuit !


-L'école  productrice de citoyens à sa convenance :  sans difficultés, l'entreprise entre à l'école, sous prétexte de compenser le manque de moyens, elle offre kits, matériels, vidéos... aux enseignants. Dans un premier temps, cela ressemble à de la publicité que l’on peut souvent cacher (pour nous apprivoiser peut-être !) et dans un deuxième temps, lorsque nous serons bien habitués, quand nous serons bien dépendants, l’entreprise ne participera plus qu'aux projets éducatifs lui convenant, c’est à dire les plus rentables financièrement et idéologiquement. 

L’Éducation nationale ferme-t-elle les yeux ou est-elle éblouie par le libéralisme ambiant ? 

Soyons vigilants, résistants et intransigeants !

 

Catherine Chabrun
Groupe départemental 91

Droits et citoyenneté de l'enfant à l'école primaire : la régression des nouveaux programmes

Mai 2002

 

Lettre ouverte de l’Institut Coopératif de l’Ecole Moderne

et de l’Office Central de la Coopération à l’Ecole

DROITS ET CITOYENNETE DE L’ENFANT A L’ECOLE PRIMAIRE :

LA REGRESSION DES NOUVEAUX PROGRAMMES

Depuis l’adoption de la Convention internationale des droits de l’enfant le 20 novembre 1989, les mouvements pédagogiques ont mené des réflexions, organisé des formations, produit des outils d’information des enseignants et des enfants, pour que la Convention soit connue dans les écoles et que les élèves puissent y exercer une véritable citoyenneté participative.

Nous attendions des Nouveaux programmes de l'école primaire de 2002,  dans le cadre de l’éducation civique, une reconnaissance de cette citoyenneté et les modalités d’exercice des libertés et des obligations des élèves, dans une école respectueuse du droit. Or non seulement il n'y a aucune avancée mais c'est une véritable régression ! Il n'est jamais question de "droits" ou de "libertés" et le mot "citoyenneté" n'existe plus. Quant à la Convention, elle est citée une seule fois mais elle ne figure pas au programme :

" A travers la géographie, l'élève(...) découvre que la Convention internationale des droits de l'enfant de 1989 est loin d'être appliquée dans plusieurs pays, en particulier en ce qui concerne le travail des enfants de son âge".

 

Remarquons que si elle était étudiée, dans sa dimension universelle et dans son application à travers le monde, les élèves français pourraient aussi apprendre que leur solidarité est nécessaire pour que tous les enfants puissent être mieux protégés et aller à l’école. Ils retiendraient que, dans des pays en voie de développement, des enfants connaissent mieux leurs droits qu’eux-mêmes et qu'il existe un article de la Convention qui leur donne le droit d'exiger d’être informés :

Article 42 - "Les Etats parties s'engagent à faire largement connaître les principes et les disposition de la présente Convention, par des moyens actifs et appropriés, aux adultes comme aux enfants".

En 1993, le Comité des droits de l'enfant des Nations Unies avait jugé positive l'action de la France " pour informer les enfants de leurs droits et les encourager à s'exprimer par l'intermédiaire de conseils spéciaux créés dans les écoles et les collectivités locales".         

Nous sommes donc en pleine régression !

C'est une situation étonnante et paradoxale, puisque les nouveaux programmes sont en contradiction avec les actions menées par les ministres eux-mêmes pour faire connaître la CIDE à l'occasion de la Journée nationale des droits de l'enfant( B.O. 1996, François Bayrou, B.O. 1997, Ségolène Royal).

En 1996, François Bayrou  avait indiqué que « c’est aux enseignants qu’il revient de lui donner toute sa portée à l’école en sensibilisant les enfants à leurs droits et obligations ».                         

En 1997, Ségolène Royal avait souhaité qu’un important travail de présentation et d’explication de la Convention se déroule dans les écoles, les collèges et les lycées, car « les idées que la Convention proclame, les droits qu’elle affirme ont une dimension universelle qui doit être connue des enfants et des adolescents confiés à l’éducation nationale ».

En 1998, dans son rapport, " Droits de l'enfant, de nouveaux espaces à conquérir", une commission d’enquête de l’Assemblée nationale avait estimé que la Convention reconnaît aux enfants " non seulement des droits civils, sociaux ou culturels, mais aussi des libertés publiques, véritables « droits de l'homme de l'enfant »". 

Après toutes ces initiatives ministérielles préconisant une information sur les droits des enfants et la mise en oeuvre de pratiques citoyennes, après la reconnaissance des libertés publiques accordées aux enfants, après les nombreuses études et actions menées, il aurait été logique et cohérent que les nouveaux programmes s’appuient sur les avancées théoriques et pratiques opérées. Or il n'en est rien ! Les rédacteurs des nouveaux programmes et le ministre Jack Lang les ont délibérément ignorées.

Nous appelons donc tous les militants des droits de l’enfant à continuer l’action  pour que les droits et libertés de l'enfant et l'exercice d'une citoyenneté participative à l'école deviennent une réalité, conformément aux engagements que la France a pris en ratifiant la Convention internationale.

 

Emploi du temps

Mai 2002

Leçon d’Histoire : 

Une fleur a poussé sur le pas de la porte

A côté de la pierre où tu te débottais.

Le vent de la montagne aura semé des graines…

La montagne, le soir, est toujours aussi sombre

Et toute la journée,

Toujours aussi battue par le vent qui remonte.

Ce méchant vent d’autan qui est vent de misère,

Répétais-tu souvent…

Tu as raison, la vie est dure.

Mais dieu… que Cayenne est si loin…

La montagne, la nuit, est toujours aussi noire

A part les réverbères en bas, dans la vallée.

Ils les ont installés l’an passé au village.

Ca renverse le ciel, ces étoiles d’en bas,

J’ai perdu mes repères…

M. le Comte a clos ses champs, après cet incendie.

Le chemin du dessus est emporté de ronces

Et j’ai moins de courage…

Tu as raison, la vie trop dure.

Mais dieu… que c’est si loin Cayenne…

La source s’est tarie, cinq jours à la fin août.

Certaines nuits, quand les enfants sont endormis,

Je regarde la lune au sommet de la crête.

Mais on m’a raconté que quand c’est lune ici

C’est le soleil là-bas…

La soupe va tremper et j’ai mis ton assiette.

Les oignons du jardin ont beaucoup de pelures,

C’est un signe de froid.

As-tu raison ? La vie me dure.

Et dieu… c’est pas juste, Cayenne…

 

Leçon de conjugaison :

 

Le futur appartient à la dame Camarde

Et sa foutue sale cocarde

Qu’on voudrait bien lui arracher.

 

Le passé est bâtard de la mère Jobarde

De ses attraits d’arrière-garde

Qu’on voudrait bien reconjuguer.

Le présent est un fruit de déesse gaillarde

Avec des seins comme une écharde

Qu’on voudrait bien voir perdurer.

Futur, passé, présent.

J’étais, je tente d’être et je ne serai plus.

Conjugaison vitale.

 

Leçon de géographie :

 

Il ne connaissait pas les bords de la Garonne.

L’orgueilleuse douceur, l’impassible de l’eau, quand la lune de brume irise ses contours. Il ne se doutait pas de l’écume de glace qui berce ses îlots dans les nuits de janvier. Il ne savait non plus les souches millénaires amputées à jamais, penchées vers leur bourreau.

Il ne connaissait pas le froid de la Garonne.

Il n’imaginait pas les monceaux de mystère charriés en grondant du ventre des pitons. Elle vole aux Pyrénées sa couleur de colère. Il ne concevait pas les eaux d’ocre barbare d’un lit chargé de mort. Il ne savait pas plus les terreurs ancestrales qui maudissent Garonne. Et puis qui la supplient.

Il ne connaissait pas le gris de la Garonne.

Il ne soupçonnait pas qu’elle fît l’amour aux mouettes, qui viennent hardiment tâter de sa chaleur. Il ne supposait pas qu’elle puisse dès juillet libérer ses galets pour le pied des enfants. Il ne saurait jamais combien elle était femme. Solide et imprévue, aguicheuse et fidèle.

Il ne connaissait pas le chaud de la Garonne.

Il arrivait d’ailleurs, il ne pouvait savoir.

Il ignorait tout d’elle.

Et même ses appels il ne les savait pas.

Alors je l’ai poussé.

 

Leçon  d’Education Civique :

 

C’était un soir d’été. Un soir à touristes. Un de ces soirs feutrés où les accents se mêlent, comme un vague remord pour ceux qui sont restés. Restaurants. Restaurants qui déambulent sur le trottoir, dévoilant leurs appâts. Qui s’offrent sans pudeur aux désirs des clients. Terrasses avec parasols, la bouffe des vacances. Qu’importe alors l’ivresse si l’on a le flacon…

Quand il surgit d’on ne sait où, les yeux des dîneurs se rétrécirent. Les conversations s’intimisèrent, chacun se raccrochant au regard du voisin. Faire le cercle. A guichet fermé.

Il commença par les tables les plus proches de la chaussée, tendant sa sébile et murmurant des mots. Sans même l’excuse d’une guitare. Sa béquille le faisait bancroche et jetait une ombre sur les plateaux de fruits de mer.

 Il claudiquait entre les chaises. Une pièce tomba dans sa soucoupe, comme une incongruité. Regards évitant son merci.

Et des mains qui éloignent, des mentons de mépris.

Arriva le serveur. Débordé, débordant de style. Fous le camp. Allez, taille-toi ou je te raccompagne. T’as rien à faire ici.

La béquille regimbe. Alors la main, debout, menaçante. Qui bouscule. Déséquilibrée, la verrue bancale. Rattrapée par une autre main qui la relève, l’installe à sa table.

Plateau de fruits de mer pour la verrue.

Regards offusqués, lèvres occultées. Silence, désaveu. Puis le murmure qui reprend, les yeux qui se décrochent de l’intrus et du samaritain.

Cette nuit-là, je me souviens…

Avant de me coucher, l’estomac en repos, j’ai pleuré comme un con en rangeant ma béquille.

Lecture libre en littérature

Mai 2002

 

Lecture libre en littérature

 

Hervé d’Abadie a instauré, dans l’emploi du temps de sa classe de cycle III, une plage de lecture durant laquelle les enfants lisent, sans souci de rendre des comptes à l’adulte. Objectif avoué : déscolariser la rencontre avec la littérature et faire des enfants, des véritables lecteurs.

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 A l’heure où l’on parle beaucoup dans les écoles des rallyes-lecture, et de défis de lecture, à l’heure où le groupe d’experts ministériels proposent que les élèves de cycle III lisent un minimum de dix romans par an, beaucoup d’éditeurs proposent aux enseignants, un paquet complet de vingt livres de poche avec leurs questionnaires accompagnés de leurs corrections. 

Épatant ! De la littérature, écrite pour les enfants, entre dans les pratiques scolaires par la grande porte. Jadis, les enseignants faisaient lire des extraits de livres d’adultes pour les adultes. Aujourd’hui, les adultes n’auront pas même la corvée de lire les livres édités pour la jeunesse. Les éditeurs proposent le packaging ; l’enseignant fera sa distribution semestrielle de livres et de questionnaires. Le bureau des statistiques donnera le pourcentage de livres achevés et compris, de livres achevés et non compris, de livres non-achevés et non-compris. 

