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logo blog Le Front Populaire de l’Enfance, 20 décembre 1935

Encore peu de réponses à la constitution du Front populaire de l’Enfance et à sa charte… Freinet renouvelle son appel dans un contexte qui lui semble favorable avec notamment des initiatives spécifiques pour l’Enfance qui pourraient rejoindre le Front Populaire de l’Enfance.

 
« Il est impossible de mesurer dès maintenant la portée de notre initiative, car il faut laisser aux individus et aux groupements touchés par nos publications et nos circulaires le temps de réagir.
Nous enregistrons du moins :
D’abord l’adhésion enthousiaste de notre grand Romain Rolland qui nous adresse la lettre suivante :
« De tout cœur, je m’associe à vous, dans le Comité de Patronage du Front Populaire de l’Enfance, que vous voulez former et dont la nécessité m’apparaît, comme à vous, impérieuse. Je vous prie de croire toute ma sympathie dans le bon combat que vous livrez. »
Le secrétaire de la Fédération de l’enseignement nous écrit :
" Le Bureau de notre Fédération a pris connaissance de votre lettre du 2 courant.
Il a estimé qu’en raison de la proximité de la fusion syndicale, il ne pouvait accepter de participer au Comité de Patronage que vous projetez. 
Ce sera à la Fédération unifiée d’étudier votre proposition quant au fond même. "
Le Comité Central des Groupes de Jeunes, lui, nous soutient totalement comme par le passé et se propose de demander à tous les groupes une action énergique.
***
Deux ordres de faits ensuite montrent que l’idée d’un regroupement des forces gravitant autour de l’Enfance est désormais dans l’air et qu’une action coordonnée de tous ceux qui s’y intéressent, devrait rapidement aboutir.
La Fédération Nationale des Comités d’action et de défense laïque de France se réunit en Congrès à Paris le dimanche 29 décembre. Elle adresse une invitation aux divers groupements laïques pour que soit étudiée la possibilité d’un Front laïque, susceptible surtout de défendre l’école et ses maîtres.
D’autre part, la Fédération de l’Enfance Ouvrière et Paysanne publie le rapport intégral fait par Daniel à la réunion du Bureau et fixant l’orientation nouvelle de la Fédération.
Nous reviendrons plus loin sur certaines considérations pédagogiques contenues dans ce rapport. Nous signalons seulement ici qu’il préconise la constitution d’une Fédération Populaire de l’Enfance Française, gravitant plus spécialement autour des patronages laïques.
L’une et l’autre de ces deux initiatives nous paraissent insuffisamment élargies et gagneraient à s’incorporer et à se fondre dans notre Front de l’Enfance.
Le Front laïque s’adresse exclusivement aux parents et aux éducateurs et néglige l’action si puissante auprès des enfants eux-mêmes, c'est-à-dire tout le côté pédagogique et social de notre action éducative.
La Fédération Populaire de l’Enfance Française au contraire s’occupe spécialement des enfants et ne pense pas suffisamment à mobiliser, à grouper et à animer parents et éducateurs.
L’une et l’autre de ces actions ont certainement leur pleine raison d’être. Mais puisque nous parlons de regroupement, pourquoi ne pas élargir notre conception et ne pas constituer ce large Front Populaire de l’Enfance qui ne négligera aucune des questions touchant l’Enfance et la Jeunesse, mais qui œuvrera pratiquement aussi pour mobiliser les parents et les amis de l’École et pour défendre nos instituteurs et nos institutions contre l’action sournoise ou avouée du cléricalisme et de la réaction.
Nous écrivons dans ce sens aux animateurs du Front laïque, ainsi qu’à nos camarades de l’Enfance ouvrière, pour leur demander de joindre leurs efforts aux nôtres. Personnellement, nous l’avons dit, il n’y a dans notre initiative aucune pensée individualiste d’amour-propre et nous sommes prêts à nous rallier à tout mouvement répondant à nos buts et qui serait lancé par d’autres groupements. Il ne s’agit pas aujourd’hui de faire triompher tel ou tel projet : l’enjeu est autre ; il s’agit de regrouper par l’action immédiate tous ceux qui sentent la nécessité urgente de sauver l’école et l’enfance ouvrière.
Devant cette nécessité, notre entente immédiate doit être possible.
Dès aujourd’hui, entrez en rapports avec toutes les organisations qui s’intéressent à l’Enfance. Le Front de l’Enfance sera sous peu une puissante réalité. »
 
Célestin Freinet