Apprentissage des langues : avant tout, communiquer

Novembre 2001

 

Expériences de correspondances au lycée et à l’école primaire, rôles de l’intervenant en langue et implication dans le projet de la classe ; ce dossier ouvre des pistes pour montrer qu’une autre manière d’aborder l’apprentissage des langues à l’école est possible, souhaitable même. Un apprentissage qui repose sur la communication, qui met en préalable l’envie d’aller vers l’autre.
 



« Ouvrir la classe vers le monde extérieur, le milieu socioculturel environnant ou lointain, l’étranger. Les techniques Freinet permettent de construire un réel circuit de communication aussi bien à l’intérieur de la classe qu’avec l’extérieur. La maîtrise de la langue étrangère n’est plus un exercice scolastique, mais devient une activité socialisée. Les motivations se situent en amont de la chaîne des actes pédagogiques : partir des pratiques socialisées de communication pour motiver l’expression personnelle. »
 
Gérald Schlemminger
La pédagogie Freinet et classe de langue vivante
Editions ICEM-pédagogie Freinet n°23
 
 
 
 
Raison d’être :
une correspondance internationale au lycée



Correspondance par internet, « chat », programmes d’étude des civilisations menés en parallèle dans les classes, aboutissant à un voyage-échange ; tous les ingrédients sont réunis pour dynamiser l’apprentissage d’une langue étrangère par des classes française et américaine. Récit du projet « Raison d’être », vu du côté américain, par Hélène Gresso.
 
 



Lorsque mon collègue Jean-François Cerles du lycée Paul Héroult de Saint-Jean de Maurienne et moi-même, il y a quatre ans, cherchions un nom pour le programme que nous mettions en place, nous voulions qu'il fût compréhensible à la fois en anglais et en français. Pour son sens chargé de symboles autant que pour sa signification bilingue et transculturelle, nous avons choisi "Raison d'Etre".
 
La correspondance devient donc notre moteur, comme dans une classe Freinet courante. Elle sert à promouvoir les connaissances en langue, l’analyse culturelle, l’individualisation du travail et le recul de chacun sur ses acquisitions comme sur les remises en question.
 
Notre programme fonctionne de concert dans deux classes, l’une de Terminale du lycée Paul Héroult à Saint-Jean de Maurienne et l’autre (à cause du fonctionnement très flexible des études américaines) comprenant des élèves suivant des cours obligatoires de langue vivante dans le cadre d’un diplôme universitaire à Penn State University de Pittsburgh aux USA.
 
Les classes qui ont participé comprenaient selon l’année (en France) des Terminales L-Langue renforcée et des TLV2 (L, ES, S, STTA, STTG) et (aux Etats-Unis) un programme annuel intensif de niveau élémentaire et intermédiaire, des classes de niveau intermédiaire, et un classe de conversation de niveau intermédiaire-supérieur.
 
Considérations pratiques
 
 Il est absolument nécessaire d’avoir au moins trois cours par semaine avec sa classe afin de mettre en œuvre ce programme. Un double cours et deux heures séparées donnent des conditions de travail correctes.
 
Les classes américaines de « gen-ed » et en particulier les « frosh » ou « sophomores » sont proches des Terminales françaises. Il est aussi possible de mettre ce programme en place pour des classes de BTS et prépas (aux US : juniors et seniors). Au niveau du collège, des 4e-3e peuvent travailler avec une classe « 9 » ou »10 » .
 
Penser au décalage horaire (les cours en France doivent avoir lieu en fin d’après-midi) et aux périodes de vacances. Enfin, les USA fonctionnent en semestre, avec changement complet des classes après Noël, à moins d’avoir prévu pour l’échange une classe qui couvre toute l’année scolaire. Un projet de 4 mois est bien sûr toujours possible si l’on a tout prévu dès avant la rentrée.
 
 
Contenu
 
Le contenu est essentiel et doit être prévu à l’avance, de préférence pour au moins 2 mois, afin de coordonner les thèmes, les lectures et les discussions en direct.
 
Notre programme repose sur l’enseignement de la culture française (ou américaine), dont on aborde quelques notions clefs (au nombre variable selon les classes.) Ces notions fondent l’architecture du programme et son développement. Elles sont découpées en étapes qui chacune sert à la discussion hebdomadaire individuelle et « en direct » entre les élèves des deux classes.
Notre objectif est de donner de multiples perspectives en mouvement plutôt qu’un bloc monolithique de « faits » : tout est sujet à discussion, rapporté et comparé ; les thèmes étudiés le sont à plusieurs niveaux (ce qu’est la norme ou la moyenne en France, le cas de la région de Saint-Jean, dans la classe de nos correspondants) et peuvent donc être utilisés en « écho » lors des visites réciproques. Chaque thème de notre programme fonctionne en parallèle à celui de la classe de nos correspondants, afin de faciliter sondages, échanges et débats.
 