En classe, il y a 4 ans, concernant la littérature, les choses tournaient ainsi : les enfants choisissaient et inscrivaient un livre auprès du responsable de la bibliothèque de classe. J’augmentais le nombre de volumes en début d’année, à Noël et au passage d’un représentant. Les enfants lisaient à la maison. Point. En classe, nous lisions un roman en lecture suivie c’est-à-dire tous à la même vitesse et avec décorticage du texte.  

En arrivant dans une nouvelle école, je me suis trouvé confronté à des enfants qui ne voulaient pas du questionnaire adjoint au chapitre. Ils en avaient eu trop l’an dernier. J’ai dû promettre que nous étudierions « Les contes du chat perché » sans questionnaire à la clé. 

Un des principes de l’école est de permettre à tous d’apprendre à lire. Comme la plupart d’entre nous, acceptent de croire que cet apprentissage ne se limite ni au CP, ni au cycle II, nous organisons divers exercices pour perfectionner cet apprentissage. Mais, nous ne risquons guère l’entraînement sans contrôle de la lecture des élèves. Cela reste dans le carcan scolaire. Je garde sous silence, ce moment où « une fois le travail terminé, vous prenez votre livre. » 

Dans ma classe, j’ai institué en début d’après-midi, le quart d’heure de lecture suivie du bilan de lecture. Cette activité a subi de nombreuses modifications au cours des quatre années de son existence. La première fut que le quart d’heure oscille entre vingt et trente minutes. Je vous livre les conditions de sa réussite. 

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Un lieu et un temps pour lire

 

Il faut un moment institué dans l’emploi du temps : j’ai choisi ce moment où chacun lit son propre livre et où tous lisent. Il permet une sérénité dans la classe et une possibilité pour chacun de s’installer où il le désire en classe, par terre, sous une table (eh oui !), dans le couloir... Une liberté s’est installée pour une plus grande aisance. C’est Émilie qui un jour a dit : si on se mettait ailleurs qu’à son bureau.

 Il faut un moment quotidien : quand on lit un livre, on aime suivre l’histoire, on aime y revenir, se replonger dans le récit. Proposer de lire une fois par semaine amorce un désintérêt de l’histoire. Chacun peut aussi le continuer à la maison. Mais, il y a la garantie qu’on pourra le lire à l’école. C’est sûr chaque jour !

Un moment de silence 

C’est un moment de concentration d’ouverture vers un récit inconnu, il y a donc une règle à respecter, c’est celle du silence pour sauvegarder la sérénité de chacun : ce n’est pas un moment de communication. Les plus jeunes aiment bien montrer au copain les dessins de son livre. Mais, il existera un autre moment dans l’emploi du temps pour cela. Au moment du quart d’heure de lecture, on est à fond avec son bouquin. Le fait de pouvoir choisir son installation dans l’école permet  aussi de limiter ce choix en cas d’infraction à la règle. 

Liberté dans le choix du livre 

L’enfant lit ce qu’il veut : historiquement dans la genèse de cette activité, les trois premiers mois, bandes dessinées et documentaires étaient prohibées car les moyens lecteurs ne lisaient pas. Ils regardaient les photos et dessins en tournant les pages. Or, je recherchais le fait que les enfants lisent de l’écrit. L’assurance d’un enfant est parfois tellement minimale que devant les livres, il bloque. On le verra quand il montrera aux copains les dessins du livre, quand il lira des BD ou des albums et qu’il n’osera pas se lancer sur des livres de son âge. Alors,  mon rôle consiste aussi à lire un livre à cet enfant qui ne voit aucun livre à sa portée.  

Pas de compte à rendre  

La mode pédagogique en est au rallye-lecture, aux défis de lecture. Les enfants rédigent des questionnaires, répondent à des questionnaires sur le roman lu et choisi par l’adulte. Par ces questionnaires, l’école détourne les raisons pour lesquelles un écrivain a écrit son roman. Franchement, êtes-vous vraiment préparé à répondre à des questions après lecture de votre roman. A nouveau, l’école rend quelque chose de plaisant, fastidieux. Et ne s’agit-il pas de donner envie de lire pour l’avenir de chaque enfant ? 

Et, si les réponses sont fausses, l’école  reprend-elle la lecture du roman avec l’enfant ? Ou ne s’agit-il encore que d’un constat de non-compétence de l’enfant ? 

On ne lit pas de la même façon quand on sait qu'on aura un questionnaire en conclusion. On ne se laisse pas porter par le texte. On doit nécessairement mettre en mémoire certains éléments pour anticiper les questions ; les dés sont pipés : on  ne saura pas quels éléments mettre en mémoire. Et l’enfant, en difficulté ne pourra pas forcément mettre en mémoire.

Favoriser les échanges

 

L’enfant peut lire ce que les copains proposent à la classe : notre bibliothèque est complétée par les volumes prêtés par les enfants qui le désirent. Le prêteur doit inscrire son prénom dans son livre et le faire inscrire sur le cahier des copains pour se souvenir de son prêt. De même, les emprunteurs sont inscrits sur ce même  cahier. Il y a une garantie pour la sauvegarde du livre prêté.

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Au cours du temps, l’ouvrage prêté est parfois abîmé ; en conseil de coopérative, j’explique qu’un livre s’use par le fait de s’en servir ; il faut penser qu’à partir du moment où un enfant prête un  livre, à la communauté, celui-ci a le désir de faire découvrir un livre qu’il a aimé ; il ne pense pas qu’on puisse lui abîmer ; il le prête pour faire partager. La confiance est là. 

La liberté de lire ne doit pas faire peur 

L’enfant n’est pas seul devant le rayonnage. Outre son flair, outre son doigté à feuilleter les pages, il peut appuyer son choix sur les 4 éléments suivants : 

-le « salon » littéraire hebdomadaire : en classe, on programme chaque lundi, un bilan de lecture. On parle du livre qu’on lit ou qu’on a lu. On  dit qu’il est bien ou pas. On essaye d’en donner le goût aux autres. Il arrive qu’un livre fasse boule neige. Sur l’année, chaque enfant aura lu un livre pour lequel chacun se sera délecté. 

Au fil de l’année, on trace des grandes lignes sur les multiples façons de parler d’un livre. Ainsi bon ou moyen parleur, bon ou moyen lecteur pourra s’exprimer.  Il est aussi arrivé qu’une discussion entre trois ou quatre enfants surgisse à propos d’un livre. Attention, il ne s’agit pas de reproduire une émission télévisée. Ni même de rechercher à évaluer la compréhension  d’un livre au travers les propos d’un enfant. Ainsi, chacun sait ce que les autres lisent et ce qu’il peut lire : la collectivité » a déjà fait un débroussaillage parmi les ouvrages de la bibliothèque.

neduc-139-0021.JPG (18093 bytes) -la « publicité » des livres : au cours d’un trimestre, chacun dessine ou évoque un livre qu’il a aimé sur une affiche. Ainsi, une mémoire des livres « chouettes » à lire existe pour celui qui serait désemparé devant l’immensité de notre étalage. Il est vrai que je pourrais rendre cet affichage plus méthodique, y rechercher un travail de classement par type, par niveau de lecture, par éditeur. Mais, ce  serait à mon sens, rechercher une scolastique là où inversement, je recherche à susciter une envie de lire ; et elle est si fragile…

 -les conseils de l’adulte : face à la bibliothèque, mon travail consiste à aider un enfant désorienté à choisir un bouquin ou  à aider un moyen lecteur à trouver un livre correspondant à son niveau de lecture (niveau dont j’ai une connaissance purement empirique). 

En outre, j’ai une attitude aidante : au côté  de l’enfant, je vais lire les résumés de quatrième de couverture, regarder ostensiblement la couverture, je vais  feuilleter les pages et en lire un passage, je vais lire le début du livre (là, il peut y avoir l’étincelle). Je vais bruyamment remettre un livre pas terrible sur l’étagère. Bref, j’opte pour le comportement du lecteur qui choisit un livre en bibliothèque ou en librairie. Durant le quart d’heure de lecture, je lis par désir de connaître un livre de notre bibliothèque ou aussi par malignité envers un moyen lecteur. 

Le niveau de lecture 

Les livres sont rangés en fonction des niveaux de lecture. J’ai procédé à un classement rapide. Puis, il y a eu des modifications successives par les enfants au fil des années. Ainsi les livres ont pris leur place. 

Trois niveaux sont déterminés : bons et moyens lecteurs et bazar. Le bazar est composé d’albums, aux belles illustrations, de livres pour petits, des 1000 ans de conte… Ce bazar est un vivier qui sert à aider les enfants qui ne sont pas rassurés. 

Chaque enfant a un niveau de lecture, déterminé par tâtonnement : au fil des livres, tel enfant va se diriger son choix vers tel type d’ouvrage. N’oublions pas qu’un enfant ne recherchera pas à être en échec. Et petit à petit, il va trouver les livres en adéquation avec sa maturité de lecture. Ceci est valable tant pour le moyen lecteur que pour le bon lecteur. A ce jour, je n’ai pas eu la nécessité d’élaborer un tableau des niveaux de lecture ou des couleurs de lecture... une classification des apprentis-lecteurs.  

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Le niveau de vocabulaire de l’enfant ne doit pas être un obstacle

 

Durant cette activité de lecture libre, je suis disponible pour répondre à toutes les questions sur les lectures de chacun. L’enfant avec son livre se déplace vers moi, et je donne rapidement le synonyme en contexte, ou l’explication d’un mot ou une expression inconnu. Mon intervention reste toujours rapide et sûre de sorte que l’enfant ne perde pas le fil de son récit. Jamais, je ne renvoie au dictionnaire. La durée de la recherche détruirait l’envie du jeune lecteur de continuer son histoire. Par le passé, j’ai voulu que chaque enfant note et indique les mots nouveaux qu’il avait découverts au cours de sa lecture. L’expérience a avortée.

 Hervé d’Abadie

Classe de cycle IIII

Ecole rurale Tilly (78)

Herve.dabadie[arobase]wanadoo.fr 

Florence, 8 ans ne lisait que des « J’aime lire ». Elle avait pourtant de sacrées capacités de compréhension. A la maison, elle était très sollicitée pour développer sa culture scolaire. Quel curieux décalage entre l’école et la maison ! En maître soucieux de pousser ses élèves vers des épreuves toujours plus hautes, je sollicitais de Florence qu’elle lise des œuvres plus difficiles. Elle en lu... une… Puis, elle a repris les « j’aime lire » et termina les 35 numéros. En fin d’année, elle se mit aux ouvrages de son niveau. Cherchait-elle à se rassurer, à vérifier la réalité de ce moment lecture, à se libérer de la pression de ses parents ?

On a écrit un article pour le quotidien local

Mai 2002

 

Une réaction en chaîne ou comment une activité de classe presque scolaire peut déboucher sur un projet de plus grande envergure. Récit par le professeur de français.

Reconstitution du crime !  

Deuxième quinzaine d'octobre 

Les 3e B tiennent un "Journal de Bord" : on prépare l'étude de l'autobiographie (mon choix pour la lecture parallèle : Vallès, l'Enfant).  

Consigne : pendant les 13 jours à venir, écrire au moins un paragraphe de  3 lignes chaque jour sur ce que l'on a vécu, de près ou de loin (on peut faire état d'une nouvelle "du dehors" si elle a marqué l'esprit ) ; je précise  que je ne demande en aucun cas un "Journal intime" évidemment.  

Objectif : au jour le jour, observer, raconter, expliquer - et peut-être, réagir, argumenter. Je ramasse les "Journaux" la veille des vacances. 

