CréAtions N° 119 - Projet de classe / novembre 2005

Novembre 2005

 


CréAtions N° 119 - Projet de classe
novembre/décembre 2005

 
Ont participé à l'élaboration de ce numéro : Jacqueline Benais, Simone Cixous, Thomas Deligny, Yolande Dupuy, Katian Iérémiadis, Agnès Joyeux, Maud Léchopier, Danielle Maltret, Hervé Nunez, Jeannette Roudier.
Crédits photographiques : Jacqueline Benais, Joël Blanchard, Loïc Costes (Rouge-Vert-Bleu), Agnès Joyeux, Maud Léchopier, Magali Martin, Hervé Nunez, Jean-Michel Rousval, Marie Savitri Go.
 
Titre et chapeau
niveau classe
thème
techniques utilisées
Artiste
 

Des projets pour construire et se construire

 
 édito
 
 

 

L’art de la FRESQUE entre au lycée

lycée

Un projet d’équipe porteur d’ouvertures multiples, un projet dans la durée

fresque

J-Jacques Jolinon, fresquiste

 

 

T’es qui, toi ?

élémentaire: CE1

Agir ensemble contre l’intolérance pour vivre dans la différence : créer des affiches

écriture, dessin, peinture
rapport texte-image

El Yazid Kherbache, plasticien

 

Maria Vilde

 

Artiste autodidacte

Un art populaire

peinture
Maria Vilde
 
Traces
 
élémentaire: CE1-CE2
Quand histoire, découverte et création se mêlent
ocres et rectangles de bois comme outil scripteur
 
 

Une pratique, un outil : Mémoire de passage

élémentaire :
cycle 3

Un bas-relief en terre cuite
Laisser une trace

 

terre cuite

trace
 

 

Une année d'arts plastiques

élémentaire :
CM1

La place de l’expression dans la classe, production personnelle et retour au groupe

peinture, pastels gras et secs
linogravure, pâte à sel, écriture

 
 

Notre école, notre jardin

maternelle : MS/GS

Carte blanche à l’Ecole maternelle Anatole France de Quéven

dessin, peinture, photos.

 
 

Xavier Boggio Ou la lumière traversante

 
 

Travail par série ou thème

peinture, résine, installation

Xavier Boggio, peintre, sculpteur

 

Le pinsé, avec J-Jacques Petton, initiateur du courant artistique du «pinsé» dans le Finistère

élémentaire : CM1/CM2

Un événement arrive dans la classe

collectage de laisses de mer
travail en 2 et/ou 3 dimensions

Jean-Jacques Petton

Ecrire autrement

élémentaire :
CE1 et 2

Des romans-photos pour la Fête du Livre

écriture, réalisation de « story-boards», photo

 

Carnet de bord de l’atelier Danse n°2

 

lycée

 carnet de bord

danse, écriture

Christiane Quoiraud, chorégraphe

 

Jeux d’empreintes

maternelle : GS

Après la visite de l’exposition de Claude Viallat, productions collective et individuelles

peinture empreintes, découpage
assemblage

 

 

Le musée valise : jeux deux mains 

 
PE stagiaire en élémentaire: CE1
Pour créer une dynamique : les productions voyagent dans une valise
Réalisation d’un mode d’emploi, artothèque
 
 

Bibliographie

 
 
 
 

 

 

Créations 119 - édito

Novembre 2005
 

Revue Créations n°119 : Projet de classe
publiée en novembre 2005

Edito

  

 

Edito

Des projets pour construire et se construire

 

 

