CréAtions N° 116 - Bestiaire - mars-avril 2005

Mars 2005

 

 


CréAtions N° 116 -Bestiaire

  mars/avril 2005

Ont participé à l’élaboration de ce numéro : Jacqueline BENAIS ; Nicole BIZIEAU ; Simone CIXOUS ; Agnès JOYEUX ; Maud LECHOPIER ; Danielle MALTRET ; Hervé NUNEZ ; Jeannette ROUDIER

Photographies : Christian BIZIEAU ; Mikaël COUPECHOUX ; Annie DALMAIS ; Katina IEREMIADIS ; Catherine FOUCHER-BACHELART ; Hervé NUNEZ ; Edith PAULET ; Isabelle STROH ; Dominique TIBERI ; Nathalie VANLAER.


 
Titre et chapeau
Niveau classe
thème
Techniques utilisées
artiste

"Chacun cherche son chat"

  Edito    

Histoire mise en boîtes maternelle: PS-MS
Mise en images et en espace d une histoire écriture, volume, collages  
 Mayollet park élémentaire: CP-CE
Sculptures et identités pour des animaux "bizarres" dessin, écriture,  béton cellulaire, sculpture,
bas-relief
exposition de Jean Fontaine
 

Une pratique, un outil:

du figuratif à l’abstrait

enfants, adultes
proposée par Nicole Bizieau, conseillère pédagogique en Arts Plastiques dessin, collage,
peinture
 

 

Traces en image, trace en relief

maternelle: PS

élémentaire:CP-CE1

De la mare jusqu'au mur,  le bas-relief des grenouilles peinture, empreintes, dessin, terre, bas-relief
Ariette et Marc Simon, céramistes

 

 Portraits transformés maternelle : GS Un prolongement à d'autres investissements
feutres, écriture  
Une carapace comme maison maternelle : cycle 1 Qui n'a jamais rêvé de se réfugier dans la carapace d'une tortue? graphisme, craie, encre, photocopie
 
 

 

 Les lions maternelle: GS
D'une chanson naissent des images de la savane  dessin  
  Le livre-tortue
 
 Un artiste     Claire Cour

 

 Carte blanche à
Ecole  primaire Rameau de Villeneuve d'Ascq Un jour, nous avons fermé les yeux et nous avons rêvé... peinture, dessin
 

 

 Le chat de Louise Élémentaire La classe Freinet est ouverte sur l'extérieur pour partager les connaissances
dessin
 

 

Petit théâtre de poche  Collège Le "kamishibaï" permet aux disciplines scolaires de se rencontrer autour de "l'image" écriture de contes, estampe, pastels gras
 

 

Nathalie Charmot, l’œuvre au travail   Déambulation poétique   Nathalie Charmot, plasticienne
Carnet de bord de Dominique 4 élémentaire: CM
Rencontrer une artiste écriture, photographie
collage, peinture
Pascale Delarge

Le bestiaire d’écrivol Groupe Freinet de l’Aisne Un lâcher de ballons-poèmes pour diffuser le créations poétiques des jeunes 

écriture poétique

 

L’idée de “ centre ”
 
collège La ville, comme un plan, vue d'avion performance, photographie  

Bibliographie        

 

 

Edito Créations 116 Bestiaire

Mai 2006

CréAtions n° 116 - Bestiaire - mars/avril 2005


Edito

« Chacun cherche son chat » (1)

 

Déjà la pratique chamanique, le totémisme tentaient de situer le rapport entre l’homme et l’animal comme désir de s’identifier à lui, à sa force, à sa ruse, d’obtenir sa protection. A cette époque là, sur la paroi des grottes, l’animal est bien plus représenté que l’homme. Le terme de bestiaire désignant le gladiateur qui combattait les animaux dans l’arène à l’époque romaine s’inscrira cependant comme rapport violent entre l’homme et l’animal. Bestiaire a désigné plus tard un recueil dans lequel on rapportait tout le savoir sur l’animal qu’il soit réel ou légendaire.

Ainsi dans différents domaines artistiques, littéraire, musical, pictural, le bestiaire a toujours été une source fabuleuse de production symbolique, mythique, qui permet à l’être humain d’exprimer ses fantasmes, ses craintes, ses désirs et de laisser libre cours à une expression où il s’agit souvent de confronter l’humanité à l’animalité.

La mythologie n’est-elle pas une grande source de translations, d’analogies entre le genre humain et animal ? Qu’ils soient réels ou imaginaires comme les griffons, chimères, ogres, sirènes, centaures… les animaux sont des référents familiers aux auteurs tels que La Fontaine, Saint-Saëns, Picasso, Pompon, Barye, Daumier, Flanagan, Walt Disney.. Ce faisant, ceux-ci interrogent les tabous de la société, car ils n’ont pas peur du diable.

Les enfants sont très liés affectivement aux animaux et ils les représentent volontiers. Le personnage favori dans les textes d’enfants est un animal, l’ami, le confident, un double de lui-même. Il permet l’expression d’émotions que le récit médiatise et met à distance comme le chien Maigre dans le récit L’amour remède de tous les mots. Dans l’image, le moindre indice leur permet de reconnaître ou de signifier un animal parmi les lignes ou les taches aléatoires comme dans « Le petit théâtre de poche ». Les animaux qui leur en imposent tels le lion, animal mythique, prennent une grande place ainsi que les animaux fantastiques auxquels les enfants donnent un peu de leur identité, de leur comportement. Il en est ainsi dans Mayollet Park, une fiction qui se réfère tant à une culture cinématographique animalière, qu’à des appuis scientifiques, cabinets de curiosité, sans jamais créer des animaux objets que l’on mutile ou que l’on casse comme de vulgaires jouets.

L’élément déclencheur peut être une réalité comme la mare de « traces en image, traces en relief », une œuvre tel « le chat de Louise », un poème dans « les lions », une histoire, celle d’« histoire mise en boite », un rapport identificateur fort comme dans « une carapace comme maison », un imaginaire païen chez Nathalie Charmot, l’identité même dans « portraits transformés » qui tiennent de la recherche de son image, mi ange, mi démon, belle ou bête.

On peut regretter les obstacles manifestés contre la présence d’animaux dans les classes (sanitaires, sécuritaires), car un animal à soi, à la maison, ou confié aux soins des enfants dans la classe, est accès au monde extérieur, présence apaisante, recours toujours efficace contre les tensions et les angoisses et apprentissage irremplaçable du rapport à l’autre.


