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Dans :  Histoire-Géo › Sciences et Techno › 
Septembre 2011
On oublie trop souvent les épouses des personnages célèbres. Pourtant sa présence et son rôle sont inséparables des travaux et des engagements de son mari.

 

Anne-Marie Paulze, orpheline de mère, est élevée au couvent (comme la plupart des jeunes filles de la noblesse et de la haute bourgeoisie) jusqu’à douze ans. Elle en sort pour diriger la maison de son père, Fermier Général1 et membre du Parlement de Paris. Elle épouse à 14 ans à peine le jeune (28 ans) Lavoisier qui lui semble (comme à son père) très préférable à un autre prétendant (50 ans) insistant et puissant.
La jeune femme, dotée d’une forte personnalité et déjà formée à l’esprit des Lumières, partage vite les intérêts de son mari, et ne se contente pas d’être une excellente maîtresse de maison. On la retrouve à ses côtés dans tous les aspects de son existence de savant et d’homme public.
 
1. Pour la Ferme Générale, voir article: Lavoisier, grand commis de l'État.
 
La femme de sciences
 
Elle apprend les sciences, l’anglais et le latin. Elle pourra ainsi traduire les écrits des chimistes anglais.En particulier, elle traduit deux ouvrages de Kirwann, chimiste irlandais très respecté, connu pour son attachement au phlogistique.2 Ces textes paraissent en 1788, assortis de notes critiques rédigées par Lavoisier et ses amis ainsi que d’une Préface et de « Notes du traducteur »  qu’elle compose elle-même.
Elle assiste aussi aux expériences menées par son mari et ses collaborateurs dans le laboratoire de l’Arsenal, elle y sert de secrétaire et dessine appareils et étapes du travail. De plus, ses lettres adressées à de nombreux savants étrangers contribuent à les rallier progressivement aux nouvelles théories (anti-phlogistique). Par contre, elle ne maîtrisera jamais la nouvelle nomenclature chimique.
La vie mondaine et politique
 
Son salon, où se croisent savant et financiers, permet l’échange des idées libérales qui préparent les propositions de la future Révolution. On y défendra en particulier : la réforme des impôts et les modalités de vote aux États Généraux avec le doublement du Tiers et le vote par tête.

Par ailleurs, elle s’engage aux côtés de son mari dans son activité politique de représentant à l’Assemblée de l’Orléanais (1787-1788). Ainsi, elle visite plusieurs manufactures et rédige des mémoires sur leur fonctionnement et les possibilités d’amélioration.

 

brocard de soie : Tours, ancienne capitale de la soie

 

Elle s’intéresse aussi à la peinture et prend des leçons avec le peintre David.3 Les techniques apprises alors lui serviront, lors de la préparation du Traité de Chimie, à réaliser et graver les planches qui l’illustrent.

Malheureusement, lorsque Lavoisier est emprisonné, son intervention maladroite auprès du député Dupin contribuera à la condamnation et l’exécution de son mari.

 

 

L’après Révolution
 
Son destin se poursuit encore de nombreuses années. D’abord emprisonnée, puis réduite à vivre de la charité d’un ancien domestique, elle ne tarde pas à rentrer en possession de son héritage et reprend une vie mondaine, toujours en relation avec le monde des savants. Ainsi, elle s’active pour publier, en 1805, les Mémoires de Chimie, laissés inachevés par Lavoisier.

En 1801, elle fait la connaissance de Benjamin Thomson, comte de Ruthford, aventurier et inventeur américain qu’elle épouse en 1805. Mais la mésentente règne dans le couple, d’où la séparation quatre ans plus tard.

En 1835, Mary de Sommerville, une Anglaise qui rencontra de nombreux savants au cours de ses voyages à Paris, la décrit ainsi dans son journal : "vieille, riche et désagréable, ... reçoit luxueusement dans son palais tous les vendredi. Toutes les pièces du château sont alors illuminées, même celles où personne ne va."

Crédit iconographique : 
photo : Hélène Duvialard