Notre approche est un cycle dynamique constitué d'éléments différents qui chacun jouent un rôle, en renforçant leurs effets mutuels et en impulsant leur propre mouvement à l'ensemble. Ces éléments sont tributaires des TIC (en particulier, communication synchrone et asynchrone) qui forment l’aspect technique du programme et soutiennent à la fois la collaboration entre les classes et la communication qui les lie.
 
Puisque le mouvement est continu, il est difficile de trouver un point de départ et un point d'arrivée, on pourra commencer avec le site Internet des deux classes dont le programme est commun (http://language.la.psu.edu/francais3) et pour l’année dernière http://language.la.psu.edu/archive/francais3). Il sert aux deux classes de vitrine vers l'extérieur autant que de moyen d'expression interne (de classe à classe ou d'individu à individu) : c'est là que les étudiants se présentent sur leur page personnelle lorsque commence l'année, c'est là qu'ils postent leurs travaux une fois que ceux-ci sont finis, c'est là qu'ils consultent ce qu'a réalisé leur correspondant afin d'en discuter lors de la communication suivante. "Raison d'Etre" est à la fois le nom du programme et celui du magazine afin de renforcer son rôle de ciment entre les deux classes. Ce magazine est constitué d'articles postés de façon régulière, après un travail de préparation méthodique sur le thème culturel choisi, et représente une synthèse de la prise de position de chaque élève vis à vis de discussions en temps réel qui s'effectuent chaque mardi sur un thème donné, coordonné dans un unité et par rapport à l’ensemble, entre les deux classes, par groupes d' une ou deux personnes, de « keypal » à « keypal » (correspondant –penpal- qui utilise un clavier -keyboard- plutôt qu'un stylo.) Ces discussions ou débats en temps réel sont exploités en classe et sont renforcés par le contact personnel, établi au moyen de messages électroniques hebdomadaires.
 
Chaque activité prépare et soutient la suivante dans un cycle constant : les structures linguistiques sont incorporées aux discussions en classe qui préparent les discussions avec le « keypal », lesquelles ne peuvent s'effectuer correctement si l'on n'a pas étudié le thème à travers des lectures et leur discussion. L'écriture d'essais suppose une synthèse des idées et une mise en oeuvre de toutes ses connaissances, fonctions et compétences acquises, dont le « recyclage » est rendu nécessaire par la cohérence du programme ; ces essais, selon le moment dans un « cycle » où ils sont rédigés varient : ils peuvent présenter des faits et les mettre en regard d’une discussion avec leur « keypal », ou présenter une problématique et exprimer une opinion sur celle-ci. L'ensemble des unités thématiques est construit à l'avance afin de retrouver en filigrane des compétences (argumenter, par exemple) que l’on maîtrise mieux au fur et à mesure, et des connaissances discutées (voire débattues) précédemment, donnant par là-même aux étudiants l'occasion d'observer comment différents éléments (valeurs, comportements, points de partage/de division) constituent un tout indissociable. Ils appréhendent la complexité de ce que sont la langue et la culture d’un pays et prennent conscience des différentes approches possibles sur un même point (par exemple, la famille en tant que valeur se retrouve dans les thèmes des relations personnelles, du système éducatif, de la nourriture, du monde du travail, et donc de la conception de l'espace, du temps, de l'argent, du devoir…).
 
Le voyage-échange
 
Au printemps, après environ six mois de travail en commun, les jeunes Américains ont la possibilité de rencontrer ceux qui sont devenus leurs amis français et mettre en perspective leur savoir ; deux semaines plus tard vient le tour des jeunes Français. Ces voyages effectuent une synthèse de l'année en concentrant de façon réelle (par le choc de la rencontre, de la langue, de la culture) tout ce qui a été étudié au cours de l'année (ou, le cas échéant, du semestre.) Cette intégration complète donne une nouvelle dynamique à la classe et a un impact déterminant sur les étudiants. En effet, les voyages cristallisent le processus intellectuel et l'engagement personnel qui se sont développés au cours de l'année. Les rencontres et plus encore le déplacement font entrer en collision un outillage mental et des codes, un savoir abstrait, et une expérience. Les étudiants ne se rendent pas compte qu'ils fonctionnent selon un code donné, jusqu'à ce qu'ils ne puissent plus fonctionner avec celui-ci et soudainement se comprennent comme complètement étrangers. Ils se perçoivent dans le regard de l'autre et ne se reconnaissent plus. C'est là que la préparation de l'année entre en jeu : elle leur permet d'aller plus loin que l'émotion ressentie et leur permet d'appréhender leur réaction, de la placer en parallèle ou en opposition avec ce qui a été étudié et discuté avec leur correspondant, de l'analyser, et d'en tirer des conclusions non seulement sur la culture visitée ou sur la leur, mais aussi sur eux-mêmes. Ils deviennent sensibles aux limites mentales qui les encadraient jusqu'alors et, de façon paradoxale, s'en libèrent un peu par le fait-même de les percevoir. Ainsi les étudiants se placent-ils différemment face à leurs apprentissages dans la classe après le voyage qu’ils ont effectué ou celui de leur correspondant chez eux.
 