(1) d’après le film de Cédric Klapisch (1996)

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Histoire mise en boîtes

Mai 2006

CréAtions n° 116 - Bestiaire - mars/avril 2005


Classe Maternelle PS-MS. Ecole maternelle de l’Aubette, Magny en Vexin (Val d’Oise) – Enseignante, Agnès Joyeux

 

Histoire mise en boîtes

 


Le point de départ des enseignantes
Un projet d’écriture d’albums interactifs regroupe cinq classes de deux écoles. Les règles du jeu sont fixées par les enseignantes qui proposent à leur classe d’inventer une histoire et de la mettre en “ images ” sous la forme d’une mise en scène dans une boîte. L’ordre des classes est fixé ; il y aura deux passages dans chaque classe. Chaque semaine, on fait passer les boîtes et l’histoire continue… Elles décident aussi d’un type de boîtes à chaussures, pour que les boîtes soient empilables et puissent être présentées en pyramides. On verra que les enfants en décideront autrement.


Toutes les classes participent
L’aventure démarre dans ma classe de tout-petits petits. Les enfants expriment le besoin d’un personnage principal : l’héroïne sera une petite lapine en peluche du dortoir qu’ils baptisent “ Jessica ”. Mais le jouet est trop grand pour la boîte dont nous disposons. Il faut en faire une représentation. Ensemble, les enfants décident de reconstituer l’école, point de départ des aventures de Jessica. Ils listent ce qui est nécessaire ; ils me dictent un texte que je note sur un cahier joint à la boîte. A l’occasion d’un atelier, un petit groupe, aidé de l’ATSEM réalise la boîte.
La classe des moyens-grands (MG) qui nous suit proteste contre le cahier joint à lire. Je modifie donc la boîte et recopie le texte à l’intérieur de la porte de l’école réalisée dans le couvercle de la boîte.
Plus tard, des enfants du cours préparatoire de la quatrième classe nous reprocheront de ne pas avoir décoré l’extérieur de la boite, nous le ferons donc lors du passage suivant des boîtes dans notre classe.
Les moyens grands chargés de la boîte N° 2 emmènent Jessica le long de l’Aubette, rivière qui longe l’école. Jessica s’envole avec un canard.
Les enfants de la classe suivante (encore des MG) la feront atterrir en Afrique où elle rencontre animaux et musiciens …
C’est sur le dos d’une fourmi géante qu’elle en repartira pour aller jusqu’en Ecosse à la rencontre de Nessie, le fameux monstre du Loch Ness, qui est une femelle comme chacun sait. Mais Nessie est bien trop grosse pour entrer dans une boîte : elle déborde de la tête – coiffée d’un chapeau écossais - des ailes, et de la queue !
Tous les textes sont désormais intégrés dans la mise en scène de la boîte : sous le pont de l’Aubette, sur la langue de Nessie, etc.
La présentation pyramidale des boîtes n’est plus qu’un désir caduc des enseignants. Les enfants lui ont préféré une exposition linéaire, plus proche de celle d’un livre accordéon par exemple et qui permet plus de liberté aux mises en scènes.


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histoire, écriture, volume, collage

 

"Mayollet Parc"

Mai 2006

 

CréAtions n° 116 - Bestiaire -  mars-avril 2005

Ecole du Mayollet à Roanne (Loire) - Classe de CP-CE - Enseignant : Christian Bizieau

 

 « Mayollet Park »

 

Sculptures et identités pour des animaux « bizarres »

«En 2050, il n'y avait plus d'élève à l'école du Mayollet, ni dans aucune autre école, parce que l'école était supprimée et que les enfants apprenaient tout à la maison sur leur poste de télévision. Un homme habitait dans l'école du Mayollet. C'était un monsieur qui avait beaucoup lu, tous les livres qui existent dans le monde, et qui avait beaucoup étudié. Il était donc devenu très savant.
Il avait transformé toutes les classes en laboratoire et faisait toutes sortes d'expériences sur les animaux.
Car il n'aimait pas les animaux et était devenu complètement fou.
Pendant des années, il découpa les bêtes en morceaux et essaya de les coudre ensemble pour créer de nouvelles espèces.
Ce savant fou était donc le maître d'un étrange zoo qu'on appelait Mayollet Parc ».

 


Tout est parti d’une visite au musée


Lors de la visite de l'exposition des œuvres de Jean Fontaine, «Zoofolie», au musée des Beaux Arts de Roanne, les enfants ont croqué des œuvres de l'artiste.
De retour en classe, ils ont eu envie de créer, à leur tour, des animaux extraordinaires : «Nous aussi, on va faire des sculptures!».



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béton cellulaire, sculpture, bas-relief,  Jean Fontaine

Une Pratique, un Outil : du figuratif à l'abstrait

Mars 2005

 

CréAtions n° 116 "Bestiaire"
publié en mars-avril 2005

Un outil proposé par Nicole Bizieau, conseillère pédagogique en Arts Plastiques

 


Du figuratif à l’abstrait

Les mécanismes de l’art abstrait sont basés sur la composition, le jeu des couleurs et des formes entre elles. Les artistes abstraits développent et inventent un univers qui leur est propre. Leur démarche est singulière. Certains d’entre eux partent de la réalité, la déstructurent et en proposent une nouvelle interprétation, qui n’est pas évocatrice au premier regard. Ce serait restrictif de penser que la démarche proposée ci-dessous est celle des artistes abstraits, qui ont leurs propres chemins techniques. Ceci n’est qu’une proposition pédagogique pour faciliter la compréhension des enjeux de l’art abstrait par les enfants.
Cette proposition est de l’ordre de l’expérience tâtonnée, de la recherche.


Sensibilisation
Proposer des représentations abstraites et figuratives des deux genres et les faire titrer. Le s titres seront proches dans le cas du figuratif et fort variés dans le cas de l’abstrait. Pourquoi ?
Organiser un débat qui permettre de clarifier.



 


Démarche

Prendre une image (photo ou page de magazine ou…) très représentative, dans laquelle chacun reconnaît le même sujet. 

- La reproduire sur papier calque selon une consigne : tracer les lignes contours, qui délimitent les surfaces définies par les zones reconnaissables et nommables telles que zone d’arbres, champs, personnages, ciel, terre, eau… On obtient des zones blocs, des masses.
- Découper les différentes zones et les reporter sur des matériaux variés : papiers de couleurs différentes, de textures différentes…
- Découper ces nouvelles formes ;
- Recomposer l’image d’origine comme un puzzle.
On obtient une nouvelle image moins figurative que la première mais qui représente malgré tout le même sujet.

On peut faire varier les matériaux découpés :
- jouer sur la variable couleur : celles qui rappellent l’image d’origine, libre choix, camaïeu, noir gris blanc, papier coloré issu de magazines, ou imprimé d‘écriture de divers aspects;
- jouer sur la variable forme, masses obtenues par leur interprétation : en les arrondissant, en les étirant dans le sens horizontal, vertical…


Selon les sensations obtenues par les différents effets produits, les enfants comprennent l’importance des choix.

La quantité infinie d’expériences créatives enrichit la perception artistique de l’enfant et nourrit sa créativité.