Rentrée des vacances de Toussaint :  

Je rends les "Journaux de Bord". Constat inquiet : sur 28 copies (soit 28 x 13 jours = 364 paragraphes minimum), un seul paragraphe évoque le conflit Israël / Palestine, qui a pris pourtant de une ampleur préoccupante fin octobre. Rien d'autre sur l'actualité. Mais comme une rengaine, le constat par les ados d'une vie repliée sur soi. Proposition : on va s'intéresser à l'actualité, via la Presse !  

J'ai dans ma manche en réserve une proposition de l'agence locale du Progrès (quotidien Rhône-Alpes à large diffusion) : chaque semaine, des élèves sont invités à y écrire un article de 2500 / 3000 signes sur un sujet à leur convenance, parution à programmer ; ils peuvent rencontrer un journaliste auparavant.  La proposition reçoit un bon accueil. 

Je prends contact. Rendez-vous avec le journaliste le vendredi 1 décembre, en classe. 

Dernière semaine de novembre 

Des élèves volontaires achètent le Progrès avant de venir en cours, choisissent 3 (ou 4) articles à la Une, observent la mise en page, le sujet, et la place prise par l'article en pages intérieures. Joli exercice d'improvisation ! Au moment de la présentation, je fais observer quelques banalités (pour moi ?) sur la qualité éphémères de l'info, même dans un quotidien, vite jeté. Des idées émergent : quels sujets sont privilégiés en Une ? Notion de rapport de proximité... Problèmes de survie financière… 

Je propose aux élèves de ne pas oublier les questions qu'ils soulèvent : ils en auront besoin le vendredi. 

Jeudi, j'apporte 2 articles de faits-divers de l'été (donc "périmés") ; on étudie les connecteurs dans les phrases (c'était dans mon planning !) et par la même occasion, une série d'observations émerge sur le style, la construction des phrases, la rareté des liens logiques, l'organisation chronologique, et le rapport récit / style direct). Idée géniale !... car, le vendredi, le journaliste donne une série de conseils d'écriture "pour faire vivant", et je "bois du petit lait" : consignes sur le choix des temps (passé composé + présent de narration), sur la connection des phrases, sur l'emploi du style direct... Mince, ce qu'on vient d'étudier, ça importe aussi au journaliste ! 

Vendredi 1 décembre  

Le rendez-vous a été fixé pour la deuxième heure. Auparavant, on écoute un exposé normalement programmé à cette heure, puis les volontaires du jour s'apprêtent à faire leur "Revue des articles de la Une", comme leurs copains des jours précédents. L'invité se pointe, en avance : panique !

Jeune, le journaliste (également directeur de l'agence locale).  

La revue des articles se fait pourtant, d'une voix chevrotante, mais ça fonctionne ; notre professionnel est surpris par les points de vue ; la discussion enchaîne : pourquoi tant de place donnée en Une à l'accident du camion ? (+ 25 % de ventes prévues sur les communes concernées !). Des élèves sortent leur liste de questions : ciel, je n'avais pas osé le leur demander, de crainte de figer les spontanéités !!! Ça roule !  

Questions sur la langue de bois de la Presse, réponse "politiquement correcte" ; on passe poliment à la suite (mais après le départ du journaliste, les élèves et moi en reparlerons, et on se mettra d'accord sur ce que l'on a pensé de la réponse !). 

Ensuite, conseils sur l'art d'écrire un article (voir ci-dessus), et photo. Sujet retenu pour l'article : un bilan sur l'expérience (en cours) de recherche d'un stage pour la semaine précédant Noël. 

Mardi 5 décembre 

Chaque élève rédige un témoignage de 8 lignes sur sa recherche de stage. Je récupère à la fin de l'heure, corrige vite-vite, constitue des groupes selon les thèmes qui ressortent (ici, je retiens 2 axes : recherche auprès de la famille proche, auprès de relations, ou à l'aveugle sur le seul critère professionnel - et gradation des difficultés dans la recherche). Ça fait 5 groupes. Pour 5 paragraphes successifs dans l'article. 

Jeudi  7 décembre 

Cours de 11 h 30 à 12 h 30, je squatte la salle de permanence (une grande salle : impossible de travailler en grands groupes dans ma classe, on se monte dessus !) : j'explique à chacun des 5 groupes ce qui les réunit, dans quel ordre je propose de distribuer les écrits dans l'article, je propose un point fort pour chacun, et je demande à chaque groupe de se choisir un donneur de parole et un "secrétaire" : ils travaillent comme des anges ! A la fin de l'heure, j'ai 5 textes (dont l'un a déjà beaucoup approché le fameux style journalistique" ). 12 h 30. Aidée d'élèves, je tape les textes sur ordinateurs, je les corrige, je note les redites d'un groupe à l'autre, et j'imprime en plusieurs exemplaires. 

Vendredi 8 décembre 

Les groupes se reforment. Lecture des 5 textes dans l'ordre prévu : on "sent bien" ce qui se répète, et les textes où le style "passe" mieux que dans d'autres. Négociations faciles. Retour à l'écriture par groupes ; remise au propre (ça va vite).  

Puis on cherche des titres possibles tous ensemble ("brainstorming") : on sait que c'est le seul point que les journalistes contrôleront. 

A midi, avec quatre ou cinq élèves, lecture finale (miracle, le calibrage imposé est presque respecté !), petites coupes... Et c'est parti ! (par Internet). 

Parution  : vendredi 15 

Entre temps, je leur ai passé la vidéo que j'ai tournée, il y a peu d'années à l'imprimerie du Progrès  (quand c'était moins compliqué de sortir les élèves de nuit avec quelques parents), et... la vidéo de l'entretien avec le journaliste (j'avais posé mon caméscope au fond de la classe, derrière les élèves pendant sa visite !). On a donc pu reparler posément du moment de "langue de bois" du journaliste - concernant les nouvelles que la Presse occulte, celles qu'elle ressasse, ou celles qu'elle déforme...

 Annie Dhénin

Collège de Chazay

 

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Une semaine dans la peau d’un adulte

Au collège de Chazay, la plupart des élèves de 3ème ont cherché un stage d’une semaine  pour fin décembre. Ils découvriront ainsi  la vie d’une entreprise : témoignages. 

“ Comme d’autres d’élèves, j’ai choisi la facilité : la famille ” déclare Sandrine, qui avoue ne pas avoir eu de mal à trouver son stage… près de sa tante. Cela nous a tout de même demandé un minimum de démarches : il faut au moins rencontrer le patron afin de lui prouver la sincérité de nos motivations. (Reconnaissons que certains élèves ne désirent pas réellement faire ce stage ! ) Et puis, il n’y a pas toujours un rapport avec l’orientation à venir : “ Je fais mon stage dans le droit, par simple curiosité, pour comprendre certaines démarches juridiques . ” dit Déborah. Comme quoi la facilité n’ouvre pas  toujours sur la solution la plus simple.

Pour quelques-uns, le stage a donc été simple à trouver ! Manon : “ J’ai demandé à ma mère qui a demandé à mon cousin qui a demandé à un ami …”

 “ Moi, j’ai  laissé chercher les parents car je trouve que demander à une entreprise directement, ce n’est pas facile ! ” explique Alexandre. 

Une idée de notre métier futur 

Mais la plupart des élèves de notre classe ont cherché leur stage tout seuls (“ comme des grands ! ” dit Valérie).

Certains d’entre nous avons trouvé très rapidement (2 demandes en moyenne) : “ Nous nous sommes surtout adressés aux commerçants : peut-être que ce secteur peut accueillir plus de stagiaires ?” Nous avons été chanceux, car la plupart de nos camarades avaient certainement les mêmes objectifs que nous, et leurs recherches ont été plus longues et difficiles.

 “ En effet, ont-ils dit,  nous avons tous trouvé un stage dans l’artisanat ou le service, mais avec quelques difficultés pour certains : tout d’abord, les entreprises ne nous prennent pas toujours au sérieux à cause de notre âge, notre motivation ne leur paraît pas très convaincante.

Par ailleurs, durant la période de Noël, l’entreprise a moins de temps à nous consacrer, elle est parfois trop petite, ou manque de place ”.

Chloé : “ Quand je me suis présentée chez mon vétérinaire, il avait déjà accepté une stagiaire du collège ! Raté ! ”

Parfois, nos lettres sont restées sans réponse ; ou bien, on nous répondait que le stage était trop court… ou trop long ! Malgré tout, nous avons fini par trouver !

Lorsque nous avons un but précis, tout se complique . “ Je voulais un stage dans le Droit et j’ai failli baisser les bras devant tant de refus ”, témoigne Marine . Il a fallu accepter certaines contraintes (longs trajets…). Ça va, on est motivés ! Hélas, quelques-uns d’entre nous ont dû renoncer à leurs rêves.  “ J’ai dû me contenter de faire un stage moins passionnant que celui que j’avais prévu de faire ”.

Nous savons que pour l’entreprise, ce n’est pas toujours facile, de prendre un stagiaire, mais il faut qu’on sache que nous prenons notre orientation très au sérieux. Ce stage n’est pas une semaine de vacances, mais bien une aide à notre orientation future. “ Mon rêve a été réalisé : je fais mon stage dans une entreprise de reporter photographe ”, déclare Céline.

Comme quoi, la persévérance  gagne toujours ! 

La classe de 3B

 

Bilan 

D'abord, la qualité de ce travail d'équipe :

- oui, je suis assez contente de cet article, qui me semble assez bien témoigner d'une expérience sociale dans le tissu professionnel local (largement local). D'ailleurs, on mettra l'article sur le Site Internet (partie "Actualité bien sûr). Mais ce n'est pas l'essentiel (ce serait beaucoup de travail et de temps pour 3000 signes, après tout !) ; 

- il y a eu surtout une grande adaptabilité des élèves à diverses situations de contribution, avec des moments de travail individuel / en groupes / en groupe classe ;  

- il y a eu des élèves capables de s'impliquer, de négocier, de s'effacer (parce qu'il fallait laisser quelques lignes de plus à l'autre groupe !) ; 

- il y a eu des élèves soucieux de leurs lecteurs, et qui ont fait l'effort de comprendre ceux des patrons qui leur ont refusé un stage... poliment (même gentiment parfois, sur un ton désolé) ; et qui ont traité par l'humour ceux qui ont donné les (mauvaises) raisons les plus contradictoires ! ; 

- il y a eu des élèves aptes à entrer rapidement dans une règle du jeu (écrire autre chose qu'une rédaction - mais on avait déjà commencé !) ; 

- il y a eu des élèves capables de se donner des animateurs sans désigner des chefs... ou des porteurs de serviette ! ; 

- il n'y a pas eu de vedette, et on ne distinguait pas les "bons" élèves des "... ?" élèves  dans les groupes !   D'ailleurs, quand nous sommes passés très légitimement à l'évaluation notée de cette activité (pourquoi n'auraient-ils pas eu une note pour ce travail, à côté de toutes celles qui tombent dans le trimestre !), j'ai proposé une note globale (la même pour chaque groupe - à charge pour chacun dans les groupes de redistribuer éventuellement un 1/2 point (ou plus) de sa note à celui (ceux) qui avai(en)t le plus travaillé dans le groupe : ils ont tenu à garder tous la même note ; et ça m'a fait un énorme plaisir, car cela couronnait ce travail très solidaire, où chacun avait fait ce qu'il avait pu en toute bonne foi. 

Il y a eu une autre évaluation objective : l'arrivée d'un gros paquet de journaux en justificatifs, le jour où l'article est paru : chacun avait au moins un exemplaire et on a pu en distribuer, afficher l'article partout dans le collège... Très grande joie, réelle fierté des élèves - je n'aurais pas cru que cela leur ferait tant d'effet. 