Les effets sur la classe durent même pour ceux qui n'ont pas participé au voyage en France parce que la force des liens tissés et l'intégration des notions restent des phénomènes marquants. Un grand nombre d’entre eux continue à étudier le français même lorsqu’il n’y est plus obligé. Il faut ajouter à cela que les étudiants ont suivi un programme exigeant (avec des aspects assez ingrats) mais où il est très difficile de ne pas s’investir personnellement. L’aspect affectif ne se fait donc pas au détriment de l’aspect intellectuel, mais vient le renforcer.
 
En conclusion, malgré son succès l’existence du programme est toujours source de réflexions. Les thèmes choisis et les projets changent d’année en année. Il a de plus commencé à s’étendre en amont et en aval. Il inclut maintenant un programme « junior » (ou préparatoire) entre des élèves de première (dans le cadre de leurs TPE) et une classe de dernière année de français en « high-school » (12th grade), et la possibilité d’un « stage » pour des étudiants ayant poursuivi leurs études après le programme, de préférence en pédagogie/français à PSU, qui pourraient passer le mois de mai à Saint Jean en échange d’une aide ponctuelle apportée à la préparation des oraux de langue pour le bac.
 
Hélène Gresso
Enseignante de français
À Pittsburgh aux USA
(Penn State University - PSU)
 
When I first learnt that our group would perhaps have the opportunity to have American keypals over the Internet and to go to the USA, I wondered if it would interest me and what it could bring. In fact, I had a bad picture of the USA, without really reflecting if it was prejudice or if it was true. I had a lot of stereotypes about the Americans, like many French people I believe. For example, the "chemical" food, the violence, the importance of one's appearance, the business....at all scared me a little.
 
Aurore Saint-Jean de Maurienne



VOYAGE EN FRANCE, par Natalie (US)
 
Après avoir passé près d'un mois avec nos correspondants français , il est devenu très difficile à croire tous les stéréotypes que nous entendons parler du pays et ses gens. Avant de partir pour Spring Break, ma tête a été remplie avec les histoires d'horreur et les rumeurs méchantes de France. "Prend Garde aux Gitans" était la phrase que j'ai entendu tous les jours avant de partir pour France. Ceci vient de prouver le point que les gens ne devoir pas croire tout qu'ils entendent...
...Une leçon simple que j'ai apprise est de jamais dire quelque chose mauvais d'un pays jusqu'à ce que vous visitiez en fait vous-même. Ne juge jamais quelque chose par ce que les autres gens disent. L'expérience que vous recevez en habitant avec une famille est 100 fois plus grande que seulement visiter ou rester dans un hôtel. Je pars un peu d'américain derrière, et dans son endroit a reçu une nouvelle famille.
 
 
 
Génial la France ! Un texte libre de Sean (US)
 
Génial ! C'est le premier mot je pense quand je réfléchis de mon voyage en France et aussi du voyage de nos " Keypals " ici. Avant mon voyage, j'ai pensé des choses comme " Est-ce que les Français m'aimeront ? " , " Est-ce que je me perdrai en France? " , " Est-ce que j'oublierai tous les mots en français ? " et des autres. Mais, quand je suis arrivé en France, j'ai su que tout sera bien ! Ma famille là-bas, les Camets étaient très accueillants, et les Keypals étaient très sympas !

La meilleure chose de mon voyage en France était que je pouvais rester avec une famille française et aller au lycée avec les étudiants, et tellement vivre comme les Français ! Je sais que nous ne pourrions pas trouver un meilleur group d'amis que les Keypals que nous avons rencontré !


Aussi, j'adorais expliquer les mots anglais aux Français (par exemple, pour " naked " j'ai expliqué c'est " sans vêtements ") D'habitude je n'aime pas beaucoup le shopping (j'achète mes choses et puis je pars), mais avec Bobana au centre commercial c'était très amusant ! Je ne savais pas que nous étions au centre commercial pendant trois heures !