Prolongement

La réalisation issue de ces recherches peut devenir modèle pour une production plastique de deuxième génération, ou simple source, en sélectionnant une zone qui plaît plus particulièrement (avec une fenêtre). La production obtenue n’aura pas moins pour origine le même sujet que l’image initiale, source de représentation et pourra en porter le même titre.
L’expérimentation permet aux enfants de comprendre qu’on peut traduire une même idée, une même image par l’utilisation de couleurs, de formes, de lignes non figuratives, qu’on dispose d’une richesse infinie des possibles, et qu’on offre la liberté au regardeur qui pourra à son tour interpréter, exprimer SON impression singulière.

 

Rubrique Une pratique, un outil 
sommaire CréAtions 116 

dessin,  collage, peinture 

 

Traces en images, traces en relief

Mai 2006

CréAtions n° 116 - Bestiaire - mars-avril 2005

Ecole maternelle de Ouches (Loire) - classes de PS, C.P-CE1 - Enseignantes: Annie Dalmais, Edith Paulet - Intervenants : Arlette et Marc Simon, céramistes

Traces en images, traces en relief


De la mare jusqu’au mur,  le bas relief des grenouilles

 

L’homme a toujours laissé sa trace.
C’est de ce constat que nous sommes parties pour ce projet de classe à PAC : “chaque enfant laissera sa trace dans l’école”.
Les enfants recherchent d’abord ce qui fait trace :
- avec leur corps : mains, doigts ;
- avec des outils : empreintes d’objets divers, d’objets détournés de leur fonction première ;
- avec des outils scripteurs «ordinaires» sur différents supports : papier, mais aussi sol de la cour, plateaux recouverts de sucre, de farine et de sable, et encore pâte à modeler, pâte à sel.
Puis, pour affiner leurs gestes, ils utilisent feutres, plumes, stylos, sur pâte à modeler, papier ; ils observent différents motifs de tissus, poteries, tapis, mais aussi leurs productions pour y repérer les éléments graphiques, et les isoler par un système de cadre pour les reproduire par répétition, alternance…

 

 

 

« Sur des plaques de terre, nous faisons des empreintes à l’aide de petits bouts de rideaux. Le petit rouleau nous permet d’appuyer sur les motifs pour qu’ils apparaissent mieux sur la plaque. »

Traces dans le sable mouillé avec un bâton :

       


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peinture, empreintes, céramiques, terre, bas-relief

 

Portraits transformés

Mai 2006

CréAtions n° 116 - Bestiaire -  mars-avril 2005

Ecole maternelle l’Arrousaire, Classes de GS - Avignon (Vaucluse) - Enseignante Sylvie Neuvière

Portraits transformés

 

Un prolongement à d’autres investissements


Ce projet fait suite à un travail sur le portrait mené aussi bien en expression artistique qu’en langage oral. Il a eu lieu au moment du carnaval et parallèlement à un échange avec les enfants du CP : les élèves de grande section avaient inventé des devinettes en fonction du déguisement qu’ils porteraient le jour du défilé ; les enfants du CP devaient les reconnaître grâce à la description et au dessin associé.

 

Nous avions travaillé l’autoportrait en peinture en nous regardant dans des miroirs, en analysant différentes œuvres de peintres figuratifs, d’autres recherches avaient été menées faisant appel à l’imaginaire, un travail avait été réalisé à partir des photos des enfants photocopiées et colorées à l’encre, en s’inspirant de la technique d’Andy Warhol.
Sur le mi-temps de ma collègue, les enfants avaient travaillé le portrait en langage verbal : élaboration collective des portraits de différents animaux, portraits dont les descriptions ont été reportées dans le « cahier de vie » de la classe (cahier qu’un enfant emporte tous les soirs chez lui).

 

Je m’appelle Abdellah. Je suis grand, j’ai cinq ans. J’ai les cheveux bruns et les yeux marron.
Je suis bavard mais un bon garçon. Je vais aller bientôt au C.P. J’adore faire du cheval, de la plongée, du ski et du grand toboggan et j’aime aussi aller au parc.

 

Je m’appelle Juliette.
Je suis gentille, très intelligente et belle. J’ai les yeux gris bleus et les cheveux châtain clair longs.
Je mange bien, j’aime bien aller à l’école et j’aime beaucoup les chats gris
.


Autoportrait


En se servant de ces portraits comme point de départ du travail oral nous avons défini ce qui est apparu essentiel aux enfants pour se présenter : prénom, âge, caractéristiques physiques, quelques traits essentiels du caractère et des goûts.
Chaque enfant s’est défini en respectant les critères élaborés ensemble et a dicté son texte à la maîtresse. Le texte a été caché sous un petit bout de cartoline portant la mention « qui suis-je ? » placé sous la photo de chaque enfant.
Puis un travail graphique a été effectué à partir de la photo sur du papier calque : nous avions choisi de transformer les portraits photographiques soit en personnages qui font peur, soit en personnages qui font rire. En quelques mots, les enfants ont présenté leur nouveau personnage, face à leur photo transformée, ils ont écrit en cursive le nom du nouveau personnage et ont décoré leur « nom de métamorphose ».
Tout a été regroupé dans un cahier laissé à la disposition des enfants de la classe.

 

 


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 Portrait

 

Une carapace comme maison

Mai 2006

CréAtions n° 116 - Bestiaire - mars-avril 2005

Classe de cycle 1, Ecole Maternelle, Saint-Maurice-en-Trièves (Isère)
Enseignante : Katina Iérémiadis


Une carapace comme maison

 

Qui n’a jamais rêvé de se réfugier dans la carapace d’une tortue?

Trois tortues tropicales ont passé les mois d’hiver dans notre salle de classe. Les enfants les ont soignées, observées. Un jour, un de nos cochons d’Inde est même tombé dans la baignoire où elles vivaient! Les tortues sont devenues nos animaux familiers.
Au cours de nos observations, l’attention s’est très vite portée sur leur carapace couverte d’écailles particulières, aux formes géométriques et symétriques. Nous avons cherché dans la bibliothèque des photos et des illustrations du thème de la tortue. 

Nous avons reproduit ses écailles, et aussitôt, les enfants se sont laissé inspirer et ont commencé à inventer des carapaces aux graphismes et aux couleurs variés.

Plusieurs ateliers d’exploration ont vu le jour :


- exploration graphique collective : inventer des graphismes de carapace.


- présentation et mise en commun des trouvailles de chacun, avec une compilation distribuée à tous. Les enfants se sont approprié cette compilation en coloriant généreusement les carapaces.

- transposition de leur idée ou de celle d’un autre à la craie et à l’encre de couleur.

 -mise en couleurs d'images photocopiées à partir des albums disponibles.


