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La méthode naturelle de mathématiques

Septembre 1996

On nous demande souvent ce que nous entendons par Méthode Naturelle de mathématiques, et ce qui nous différencie d'autres approches de l'enseignement des mathématiques. Pour tenter de l'exprimer, sans pour autant prétendre à une définition,, nous pouvons d'abord établir un parallèle avec ce qui se passe dans une classe Freinet en français.

 
Au départ, le texte libre
 
Présentation au groupe, discussion, amélioration, dégagement de règles de style, d'orthographe, de grammaire....
 
nouveaux textes libres
 
parallèlement, courrier administratif, correspondance scolaire, affiches, tracts, annonces....
 
Une création individuelle
 
une séance collective : échanges et conflits socio-cognitifs
 
réinvestissement des acquis
 
l'école est dans la vie
 
Ces situations vraies permettent l'application au réel des règles découvertes et un réinvestissement des acquis
 
Création mathématique
 
présentation au groupe, discussion, propositions, hypothèses, recherches, dégagement de lois mathématiques...
 
nouvelles créations
 
calcul vivant : nécessité externe ou interne à la classe, à l'école : achats, ventes, mesures, tableaux, tracés, classements...
 
Bien-sûr, on remarquera que si on essaie le plus souvent d'inscrire le texte libre dans le réel par sa valorisation (imprimerie, illustration, traitement de textes...) et sa communication (livres, journaux, affiches....), le plaisir des maths et de la recherche sont les seuls moteurs en méthode naturelle de mathématiques. Au point où en est notre pratique, il semble que cela suffise, mais il n'est pas interdit de tenter l'expérience de mettre les créations en valeur, de publier les résultats des recherches, de les communiquer à des correspondants.
 
Mathématiques naturelles et calcul vivant
 
On confond souvent ces deux approches. Il nous semble important de clarifier.
En calcul vivant, on part du concret pour résoudre un problème concret.
Mais le calcul vivant est intrinsèquement limité, parce qu'il est fait pour résoudre un problème particulier, ce qui empêche de généraliser et surtout d'aller voir ailleurs, de poursuivre des pistes divergentes, d'autres idées. La recherche cesse quand le problème est résolu.
Le calcul vivant est bien lié au calcul.
A partir des créations mathématiques, la discussion s'inscrit d'emblée dans l'abstrait. On manipule des objets mathématiques dépouillés de l'affectivité qui entoure les objets du calcul vivant, on manipule des idées, des concepts.
La méthode naturelle de mathématiques agit dans le domaine des mathématiques.
Il faut savoir qu'il existe du faux calcul vivant : des situations "concrètes" qu'on fabrique selon les nécessités du programme (on n'a pas sous la main des situations de vie permanentes, ni pour toutes les notions du programme) et qui remplissent la plupart du temps les manuels du commerce. Ces fausses situations concrètes :
- ne s'inscrivent pas dans la vie de la classe : il n'y a donc plus d'enjeu de résolution,
- ne permettent donc pas de mobiliser les désirs, de susciter la recherche,
- ne permettent pas de dégager des lois, car toute généralisation ne peut apparaître qu'au bout d'un ensemble d'expériences.
 
Notre pratique
 
- Pour ne pas couper l'école de la vie, il faut accueillir les situations de calcul vivant qui surgissent dans les nécessités de vie de la classe.
- la méthode naturelle de mathématiques, pratiquée quotidiennement, a besoin des situations de calcul vivant pour appliquer au réel les lois découvertes dans les débats, au cours des créations.
- le calcul vivant est donc inclus dans la méthode naturelle de mathématiques. Il est indispensable et incontournable, mais son aspect sporadique et limité fait qu'on ne peut s'en contenter.
- une mise en place d'exercices de renforcement lorsqu'une notion est acquise, est nécessaire... sans illusion exagérée sur leur efficacité.
 
Monique Quertier et Rémi Jacquet
Nouvel Educateur 54 décembre 93