Maintenant j'ai des difficultés parce que je ne sais pas quels cours je voudrais prendre pour le semestre prochain. A l'université, le dernier cours que j'ai besoin de prendre est FR112, mais après FR112, je voudrais parler encore avec mes copains français! Donc, peut-être je vais prendre d'autres cours français, parce que j'espère aller en France une autre fois et peut-être en Yougoslavie aussi ! Ce sera chouette si vous pouvez revenir ici aussi !



 
 
 
Adapter l’enseignement de l’anglais
à la pédagogie Freinet.
 
 
Sylvie Chancelier est lectrice d’anglais à l’école ouverte Ange Guépin de Nantes. Elle nous explique comment, partant d’un constat d’insatisfaction générale de l’équipe pédagogique, sur le rôle et la place de l’intervenant en langue dans l’école, un projet d’adaptation de l’enseignement de l’anglais, à une pédagogie axée sur une véritable communication, a pu être mis en place ; lui permettant de se sentir membre à part entière de cette équipe.



 



 
 



Face à l’insatisfaction de l’école ouverte Ange Guépin en ce qui concerne l’enseignement des langues en primaire tel qu’il est traditionnellement pratiqué, nous avons engagé une réflexion sur les méthodes et les moyens que nous pourrions employer afin d’atteindre une meilleure adéquation entre le fonctionnement quotidien de l’école et les quelques heures d’enseignement de l’anglais en cycle 3.
 
La première étape de notre projet a constitué en un recensement des remarques des enseignants sur les expériences antérieures et leurs souhaits pour l’avenir. Dès le départ nous avons également fait participer les enfants en leur demandant ce qu’ils retenaient des séances d’anglais des années précédentes, ce qu’ils aimeraient conserver et ce qu’ils aimeraient changer. Avec ces discussions à deux niveaux, nous avons pu recenser les besoins et les envies de chacun.
 
A partir de ce moment là nous avons pu fixer nos objectifs et réfléchir à une organisation qui permette de les réaliser. Contrairement à ce qui a lieu le plus souvent, nous voulions que l’anglais entre dans la classe, qu’il ne soit plus seulement un apprentissage satellite mais bel et bien un lieu de communication dans lequel la langue vivante est outil.
 
Quand nous avons commencé les séances d’anglais, les enfants étaient déjà dans une position d’acteur de leur apprentissage, ils considéraient déjà l’intervenante extérieure que je suis comme membre d’une équipe pédagogique, ce qui s’est avéré déterminant pour la conduite du projet.
 
Bien que nous ayons déjà pris une direction à ce stade, il fallait mettre les idées en application. Tout d’abord, nous étions d’accord sur le fait que les cours ne se dérouleraient qu’en anglais, cela n’a pas été longtemps une difficulté pour les enfants, ils se sont très vite habitués à un mode de communication qui allie la mimétique, la prosodie et le graphisme au contenu linguistique en soi. Rapidement, aux indices extralinguistiques s’est ajoutée la reconnaissance de certains mots récurrents, les enfants sont alors entrés dans une compréhension de type global.
 
A cette étape du projet, les séances n’incluaient aucune trace écrite, les enfants n’avaient pas de cahier. Dans un premier temps cela n’a pas posé de problème, les enfants ne semblaient pas associer l’absence de trace écrite à l’absence d’apprentissage, ce qui est un raccourci fréquent.
 
Tout en ayant posé ces premiers principes, nous avons appliqué l’idée conductrice du projet à savoir l’encrage de l’anglais dans la vie de classe. Pour cela nous avons décidé qu’une période de «  bonjour » ou «  quoi de neuf  ? » aurait lieu en anglais chaque semaine, cela représente ½ heure par classe. Concrètement cela s’est traduit par la reprise des expressions de l’enfant-animateur par l’intervenant, en anglais. Petit à petit l’enfant animateur s’exprimait directement en anglais, il appelait au silence ou encore à la présentation du livre de vie. Les phrases qui au début faisaient écho ont vite été retenues par les apprenants.
 
Ces moments se déroulent en classe entière, CE2, CM1 et CM2 y assistent indifféremment. En règle générale, la séance se déroulait par une prise de parole de ma part, je présentais alors un document authentique lié au monde anglophone, toujours en anglais, et en tachant de faire participer la classe.
 
