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logo blog Le projet d’enseignement moral et civique

 


Ressenti global

 
Le projet évoque très largement les situations pédagogiques, que ce soit dans les principes généraux qui présentent les grands axes ou dans les exemples pratiques donnés en regard des compétences et connaissances à enseigner :
Les principes et les valeurs inscrits dans les grandes Déclarations des droits de l’homme et la Constitution « ne pouvant se transmettre à l’école que dans des situations pédagogiques et éducatives où elles sont activement impliquées (discussion, argumentation, projets communs, coopération, etc.), leur enseignement suppose une cohérence entre ses contenus et ses méthodes. Il suppose également que les formes d’évaluation qui lui seront associées soient d’une grande diversité et soient adaptées à sa nature, à ses modalités et à ses objectifs ».
Et pourtant, oubliées les pédagogies coopératives qui mettent en place, depuis un certain temps, ces situations pédagogiques !
Des situations nourries par le vécu du groupe ou de l’individu, par l’environnement naturel, social, familial. Des pratiques pédagogiques qui placent l’humanité et son environnement au centre et qui permettent aux enfants et adolescents d’acquérir les « compétences et connaissances » exposées dans ce projet sans leçons artificielles, mais dans l’exercice quotidien de leur citoyenneté en construction.  
 
Si dans le premier degré, l’enseignement moral et civique semble se distiller facilement dans toutes les situations de classe, au collège, il peut être réduit à l’heure de vie de classe voire à la vie scolaire, même si le risque est évoqué dans l’introduction : « L’enseignement moral et civique doit avoir un horaire spécialement dédié. Mais il ne saurait se réduire à être un contenu enseigné “à côté” des autres. Tous les enseignements à tous les degrés doivent y être articulés en sollicitant les dimensions émancipatrices et les dimensions sociales des apprentissages scolaires, tous portés par une même exigence d’humanisme. »
 
Tout au long de ma lecture, un élément me semble essentiel et est absent : l’adulte au sein de l’école, de l’établissement scolaire devrait avoir des attitudes, des paroles en adéquation avec tous les principes et valeurs inscrits dans cet enseignement.
 
Dans les connaissances, sont citées les grandes Déclarations des droits de l’homme et les principes de la Constitution de la Ve République, mais pas la Convention internationale des droits de l’enfant. On trouve juste quelques articles cités au Cycle 2 (droits et devoirs des élèves, par ex).
 
L’expression « être capable » est utilisée dans les compétences à acquérir. Je crains une évaluation avec des cases à cocher, ce qui n’a pas de sens. Les verbes seuls suffisent, on est dans l’objectif, la visée éducative. D’ailleurs, parfois seul le verbe est cité, un exemple : « S’estimer. Être capable de prendre soin de soi. Avoir confiance en soi ».
 
 L’adjectif « moral » est souvent superflu, on a l’impression qu’il faut l’utiliser, un exemple : « Il n’y a pas de conscience morale qui ne s’émeuve, ne s’enthousiasme ou ne s’indigne ».
 
De bonnes intentions, des valeurs et principes qu’on ne peut que partager, mais leur scolarisation, dans le sens qu’il faut programmer et pointer les acquis, risque de les vider et de les dénaturer. C’est toute l’Éducation dans et hors l’école qui doit avoir ces visées humanistes. Pas dans un enseignement « à côté », dans des exercices, des leçons, des évaluations (où les élèves pourront restituer correctement cet enseignement et continuer d’agir et de penser comme si rien ne s’était passé), mais dans l’exercice du vivre ensemble, d’apprendre ensemble, de construire ensemble, de projeter ensemble, de décider ensemble… Les compétences suivront et les connaissances auront du sens et seront recherchées.
 
Quelques remarques sur les quatre dimensions de cet enseignement renommé dans la présentation « culture morale et civique » (cycle 2 et 3).
 
Je suppose que l’ajout « culture » permet de faire référence aux trois termes consensuels du socle de la loi pour le Refondation de l’école  « Socle commun, de compétences, de connaissances et de culture ». En effet dans chaque dimension, on trouve : culture, compétences et connaissances.
 
1) Culture de la sensibilité
- « Mais cette sensibilité doit s’éduquer et appelle le retour réflexif sur les expressions premières des émotions et des sentiments, l’élucidation de leurs motifs ou leurs mobiles, leur identification, leur mise en mots et leur discussion. » « Éduquer » est gênant, même si le reste de la phrase l’éclaire. Surtout que dans les compétences, on trouve « Être capable de s’exprimer en contrôlant ses émotions et ses sentiments ». Éduquer, contrôler peuvent  être compris différemment par des adultes…
- Une maladresse dans les connaissances « Le secours à autrui (l’empathie) », réduction de l’empathie au secours…
Il manque dans la connaissance de soi et des autres, la compréhension.
De grands absents dans les exemples de pratiques : l’entretien du matin ou « Quoi de neuf ? » et autres moments de paroles (bilans, Conseils) la correspondance, les classes transplantées, l’étude de son environnement proche, l’écriture de textes, les présentations de ses œuvres…
 
2) Culture de la règle et du droit : des principes pour vivre avec les autres
-  « Apprendre à partager les tâches dans des situations de recherche », les « tâches » laissent à penser à des travaux ennuyeux certes, mais les situations de recherche donnent du sens au travail et justement il n’est plus fastidieux. Il est vrai qu’il faut répartir les différents travaux, c’est donc tout le travail en équipe qu’il faut définir.
-  La réduction du mot coopération à l’EPS et à l’éducation artistique et de celui de l’expérimentation aux seules sciences.
Une grande absente, la Convention des droits de l’enfant et aussi :
- la dimension participation démocratique (ou démocratie participative) des Conseils
- l’élaboration des règles et leur suivi
 
3) Culture du jugement : penser par soi-même et avec les autres
Dans cette dimension, on trouve plus rarement l’adjectif moral… le mot jugement est souvent employé seul ou parfois avec critique.
Je suis dubitative dans les connaissances sur « les valeurs de l’Union européenne », quelles valeurs la société montre-t-elle aux jeunes ?
À part le « débat argumenté », absence des moments de parole qui peuvent mettre en œuvre les exemples de pratiques cités : Le débat philosophique, les entretiens ou « “Quoi de neuf ?”, les exposés, les présentations de textes, les journaux scolaires…
 
4) Culture de l’engagement : agir individuellement et collectivement
À part les Conseils d’enfants (classe et école), on retrouve les pratiques coopératives des mouvements pédagogiques… sans y faire référence.
Une absence, celle des associations partenaires de l’École dans cet exemple de pratiques :
“Engager la classe dans des actions de solidarité ou en faveur de l’environnement proposées par l’Éducation nationale”… on pourrait compléter et par les associations reconnues partenaires de l’École.
La participation démocratique est réduite au vote démocratique, la participation des élèves aux projets, aux décisions et à tout ce qui les concerne n’apparaît pas. C'est l'article 12 de la Convention internationale des droits de l'enfant...
Dans sensibiliser à l’engagement, il manque l’engagement associatif. Sur le local, il existe assez d’associations engagées sur des thèmes qui concernent les enfants : protection de l’environnement, animaux, personnes en situation de handicap, aide aux plus démunis….
 
Remarques à compléter bien sûr !
 
Pour conclure : si cet enseignement moral et civique ne permet pas d’agir autrement, ni de vivre plus heureux, ni de s’émanciper, ni de choisir hors des déterminismes, alors à quoi sert-il ?
 
 
 

 

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