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La coopé .... bof!

Février 1975

 

La Coopé ... Bof!!!

 C'est la réponse d'un bon nombre de gars du lycée, qui ne voient nullement l'importance·de la coopérative. ou qui ne voient à travers ce nom que le foyer (la salle 12) représentant pour eux  la possibilité de ne pas aller dans des permanences où il est interdit de parler.

 Mais la coopérative c'est aussi autre chose. Remarquez que la pauvre depuis 2 ans commence à s'essouffler si bien que l'on n'entend plus sa voix. Pourtant sa naissance ne date pas de tellement longtemps (1969-70). Ses premiers pas furent assez encourageants. et porteurs de grandes espérances ... Mais à l'heure actuelle tout le monde semble s'en détourner. Sa nécessité n'en est pas moindre ... au contraire : ce besoin de meilleures relations professeurs-élèves est un problème toujours d'actualité, le besoin d'humaniser le lycée reste un but à atteindre, le besoin d'activités de plus en plus nombreuses et diverses est encore réel.

 En fait, le foyer coopératif est un moyen de faire le contre poids d'un enseignement traditionnel et structuré dans lequel l'initiative et la responsabilité sont refusées. C'est la possibilité que le lycée ne devienne un lieu où l'on ne vienne simplement que pour prendre une certaine dose de culture pour ensuite partir. C'est une des façons les plus réelles de commencer à prendre notre vie en main, par la grande part offerte à l'esprit critique, à l'initiative, aux responsabilités, à la réflexion.

 Nous voilà au fond du problème : commencer à prendre sa vie en main !!! Mais nous en laisse-t-on vraiment la possibilité ? Et puis, voulons-nous réellement de cette responsabilité qui est souvent lourde à assumer et pleine de conséquences? Je crois que nous la craignons tous plus ou moins ...

 Mais faisons au moins chacun l'effort d'aller jusqu'au bout, c'est-à-dire de prendre les moyens pour commencer dès à présent à améliorer notre vie au lycée ? Ne laissons pas échapper ces possibilités de changer un enseignement trop limité en un enseignement vivant !

 Si l'on prend l'exemple de la coopé, on s'aperçoit vite que si le désintéressement dont elle fait l'objet continue au rythme actuel, elle ne pourra pas y survivre longtemps ... Et ce sera une possibilité en moins de satisfaire certaines de nos revendications, car il serait inutile de croire que si nous la laissons mourir, nous puissions ensuite, ayant pris conscience de sa nécessité, la faire revivre ! C'est donc maintenant qu'il faut s'apercevoir que la coopérative est indispensable ! C'est maintenant que nous devons lui redonner un second souffle en préparant activement la soirée coopérative en invitant nos professeurs à organiser avec nous des activités qui nous intéressent , en en parlant autour de nous et en cotisant aussi pour subvenir aux besoins financiers des différents clubs déjà existants et peut-être si nous le voulons des nouveaux à venir !!!

 M. AUDOIRE

 

Et si la coopé disparaissait ?

 J'ai beaucoup apprécié l'article de M. Audoire sur la coopé. Il a fort bien cerné les buts de la coopé, ses difficultés et sa crise actuelle.

 Je ferai seulement une correction, pour l'Histoire : la coopé existe - du moins sur le papier - depuis 1964 et non 1969. Mais cette erreur me parait significative : la coopé a mis du temps pour avoir une existence réelle, pour qu'elle apparaisse vraiment comme une communauté d'élèves et d'adultes. Au début, c'était plutôt une juxtaposition d'activités, de clubs, sans lien véritable. L'aspect financier restait prédominant (vente de petits pains, solidarité et entraide ... ) Elle demeurait gérée trop exclusivement par des adultes (dévoués !)

 C'est en 1967-68 que les élèves commencèrent à prendre conscience de ce que pouvait être la coopé, et commencèrent à prendre en main ses destinées ils découvrirent les "statuts" qui montraient bien que la coopé est une affaire d'élèves et non d'adultes (exactement : d'élèves avec le conseil de quelques adultes) ;

 - en janvier 68, une importante délégation d'élèves de la coopé participa activement à de passionnantes journées de I'AROEVEN sur les rapports jeunes-adultes ;

 - en mars 68, une commission constituée d'élèves et d'adultes de la coopé fut constituée pour revoir le règlement intérieur du lycée.

 Cet état d'esprit se concrétisa tout naturellement pendant les "événements" de MAl 68 : les élèves du lycée de La Bastide se retrouvèrent aux premiers rangs parce qu'ils avaient appris à s'organiser, à discuter, à s'écouter, à prendre des décisions et des responsabilités.

 Il serait trop long de relater toutes les péripéties qui suivirent : les hauts et les bas, les incidents avec quelques adultes (1), l'organisation des diverses fêtes et manifestations, les expositions, l'ouverture de la salle 12, la naissance et la mort de certains clubs ...

 Cette vie a toujours été fragile : la coopé repose sur le dévouement d'une poignée d'élèves et d'adultes qui prennent sur leur temps de loisir et de travail. SITUATION ANORMALE : une coopé devrait faire partie intégrante des horaires des élèves et des professeurs. Faire fonctionner des clubs de 13 h à 13 h 45, ou à partir de 17 h (quand on habite à 10 km, quand on a un car à prendre, quand on a des centaines de copies à corriger ... ), c'est une gageure bien difficile à tenir. Je pense donc que la crise que signale M. Audoire n'est pas nouvelle. Mais elle s'aggrave parce qu'elle est liée à la crise actuelle de l'enseignement et de la pédagogie, à la crise sociale et politique.

 Allons plus loin : l'existence même d'une coopé - telle qu'elle est - (comme des 10 %). c'est le signe révélateur que rien ne va plus, qu'il faut autre chose. Mais dans une société, juste et humaine, dans un enseignement réellement démocratique, une coopé sous sa forme actuelle (comme les 10 %) devrait disparaître, ou alors s'étendre à l'établissement tout entier et se confondre avec lui (et les 10% devenir 100 %).

 En fait, dans les conditions actuelles, la coopé (de même que les 10%), est aussi efficace qu'un emplâtre sur une jambe de bois. Il serait même dangereux de laisser croire comme certains (et comme le ministère) que la coopé (comme les 10 %) pourrait être une solution miracle aux problèmes de l'enseignement.

 Cela dit, faut-il laisser mourir la coopé, et attendre les réformes et les révolutions qui d'un coup de baguette transformeront tout ? Je ne le crois pas : elle reste un moyen pour préparer les changements que nous souhaitons.

 Mais c'est à TOUS LES COOPERATEURS, jeunes et adultes, d'en discuter et d'en décider.

 J. BRUNET

 



 

(1) euphémisme