Bon ! je ne vois pas pourquoi on ne recommencerait pas ! Mais pour l'heure... ils vont partir en stage.

Rencontres avec Sarajevo : aventure pédagogique

Mai 2002

 

Plutôt que d’expliquer de manière un peu théorique, quel peut être l’intérêt pédagogique d’un lycée, cogéré par des élèves et des membres d’une équipe éducative, nous avons choisi de vous donner à entendre ce que ce genre d’institution permet de mettre en œuvre.

Présentation, donc, d’une tranche de vie où chaque lecteur pourra lire en filigrane les choix  politique et pédagogique du Lycée Expérimental de Saint-Nazaire 

Comme pour tout, il y eut la naissance de l’idée dans la tête de certains, puis une première tentative qui échoua pour cause de guerre au Kosovo, qui se poursuivit par la mise en route et la réalisation du premier voyage au printemps 2000.

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1999 : Un projet qui tourne court 

On n'y croyait plus! Voilà deux ans, j'avais proposé à Olivier d'aller faire un tour dans un des pays de l'ex-Yougoslavie. J'avais été émerveillé par des films du réalisateur Emir Kusturica, et je voulais en savoir plus sur la culture de cette partie de l'Europe jusqu'ici inconnue pour moi. Olivier, toujours prêt à s'engager dans des projets d'élèves, semblait motivé pour cette aventure. C'était au mois de juin 1998, et nous avions décidé que, dès le mois de septembre, à la rentrée, nous programmerions des activités afin de constituer un groupe.

 On commença donc par organiser des réunions, pour définir et structurer d'avantage notre projet. Après les premiers rendez-vous, nous décidâmes que la destination et l'objet de notre questionnement seraient La Bosnie, et plus précisément Sarajevo. Une ville au passé pesant, qui fut le théâtre de quelques événements tragiques : l'attentat de l'Archiduc d'Autriche en 1914, qui mit le feu à la poudrière de la première guerre mondiale et puis surtout, récemment, de 1992 à 1996, le siège de l'armée Yougoslave qui mit la ville à genoux. Que voulait-on réellement faire là-bas? C'est la question que nous ont fait nous poser quelques personnes qui avaient séjourné dans la capitale bosniaque. Y aller sans un réel intérêt, sans un projet fort et sensé, ça ne valait selon eux pas le coup. Nous avons donc remis les pendules à l'heure et demandé à certains de revoir leurs intentions quant au but de ce voyage. Les intéressés ont préféré claquer la porte. Le reste du groupe, lui, avançait à grands pas, au fil des documentaires analysés, des livres et articles de presse lus, et des rencontres faites. Au mois de mars, nous étions prêts à partir. Il ne manquait plus que l'autorisation du proviseur de notre lycée d'appui… 

…Je vous le donne en mille, il nous l'a refusée ! Pas directement. Il a préféré prendre conseil auprès de la hiérarchie : Ministères de l'Éducation Nationale, puis des Affaires Étrangères. Négociations ultras tendues entre le Lycée Expérimental et le Quai d'Orsay ! Étonnant, non ? Toujours est-il que la décision est tombée comme un couperet. Pas de voyage pour cette année. Tout le monde était évidemment très déçu. L'énergie du désespoir nous poussa à organiser une soirée de réflexion sur l'après-guerre en ex-Yougoslavie, au cours de laquelle interviendraient les différentes personnes que nous avions rencontrées. Une fois encore, il y a eu maldonne, car la salle n'était pas disponible. La fin de l'année était proche et décision fut prise de retenter l'aventure en septembre.

2000 : un premier voyage à Sarajevo

En septembre, donc, un nouveau groupe se forme autour de trois survivants. Ensemble, ils reformulent en partie le projet de l'année précédente et s'intéressent à la reconstruction de Sarajevo et de la Bosnie. En février 2000, ils reçoivent l'autorisation de partir…

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 …À leur retour, ils ont exposé au lycée une sélection de photos et organisé une soirée de débat pour discuter et informer leurs condisciples de ce qu’ils avaient fait, vu et entendu à Sarajevo. Chouette soirée qui s'était terminée autour d'un buffet froid et de quelques bouteilles.

Voici ce qui fut rapporté, de la soirée débat organisée au lycée au mois de juin 2000 : 

Aux murs sont affichés, photos, affiche, textes et cartes. La salle est plaisamment aménagée et les voyageurs commentent, à la demande, les différentes parties de l’exposition. C’est très instructif et très différent de ce que j’entends d’habitude à la télé au sujet de la vie en Bosnie et de la guerre qui s’y est déroulée. 

Quand le voyage avait commencé à s’organiser, j’étais sceptique. Je voyais mal comment il était possible d’aller là-bas sans être un abominable voyeur. Eh bien, il me faut rendre un hommage à ce voyage qui, selon moi, a évité tous les écueils que je pensais inévitables. Ils ont visiblement rencontré des personnes de multiples tendances politiques et ils sont élogieux sur la qualité de l’accueil qui leur a été réservé… 

Les réponses qu’ils apportent sont instructives. Ils sont au fait de la situation. Ils parlent d'hommes et des femmes de là-bas avec une grande sincérité dans la voix. Ils disent tous combien ce voyage les a changés et les a amenés à regarder le Monde autrement… 

Je suis ému de les entendre. Ils racontent la vie ! Je vois dans leurs yeux, l’intensité de ce qu’ils ont vu ; c’est très touchant. Souvent, quand ils racontent leur voyage, ils regardent dans le vide tout en parlant. Comme si la narration les emportait là-bas pour mieux retrouver leurs souvenirs.

J’apprécie qu’ils me fassent partager leur expérience. 

C’est un formidable moment d’échange ! ” 1

2001 : un deuxième voyage 

En septembre 2000, l’affaire s’est relancée d’elle-même. L’expérience a fait des émules. Il faut dire que les échanges, qui avaient fait suite au premier voyage, avaient suscité une forte émotion et un grand intérêt.

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Donc, avec une dynamique affirmée, une nouvelle aventure pédagogique repart. Des réunions se déroulent tous les mardis de 15 h 30 à 17 h 00. Chacun se responsabilise sur une tâche. Simon par exemple est chargé de la comptabilité. Claire a préparé avec minutie d’énormes dossiers de demandes de subventions. Le groupe organise son travail et planifie son boulot. Des projets de production naissent des discussions, au fil de la préparation : un livre qui prendrait la forme d’un abécédaire, une vidéo sur les coulisses du voyage et une expo photo. 

Des films sur la Bosnie sont visionnés : “ My private Sarajevo ”, “ Chronique d’une Ville Assiégée ”, “ Le Cercle Parfait ”, “ Chat noir, Chat blanc ”. Deux soirées vidéo sont organisées dans le lycée. Des débats suivent et permettent tout doucement de cerner les questions posées par l’Histoire. 

Une formation est assurée par un photographe. Il est dit qu’on ne sera pas des voleurs de photos. Alors les élèves se rendent en ville pour s’entraîner à prendre des photos en demandant aux personnes leur autorisation, qui dans un café, qui dans la rue ou une galerie marchande ? On visite également une exposition Depardon au centre culturel de Saint-Nazaire.  

Les contacts sont pris avec les personnes que nous rencontrerons sur place. Ceux qui projettent une vidéo se forment à la prise de vue avec un professionnel. La recherche de subvention porte ses fruits auprès de la région des Pays de Loire et de la municipalité de Saint-Nazaire. C’est l’occasion pour les élèves de découvrir les coulisses d’une mairie ! 

Tout un travail est fait pour organiser le transport. SNCF jusqu’à Paris, puis Eurolines pour joindre Zagreb et enfin Centrotrans pour arriver à Sarajevo. 

Le vendredi 13 avril 2001, c’est le grand départ. Après deux jours de voyage, nous voilà à Sarajevo. On découvre la ville à pied ou en tramway. Les premières rencontres avec les traces de la guerre donnent à penser :  “ Cet après-midi, visite du quartier de Dobrinja, départ du centre ville en tramway. Le quartier de Dobrinja est très impressionnant et déroutant : des immeubles vides et bombardés. J'ai du mal à exprimer ce que je ressens, ça m'a prise aux tripes, les larmes sont arrivées, mais pourquoi ce sentiment de malaise encore une fois ? Quand je me mets à la place des gens qui ont vécu la guerre, les bombardements, qui voyaient leur famille, leurs amis partir ou mourir, ...  

Emmanuelle 

Dobrinja ! Quartier complètement détruit, ravagé par les obus. Quartier le plus détruit de la ville. Même six ans après la guerre, le malaise est toujours là. Certaines maisons et appartements ont été rénovés, des familles vivent ici, des enfants jouent... Ça respire la mort. Tu te demandes qui a fait ça et ce qui pousse certains hommes à tuer leur égal ? La reconstruction est en cours chez les Bosniaques mais pas chez les Serbes. Pourquoi ? La misère est la même chez les deux peuples. Et qui dirige ça ? L’État, une minorité de personnes cyniques qui vivent dans le plus grand des conforts, au mépris de ces personnes et qui se permettent encore de les diriger et de leur imposer des barrières qui les divisent. D'un côté de la route, appartements bosniaques flambants neufs, de l'autre côté appartements serbes complètement détruits. Ces deux peuples ont les mêmes besoins, la même histoire mais des barrières leur sont encore imposées pour encore plus les détruire. Comme s'ils n'avaient pas assez souffert et qu'ils ne souffraient pas encore assez.  

Laure ” 

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Les sujets graves que nous abordons et les grandes questions que nous nous posons, sans parler des travaux nécessaires aux productions, n’empêchent pas la bonne humeur, la convivialité et la fête. Presque tous les soirs, on se retrouve au « Clou », un bar sympa dans une cave et qui passe du jazz. On y fait des rencontres, d’autres rencontres que celle de la journée, mais c’est également l’occasion de se détendre en buvant une bonne bière, voire plus !

 Après dix jours sur place, il fallut partir et ce ne fut pas simple de laisser une expérience si intense derrière soi. Au retour à Saint-Nazaire, le travail a continué pour élaborer les productions. L’exposition, le montage vidéo et le livre ont été présentés, en juin dans un premier temps, au centre culturel de Saint-Nazaire à l’occasion de la présentation du projet inter-arts du lycée. Un franc succès, avec éloge de la presse. À partir de septembre l’ensemble des productions a circulé : Salon de l’ICEM à Nantes, Cosmopolis, Maison du Citoyen à Nantes, Soirée débat ouverte au public (environ 70 personnes) au Lycée Expérimental, Lycée A.Briand, Librairie La voix au chapitre, Maison du Peuple de Saint-Nazaire. Parallèlement, le groupe a décidé d’organiser la venue d’une quinzaine de jeunes Bosniaques. C’est donc reparti pour un tour. Démarche, rencontre, préparation, financement… 

Voilà où nous en sommes au mois de janvier 2002. Le Lycée Expérimental, par son fonctionnement particulier permet ce genre d’aventure pédagogique, humainement très forte. 

Cela permet aux élèves d’avoir une vue d’ensemble d’un projet, d’en appréhender la complexité et d’agir afin qu’il se réalise. Tout le groupe s’est donc trouvé en situation de penser, organiser, financer, réaliser, bien plus qu’un voyage. Un morceau de vie ! 