Ce fonctionnement a pu être suivi jusqu’aux vacances de Noël, puis à la rentrée de janvier nous avons ressenti un statu quo, les enfants animateurs connaissaient la ritournelle, le nombre de phrases à mémoriser étant limité, l’activité n’évoluait plus. A ce moment là nous avons donc fait un bilan mobilisant à nouveau les trois acteurs du projets : apprenants, enseignants, lectrice.
 
Les enfants ont alors exprimé le désir d’avoir un cahier d’anglais, nous avons également décidé de ne plus reprendre seulement les expressions de l’animateur du bonjour, mais aussi les interventions de la classe. Nous avons donc commencé à exploiter au pied levé les remarques des enfants, toujours en contexte, en les reprenant en anglais. Cela avait lieu à l’oral dans un premier temps, et était suivi d’une manipulation de la part des enfants. Ensuite, une ou deux phrases de résumé étaient écrites au tableau.
 
Il est important de rappeler ici notre souci d’inclure autant que possible les mots nouveaux dans des phrases syntaxiques. Nous sommes conscients du fait que les enfants ne retiendront pas ces phrases dans leur intégralité mais nous soulignons l’importance de percevoir la langue comme une suite de mots et non pas en tant qu’entités isolées. Ce nouveau fonctionnement nous a semblé plutôt satisfaisant.
 
Le deuxième moment en anglais dans la semaine se passe en dehors de la classe. Les CM1 et les CM2 sont alors réunis entre eux, pour ¾ d’heures d’anglais chacun. Ces ¾ d’heures respectent les principes de départ, nous voulions a priori que ces moment isolés servent directement l’expression en anglais dans la classe, mais cela n’a pas été clairement vérifié.
 
Finalement, il s’est agi le plus souvent de jeux participatifs basés sur la collecte d’informations authentiques. On a pu également apprendre et présenter une comptine, produire de nouveaux vers sur le même modèle.
 
Nous avons suivi trois projets internes, le premier sur les mots de l’anglais que les enfants connaissent déjà, le deuxième sur les pays anglophones et les stéréotypes qui leur sont associés et en fin d’année un projet de jeu de l’oie géant en anglais, préparé sur plusieurs semaines.
 
Pour conclure, si l’on peut retenir un élément fondamental de notre fonctionnement c’est celui de la participation collective, l’anglais y est pris en compte dans un cadre communicatif actif, il est source de curiosité et d’ouverture, il ne se limite pas à un rôle d’instrument.
 
Sylvie Chancelier, lectrice d’anglais à l’école ouverte Ange Guépin de Nantes









 



 
 
 
 
Correspondre dans une langue étrangère
 



Christine Saindon, institutrice à Cliponville (cycle III) a mis en place une correspondance en anglais avec des école du Japon et de Pologne. Spécificité de cette correspondance, elle nécessite l’utilisation d’une langue étrangère pour les trois classes.
 
Cette année, nous avons correspondu occasionnellement avec quatre classes de notre circonscription pour les besoins d’un défi lecture, il s’agissait là de correspondance fonctionnelle. Une correspondance régulière en français avec la Roumanie s’est également mise en place, très importante pour découvrir le goût de la liberté dans l’écriture que les élèves ont exprimé par comparaison avec la correspondance en langue étrangère. Pas toutes aussi contraignantes les unes que les autres, ces différentes correspondances se sont complétées et enrichies.
 
Nous n’avons pas eu plus d’un échange par mois avec le Japon, avec un décalage dans les calendriers scolaires qui réduit la période commune de septembre à mars. Ceci a été compensé par le nombre de correspondances mises en place dans la classe, on avait toujours un mail, une lettre, un fax à envoyer quelque part pour des raisons différentes.
 
Certains élèves avaient deux, voire trois correspondants à qui ils pouvaient écrire la même chose ou pas, c’était suivant les moyens et les envies de chacun.
Nous avons varié les envois pour créer la surprise : le collectif alternant ou jumelé avec l’individuel, les jeux, les cassettes vidéos ou sonores. Les films échangés avec le Japon nous ont permis de mieux mesurer la différence entre nos écoles.
 
Correspondance et apprentissage de l’anglais : un exemple
 
Nous nous sommes présentés collectivement sous forme de jeu. Nous avions collé nos photos sur une affiche, chacune portait une lettre et nos noms étaient écrits derrière un chiffre. Les correspondants devaient retrouver qui est qui.
 
Au cours de l’élaboration de ce jeu, les enfants ont pu :
-réinvestir les noms des couleurs et des vêtements qu’ils avaient appris l’année précédente ;
-demander des éléments de description visibles sur les photos comme pull-over à rayures (striped sweater) ou queue de cheval (pony tail) ;
-nous avons aussi senti le besoin d’un vocabulaire plus étendu pour décrire le nez, les cheveux… les photos étaient des bustes en couleur.
 