Certains enfants ont poursuivi ce travail par des recherches individuelles : dessins au feutre, modelage en terre, dessins à la gouache, etc.

La tortue a mangé une girafe (Nans)

Dans la carapace,
il y a un cirque avec un trapéziste (Nans).

Un peu plus tard, une élève apporta une image trouvée sur Internet, représentant, en coupe, le squelette d’une tortue. Cette image insolite a donné lieu à des commentaires multiples puis elle a été collée dans notre grand livre collectif sur les animaux. Le lendemain, un enfant s’est amusé à reproduire cette représentation en coupe et a imaginé ce qui se passait à l’intérieur de sa tortue : “ C’est la fête chez ma tortue-chapiteau!”
J’ai proposé alors aux enfants d’imaginer sur une photocopie du squelette en coupe ce qu’ils feraient s’ils habitaient une carapace de tortue.

J’ai proposé alors aux enfants d’imaginer sur une photocopie du squelette en coupe ce qu’ils feraient s’ils habitaient une carapace de tortue.

Les réponses ont revêtu des caractères de toutes sortes :
Réponses des enfants de moyenne section :
- “ Le soleil m’a donné ses rayons. Dans ma carapace, je prends ma douche. Il y a des bulles partout.”
- “ Lorsque je rentre dans ma carapace, je m’amuse à sauter sur le trempoline. Parfois j’ai peur du monstre. En fait, c’est mon papa qui s’est déguisé.”
- “ Dans ma carapace, j’ai rangé ma maison qui roule. J’aime bien aller dans la forêt parce qu’il y a des animaux méchants et des animaux gentils.”
- “ Dans ma carapace, je saute sur une chaise parce que j’ai faim. Dans ma carapace, il y de la viande, des pâtes et des petits pois. J’ai mis des piquants pour faire joli.”
- “ Dans ma carapace, il y a de la viande.”
Réponses des enfants de grande section :
- “ Je me suis pris les pieds dans un piège. J’ai construit une maison dans ma carapace avec des rideaux et une cheminée.”
- “ Lorsque je suis dans ma maison, j’aime faire le feu, je répare l’antenne et je monte sur plusieurs échelles. Je fais de la montagne.”
- “ Quand je suis dans ma carapace, je dors et je rêve à un manège, à un soleil avec plein de ronds. Le fumée fait des dessins bizarres.”
- “ Dans la carapace, la tortue s’amuse, il y a une maison. C’est ma maison, j’aime y faire de la balançoire.”

En observant rapidement les représentations graphiques de cet espace rêvé et imaginaire, on retrouve les dimensions symboliques de la maison comme lieu protecteur, sein nourricier, refuge ludique et " réservoir des songes". Ses maisons symboliques, dont les parois, curieusement, ne se confondent pas toujours avec celles de la carapace, ont une cheminée qui fume, des rideaux, un garage, un coin-jeux, des antennes de télévision, un lit pour dormir et rêver, etc. Et dans les coins sombres, la rencontre du monstre demeure possible.
Pour les plus âgés, la carapace demeure un refuge mais il est souvent nécessaire de bâtir, à l'intérieur, une autre maison. Dans les représentations des plus jeunes, le rapport sensoriel au monde domine encore ( nager dans les bulles, présence de viande, etc.). Ils se sont mis " dans la peau" de la tortue et la carapace est une métaphore du corps. Cette différence est-elle la manifestation d'une mutation en cours entre un espace rêvé et un espace pensé?


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maison, tortue, graphisme, craie, encre, photocopie

 

Les lions

Mai 2006
 

CréAtions n° 116 - Bestiaire - mars-avril 2005

École maternelle de Carcans (Gironde)- Classe de GS - Enseignante : Isabelle Stroh

Les lions

D’une chanson

naissent des images

de la savane.

« Le lion, le lion, caché dans la savane.
Le lion, le lion, il chasse le gros buffle.
Le lion, le lion, est perché sur un arbre.
Le lion, le lion, croit qu’on ne l’a pas vu !
Mais le buffle charge, la branche se casse.
Le lion caché s’est cassé le nez !

Le lion, le lion, caché dans la savane.
Le lion, le lion, il chasse la gazelle.
Le lion, le lion, est perché sur un arbre.
Le lion, le lion, croit qu’on ne l’a pas vu !
Mais la gazelle passe, la branche se casse.
Le lion caché s’est cassé le nez. »
Anonyme



 

  


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lion, dessin

 

Carte blanche

Mai 2006
 

CréAtions n° 116 - Bestiaire -  mars-avril 2005

Carte blanche à la classe de CE1, Ecole publique primaire Rameau, Villeneuve d’Ascq (Nord) – Enseignante, Madame Duval – Intervenante, Nathalie Vanlaer de l’association «le trait libre»

Carte blanche


Un jour, nous avons fermé les yeux et nous avons rêvé…
Rêvé d’un jardin, un jardin extraordinaire à peindre
pour les murs du préau.
Au début, on disait «je ne sais pas dessiner» et puis,
De nos mains ont jailli des arbres colorés, des oiseaux libres
Des fleurs énormes, un soleil chaud, et des enfants heureux.
« On a fait nos dessins sur du papier : essais
On a découpé nos dessins
On les a posés sur la planche et on a tracé le contour.
On a peint chaque dessin.
On a choisi les couleurs de nos dessins »
Jordan et Asma

 

 

« Avec des pinceaux de différentes grosseurs,
on a peint les dessins »
Lucie

 

 


 

Voici notre peinture murale finale de 2 mètres sur 1m20.

 

 

 

« Je peins l’arbre avec des spirales. C’est un arbre extraordinaire. C’est moi qui l’ai choisi, j’ai choisi aussi la couleur »
Alexis

« Je marque mon prénom sur la planche, comme ça on verra que c’est moi qui ai peint »
Sophie


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jardin, peinture

 

Le chat de Louise

Mai 2006
CréAtions n° 116 - Bestiaire
publié en mars/avril 2005
École élémentaire Les Charruauds, Libourne (Gironde)- Classe de CP/CE – Enseignante: Catherine Foucher-Bachelart


Le chat de Louise


La classe Freinet
est ouverte
sur l’extérieur
pour partager
les connaissances

Louise, la grand-mère de Perrine, est venue à l’école montrer comment elle fait des sculptures en plâtre à l’école d’Arts plastiques de Libourne.