Il a fallu se coltiner à de vrais problèmes, écrire, pour de vrai, un vrai livre et monter un vrai film, s’impliquer dans des rencontres, comprendre, réfléchir sur le Monde et la question des Balkans et de la guerre en particulier. Enfin, quelque chose qui doit s’appeler : apprendre. 

L’expérience de l’écriture est instructive car elle a concerné des élèves qui avaient, pour leur grande majorité, des difficultés scolaires avec l’écriture ! Alors quand ils ont vu que le livre intéressait et en plus se vendait très bien dans une vraie librairie, ce fut sans doute pour eux un grand pas en avant vers le retour à la confiance en soi.

Simon explique : “ J’ai acquis beaucoup de maturité, j’ai grandi. Je sais maintenant comment me comporter face à un problème qui me dépasse. Je sais l’exprimer.”

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 Quant à Alex, une fois rentré, il a écrit un texte "Lettre à un inconnu" où il parle de son évolution en se questionnant sur la guerre et ses monstruosités. 

“Merde, d’un seul coup, je me sens envahi d’une grande lassitude, presque l’envie d’arrêter de vivre, car cela est pesant, pour être sûr de ne pas voir cela. Et d’imaginer que moi je pourrais m’y livrer me dépasse. Cela me paraît tellement absurde, mais comme d’autres l’on fait, pourquoi pas moi. Alors, il vaut mieux que j’en finisse, avant d’être coupable d’un crime inacceptable. 

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Eh bien non, je veux continuer à vivre, me débattre, j’ai le droit d’espérer vivre dans un monde en paix. J’en ai conscience, ce doit être la meilleure arme contre le fait de le faire. Nous devons essayer de combattre tout message à caractère haineux, toutes situations qui seraient inacceptables ne serait-ce que pour une seule personne, pour éviter que l’on en arrive à un cas similaire un jour. Je dois aussi communiquer mes informations et mes questionnements et essayer de comprendre ces débordements. 

Bref, comme disait Camus, je suis un homme miné, un homme miné est un homme qui réfléchit, mais qui veut vivre. ” 

Alex  

Simon et Jean-Paul

 1- Extrait de “Lettre à un inconnu” d’Alexandre Saget

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Responsabilités dans la classe coopérative

Mai 2002

 

neduc-139-0004.JPG (7550 bytes) Responsabilités dans la classe coopérative

Il y eut de tout temps des «effaceurs de tableau», des «ramasseurs» et des «distributeurs de cahiers». Ils étaient souvent désignés par le maître, arbitrairement, ou pour un quelconque mérite. Parfois, ça se faisait par roulement. Cela déchargeait le maître et était vécu par l'enfant la plupart du temps comme un privilège, et non comme une responsabilité.  

Dans la classe coopérative, les décisions sont discutées, prises en commun et, si besoin, remises en question par le groupe. Assumer une responsabilité, si minime soit-elle, est un apprentissage qui s'inscrit dans celui de la citoyenneté. On est responsable d'une charge, et on l'est devant les autres, c'est à dire qu'il faut en rendre compte.
Pour que ces responsabilités soient correctement assumées, il convient que le Conseil de classe définisse les modalités et qu'en permanence il analyse et critique leur fonctionnement et propose si besoin des améliorations. Le partage des responsabilités fait intégralement partie d’un ensemble plus vaste d’institutions mises en place dans la classe, intimement liées les unes aux autres, chacune étant porteuse de sens.

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Responsabilités et exercice de la citoyenneté

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Dans la classe coopérative, les enfants prennent la parole, s’organisent, partagent pouvoir et responsabilités, élaborent et réalisent leurs projets, font la loi, participent au respect des lois et des règles et répondent de leurs actes devant le groupe… Ils prennent ainsi conscience des exigences du vivre-ensemble et se forment à l’exercice d’une citoyenneté active, solidaire et responsable.

Une des valeurs fondamentales de la société démocratique est la participation responsable. 

Dans la classe coopérative, comme dans toute expérience de démocratie participative, qu’il s’agisse d’exercice des libertés, de partage du pouvoir, d’engagement dans un projet collectif, d’organisation des activités, la notion de responsabilité est essentielle. Elle est à la fois une valeur, un  but à atteindre et une nécessité.

Liberté et responsabilité sont indissociables. Exercer un droit c’est prendre un risque. En effet, si le  droit induit la reconnaissance de la faculté d’exercer une liberté, il implique aussi le risque d’encourir une sanction pour réparation des préjudices causés à autrui, comme nous l’avons vu pour le journal au lycée.  

Lors de l’adoption de la Convention internationale, un débat a opposé ceux qui craignaient que les droits accordés à l’enfant lui fassent perdre son droit à l’enfance et à la protection et ceux qui, comme nous-même, soutenaient que l’exercice des libertés ne constituait pas la perte du droit d’être protégé.  

Pour le Professeur Eugène Verhellen « l’argument le plus fondamental invoqué de manière récurrente par ceux qui sont opposés à l’idée d’accorder des droits autonomes aux enfants est que ces derniers seraient incompétents pour prendre des décisions bien fondées »(1).Il récuse la définition des enfants comme des êtres humains «  encore inachevés », ce qui leur confère un statut de « pas encore » :  « ils ne savent pas encore, ils ne peuvent pas encore, ils ne sont pas encore. » 

L’expérience des classes coopératives montre qu’il est possible de sortir de la contradiction entre liberté et protection, en pensant en terme de dialectique, d’articulation entre ces propositions apparemment antagonistes, et de considérer l’enfant comme un partenaire actif et responsable. 

Être responsable, c’est reconnaître les actes que l’on a librement choisis d’accomplir et en assumer les conséquences : le jugement et la sanction, de la collectivité. C’est aussi savoir tenir ses engagements au sein du groupe, pour la réalisation des projets collectifs et pour la bonne marche des activités.

La responsabilité sociale doit être apprise par une participation sociale active, c’est pourquoi les textes officiels préconisent, dès la maternelle, que l’enfant devienne un acteur dans la communauté scolaire et y assume des responsabilités à sa mesure.  

Dans la classe coopérative, les activités diversifiées, les nombreux ateliers, la complexité de l’organisation… impliquent que de nombreux rôles et tâches soient assumés.  

L’enseignant ne peut y arriver seul, la participation des enfants est donc nécessaire au fonctionnement de la collectivité.  

L’expérience montre que les enfants sont toujours volontaires pour les assumer lorsqu’elles répondent aux besoins générés par les activités (apprentissages coopératifs, entraide, ateliers, bibliothèque, réception du courrier électronique, journal, rangement du matériel...) et les institutions (conseils, président de jour, délégués au conseil d’école, trésorier, secrétaire...). En servant la communauté, en y jouant un rôle reconnu par les autres, en y étant nécessaire, chacun y trouve sa place : il est donc impératif que chacun ait une responsabilité.    

Ces responsabilités, ces métiers comme les appelle Fernand Oury, sont définies par le conseil, en fonction des nécessités  du travail et de la vie collective. Leur répartition tient compte à la fois des désirs et des possibilités de chacun. Il n’est pas toujours facile de décider : il ne faut pas décevoir un enfant volontaire pour une responsabilité mais il ne faut pas non plus le mettre en situation d’échec. C’est pourquoi, les fonctions sont souvent définies avec les compétences nécessaires pour les assumer et font l'objet d'une fiche-guide pour en faciliter l’exercice.

Le responsable détient un pouvoir réel d'organisation et de gestion dont il rend compte au conseil, dans le domaine qui lui est imparti. Il peut proposer une nouvelle organisation matérielle et institutionnelle, demander une réparation mais il peut aussi être critiqué au conseil et parfois être dessaisi de sa fonction pour négligence. Il s’agit donc d’un véritable apprentissage du sens et de l’importance d’une responsabilité dans une société démocratique... 

Extrait de Jean LE GAL, Les droits de l’enfant à l’école, pour une éducation à la citoyenneté,  Éditions De Boeck-Belin,

Collection Comprendre, 2002 

(1) VERHELLEN Eugène, Évolution et développement historique de l’éducation de l’enfant et de la participation des enfants à la vie familiale, Actes de la Conférence de Madrid du Conseil de l’Europe.


L'école est obligatoire : la présence physique des enfants n'a pas de signification particulière. Combien sont vraiment là avec leur désir ? Il suffirait d'ouvrir les classes pour être renseigné. Or rien ne se fait sans désir. Ils n'entreront dans la danse que lorsqu'ils sauront sur quel pied danser, quand ils sauront ce que les autres attendent d'eux (rôles) et ce qu'ils sont en droit d'attendre des autres (statuts). Quand ils auront une fonction définie, une responsabilité, peut-être se sentiront-ils membres d'un groupe. Alors, et alors seulement, on pourra parler de groupes coopératifs... 

« Qui c’est le conseil ? »,

Catherine Pochet, Fernand Oury,

Editions Matrice

Il n'y a pas d'institution une, la présence d'une institution est liée à la présence d'autres institutions ; selon la formule de Tosquelles : « Une institution ça n'existe pas » mais « Il n'y a que des institutions en interaction » … Une première institution, le Conseil, permet à l'ensemble des enfants de se réunir pour prendre part à la vie de la classe (échanger, régler des problèmes, des conflits, discuter, élaborer des projets, etc.). À partir de ce lieu de paroles peut se mettre en place une autre institution. 

L’institution des Métiers implique celle du Conseil qui préside à leurs choix et à leur répartition. Les enfants ont disposé d'un lieu-temps qui leur a permis de se déterminer, de définir l'organisation complexe de ces Métiers.  Sans le Conseil, les Métiers ne seraient qu'un gadget de la maîtresse : c'est elle qui choisirait et distribuerait les enfants. Comme telle, l'institution se transformerait en un pur et simple système d'organisation. Les Métiers ne peuvent fonctionner comme institution - dispositif de mobilisation et de relance d'échanges, de confrontations, de partages, de différenciations - sans cette articulation à un Conseil, sans la mise enjeu d'échanges de paroles. 

Francis Imbert , Vivre ensemble, un enjeu pour l’école, Editions ESF, 1997.


Socialiser et responsabiliser l’enfant dans une classe coopérative

Dans nos classes coopératives, l’organisation du travail et de la vie du groupe vise à socialiser et à responsabiliser l’enfant. Ainsi il est amené à prendre en charge différentes responsabilités. Ces responsabilités sont tournantes et évolutives. Les pratiques peuvent être diverses d’une classe à une autre, d’une année à une autre, en fonction de l’expérience du maître, et également de celle des enfants, en matière de fonctionnement coopératif.

À propos des responsabilités

Il y eut de tout temps des «effaceurs de tableau», des «ramasseurs» et des «distributeurs de cahiers». Ils étaient souvent désignés par le maître, arbitrairement, ou pour un quelconque mérite. Parfois, ça se faisait par roulement. Cela déchargeait le maître et était vécu par l'enfant la plupart du temps comme un privilège, et non comme une responsabilité.

Or un monde sépare les deux, celui d'une vie coopérative où les décisions sont discutées, prises en commun et si besoin remises en question par le groupe.

Assumer une responsabilité, si minime soit-elle, est un apprentissage qui s'inscrit dans celui de la citoyenneté. On est responsable d'une charge, et on l'est devant les autres, c'est à dire qu'il faut en rendre compte.

Il va de soi qu'il n'y a pas de règle qui en définit la durée. Elle est fonction de la responsabilité elle-même, de l'âge de l'enfant, du moment dans lequel on se situe dans l'année scolaire. Il me semble pourtant qu'il faut un minimum de temps pour que l'enfant ait le temps de s'habituer à cette fonction.
Pour que ces responsabilités soient correctement assumées, il convient que le Conseil de classe définisse les modalités et qu'en permanence il analyse et critique leur fonctionnement et propose si besoin des améliorations.

