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logo ressource btn Une mine d’or au Burkina Faso

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Dans :  Histoire-Géo › 
Mars 2009

En Afrique, le Burkina Faso, pays très pauvre, est pourtant riche en minerais. Il y a de l'or. Et des familles misérables risquent leur vie pour en récupérer quelques paillettes.

Le Burkina est l'un des pays des plus pauvres du monde.
Mais son sous-sol contient divers minerais, qui intéressent l'industrie mondiale - souvent, sans retombées économiques sensibles pour la population locale.
L'exploitation "artisanale" de l'or, (présent sur une bonne partie du territoire), a développé des pratiques désastreuses pour les hommes et pour l'environnement.
Problèmes sociaux, enfants non scolarisés, accidents, intoxications, pollutions… la ruée vers l'or fait des ravages.

Le Burkina Faso1, ancien territoire de l’Afrique Occidentale Française2  sous le nom de Haute-Volta, est devenu indépendant en 1960. C’est un pays de 274.000 km2, peuplé d’environ 15 millions d’habitants. Sans accès à la mer, vivant presque exclusivement d’une agriculture rendue difficile par le climat, le Burkina Faso est l’un des pays les plus pauvres du monde. Un habitant sur deux vit avec moins d’un dollar par jour. Cependant la présence d’or est signalée sur presque tout le territoire et sa recherche est en plein essor depuis environ vingt-cinq ans.

1- Le nom Burkina Faso signifie «le pays des hommes libres». 

2- L’AOF était un territoire colonisé par les Français en Afrique depuis 1895 et qui comprenait la Mauritanie, le Sénégal, le Soudan français (devenu Mali), la Guinée, la Côte d'Ivoire, le Niger, la Haute-Volta (devenue Burkina Faso) et le Dahomey (devenu Bénin)


Le climat :

Le Burkina Faso est situé au cœur du Sahel et possède un climat tropical de type soudanien caractérisé par deux saisons : une saison sèche et une saison des pluies. On peut distinguer trois grandes zones climatiques, du nord au sud :
- La zone sahélienne (A), caractérisée par une pluviométrie faible (moins de 600mm d’eau par an), des températures élevées et une végétation arbustive clairsemée.
- La zone Soudano-sahélienne (B), zone de transition au centre du pays, caractérisée par une pluviométrie moyenne (autour de 750mm par an)
- La zone Soudano-guinéenne (C), avec des pluies relativement abondantes et des températures moyennes plutôt basses (saison des pluies plutôt fraîche).
La tendance observée depuis une quarantaine d’années est au réchauffement global et à la diminution des précipitations.
      
zones climatiques au Burkina  
 

 
L’exploitation de l’or

L’or est présent sur presque tout le territoire. Il est exploité industriellement dans des mines (Poura, Essakane, Guiro), et artisanalement, par orpaillage, sur de nombreux gîtes (Yako, Ouahigouya, Kaya, Yalogo, Goraom Gorom, Sebba, Kongoussi, Bogandé, Gaoua, Houndé…)3

 3- Sources : Premier Ministère du Burkina  Faso.

 

Le paysage aux abords de la mine : un hameau avec ses greniers à mil aux murs de terre et aux toits de paille. Avec la terre de cette région, on fabrique des briques qui sont ensuite séchées au soleil et qui servent à élever les murs des constructions. Un abri recouvert d’un épais toit de paille sert de lieu de réunion pour les palabres4, lorsque les arbres ne fournissent pas une ombre suffisante. Des sacs en plastique noir dispersés par l’harmattan, (vent chaud venant du désert), polluent toute la savane, même si beaucoup sont récupérés et découpés en lanières que l’on tisse pour en faire des sacs et des paniers.

 4- Palabres. En Afrique noire, les hommes se réunissent, généralement en plein air, sous un arbre,  pour discuter de tout problème relatif à la communauté villageoise. Ces discussions portent le nom de «palabres»

 L’orpaillage est une technique artisanale. Les hommes lavent dans l’eau des rivières les sables ou les terres qui contiennent des paillettes d’or.
On a recours à cette technique lorsque la concentration en or sur les gîtes est faible et dans les régions où il n’existe que des indices de présence d’or.
Lorsqu’il s’agit d’un véritable gisement, l’exploitation est industrielle c’est-à-dire qu’elle se fait avec des machines qui permettent de creuser plus facilement et à grande échelle.
L’or est désormais le deuxième produit d’exportation du pays après le coton.

la province de Bam au Burkina  
 

 
Dans la province de Bam, près de la ville de Kongoussi, se situe le village de Lourgou.
L’une des nombreuses sociétés minières présentes au Burkina Faso y exploite depuis des années une mine d’or, selon des méthodes plus proches de l’artisanat que de l’industrie.

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1 et 2- La mine consiste en une multitude de puits, trous qui peuvent atteindre 70 mètres de profondeur, simplement creusés dans le sol sans que leurs parois soient consolidées. Seule l’ouverture est renforcée par des sacs et les mineurs posent leurs pieds sur des branchages pour ne pas effriter le sol. Chaque puits est équipé d’une poulie fixée à une poutre, sur laquelle s’enroule une corde qui permet de descendre et de remonter. Des galeries partent du fond du puits. De la surface, on peut entendre les bruits assourdis, les voix des mineurs. Ces puits sont extrêmement dangereux : ils s’effondrent régulièrement en ensevelissant des mineurs.

 

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3- Les jeunes garçons et les hommes qui y travaillent sont simplement équipés d’une lampe électrique. Les outils utilisés par les mineurs restent très rudimentaires. Tout le travail se fait  manuellement, sans le secours d’aucune machine. Les mineurs utilisent en particulier la daba, une sorte de hachette à tranchant perpendiculaire au manche. Aucune ventilation n’est prévue, ce qui rend le travail épuisant.