«Nous avons aimé son chat, qui est rigolo, parce que sa queue est un serpent. Elle nous a apporté tout son matériel. Elle fait des sculptures avec du fil de fer et du grillage, recouverts de bandes de plâtre.
On a essayé : Ken et Gaël ont fait un serpent. On a aussi travaillé avec l’argile. Certains ont dessiné le chat de Louise : Dylan, Laurane, Jeanne, Anthony, Perrine, Marine, Manon et Marie-Sophie.»
.
(Extraits du journal des CP/CE1 N°7)


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chat, dessin 

 

Le livre-tortue

Mai 2006
CréAtions n° 116 - Bestiaire
publié en mars/avril 2005, Editions PEMF
Claire Cour, artiste

 

 


Le livre-tortue de Claire Cour


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artiste

 

L’œuvre au travail de Nathalie Charmot

Mai 2006

CréAtions n° 116 - Bestiaire - mars/avril 2005

Spectacle Ogres de la Compagnie « Le Dérailleur Machinerie Théâtrale ». Metteur en scène Mourad Haraigue

L’œuvre au travail de Nathalie Charmot

Spectacle Ogres de la Compagnie « Le Dérailleur Machinerie Théâtrale ».
Metteur en scène : Mourad Haraigue

 

Proposition: Créer des costumes, chapeaux, accessoires et des éléments de scénographie qui participeront fortement à l'identité du spectacle


"Il s'agira d'une déambulation poétique, onirique et fantastique en forme de visite guidée dans un espace extérieur : nature, serre...
J'entame ma recherche iconographique en parallèle à celle du metteur en scène ce qui donne lieu aux premiers échanges d'idées en lien avec l'univers des contes, du fantastique, de la nature, de la transformation des corps...

Un dialogue s'engage autour d'images, de représentations picturales ou photographiques qui nous inspirent.
La lecture de textes comme les contes de Perrault et «Le Livre des subtilités des créatures divines» d'Hildegarde De Bingen, l'observation des peintures de Jérôme Bosch nourrissent notre imaginaire. La trame du spectacle, les différents personnages et les scènes qui le composent n'existent pas encore : tout est à inventer.
Mes recherches de formes et de matières démarrent autour de la lecture des contes «Le petit chaperon rouge», «La belle au bois dormant», «La barbe bleue» et «Le petit Poucet». De ces histoires naissent les premières idées répertoriées rapidement comme des notes par de petits croquis ou schémas griffonnés sans souci de rendu esthétique.
Je passe dans un second temps à l'étape des maquettes abouties qui prennent en compte les silhouettes des comédiens et des danseurs telles que je les imagine en m'appuyant sur des silhouettes photographiques.
Ces peintures constituent une des étapes les plus importantes de mon travail de création car l'essentiel s'élabore à ce moment là, dans une concentration un peu méditative. Sur un papier recyclé vert qui m'évoque une atmosphère végétale, je dessine et peins le plus précisément possible chaque forme, chaque détail tout en sachant que les matériaux pourront au moment de la réalisation faire bouger et évoluer les choses.

 

Les maquettes seront présentées au regard du metteur en scène et des comédiens, qui vont se les approprier et les faire évoluer au fil des improvisations et de leurs suggestions.
Un choix est fait parmi mes différentes propositions avec l'idée de réaliser une première série de costumes pour la création du spectacle dans le cadre de la programmation estivale du Parc du Pilat et pour la seconde étape dans les Serres Municipales de Saint-Etienne.
D'autres costumes et une structure scénographique autonome seront construits pour une nouvelle évolution du travail lors de la Biennale Design de Saint-Etienne en novembre 2004.

Détail du carton d’invitation - Affiches et cartes

 

  Ch. IX : L’ÂNE (De asino)
L’âne est plus chaud que froid ; il est stupide et presque aveugle à cause de la surabondance de forces dont il dispose pour la fornication. Il ne tient pas plus à l’état sauvage qu’à l’état domestique ; il ne fuit pas l'homme et se trouve bien avec lui, car, par une partie de sa nature, il rejoint une partie de celle de l'homme. Mais sa chair n’est pas bonne à manger pour l’homme, car elle est souillée à cause de la stupidité qui est en lui.
Si quelqu'un est atteint de paralysie et d'une de ces maladies changeantes qui augmentent ou diminuent selon la lune, comme c'est le cas pour les lunatiques, il faut rechercher un endroit où l’on tue un âne ou bien il meurt (…)
Hildegarde De Bingen

 
 

 

Synopsis

Le public s'installe au cœur d'un «manège» à la morphologie instable ; rapidement il est confronté à de multiples apparitions. Il découvre un bestiaire poétique et grotesque à l'intérieur d'un parcours en forme de dédale. Dès lors commence un voyage onirique à la manière d'Alice, dans les jardins «voilés» de l'enfance.
Des scènes étranges, fragments de contes et de mythes, se succèdent dans un environnement qui ne cesse de se recomposer : images filmées, formes lumineuses, ombres portées.
Il s'agit pour nous de constituer une cohorte de personnages hybrides en expérimentant des métamorphoses possibles du corps :
- lorsqu'il se déforme au service des objets, des outils, des matériaux
- lorsque l'image l'absorbe, l'imprègne (au sens propre) partiellement ou totalement
- Lorsqu'il est transformé ou envahi par la végétation
Il est question de cultiver l'artificiel en testant des écarts possibles de la nature, des invraisemblances monstrueuses, burlesques ou merveilleuses. C'est un bestiaire fantaisiste en référence à la peinture de Jérôme Bosch et au cinéma fantastique (Murnau, Browning...), une aventure dans l'onirisme corporel."
Nathalie Charmot
Ménagerie du bizarre
«La tentation était si forte qu’elle ne put la surmonter : elle prit donc la petite clef et ouvrit la porte du cabinet.»
Charles Perrault, La Barbe bleue
              

Recherches iconographiques

   

 

 

 

 


 

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Nathalie Charmot

 

Le carnet de bord de Dominique

 

 

 

Carnet n°4

Rencontre avec une artiste
 

Evoquer la culture à l'école n'est pas sans convoquer des sentiments aigres doux. En effet, notre tâche d'éducateur consiste à léguer aux enfants un héritage culturel important, mais aussi, et c'est plus délicat, à les inciter à prendre les chemins complexes de la création. Coincés entre tradition et modernité, la facilité nous incite le plus souvent aux retours en arrière et malheureusement, la culture scolaire ne pénètre que frileusement l’activité contemporaine… Et pourtant ! Faire entrer un artiste dans la classe, c'est faire du lien, c'est renouer avec l’échange, la pratique individuelle.
 
C'est ainsi qu'un matin d'octobre, Pascale a poussé la porte de notre classe… avec le pied… tant ses bras étaient chargés de cartons. Marchande de couleurs, marchande de culture, marchande d'émotions, elle est entrée dans la classe : dialogues, confrontations avec des vraies œuvres, mises en situation… les liens se sont vite noués… et nous attendons maintenant chacune de ses interventions mensuelles avec beaucoup d'impatience et de bonheur.
 
  
Organiser l'espace      
 
Trois lieux importants se sont imposés dans la classe cette année pour mener à bien ce projet :
 
 
- Des tables où sont à disposition en permanence des livres d'artistes, des carnets de voyages, des revues d'art, des magazines… Toute cette littérature est consultable à tout moment par les enfants pour piocher des idées, comparer, imiter.
 