Ainsi les uns profitent des connaissances, de la curiosité, de la hardiesse des autres, de l’humour aussi. Nous avons donc révisé les couleurs et appris d’autres mots parce que nous en avions besoin.
 
Travail d’imprégnation
 
Dans la semaine les élèves ont travaillé par deux pour décrire quelqu’un, nous avons passé en revue les personnes de la classe, mais aussi, celles connues de tous, comme le Maire ou la sœur de… ou le père de… Chaque équipe lisait sa description et nous avons alors été très attentifs aux « he » et « she » qui donnent dès le départ une grosse indication; Tous les élèves, par imitation ont placé l’adjectif au bon endroit.
 
De ce jeu, d’autres sont nés, par équipe ou individuellement suivant les envies, les élèves présentaient une devinette ou un animal. D’où révision des couleurs (encore), des formes et acquisition de vocabulaire : « four legs, two wings, a tail… ». Donc écriture, lecture, écoute attentive. Certaines devinettes ont fait partie d’envois collectifs ou individuels.
 
Organisation pour une lettre collective
 
Nous commençons par la relecture de la lettre reçue, traduction sommaire pas de mot à mot, mais l’idée générale : « ils demandent si on fait des voyages à l’école. » Puis nous mettons en commun en français les idées pour les différents paragraphes possibles de la réponse et nous partageons le travail entre les différents groupes. Chaque groupe travaille avec nos outils : dictionnaire visuel fait maison, cahiers, répertoires individuels, dictionnaires français-anglais. Je fais le tour des groupes. La règle est de penser que pour les autres enfants aussi, l’anglais est une langue étrangère et donc de limiter les difficultés.
 
Au cours d’une lettre où nous présentions notre village, nos avons eu l’idée de joindre un dictionnaire visuel pour donner de l’autonomie aux lecteurs. Des enfants ont écrit le texte pendant que d’autres illustraient les différents lieux et commerces du village, le tout en double, car nous avons gardé ce double pour notre apprentissage personnel.
 
J’ai également proposé des techniques de lettres pour non lisant, apprises en maternelle, qui incluent des illustrations dans la phrase ou autour du texte. Par exemple, pour la phrase « Dimanche, je suis allée à la mer avec papa, on a ramassé des crabes », les mots « seaside » et « crab » seront illustrés. D’une part ouvrir un dictionnaire pour chaque mot devient vite fastidieux, d’autre spart nous apprécions de savoir rapidement de quoi parle la lettre pour aller, après, plus en détail, surtout quand nous voudrons reprendre une tournure de phrase dans une de nos propres lettres. De plus les illustrations sont très intéressantes quand on cherche un mot qu’on pense avoir déjà rencontré : « Oui je sais, c’est dans la lettre de Noël ».
 
On écrit tout ce qu’on sait d’une façon ou d’une autre, on laisse un blanc là où on ne sait pas.
 
Le texte complet est écrit au tableau et pour gagner du temps, je fais un calque au rétroprojecteur.
 
Ceux qui n’ont pas écrit, essaient de retrouver ce qu’ils connaissent et découvrent par le sens ce qui est nouveau. Les autres groupes complètent, puis je donne le reste, je ne demande pas d’inventer ni de retenir tout.
 
Dans notre répertoire, on écrit deux ou trois mots nouveaux du vocabulaire courant ou facile, il n’y a pas de français dans le répertoire ou très momentanément, au crayon de papier, jusqu’à ce qu’on le sache.
 
Dans notre cahier d’anglais, on écrit la ou les nouvelles tournures sélectionnées par moi comme risquant d’être utile.
 
Organisation pour une lettre individuelle
 
Quand on n’est pas pressé, chacun relit sa dernière lettre, on met en commun des idées de sujets à aborder, j’écris au fur et à mesure au tableau dans les deux langues. Chaque élève a un cahier de brouillon de textes , chacun écrit sa lettre en laissant des blancs comme dans la lettre collective et en sautant une ligne. On s’inscrit au tableau quand on est prêt pour la correction ou pour une demande, je donne les mots manquants sur le répertoire et chacun constitue ainsi une réserve de mots qui lui est propre. Très vite j’ai l’aide de ceux qui ont fini et qui veulent bien aider.
La lettre est recopiée et on envoie quelque chose de propre et bien écrit; C’est déjà difficile de lire en anglais, si en plus c’est mal écrit…
La dernière mouture est photocopiée pour le cahier de correspondance, comme ça on a la lettre et la réponse en face.
 