 

 La mine est pauvre : on n’en retire que de petites quantités d’or, et les ouvriers y gagnent à peine de quoi manger. Le site n’est pas fermé mais gardé par des hommes en armes engagés par la société minière et tout vol est sévèrement puni. Les accidents du travail sont fréquents : aucune règle de sécurité ne protège les mineurs.

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1- Au premier plan, le « gruyère » du paysage minier. Les sacs remplis de minerai sont entreposés au fond de la mine avant d’être remontés à la surface.
2-Dans une première étape, les mineurs écrasent grossièrement au marteau le minerai.
 
 
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3- Les femmes et les enfants pilent ensuite les morceaux cassés par les hommes pour en faire une poudre.5 C’est un travail très dur qui a lieu dans un bruit assourdissant, dans la chaleur torride – il fait entre 35 et 45 degrés - et la poussière.

 5- Malgré les lois censées protéger les enfants, beaucoup d’entre eux, dans des pays pauvres, sont peu ou pas scolarisés et doivent travailler, souvent dans des conditions très dures, comme c’était encore le cas dans nos pays au XIX° siècle.

L’eau

L’activité minière réclame de grandes quantités d’eau. Or, l’eau est rare au Burkina Faso comme dans tous les pays du Sahel. Les sociétés minières doivent forer profondément le sol pour alimenter leurs mines. Certaines de ces sociétés participent depuis 2004 au programme «les mines pour l’eau» destiné à faire profiter les habitants des forages qu’elles pratiquent pour leur activité, et qui fournissent une eau plus abondante et de meilleure qualité que celle traditionnellement utilisée par les populations. En effet, selon l’UNICEF6, dans cette partie de l’Afrique, 80% des maladies et des décès chez les enfants ont pour cause la mauvaise qualité de l’eau qu’ils boivent.

 6- L’UNICEF est un organisme au sein de l’Organisation des Nations Unies (ONU) qui s’occupe de la santé et du bien-être des enfants partout dans le monde.

 

La poudre obtenue est mélangée à l’eau. La boue liquide s’écoule sur un plan incliné couvert d’une toile émeri7 - destinée à retenir les particules d’or, plus lourdes, qui restent coincées entre les grains de la toile.

 

7 La toile émeri est une toile sur laquelle sont fixés des grains de corindon, roche très dure qui, réduite en grains, sert d’abrasif (ponçage) ou d’antidérapant.

 

 
Un désastre écologique

Les rapports des ONG8 chargées de la protection de l’environnement dénoncent l’état de délabrement total des sites miniers. Ces zones deviennent dangereuses pour les hommes et pour les animaux à cause des entrées de puits laissées à ciel ouvert et des tas de gravats.

 
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1- Un ouvrier amalgame l’or et le mercure en versant du mercure dans l’eau riche en poudre d’or.
Le mercure attire l’or et il se forme une boulette constituée de mercure et d’or : c’est l’amalgame. L’eau qui reste est ensuite filtrée dans un chiffon pour en recueillir les dernières particules d’or.


2 et 3 - La boulette de mercure et d’or est déposée dans une vieille boîte de conserve où elle est «grillée» au chalumeau et portée à incandescence. Le mercure s’évapore, seul l’or reste. Les micro-gouttelettes de mercure respirées par l’ouvrier et son entourage sont très dangereuses pour leur santé.   

Et les métaux lourds toxiques contenus dans la roche, tel le plomb, ou utilisés pour extraire l’or, comme le mercure, provoquent des pollutions chimiques qui contaminent les sols et les cours d’eau s’ils sont utilisés et rejetés sans précaution. Cela entraîne de très graves maladies et malformations chez les hommes comme chez les animaux.

 

8- Une ONG est une Organisation Non Gouvernementale : c’est une organisation privée (et indépendante des Etats), qui vise non pas à s’enrichir mais à œuvrer pour le bien public, dans le domaine de la santé, de l’environnement, du développement économique.

 

 
Les conséquences sociales

Tant que la mine est exploitable, les paysans délaissent leurs cultures, qui rapportent encore moins que le salaire de misère qu’on leur verse à la mine. Mais dès qu’elle ferme, ils se retrouvent au chômage et sans droits.
En 2003, le gouvernement a instauré un nouveau code minier pour réglementer cette industrie et l’inciter à envisager la restauration des lieux : lorsqu’un site n’est plus exploitable parce qu’il n’y a plus d’or, il faut le remettre en état, en comblant les trous et en supprimant les gravats. Mais ce code minier n’est que rarement observé et les mines sont souvent laissées en l’état.

La presse nationale burkinabée que l’on peut consulter sur Internet, reflète bien les contradictions liées à cette activité : articles enthousiastes accompagnant l’ouverture d’une nouvelle mine, promesses des dirigeants politiques et rapports inquiets des ONG chargées du développement et de l’environnement.
 

A l’entrée de la zone minière, des boutiques vendent de la nourriture, de l’eau, mais aussi des cigarettes, de la bière, de l’alcool.
Malgré la présence de l’or, le pays et les régions aurifères demeurent très pauvres : les bénéfices de l'exploitation vont essentiellement aux sociétés étrangères qui exploitent les gisements, sans que le gouvernement s'y oppose réellement. Quant aux petites quantités fournies par l'extraction artisanale, elles servent à la fabrication locale de bijoux... et les clients ne sont pas riches.


Pour en savoir plus,

on peut se connecter au site internet officiel du Premier Ministère du Burkina Faso : http://www.primature.gov.bf/

 

 

Crédit iconographique : 
cartes Annie Dhénin d'après fonds de carte http://histgeo.ac-aix-marseille.fr/ . Photos : Yves Lacroix