La vie de la classe, les besoins que celle-ci génère, donnent naissance aux diverses responsabilités possibles ; elles sont sans limite... mais je crois qu'elles ne doivent jamais dévaloriser l'enfant afin qu'à travers elles, il puisse se sentir utile à la construction de la vie du groupe. 

Anne-Marie MISLIN

En cycle III 

Constat

La classe coopérative s'appuie sur plusieurs pratiques (techniques de vie) chacune à un niveau plus ou moins développé selon les circonstances locales : expérience des enfants, du maître, relations avec les collègues, les parents, conditions matérielles...

La mise en place de ces pratiques simultanément, est nécessaire, dès que l'on veut impliquer les enfants dans la vie de la classe au quotidien ou/et pour gérer un projet coopérativement : fête d'école, classe de découverte, sortie nature, journal, corres…

Citons comme techniques de base: des temps de discussion et de décision, des outils d'organisation, l'installation matérielle, des pratiques d'expression et de recherche, une attitude du maître, et... la prise de responsabilités individuelles.

Les responsabilités en classe

Il s'agit d'un travail «pour de vrai» (tâches organisationnelles et tâches matérielles). Un  contrat est établi chacun a des comptes à rendre devant le groupe, et doit prendre en compte les besoins de la classe et les demandes des autres.


On construit ensemble le fonctionnement du groupe et la gestion des tâches. On partage ces tâches au sein d'un groupe où chacun a sa place (mon travail est respecté, je respecte celui des autres). C'est sans doute un des éléments de la vie coopérative les plus faciles à mettre en place dans une nouvelle classe ou en débutant.

En début d’année

Nous dressons la liste des responsabilités en début d'année, l'aménageons quand nécessaire. Elle est décidée pour une période allant de vacances à vacances (2 mois). Certaines responsabilités, plus lourdes, sont assumées par deux enfants (un ancien, un nouveau).La liste est affichée. On archive qui a déjà fait quoi (tableau à double entrée). Les enfants restant dans la même classe (avec le même maître) 3 ans, des habitudes se créent : le système fonctionne bien et n'est pas remis en cause. Mais chaque année nous en débattons avant de le réadopter. Nous avons déjà fonctionné avec d'autres modes (élections, tirages au sort).

 
Nous avons d'autres occasions de voter : sur les projets, les choix à opérer, les décisions à prendre concernant la vie de la classe. Les votes pour les personnes (choix de responsables) subissent souvent des effets pervers liés entre autres à l'affectif. Il n'est pas facile d'évaluer les compétences des autres, surtout de nouveaux camarades, pour exercer telle ou telle tâche.

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Avantages


- Tout le monde a une responsabilité.

-Les tâches "nobles" d'organisation/gestion (animateur, président, trésorier...) sont sur le même plan que les tâches "matérielles" (clés, fichiers, fleurs...)

-La période est suffisamment longue pour "rentabiliser" le temps de formation nécessaire.

- La responsabilité étant choisie, on l'assume plus volontiers et avec plus de plaisir, en principe.

Inconvénients


Certains «métiers» peuvent devenir moins attrayants, moins demandés : nécessité de redéfinir les tâches, d'augmenter le nombre de responsables pour telle tâche, de la jumeler avec une autre…

On quitte parfois sa responsabilité alors qu'on commence juste à être performant(e) : informatique, trésorier

Comment faisons-nous pratiquement ?

Lors de la dernière réunion de coopérative, la veille des vacances, chaque enfant inscrit sur une feuille son prénom et trois responsabilités qu'il souhaite assumer parmi celles qu'il n'a pas encore exercées. Il obtiendra un de ces trois vœux. Au tableau la liste des responsabilités est recopiée. Les secrétaires notent en face de chacune, avec des craies de couleurs différentes pour chaque enfant, les initiales des élèves qui l'ont demandée. Chacun observe, contrôle.

Si un poste n'a pas été demandé, on fait un appel et on modifie les vœux. C'est très rare, chacun étant amené à exercer 5 responsabilités par année scolaire. Plus l'effectif de la classe est chargé, moins il y de risque.


On attribue bien sûr en premier les postes les moins sollicités : directement s'il y a autant de postulants que de postes à pourvoir, en deux temps si besoin. A chaque fois on décide alors comment procéder : priorité au plus jeune, tirage au sort, un grand avec un petit…

 
Quand quelqu'un a obtenu l'un de ses vœux, on barre ses deux autres demandes. Au contraire, celui qui n'a pas été retenu pour un vœu est souligné pour ses deux vœux restants. Il deviendra ainsi prioritaire pour les autres responsabilités demandées. 

Pierre DESPOULAIN

École du Château, Fougerolles,

Haute-Saône

 

Gérer les services


Comment les services sont gérés dans ma classe de cycle 3 avec un effectif de 15 à 18 enfants, en milieu rural.


Nous avons conservé le terme de «services» pour toutes les tâches ou travaux faisables par des enfants et utiles à la classe et à son fonctionnement.


Une grande affiche au mur, à côté du tableau, bien à la vue de tous, regroupe la liste des services. En face de la désignation du service, les prénoms des responsables dans une couleur qui change chaque fois que nous changeons les responsables de ces services. La date de changement est indiquée en haut de la même couleur que les prénoms. Éventuellement la règle de fonctionnement générale est inscrite sur l'affiche (par exemple : «Pas plus de trois services par enfant»). 

Le fonctionnement a évolué au fil des années mais il y a des points communs :

- On décide ensemble lors d'une réunion de la classe.

- Rien ne peut être changé en dehors d'une réunion (sauf cas grave, touchant à la sécurité par exemple).

- Ce qui compte c'est ce qui est écrit.

- Les modifications sont inscrites dans le cahier comptes-rendus de réunion.

On ne parle pas des services à chaque réunion, le sujet est mis à l'ordre du jour si la nécessité s'en fait sentir (par exemple : désir d'arrêter un service, «démission», constat d'échec, d'incompétence, d'abandon, nouveau besoin, idée, suggestion) ou au moins une fois par mois. Il y a quelques règles garde-fous mais qui sont tempérées en cas de nécessité et avec l'accord de tous, donc : souplesse.

Les garde-fous

 

- Pas plus de trois services par enfant.

- On change une fois par mois.

- On change si le travail n'est pas fait correctement.

- On ne fait pas un service à la place de quelqu'un.

- On décide à la réunion.

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Ce sont les enfants qui lancent le processus en début d'année, j'attends qu'ils le suggèrent (cela vient assez vite quand il y a des «anciens»).


Un enfant peut proposer un service ; «l'inventeur» est prioritaire pour faire ce service en premier.
Le service peut être fait à n'importe quel moment pourvu que cela ne dérange pas, mais certains services doivent être assurés à des moments précis. Par exemple «marcher devant» (lors d'un déplacement en groupe) ou «magnétoscope» doivent être faits quand cela est nécessaire, alors que «plantes» ou «animaux» peuvent être faits suivant l'organisation personnelle de l'enfant lors des moments de travail individuel, de récréation…


Le service assumé est inscrit sur le plan de travail de la semaine et une page du cahier de bilan recense tous les services de l'enfant pour l'année par ordre chronologique. On commence l'année avec peu de services et à la fin de l'année il peut y en avoir une trentaine : «bibliothèque», «rideaux», «lumières», «photocopieuse», «allumage des ordinateurs», «facteur», «papiers», «remplaçant», «plantes», «animaux», «diapositives», «magnétoscope», «cassettes», «météo»,...

 

Il n'y a pas de service plus «noble» qu'un autre, chacun est un rouage de la machine. Certains enfants sont valorisés par un service alors qu'en matière strictement scolaire ce n'est pas évident.


Certains services demandent un certain niveau de compétences et de comportement et ne peuvent être attribués à n'importe qui (le maître peut mettre son veto). Par exemple le service «devant», c'est à dire marcher en tête de rang dans la rue, en ville, pour monter dans un bus, pour aller au théâtre, en sport, ne peut être attribué qu'à des enfants qui ont conscience du danger, qui savent observer, s'arrêter aux points de rassemblement prévus, etc. Un enfant qui a «orange» ou «rouge» en comportement ne peut accéder à ce service. De même pour l'allumage des ordinateurs ou l'utilisation de la photocopieuse. Chaque fois qu'il y a une question de danger, de matériel fragile ou s'il faut appliquer des procédures particulières, ces règles s'appliquent.


Il y a des cas où des enfants sont restés longtemps au même service car d'une part ils étaient compétents et d'autre part, il n'y avait pas de candidats pour en prendre la relève. Un enfant compétent peut travailler sur le même service pour en former un autre.


Les services assurés par les enfants, ce sujet peut paraître simple mais en fait l'observation et l'analyse du fonctionnement de cette institution peuvent apporter beaucoup quant à l'organisation de la classe, l'ambiance, le statut du travail, la prise en charge du matériel, l'aptitude à résoudre des problèmes…

Franck THOMAS

École d'Ueberstrass, Haut-Rhin

 

En cycle II 

C'est une classe de CP-CE1. Il y a donc des enfants qui restent deux ans. Les «métiers» ou «services» sont redéfinis chaque année en fonction des besoins, mais comme les enfants du CE1 connaissent déjà le système, il y a peu de discussions, d'explications ; quand on a besoin de responsable on le dit en réunion : «Il faudrait quelqu'un pour...» et on choisit des volontaires.

Pour initier les enfants du cours préparatoire, les métiers sont assumés par deux enfants : un CP «apprenant» et un CE1 «initiateur». Certains métiers, plus complexes ou concernant la sécurité des enfants ou le bon fonctionnement du matériel (marcher en tête du rang quand on est en sortie, allumer/éteindre les ordinateurs, préparer la boisson...) sont assumés en début d'année par deux CE1.


La plupart du temps, on reste sur la même responsabilité au moins un mois. Et au maximum ? Cela dépend des demandes : quand on change de métiers, on demande au responsable : «Veux-tu partir ?» Si oui, on change ; si non, l'enfant reste jusqu'à la demande d'un autre enfant.


Si la responsabilité est mal assumée (animaux pas nourris régulièrement...) on remplace un des deux responsables par quelqu'un qui peut apprendre à l'autre à le faire.


Les enfants n'ayant aucun métier se considèrent «en vacances» ou «au chômage» selon leur état d'esprit. Les métiers sont affichés et inscrits dans le cahier de bilan individuel. 

Martine DUBAIL

École de Saint-Ulrich, Haut-Rhin

 

Le conseil des métiers


Dans ma classe de cours préparatoire, quelque temps après la rentrée, a lieu le Conseil des métiers. Là, nous listons les métiers dont on a besoin pour aider la classe. Ensuite, les enfants en choisissent un.
S’ils ne veulent plus exercer ce métier, ils peuvent échanger avec un autre enfant. Il suffit d'en informer le groupe au Conseil.


Si un enfant ne trouve personne pour échanger ou s'il y a un métier qu'il veut absolument exercer, il peut proposer au Conseil que l'on change tous les métiers.


Au cours de l'année, il y a des métiers qui disparaissent s'ils n'ont plus lieu d'être et d'autres qui apparaissent.