Quand on est pressé… juste avant les vacances, par exemple, nous nous mettons d’accord sur un sujet (les cadeaux de Noël ou les inondations en Normandie…), je mets tout le vocabulaire demandé au tableau, quelques tournures de phrases, les plus avancés se rendant compte qu’il y a intérêt à demander un groupe de mot plutôt qu’un mot isolé, ça fait aussi partie des découvertes importantes que la collectivisation du travail met en évidence. Comme le sujet est commun quoique traité individuellement, on va plus vite, je passe dans les rangs et si je rencontre souvent la même phrase à corriger, je l’écris pour tous. On recopie, on photocopie, on envoie, on colle dans le cahier.
 
Un apprentissage de la langue inspiré de la méthode naturelle de lecture
 
J’ai été institutrice de Grande Section, CP et CE1 pendant dix ans, j’ai réinvesti toutes les connaissances alors accumulées pour l’enseignement de l’anglais dans ma classe. Nous écrivons des lettres, mais aussi des textes libres, des histoires, des sketches que bien sûr nous envoyons aux correspondants, mais que nous jouons aussi pour les frères et sœurs de regroupement ou les parents.
 
L’obligation de se décentrer se retrouve au cours de plusieurs moments : dans le choix des termes, dans le choix des sujets, des questions. Les enfants sont amenés à se regarder vivre, à regarder leur paysage, la France en général pour se raconter, pour raconter leur pays, les habitudes de leurs congénères. Souvent ils se mettent à la place des correspondants pour évaluer leur propre travail « Est-ce que ce que j’envoie est correct, est-ce que je serais content de recevoir cette lettre ? »
 
Former de futurs citoyens responsables
 
L’éducation à la paix ne peut se faire que par la connaissance de l’autre. Connaître des gens de tous horizons, c’est les apprivoiser, c’est maîtriser sa peur des inconnus. Donner aux enfants la parole, un pouvoir de décision et le goût d’aller à la rencontre des autres, est une nécessité première si on veut former des futurs citoyens responsables.
 
Christine Saindon
Ecole de Cliponville 76
christine.saindon[arobase]wanadoo.fr
 



 
 
 



Dans la classe, il y a une chemise par classe de correspondants, dans cette chemise, les élèves peuvent trouver une carte routière du pays concerné, l’adresse de l’école ou même des enveloppes toutes prêtes, rédigées par un rapide ou par moi, les photocopies des envois collectifs, si j’y ai pensé et si ce n’était pas trop grand. Sur un des volets de la chemise, je tiens le mieux possible, la liste des envois, ça évite les redites et ça donne une idée réelle du rythme des échanges.
 
Un des murs de la classe est consacré aux correspondants. On y affiche les lettres collectives les photos, les exposés des élèves.



 



 



" Histoire de lire "
en anglais, en allemand, en espagnol et en espéranto



 



Les Editions Odilon publient des livres pour enfants, des outils de travail individualisé, des documents, et plus généralement tout outil permettant de pratiquer une pédagogie adaptée aux besoins de chaque élève. Ces outils sont régulièrement repris et améliorés, en intégrant les remarques et critiques des utilisateurs.
 
Parmi ces outils, les livrets « Histoire de lire », d’abord publiés en français et s’adressant à des enfants grands débutants en lecture, ont été traduits et permettent, dans le cadre de l’initiation aux langues étrangères, de confronter les enfants à l’écrit. Chaque livret de ces deux séries n'a que 8 pages, et chaque page ne comporte qu'une courte phrase avec des mots simples, sous une illustration " qui parle ".
 
 
Dans les classes où on pratique l'initiation à une langue étrangère, on a longtemps considéré que seule l'utilisation de l'oral était envisageable, et que l'écrit devait impérativement être banni.
 
Les idées ont évolué, on s'est aperçu que bien sûr c'étaient l'éducation de l'oreille et la conversation qui étaient à privilégier, mais qu'il était très intéressant aussi de se confronter à l'écrit. Les enfants se rendent bien compte de l'intérêt qu'il y a à appréhender le sens d'un texte écrit dans une langue étrangère, sans l'oraliser, sans le traduire, et peuvent faire des remarques pertinentes sur sa forme, voire même sa grammaire.
 
Par leur forme et leur contenu, les livrets " Histoire de lire " se prêtent bien à un premier contact avec l'aspect écrit d'une langue étrangère.
 
En liaison avec des collègues étrangers (par exemple le MCEP, pour la version en espagnol), nous avons réalisé différentes versions (quatre, à ce jour : Stories to read,Geschichten zum Lesen, Historias para leer, Rakontoj.
 