 
- Un grand panneau d'affichage qui accueille tout ce qui pourrait nous donner des idées, notamment des formes graphiques ou calligraphiques, des affiches…
 
 
 

- Un meuble fabriqué par mes soins que j'ai baptisé « scriptorium » : quatre postes de travail où les enfants ont en permanence des plumes, des pinceaux, des feutres fins, des calames, et des revues sur la calligraphie. C'est le lieu exclusif de l'écriture.

                 
                              
 
Première rencontre
 
La première fois, Pascale est venue avec une de ses œuvres, et chaque enfant a pu en avoir une reproduction en format carte postale. Collectivement et oralement, tous les enfants ont été invités à trouver des noms communs, puis des adjectifs, et enfin des verbes qui pouvaient évoquer ou qualifier l'œuvre. La classe s'est ensuite retrouvée avec un corpus de mots dans lequel chaque enfant a pu puiser pour construire son texte en regard de l'œuvre de l'artiste.

 

Un carnet en construction
 
Au fil des semaines de l’année 2004-2005 va ainsi se construire petit à petit un carnet de re-création.
 

Ce carnet est un espace personnel à chaque enfant où s’articulent les domaines littéraire et visuel. Il s’agit d’une expression bigarrée, composite où sur une même page l’écrit avoisine la photo, le collage, le dessin, la peinture.

Les formes et les mots s’y tissent d’une page à l’autre, se font écho où lancent des dissonances en se libérant de l’ordre du figuratif, de la juste représentation, des canons convenus de la beauté.


« Il est nécessaire - et c’est dans cette direction que se fera peu à peu notre développement - que rien d’étranger ne nous advienne, rien d’autre que ce qui nous appartient depuis longtemps » nous dit Rainer Maria Rilke dans Lettres à un jeune poète.
 
 
Une rencontre avec Giacometti
 
 

Au quotidien, il s'agit pour les enfants de mettre leurs textes en page, en espace.
 
 
Tiphaine avait livré un magnifique poème lors d'une lecture des textes, et elle souhaitait l'intégrer dans son carnet d'écolier.
 
Au cours d'une de ses interventions, Pascale nous avait ramené de Paris des prospectus, des programmes d'expositions, et toutes sortes de supports destinés à donner des idées, ou encore à découper et coller. Parmi ces trésors, Pascale avait déroulé une grande affiche de Giacometti.
 
C'est sur cette sculpture que Tiphaine va s'arrêter, et comparer le personnage de son poème au personnage de l'affiche.
 
Décalquer, photocopier, essayer de le traduire à la gouache ou de manière graphique, à l'encre de Chine. C'est finalement l'encre qui l'emportera. Un petit coup de pouce du maître pour ajouter un peu de papier kraft dans la composition, et voilà une page de plus au carnet de Tiphaine.
 

Nous avions déjà un carnet « numérique »
 

A chaque début d'année, nous nous photographions tous pour construire notre trombinoscope. Ce trombinoscope sert de base à notre site de classe. En effet, en cliquant sur la photo de chaque enfant, nous accédons à tous ses travaux : textes libres, dessins scannés, exposés, reportages photo… L'autre consigne de début d'année consiste à rédiger son autoportrait afin que les visiteurs puissent être renseignés sur chaque enfant. Et puis il avait aussi fallu penser à la couverture des carnets de chaque enfant. Et pourquoi pas y mettre son portrait ?
 
Lors d'une venue de Pascale, nous avons imprimé le trombinoscope afin que chaque enfant ait sa propre photo d'identité et, par petits groupes, nous avons été agrandir les photos sur le photocopieur. Discussions sur l'homothétie, remarques pertinentes sur la perte de définition et la granulation. Pascale proposera ensuite de passer à l'encre ces différents agrandissements. Encres aux tons pastels ou acidulées, les enfants essaient, ratent, recommencent, demandent des agrandissements plus importants… Au bout de quelques jours, ils sont en possession de cinq ou six portraits en couleur. Lequel choisir ? Et pourquoi pas un peu de chaque ! Ce sont alors les ciseaux qui parlent et qui invitent à une réflexion sur la composition. On parle alors de couleurs complémentaires, de toniques.
Il s’agit aussi d’apprendre à ne rien négliger et notamment la gestion des espaces laissés blanc : on décide d'apporter une autre matière que l'encre : craies grasses, gouache, collages viennent se superposer. Au final, une magnifique galerie de portraits. Andy Warhol est passé par là !
 

 

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carnet de bord, enluminure, écriture, photographie, collage, peinture

 

Le Bestiaire d’Écrivol

Mai 2006

CréAtions n° 116 - Bestiaire - mars/avril 2005


Groupe Freinet de l’Aisne
Dessins des classes de Collège dHervé Nunez

 

Le Bestiaire d’Écrivol

Un lâcher de ballons-poèmes
pour diffuser les créations poétiques des jeunes

 

Créations a choisi pour un bestiaire quelques poèmes dans les recueils issus de ces lâchers de 2003 et 2004 et dans l’anthologie « Gouttes de mots ».
Les petits cabochons qui accompagnent les textes viennent du « petit théâtre de poche », page 25.

Un Éléphant
C'est très marrant
Un éléphant
C'est gris souris
Sa trompe gigote
Ça bouge, ça plie
Et ça sursaute.

C'est très marrant
Un éléphant
Parfois très lent
Il est gourmand
Et mange souvent
Très salement.

C'est très marrant
Un éléphant
Quand ça digère
Un éléphant
Avec sa mère
Tout doucement.

C'est très marrant
Un éléphant
Sa toilette faite
Dans un étang
Tout propre, tout net
Se lave les dents.

C'est très marrant
Un éléphant.
Les CE2-CM1, École de VIERZY

 

 

 

 

 

Les hérissons

De toutes les belles choses
Qui vous manquent en hiver,
Qu'aimez-vous mieux ?
- Moi, la piscine chaude et bleue,
- Moi, les beaux coquelicots rouges,
- Moi, les coccinelles rouges et noires,
- Moi, les oiseaux bleus,
- Moi, les lapins sauvages,
- Et moi, les hérissons qui piquent.
Le hérisson,
Petit gourmand de limaces et de limaçons
Qui se cache dans les buissons,
Harmonie entre les fermiers et les jardins
Sans fin.
Classe de CP-CE1, École de Chéry-Lès-Pouilly

Des animaux bien exigeants

Dans la nuit des âges
Dieu sur son nuage
Ayant réfléchi
Un matin se dit :
« Je n'ai plus de mains
Pour le marcassin.
Cette jolie corne
C’est pour la licorne.
Pas de carapace
Pour cette limace.
La superbe tache
Pour la jolie vache. »

Depuis ce jour-là,
Mon Dieu quel tracas !
L'asticot malin
Réclame des mains,
La licorne pleure
Une tache de couleur,
Mais le fouette-queue
Désire des yeux bleus,
Le chat siamois
Veut être angora.
Seule la limace nue
Qui n'avait rien eu
Se trouve très bien
Dans ses souterrains.
Les CM2, École René Lefèvre, Venizel

 

 

La Petite Chenille

La petite chenille qui fait
Des trous.