Catherine CLIVIO

École J. Prévert, Brunstatt,

Haut-Rhin

neduc-139-0008.JPG (23049 bytes) Dans ma classe de CE1, les responsabilités sont définies au cours de la réunion hebdomadaire de la classe (qu'on peut appeler «Conseil»). Ces responsabilités sont transcrites sur un tableau à double entrée, avec les prénoms de tous les enfants. Ce tableau prend place sur un panneau en liège de manière à pouvoir utiliser des épingles de couleur pour désigner les différents responsables.

Ces responsabilités sont prévues pour une semaine. Tous les lundis, les changements sont proposés. Il n'y a pas de roulement ; les enfants se mettent d'accord pour le partage des tâches. Souvent, ils en ont déjà discuté avant la classe. Lorsqu'il y a désaccord, on privilégie l'enfant qui n'a pas encore pris en charge la responsabilité (les petits trous laissés par les épingles en témoignent).

Parfois les enfants gardent la responsabilité pour une deuxième semaine. Ils argumentent leur demande : «J'aime ranger la bibliothèque.», «J'étais facteur mais je n'ai pas eu beaucoup de documents à apporter à d'autres classes.», «Je suis toujours prêt à l'heure donc je peux descendre rapidement le matériel de ping-pong à la récréation ».

Claudine BRAUN

École X. Gerber, Rouffach,

Haut-Rhin

Gerbe de témoignages parue dans Chantiers Pédagogiques de l’Est, revue mensuelle d’animation pédagogique du groupe du Haut-Rhin

«Moi je suis fier de ma responsabilité d’arroser les plantes. Maintenant j’ai aussi le droit de le faire à la maison.»

Christopher (CE1, école X. Gerber, Rouffach, Haut-Rhin)

 

Les expériences de Lewin (psychologie dynamique) avaient bien montré que l'espace vécu était fonction du mode d'activité et surtout de la forme de discipline dans le groupe.

Il n'est plus question ici de propriété : l'ouvrier dit « ma fraiseuse » ou « mon camion », l'institutrice dit « ma classe » sachant fort bien que ni les objets ni les lieux ne leur appartiennent. Il s'agit plutôt de sentiments de responsabilité et de liberté, de pouvoir. L'espace est ainsi délimité par sa fonction. Il est socialisé contrairement à l'espace-refuge de sécurité et, sous réserve de lois, d'autres peuvent y pénétrer.

L'organisation de la classe basée sur le partage des responsabilités va délimiter ainsi des secteurs où chaque « élève de service » fera l'apprentissage de cet espace social.

La classe se trouve alors partagée en de nombreux secteurs de responsabilité qui sont autant d'espaces ambigus, générateurs de conflits souvent mais qui permettent à chaque enfant de se situer les uns par rapport aux autres et surtout par rapport à l'ensemble.

Les notions de propriété personnelle, propriété collective, gestion provisoire sont ainsi vécues quotidiennement.

 

Vers une pédagogie institutionnelle,

Aïda Vasquez et Fernand Oury, Editions Matrice

 
 

Chaque début de trimestre, nous revoyons ensemble le tableau des responsabilités, établi en début d’année. Mais auparavant, nous émettons nos avis sur la manière dont les responsabilités ont été assumées (cela permet de s'évaluer). 

- Qui veut parler de sa responsabilité ? Dire si c'était facile, difficile, embêtant, bien ou autre encore ? 

- L'EPS, c'est facile.

- C’est un plaisir d'arroser les plantes.

- Il faut trouver une méthode pour ranger les livres dans la bibliothèque.

-Les fichiers de math ne sont pas bien rangés, on ne les a pas trouvés un jour, c'est mal organisé.

- C'est un plaisir d'aider la maîtresse.

- J'aime bien distribuer les cahiers, lire les prénoms ; ça m'a aidé à lire, je m'entraîne.

- J'aime bien faire le facteur, descendre (les escaliers), aller dans les autres classes, frapper aux portes.  Je peux aussi voir mes petits cousins. 

- Qu'est-ce qui est bien dans le fait de prendre des responsabilités ? 

- On a quelque chose à faire.

- C'est bien de faire des choses.

- La classe est rangée.

- 0n aide la maîtresse.

- La maîtresse peut compter sur nous.

- La femme de ménage n’a pas besoin de tout faire.

- On s'occupe de quelque chose.

- On apprend quelque chose. 

Après ce moment d'échange, ils ont écrit ce qu'ils aimeraient accepter ; ils se sont trouvés». J'ai remis les étiquettes au tableau et on a «tranché». Bien sûr, je me permets des choix c'est le moment de récompenser» certains.  Par exemple, Pierre, le petit doué souhaitait distribuer les cahiers ! Et pourquoi pas ? Son but n'est pas d'apprendre à mieux lire, mais sûrement de passer chez les uns et les autres, bouger, de regarder chacun et chacune... ou pour d'autres raisons que j'ignore, c'est son droit !  Gaétan et Chris se sont trouvés pour s'occuper de la bibliothèque : ils commencent à devenir autonomes en lecture... C'est tout simplement génial. Bien évidemment, j'ai toujours des doutes : ai-je bien favorisé ce choix chez celui-ci ? Je me rassure en me disant qu'il reste le trimestre prochain... et que l'année prochaine il s'adaptera à un autre système, un autre maître. 

L'important dans tout ça ? Pour y répondre j'utilise la remarque de Lisa : «C'est un plaisir d'arroser les plantes ! » 

Chaque enfant écrit dans son Cahier de Vie ou même parfois dans le cahier de français, la responsabilité qu'il a acceptée de prendre pour ce trimestre. Cela aussi est important : écrire, garder une trace. 

Françoise GRAILHE

CE1, école -La Rocaille,

Merxheim, Haut-Rhin 

 

Des métiers dans une école spécialisée

Les métiers dans notre école sont un vrai travail, utile au fonctionnement de la mini société. Ils sont liés à un ensemble d'institutions (conseil, marché, ceintures de comportement... ) et à l'organisation du travail personnel…

Le  cadre - la classe 

- Une école spécialisée, publique et annexée à un internat.

- 44 enfants de 6 à 13 ans "étiquetés" trouble du comportement et de la conduite

- 5 enseignants.

- Un système de décloisonnement complet que l'on pourrait assimiler à une classe unique de 44 enfants qui aurait 5 maîtres.

Les enfants passent en moyenne 4 ans dans cette classe. Si chaque année, un quart des enfants arrivent sans expérience de la vie coopérative, il faut noter l'importance d'un gros noyau porteur de l'histoire et de l’expérience passée.

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Comment ça démarre

En début d'année, le premier matin, au premier conseil, tous les métiers existants sont "mis sur la table". La question rituelle est posée : « Quels sont les métiers qui doivent absolument démarrer aujourd'hui ? » 

Le vote est à main levée. Seuls les "au moins ceintures blanches en comportement" ont le droit de vote au conseil. La dizaine d'enfants nouveaux ne rentrent à l'école que l'après-midi.

La règle : "celui qui quitte l'école doit former son remplaçant avant de partir, fait que tous les métiers de l'an dernier (une trentaine) sont pourvus". 

5 ou 6 métiers sont sélectionnés : donner à manger aux poissons, arroser les fleurs, responsable du feu tricolore (codes du niveau sonore)… On se rend compte alors que certaines petites responsabilités apparaissant comme secondaires sont absolument nécessaires. 

Les autres métiers se mettront en route à mesure des besoins qui apparaissent. Bon test pour vérifier ceux qui seraient tombés en désuétude.

Je propose un nouveau métier 

Première étape : remplir un bon "ordre du jour du conseil".

Deuxième étape : lire au conseil le brouillon de la fiche guide que j'ai préparé 

Troisième étape : défendre ma proposition au conseil. 

Quatrième étape : vote sur : « avons-nous besoin de ce métier? » 

Cinquième étape : élection du titulaire du poste.

Sixième étape : rédiger la fiche guide définitive à placer dans le cahier des métiers,

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Quand quitte-t-on son métier ? 

- lorsqu'il n'est plus utile, lorsque le petit aquarium s'est cassé, nous n'avions plus besoin d'un responsable. 

- lorsqu'on demande à le quitter (lassitude, baisse d'intérêt, intérêt nouveau, conscience de ne pas être à la hauteur, envie de se confronter à un métier plus difficile… ) 

- lorsque l’on est "démissionné" (par vote au conseil).

La part du maître 

- Le maître apporte une aide technique : il aide à l'élaboration de la fiche guide qui sera présentée au conseil (définition du métier). 

- Pour certains, il peut rédiger sous dictée. Il peut jouer le rôle de "conseiller en communication" pour aider l'enfant à préparer et présenter ses arguments… 

- Il peut aussi jouer le rôle de "conseiller d'orientation professionnelle", aider l'enfant à exprimer ses envies, évaluer ses compétences, affronter un métier plus difficile. 

Dans cet espace-temps, l'enfant qui fait son métier est libre d'aller et venir n'importe où dans l'école. Le temps qu'il consacre à son métier peut aller de cinq minutes par semaine (sortir les poubelles le mardi soir), à cinq minutes par jour (donner à manger aux poissons), à une journée complète de temps en temps (accueil des visiteurs). 

Pour certains métiers, les enfants ne choisissent pas leurs horaires de travail ce sont les métiers dans lesquels ils sont sollicités par les autres ; celle qui distribue les timbres ou la trésorière de la coopérative. 

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Temps consacré, lieu, modalités 

Les métiers sont une part du travail personnel de l'enfant et s'effectuent donc pendant le temps de travail personnel.

Ce temps de travail personnel, à l'Ecole Célestin Freinet est défini ainsi : tous les jours, il y a deux réunions quotidiennes obligatoires qui regroupent toute l'école : la réunion du matin, d'organisation, de mise en route (une demi-heure) et la réunion du soir de bilan (une demi-heure). Le vendredi, une partie de la journée est consacrée aux présentations de travaux, conseil et marché. Le temps de travail personnel, c'est donc tout le reste. 

Compétences acquises 

L’enfant va utiliser toutes ses capacités :

- d'analyse : définir une tache, les compétences requises, ses capacités personnelles, les risques.

- de rédaction : Cf. les différentes étapes.

- de communication : argumentation au conseil, réponses aux demandes de précision...

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Il va acquérir les compétences professionnelles liées à la pratique du métier. Elles sont très diverses du documentaliste au jardinier…

Il va avancer dans l'apprentissage de la vie coopérative.

Le danger principal du système réside dans l'équilibre entre l'efficacité et la formation. L'enfant peut garder un métier très longtemps alors que nous pensons qu'il ne lui apporte plus rien et que d'autres pourraient utilement s'y coller. Mais nous savons aussi l'importance profonde d'être compétent et reconnu dans un rôle. Difficile à quantifier tout ce qui peut se passer à ce niveau. Nous choisissons souvent… de ne rien faire.

Patrick Chrétien, Ecole Célestin Freinet

Article paru dans Freinésies, bulletin du groupe départemental 69 de l’ICEM (GLEM)

Savez-vous écrire "entonnoir" ?

Mai 2002

 

Savez-vous écrire «ENTONNOIR» ?

 

Mes élèves ont depuis toujours du mal avec ce mot. Il résiste et reste l'objet d'orthographes très diversifiées. Pour résoudre ce problème, j’avais envie d’utiliser l'idée d’un tâtonnement expérimental...

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Mettre l’élève en état de recherche. Une question, des hypothèses, vérification, si on trouve on s’arrête là sinon on continue… 

Et on confronte sa version avec les autres, on en discute et puis on poursuit la recherche jusqu’à ce qu’une réponse satisfaisante soit trouvée. 