Les collègues qui ont testé les premières éditions de ces livrets ont fait les remarques suivantes :
-Les textes sont courts et attrayants, servis par des images drôles et originales.
- Ils donnent une approche ludique de la langue, l'entrée par l'humour est positive.
-Ils apportent " visuellement " des tournures simples, qui se répètent.
-Les enfants sont autonomes, ils décodent pratiquement tout.
-Les livrets peuvent permettre au maître de raconter une histoire dans la langue étudiée.
-Ils sont incitateurs, soit pour être prolongés, soit pour en créer d'autres.
 
Utilisation en classe
 
La plupart du temps, les livrets sont en libre accès au coin-lecture ou à la bibliothèque. Les enfants les lisent, seuls ou en petit groupe, avec un recours occasionnel à l'adulte (ou à un autre enfant ayant déjà lu le livret). Quelquefois, en cas de blocage sur un mot ou une expression, ils cherchent dans le lexique joint. Quand la classe est équipée d'un coin-audio, les enfants préfèrent souvent écouter le texte du livret en le lisant.
 
Et l'oral ?
 
S'il y avait une certaine méfiance vis à vis de la mise en contact avec l'écrit, c'est surtout à cause du risque de " lecture " avec les règles orales de la langue maternelle.
 
Nous avons donc réalisé des CD reprenant les textes des différents livrets. Les enfants peuvent ainsi, avec un simple lecteur laser comme en sont équipées la plupart des classes, entendre (avec un " bon " accent) les textes des histoires qu'ils ont sous les yeux.
 
Le problème de la traduction
 
Il n'est pas utile d'avoir dans la classe la version des mêmes histoires en français. C'est plutôt à éviter, afin que les enfants ne soient pas tentés, pour comprendre, de passer par la traduction.
 
Par contre, avoir dans le coin bibliothèque plusieurs versions dans des langues différentes peut amener à des comparaisons intéressantes sur les mots, la formulation des phrases, la facilité de compréhension. Par exemple, on remarquera que dans certaines langues, on emploie la forme correspondant à " J'ai faim " et dans d'autres celle qui correspond à " Je suis affamé "
 
Et le lexique ?
 
Il nous a été déconseillé d'inclure dans chaque livret une page-lexique donnant la traduction des mots qui y figurent, pour éviter la lecture-traduction. Par contre, nous avons fournissons un lexique complet qui reprend l'ensemble des mots et expressions utilisés dans les livrets, mais employés dans d'autres phrases ou tournures, en changeant le genre ou le nombre des noms, le temps des verbes, ceci afin que les enfants n'aient pas directement la traduction, mais doivent faire un minimum de réflexion linguistique.
** ll existe aussi des cahiers d'exercices individuels proposant des exercices très simples, à partir du texte de chaque livret, qui permettent aux enfants d'avoir une activité autonome dès le début de leur apprentissage.
 
Contact :
Site www.odilon.fr.st.
ou Éditions Odilon
8, rue de Bruneau
Les Chollets – 89100 NAILLY   Tél : 03.86.97.09.82



 

 

Annexe

 
SEMAINE 3: DIVERSITES ET DIFFERENCES
 
Lundi 10 septembre
Rendre les « cartes mentales »
(sur le site web)
NM 1 avec nos correspondants: se présenter, présenter sa classe, son environnement
Poser des questions et avoir une conversation pour obtenir des informations sur son corres’ et sur la classe de son corres’
Mardi 11 septembre
MP 32-34, 38-45
Lettre 2 à son corres’ (KP)
 
Les pronoms relatifs
Mercredi 12 septembre
Lecture
Essai : Les TL en général et mon corres’ en particulier
Tchat « un collage français ?» 
Jeudi 13 septembre
Lire les réponses des TL et les classer (amener votre classification en classe)
 
 
Comparer avec les réponses de notre classe
 
SEMAINE 4: DIFFERENCES CULTURELLES
 
Lundi 17 septembre
Lire: les réponses de nos corres’
Préparer 10 questions à partir de (based on) la discussion de jeudi
 
NM2 Discussion de nos réponses
 Des différences culturelles?
Mardi 18 septembre
Lire: MP: 14-15, MC 13
KP 3
Quiz 3: La description (synthèse)
 
Mercredi 19 septembre
Lecture
 
Synthèse: Différences Culturelles
Essai (par 2) : analyser 1-2 thèmes du questionnaire
 
Jeudi 20 septembre
Journal 3
Enquête: Interviewer 5 personnes pour obtenir leurs idées sur la France ; les hommes français ; les femmes françaises.
 
 
 
L’image de la France aux Etats Unis