Elle a mangé beaucoup
Beaucoup !

Elle est devenue grosse et
Grasse.

Mais bientôt elle deviendra
Un papillon… SUPERBE !
Les PS-MS, École de Gandelu

Aie aie aie
J'ai mal au dos dit le corbeau.
Pas marrant dit le serpent.
J'ai mal aux pieds dit l'araignée.
Pas chouette dit la mouette.
J'ai mal au front dit le cochon.
Pas génial dit le cheval.
Et moi aux dents dit l'éléphant.
Pas rigolo dit le blaireau.
J'ai mal aux oreilles dit l'abeille.
J'ai mal aux pattes dit le mille-pattes.
Et moi aux genoux dit le pou.
Mais vous êtes fous dit le kangourou !
Y'en a marre dit le canard !
De vous entendre pleurer dit le bélier.
C'est bête dit la crevette.
Ça me donne le bourdon dit le mouton.
Ça ne sert à rien dit le chien.
Ça va passer… dit le chimpanzé.
La vie est belle dit l'hirondelle !
Venez faire la fête dit la belette !
TPS, PS, MS, École de Mondrepuis

 
Les hirondelles
Se laissent voyager
À travers les nuages.
Et, perchées
Sur la statue
Elles s'envolent.

Alexandre, École Saint Martin, Clis - Château Thierry
 

 

Chut ! Chut ! Ne fais pas de bruit !
Toi la souris grise
Au fond de la remise
Quand tu grignotes
La bonne biscotte !
Comme c'est la nuit,
Chut, chut, ne fais pas de bruit !

Toi le gros rat noir
Au fond du placard
Quand tu grignotes
La bonne carotte !
Comme c'est la nuit,
Chut, chut, ne fais pas de bruit !

Toi le grand hibou
Au fond de ton trou
Quand tu engloutis
La pauvre souris !
Comme c'est la nuit,
Chut, chut, ne fais pas de bruit !

Toi la petite chouette
Dans la maisonnette
Quand tu te jettes
Sur les insectes !
Comme c'est la nuit,
Chut, chut, ne fais pas de bruit !
Les CP, École du Centre, Villers-Cotterêts


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ballons, poésie, animaux, écriture

 

L’idée de « centre »

Mai 2006

CréAtions n° 116 - Bestiaire - mars/avril 2005

Collège André Duchène, l’Ile-Bouchard (Indre et Loire) - Enseignant, Hervé Nunez

 

L’idée de « centre »


La ville, comme un plan, vue d’avion

 

« La quatrième biennale d’arts plastiques avait cette année-là pour thème le « centre » en relation avec le nom de la région.
Cette idée a débouché sur un projet consistant à désigner le centre de l’Ile-Bouchard. Mais comment désigner ce centre de façon originale ?
Les élèves du collège et le professeur d’arts plastiques, M. Nunez ont décidé de le faire à l’aide de ballons.
Pour cela, on devait tracer sur le sol un cercle de 17 m de rayon partagé en une vingtaine de portions. Dans ces portions seraient répartis des groupes d’élèves portant chacun dix ballons rouges qu’ils auraient préalablement gonflés. Cela représentait quand même 5000 ballons !
C’est donc le 7 juin que ce projet s’est réalisé.
Cette manifestation a mobilisé tout le collège ainsi que les écoles maternelles et primaires (élèves et enseignants) et a vu la participation active des élèves.
Dès le matin, il y a eu la mise en place d’une flèche rouge au milieu du camping, pointée vers le centre du cercle.
Quand tout fut mis en place, un avion survola l’ensemble pour prendre une série de photos.
Tout s’est déroulé sous un soleil magnifique. Tout était réuni pour que la journée soit un total succès. »
(Teddy Veillot, pour le journal du collège « Chut ! On parle.»)

 

Cerner la notion de centre
Il faut préciser quelques raccourcis journalistiques : l’idée était de donner une forme au mot « centre » pour répondre à l’injonction de l’inspection qui a proposé ce thème à tous les enseignants d’arts plastiques de l’académie, pour que les arts plastiques participent à leur manière à la sensibilisation des élèves sur le sens de la notion de « Région centre » dans laquelle nous nous trouvions.


Beaucoup de tâtonnement


Il nous fallait définir la plastique très grande de ce mot : d’abord conceptuellement, en faisant appel notamment à des réalités différentes que sont la symbolique (le centre comme focalisation, analogies entre des formes, ce qui donnera point/ville/œil), les mathématiques (centre d’une surface quelconque), la topographie (réalité du terrain et réalité plane), la signalétique (point, flèche)…

Le projet est parti d’une proposition individuelle d’un élève qui voulait simplement réaliser une carte topographique sur laquelle la région Centre aurait été désignée par une flèche… Ma part de « maître » consiste souvent à donner plus d’envergure aux propositions, car les élèves restent contingentés par le tableau de chevalet et par les techniques traditionnelles qui limitent leur vision de l’art. Pour ce faire, les courants artistiques contemporains sont précieux. Dans ce projet, j’ai montré Spiral Getty de Robert Smithson ainsi que les travaux de Christo dans la nature (land art).
Convaincus par ces nouveaux territoires à s’approprier, les élèves ont proposé des solutions pour adapter le projet de l’élève : à partir de recherches ouvertes, l’idée de désigner le centre de l’île s’est d’abord imposée ; l’idée du point et de la flèche sur le sol est venue plus tard.

Comment imaginer la transformation d’un simple trait de crayon et d’un point sur une feuille de papier en réalité sur le terrain ? Il fallait passer de la géométrie plane à la géométrie dans l’espace, faire appel aux homothéties mathématiques, considérer le signe abstrait « flèche » ou le point comme des réalités concrètes :

- La matérialisation du point par un disque de ballons ne s’est pas présentée spontanément. Elle est le résultat d’un tâtonnement régi par des contraintes de réalisation: je me souviens notamment que nous avions pensé « entourer » l’Ile avec des barques recouvertes de draps de couleur, car la barque est un matériau familier de la rivière Vienne et « qu’entourer » est aussi un moyen de désigner. Mais cette idée a été abandonnée parce que nous n’étions pas sûrs d’avoir le nombre de barques et les marins capables de négocier les courants de la rivière.
Nous avons aussi pensé à habiller simplement tous les participants de rouge…
Que dire des efforts pour trouver l’entreprise qui fournirait 5000 ballons de la même couleur ?
- Une cinquantaine de draps ont été peints en rouge afin de remplacer le signe et l’encre de la flèche.
- Un géomètre a enfin aidé les élèves à aligner la flèche de 30 m de long et le centre du disque de dix mètres de diamètre, séparés par la rivière.