Cette méthode est-elle vraiment efficace pour l’acquisition d’un savoir ? Même si c’est indéniable, l’intérêt et la participation des élèves sont largement sollicité. 

Comment faire pour le vérifier ? (et facilement...) 

Voici donc la petite expérience que j’ai menée avec un échantillon de 29 élèves de 5e. Ceux-ci ont été partagés en deux groupes 14 et 15 élèves, dans chacun de ces groupes le niveau scolaire des élèves est globalement identique. 

1er groupe : la méthode que j’ai toujours utilisée 

Au cours de la leçon, je signale l’orthographe de ce mot en intervenant auprès de l’élève qui interrogé vient de se tromper. Après avoir effacé la faute, j’écris donc en majuscule  ENTONNOIR en gros sur le milieu du tableau, recommandant à chacun de le recopier avec une attention particulière et expliquant que ce mot est difficile, qu’il donne pas mal de fil à retordre, j’insiste, m’attarde, explique et finit par menacer qu’au prochain contrôle, il en coûtera un point de moins à tout élève qui l’écrira mal orthographié… et nous reprenons le fil de l’étude. 

2ème groupe  

Arrive le moment ou l’élève interrogé va écrire le mot, cette fois je laisse faire. Et pose malgré tout la question suivante en me dirigeant vers le tableau :  

« Êtes-vous d’accord avec cette orthographe ? Êtes vous sûrs ? » 

Évidemment des doigts se lèvent. Je note les propositions : 

ANTONNOIR (ce qu’a écrit l’élève interrogé)

ENTHONOIR

ENTONNOIRE

ENTONNOIR 

Les premières propositions sont sincères, pour les autres, il s’agit plutôt de trouver  une orthographe originale pour chacun des « sons » du mot… Peu importe, je note tout : 

ANTONOIR

ENTONOIRE

ANTONOIR

ENTONNOIRE  

Quelle est la bonne orthographe? Ils ne sont pas d’accord. On votera et chacun devra choisir (obligatoirement, il y a toujours des volontaires pour comparer le nombre de voix à celui des votants, toute abstention sera signalée…) 

Difficile quand on n’a pas «une petite idée». Quelques discussions s’engagent 

Alors on choisit en fonction de l’élève qui a proposé. Aurélie la très bonne élève a proposé ENTONNOIRE et Cyrille ENTONNOIR, mais Cyrille ne brille pas par ses résultats… 

On passe donc au vote : 

7 pour la proposition d’Aurélie,

2 pour Cyrille (lui et son copain ),

3 pour la version d’Arnaud interrogé,

Vanessa vote pour sa version avec un H sans convaincre personne,

Fabien sans trop y croire pour l’orthographe qu’il a proposée. 

C’est Romuald qui vérifiera dans le dictionnaire. Il est ravi de jouer ce rôle, lui le rebelle. 

Sa parole est attendue, il le sait (du coup, je me risque à lui dire qu’il a quelques progrès à faire en lecture, ...ouf…, ma remarque est passée sans qu’il en prenne ombrage…)                      

Contrairement à toute attente, Cyrille avait raison.  Ce n’est pas souvent que cela lui arrive…

Et le cours continue, sans menace ni recommandation… mais ils ont tous participé. 

Pour mesurer l’efficacité de chacune des deux méthodes, je décide le lendemain de demander à chacun d’eux et individuellement, en dehors de mon cours, d’écrire le mot sur un petit papier où j’ai indiqué leur nom et prénom (c’est pendant une sortie que nous faisons ensemble à l’Océanopolis de Brest…) : 

1er groupe 14 élèves

7 ont bien orthographié

7 mal

la moitié des élèves ne savent toujours pas écrire le mot. 

2eme groupe 15 élèves

13 ont bien orthographié

2 mal

et en écrivant le mot correctement, beaucoup disaient, « c’est Cyrille qui a trouvé »… comme si la personne de l’élève avait servi d’accroche à la mémorisation… 

Oui je sais qu’en toute rigueur scientifique cette petite expérience n’a pas valeur de loi généralisable. Mais tout de même les résultats parlent d’eux-mêmes. 

Et je ne peux m’empêcher de penser à tous ces débats qui secouent le monde enseignant où l’on voit s’affronter les tenants du savoir contre ceux du pédagogisme. Comme si l’un excluait l’autre. 

N’est-ce pas ici l’occasion (aussi petite soit-elle !) de pouvoir confirmer que l’acquisition d’un savoir est favorisée par une démarche pédagogique active. 

Alors n’hésitons plus un seul instant… Le collège a vraiment besoin de changer.

Martine Jouan-Prod’homme

Professeur de Sciences Physiques

au collège Jean Moulin

de Locminé dans le Morbihan

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Sécuritarisme et/ou éducation ?! Prendre le risque de la relation

Mai 2002

 

Dans tous les domaines, dans tous les secteurs, toutes les institutions, on remarque depuis des années, des faits similaires : rétrécissement perpétuel du champ des possibles en matière d'action éducative, renoncement des professionnels face à la difficulté croissante des habilitations, des demandes de subventions, ou vis à vis de tout projet éducatif un peu ambitieux. 

Depuis le 11 septembre et la campagne politique indigente que nous connaissons, le bouchon est encore poussé un peu plus loin ; à coup de matraquage médiatique, on agite des spectres de la délinquance, de l'agression et même du terrorisme pour faire encore un peu plus reculer les quelques libertés éducatives qui pouvaient rester ici ou là : dans telles et telles écoles, on "s'interdit" les pâtisseries, ailleurs les fêtes et les rencontres. Dans les écoles, dans les collèges, dans les cités, on dénonce, on montre du doigt les enfants, les adolescents les plus mal dans leur peau et on "rêve" de pénalisation ; en attendant, on distille de la haine et on couvre d'un voile pudique les injustices institutionnelles dont ils sont souvent victimes. 

 Ce n'est pas qu'autour de l'école et dans les cités, que ce sécuritarisme progresse ; c'est aussi dans tous les lieux de loisirs, de culture et d'éducation que l'on constate cette limitation des ambitions éducatives, et à la baisse des possibilités pour les jeunes de connaître des véritables expériences socialisantes : 

-dans les établissements sociaux, tout concourt à limiter la liberté d'action et de penser des équipes et des professionnels ;

-au sein des mouvements d'éducation populaire, la place des volontaires, l'utilisation éducative qui peut être faite de la découverte de nouveaux environnements, de la gestion du risque n'ont jamais été autant menacées ;

-dans les quartiers, au moment même où on met en demeure les familles de s'occuper de leurs enfants, on "pénalise" la présence des enfants et des jeunes dans les espaces publics… 

La rencontre de ces tendances n'apparaît nullement fortuite ; pire elle présente une logique de plus en plus évidente : au fur et à mesure que se rétrécissent les ambitions d'éduquer, une volonté de contrôle et de répression tend à prendre leur place ; derrière la volonté de contrôle, se cache le déni d'éduquer

Parce que nous sommes confrontés à une vision réductrice de nos fonctions et de notre métier, parce que nous sommes menacés dans notre liberté d'initier et d’accompagner (avec  les enfants et les jeunes eux- mêmes) les expériences éducatives dont ils ont besoin, parce que nous savons bien que la véritable sécurité effective passe d'abord par la sécurité affective et l'éducation au risque, il nous a semblé urgent de proposer à l'ensemble des mouvements, des acteurs des secteurs éducatifs qui se rencontrent rarement, une journée pour appréhender, comprendre et nommer un des obstacles les plus envahissants du secteur éducatif : le sécuritarisme montant et la volonté de contrôle et de répression qui l'accompagnent. 

Nous pensons pour notre part qu'une autre voie reste possible ; c'est celle ci qu'il s'agira d'exprimer et présenter, grâce aux apports de divers acteurs ou penseurs du champ social au cours de cette Journée de Réflexions. 

Association Intermèdes

28, rue des marguerites

91160 – Longjumeau

Tél. 01 69 34 69 11

Mél. : intermedes[arobase]wanadoo.fr

Site internet  :

www.assoc.intermedes.free.fr

 

Maison Robinson

Villa Saint-Martin/Bâtiment C2

91160 – Longjumeau

Tél. 01 64 48 60 61

Mél. : maison.robinson[arobase]wanadoo.fr

 

 

 

 

 

 

 

Association Intermèdes/Maison Robinson

 

Journée de réflexions, d’échanges et de propositions

« Contre le sécuritaire dans l’éducation :

prendre le risque de la relation »

 

Mercredi 5 juin 2002  de 9 heures à  18 heures

Salle Anne Franck, Longjumeau – 91160

 

Contact : Sivan 01 64 48 60 61/Laurent 01 69 34 69 11

Entrée libre ; inscription demandée

Accès :

RER B/Gare de Massy-Palaiseau puis bus 199/arrêt Place Charles Steber. Il faut ensuite se diriger vers le stade.

RER C/Gare de Gravigny/Balizy puis traverser l’espace vert en direction du stade.

 

 

 

 

Horaires

Quoi ?

9 heures

Accueil

9 heures 30

Ouverture par Bernard Defrance 

10 heures

Intervention sur la liberté de circulation à l’école (GEDEM 91).

10 heures 20

Intervention de Gilbert Longhi, proviseur du lycée innovant Jean Lurçat, à Paris :

"Les enfants ne sont pas nés élèves…"

10 heures 40

Débat

11 heures

Pause

11 heures 30

Intervention de Azuz, Mouvement de l’Intégration par les Banlieues, sur des interventions d’intervenants extérieurs en milieu scolaire

11 heures 50

Intervention de Laurent Ott, président de l’association Intermèdes, « Les 5 prises de risque en éducation »

12 heures 10

Débat

12 heures 30

Déjeuner

14 heures

Intervention du sociologue Laurent Mucchielli

14 heures 30

Intervention d’une juge pour enfant du Syndicat de la Magistrature, Elizabeth Chauvet, sur les mesures de réparation

14 heures 50

Débat

15 heures 10

Intervention de « Plein Vent », scouts de France, sur leur travail dans les quartiers

15 heures 30

Intervention à préciser

15 heures 50

Débat

16 heures 10

Intervention de l’équipe de la Maison Robinson

16 heures 30

Intervention de l’association STAJ sur leur travail d’éducation populaire

16 heures 50

Débat

17 heures 10

Clôture par le Mouvement Education et Société sur la nécessaire prise de parole des travailleurs sociaux pour éviter l’accaparement du débat par les médias (à confirmer)

 

 

 

 

 

Durant l’été 2000 les médias se sont faits échos d’une mesure sécuritaire qui, suite aux amendements votés par le Sénat sur la Loi Sécurité Quotidienne, risque d’avoir de beaux jours devant elle : la restriction de la liberté de circulation des enfants, le soir venu, dans certains quartiers ; mesure qualifiée à juste titre de couvre-feux.

 

Considérant que les pratiques sécuritaires s’opposent aux principes de la relation éducative, l’association Intermèdes a pris l’initiative d’organiser une journée afin de s’opposer aux choix sécuritaires et de prévenir leur banalisation dans le champ éducatif. L’enjeu de cette journée est à la fois de dénoncer ces principes et de « visibiliser », valoriser et proposer d’autres pratiques de terrain. S’intéresser au champ éducatif c’est poser la question du choix de société. Car la diversité des mesures sécuritaires n’empêche pas leur cohérence significative de choix politiques et sociaux.

 

Nous vous sollicitons tous les acteurs éducatifs  pour participer à cette journée et/ ou diffuser l’information autour d'eux.