Atelier Kapla au Congrès de l’ICEM de Paris

 

Revue en ligne CréAtions n°200 "Le corps et ses langages"
annoncée dans le Nouvel Educateur n°200 - Publication : décembre 2010

Congrès de l'Icem, à Paris en 2007 - Par Véronique Decker

 

 

Atelier Kapla

Un tâtonnement expérimental avec des adultes

 Au congrès de Paris, la société Kapla nous a prêté bénévolement le matériel d’intervention. Dix sacs énormes de planchettes.
Le groupe international a choisi de se mettre en situation de tâtonnement expérimental avec ce matériel qu'il ne connaissait pas...
Aucune consigne n’est donnée. Les planchettes, toutes identiques, permettent des assemblages par superposition et la relation mathématique entre la longueur, l’épaisseur et la largeur de la planchette fait de chaque construction une œuvre émouvante.

Certains adultes travaillent seuls, d’autres coopèrent spontanément, certains commencent par imiter le voisin et chacun montre sa personnalité et son rapport à l’apprentissage en s’appropriant le matériel:

- Deux enseignantes travaillent par imitation, avant de prendre chacune un élan personnel.

- Un enseignant va rechercher méthodiquement la verticalité et la symétrie, dans un travail concentré et isolé du groupe.

- Un collègue choisit une construction très légère, très fragile, qui s’effondre plusieurs fois, avant qu’il ne parvienne à organiser une maison qui se stabilise. Après plusieurs effondrements, mon aide technique aide à la compréhension de la technique de construction d'une réalisation très aérée et fragile.

- Trois collègues sont très mal parties, avec une construction totalement pleine, sans aucune aération et vont trouver ensemble une structure en chevrons qui va donner une tout autre image et prendre appui sur des fondations stables.

- Deux collègues travaillent seuls, l’une tout en verticalité, et l’autre sur une structure en réseau, qui ressemble à une ville.

Mais tout le monde s’observe, se regarde et profite par imitation des trouvailles des autres. Même ceux qui construisent seuls sont tout de même avec les autres, sous leur regard mais aussi avec la possibilité d’observer ce que fait chacun. J’ai disposé les sacs tout autour de la salle, pour que le centre, laissé vide, permette la vision de tous. Même si les participants ne peuvent pas tellement échanger par le langage, ils échangent des regards, ils observent et ils demandent mon aide ou s’en passent. La présence du groupe sollicite pourtant une œuvre, une production, une audace d’agir et de tenter.

Certains veulent construire un escalier en spirale et me demandent de l’aide. Immédiatement, deux autres stagiaires s’approchent pour bénéficier de l’aide technique, que pourtant ils n’avaient pas demandée. Les constructions, très différentes au départ, s’harmonisent par cette observation et les alternances de constructions avec des planchettes horizontales et des planchettes verticales se ressemblent. Même la construction roumaine et ses chevrons s’adjoint une tour construite sous ce rythme. Il reste le temps, le temps de l’observation qui parfois se substitue à l’action et qui pourtant porte autant de possibilités d’apprentissage.


Il s’agissait d’essayer, de faire avant d’apprendre à faire, de ne pas obtenir de réponse sans poser de questions et même si la langue ne permettait pas de se comprendre, il s’agissait d’oser.
Pour trouver cette audace, un regard empathique des autres, une aide particulière selon la demande, un temps d’essai, d’effondrement et le temps de nouvelles tentatives sont nécessaires.
En peu de temps, le niveau de réalisation de chacun se différencie, certains construisent vite pendant que d’autres font, défont et refont. Mais en même temps, l’imitation fait que les travaux s’harmonisent et que chacun s’adapte au groupe et s’ajuste à ses goûts.
Des yourtes, des villes, des tours coexistent et il faudrait poursuivre le travail pour complexifier par une appropriation des techniques par tous. A l’issue de l’atelier, certains n’ont rien construit, se contentant de faire et de défaire, selon différentes techniques. Il y a un étonnant silence, une grande concentration de tous, quel que soit le niveau de production.

De plus, il faudrait avoir une langue commune pour parler davantage et pour présenter tous les concepts mécaniques et mathématiques qui ont été mis en œuvre: mais l’objectif était de faire ressentir à des adultes ce que vivent les enfants à qui l'on propose d’apprendre par le tâtonnement expérimental. Et sur ce point, l’atelier connaît un grand succès.

 

 

 
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