 

 

Matérialisme pédagogique
 

Prendre rendez-vous avec un avion


Pour réaliser le projet, le collège ne suffisait pas, nous devions être au moins 500 pour gonfler puis brandir dix ballons chacun dans le périmètre délimité : nous avons donc contacté les écoles environnantes, de la maternelle et du primaire.
L’attente de l’avion qui devait arriver à une heure bien précise, faire trois petits tours et puis repartir, a été un moment important de l’action (j’avais contacté l’aéroclub de Tours qui avait accepté de nous faire seulement payer le prix du kérosène soit à peu près 500 francs de l’époque).
Un avion qui viendrait à notre rencontre pour voir notre installation, c’était la forme la plus inattendue d’évaluation. Il allait permettre de mesurer :
- si la flèche était bien « alignée » avec le centre du disque,
- Si le disque et la flèche seraient visibles du ciel.
Toutes ces questions qui n’autoriseraient pas de repentir devinrent brûlantes lorsque quelqu’un, à l’heure H, dit : «là-bas, regardez, l’avion arrive…».
Après avoir passé avec plus ou moins de bonheur (mais avec beaucoup de bonne humeur) l’épreuve du gonflage, chacun était prêt, la tête en l’air et retenant presque son souffle pour éviter le flou de la photo.

Vérification


Car Mickael, dans l’avion qui a tourné 7mn au dessus de nous, ce petit « point » dans le ciel, nous le savions, était en train de prendre des clichés. Et nous devions attendre de recevoir la visite de ce photographe avec la pellicule développée pour voir le résultat. Cela prendrait plusieurs jours... 

Heureusement, j’avais négocié avec un journaliste de la « Nouvelle République » qu’une des photos soit visible dans le journal du lendemain. Quelle a donc été la surprise de tous lorsque le journal est arrivé et que l’on a vu une photographie aérienne de l’Ile-Bouchard, en couleur, en dernière page !
On voyait enfin ce que voyaient les photographes.
On ne se voyait pas individuellement, nous étions des pixels, mais on se voyait ensemble, dans le disque. La flèche et le point étaient bien alignés. Celui-là n’était cependant pas assez voyant, il aurait fallu plus de participants et aussi que tout le monde vienne vraiment habillé de rouge. Ou alors il aurait fallu réduire un peu le diamètre du disque.
Que de questions et dans tant de domaines ! Les discussions et les regrets ont duré longtemps.
Le principal d’un autre établissement dans lequel j’enseignais en même temps m’a même demandé de refaire le coup de la flèche dans le sien, ce qui fut fait.
Pour le reste, on fera mieux la prochaine fois…
 


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centre, photographie, performance

 

Bibliographie Créations 116 Bestiaire

Mai 2006

CréAtions n° 116 - Bestiaire - mars/avril 2005


Bibliographie

Bibliographie

 

- Du coq à l’âne, Les animaux racontent l’art, C. d’Harcourt. Éd. du Seuil/Le Funambule.
Cette confrontation de la représentation animale dans l’art, dans sa diversité historique et géographique, souligne l’attraction, peur et fascination mêlées, quelles que soient les cultures, exercée par ceux que nous nommons les bêtes.


- Le Grand Bestiaire, Les ateliers Art Terre.
Une aventure de création collective initiée par Alain Burban, responsable des ateliers Art Terre : le livre rassemble les photographies des sculptures de « bestioles », réalisées en atelier à partir de matériaux de récupération.


- Animaux étranges et fabuleux, Christian et Ariane Delacampagne. coll. Citadelles et Mazenot.


- Bestiaire Cobra, une zoo-anthropologie picturale, Françoise Armangaud. Éd. La Différence, 1992.


- Les animaux et les hommes, leurs relations à travers l’art occidental de la préhistoire à nos jours, K. Clark. Éd. Tallandier, 1977.


- Le Peintre et l’animal, É. Hardouin-Fugier. Éd. l’Amateur, Paris, 2001.


- Comment l’esprit vient aux bêtes, essai sur la représentation, J. Proust. Éd. Gallimard, 1997.


- Animalités, Revue d’esthétique N° 40, 2001


- Epiphanies de la séparation
, Michel Onfray. Éd. Galilée.
Livre consacré à l’exposition de Gilles Aillaud qui a eu lieu à Argentan en 2004 : « bestiaire pictural de l’enfermement », « somme païenne », véritable encyclopédie des animaux, « un événement… une épiphanie… l’occasion de retrouver un peu de leur être, une possibilité d’abolir leur statut de pur êtant, de choses et d’objets ».


- Si les lions pouvaient parler, essais sur la condition animale, ouvrage collectif dirigé par B. Cyrulnik. Éd. Quarto, Gallimard 1998.


- Le silence des bêtes, la philosophie à l’épreuve de l’animalité, Élisabeth de Fontenay. Éd. Fayard, 1998.


- « L’animal que donc je suis », in L’animal autobiographique, autour de Jacques Derrida, Éd. Galilée 1999.


- Les animaux de personne et Les animaux de tout le monde, Jacques Roubaud. Éd. Seghers, coll. Volubile : deux volumes de poèmes, bestiaires cocasses et jubilatoires, portraits fables d’animaux réels ou imaginaires, accompagnés d’illustrations tout aussi inventives.


- Histoires, J. Prévert, poésie tendre et corrosive d’un autre amoureux des mots et des Bêtes.


- Manuel de zoologie fantastique, J.L. Borges. Coll. 10/18.


- La ferme des animaux, George Orwell. Éd. Champ libre, Coll. Folio.
Histoire d’une révolte qui finit mal et qui donne à penser sur notre propre Histoire.


- King, John Berger. Éd. de l’Olivier/Le Seuil, 1999.
King est la voix du conteur, et c’est un chien, paria parmi les parias que sont ses amis SDF, réfugiés sur le terrain vague que leur laisse provisoirement la société de consommation : « un opéra des gueux » sans misérabilisme.


- Plaire aux vaches, Michel Ots. Éd. Atelier du Gué 1994

Amour et humour pour ces « savants ruminants »: tout ce que vous désirez savoir au sujet des vaches.


- Matériaux pour une histoire raisonnée des insectes
, Bernard Dumortier. Éd. La fosse aux ours, Lyon, 2004.
Ce spécialiste de la communication chez les insectes nous offre là les portraits de quelques uns d’entre eux, où se mêlent érudition scientifique, art du fantastique et poésie, un régal.

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