Depuis une vingtaine d’années, les textes ministériels ont introduit le projet dans le système éducatif. Les projets se sont multipliés, à l’échelle d’un établissement, d’un groupe de classes ou d’élèves. Ils ont, au mieux, permis de casser le cloisonnement de quelques disciplines, les enseignants travaillant exceptionnellement ensemble, et donné parfois aux élèves initiatives et responsabilités dans leur mise en œuvre. En pédagogie Freinet, le projet a toute sa place, parce qu’il peut être porteur des valeurs essentielles que nous défendons. La pédagogie de projet remet en question une éducation liée à un mode d’appropriation des savoirs dépendant de programmes institués par des « spécialistes », décidant seuls de ce qu’il convient d’apprendre dans l’optique des besoins d’une société. Le manuel n’est plus alors l’unique source des savoirs proposant sa programmation immuable de séquences ou de progressions linéaires au service de l’enseignant. Le projet se situe dans la dimension du temps, et suppose la mobilisation de savoirs et de thématiques diverses, permettant une meilleure intégration des apprentissages par la réutilisation des acquis, la capacité de faire des liens, des transferts, pour une connaissance moins fragmentée. Se mettre en projet, pour l’enseignant comme pour l’élève et le groupe, c’est assumer le risque d’une situation d’incertitude : les chemins ne sont plus balisés, il faut construire ensemble, mettre en synergie projets individuels et projets de classe. La part de l’enseignant est alors de favoriser l’émergence des désirs de chacun, de créer les conditions favorables pour que les enfants investissent leurs propositions. L’enseignant permet, dans la coopération, de dégager les motivations profondes des choix, d’élargir leur champ d’investigation ; il propose une grande richesse de matériaux, d’outils essentiels, de démarches respectant le tâtonnement et les échanges. Il favorise le processus personnel de l’enfant, chacun trouvant sa place d’acteur et d’auteur dans le projet investi.
« L’école que nous voulons sera à l’image de la vie, comme elle complexe et diverse, ce qui ne veut pas dire compliquée »*. Dans nos classes, un projet se définit comme processus éducatif, fondé sur la prise en compte de l’enfant tel qu’il est.
«La fonction, la raison d’être de l’enfant, c’est d’abord de vivre»*. A l’enseignant de créer les conditions pour mettre en œuvre dans le projet le dynamisme de la vie, sans limites présupposées, sans organisation scolastique de la classe, en accueillant ce qui advient des enfants, de l’environnement. C’est « l’événement » qui devient projet de travail, processus permettant dans la durée une potentialité organisatrice de la classe, une activité créatrice favorisant un tâtonnement productif fructueux, une réussite, l’acquisition de savoirs. Ainsi naît « l’élan vers la culture, la possiblité d’être réceptif aux apports des autres, dans un échange critique »*.
Dans ce numéro, l’origine et le contexte des projets évoqués varient : lien avec l’environnement (fête du livre ; patrimoine de la ville), lien avec une cause défendue par une association (anti-racisme), lien avec la possibilité de publier dans une revue (carte blanche dans CréAtions) ou lien avec le tâtonnement créateur d’une classe (exploration plastique, réception d’une œuvre d’artiste). Certains articles mettent l’éclairage sur le processus de réalisation du projet en relatant les expériences menées (carnet de bord, aménagement de la classe et des ateliers, appropriation par les élèves).
Enfin, le projet comprend une phase de communication qui peut adopter des formes et des supports très variés : exposition, musée-valise, revue CréAtions, affiche, carnet de bord.

(*) Freinet, « L'Education du travail ».

CréAtions

 

 

sommaire "Projet de classe" n°119  


 

 

 

L’art de la FRESQUE entre au lycée

Novembre 2005
 

Créations n°119 - Projet de classe - novembre 2005

Lycée Chrétien de Troyes,Troyes (Aube) - Enseignantes : Dominique Sabroux (Histoire-géographie), Marie-Noëlle Lemarchand (biologie), Martine Florent (Éducation physique - Intervenant : Jean-Jacques Jolinon, fresquiste

  

 

L’art de la FRESQUE entre au lycée

 Un projet d’équipe porteur d’ouvertures multiples

 

Une expérience décisive

En mai 1999 : nous avons pratiqué l’Europe à notre échelle, en apprenant à vivre avec une classe italienne et une classe allemande. Les 27 élèves d’une classe de seconde allaient, pendant 15 jours, être immergés au Centre de culture européenne de Saint Jean d'Angély, dans un bain culturel, artistique et historique. Il s’agissait de mettre en évidence les racines communes de nos trois pays, à l’époque médiévale. Parmi les différentes activités, les élèves ont été initiés par Jean-Jacques Jolinon à l’art de la fresque. Ils ont réalisé avec beaucoup d’enthousiasme une fresque reproduisant l’arche de Noé de l’église romane de Saint Savin (patrimoine mondial de l’UNESCO), et une fresque pour le lycée représentant quelques scènes de la Tapisserie de Bayeux.

Un projet de fresque sur les murs de la ville

Il est né de cette première expérience. Nous avons exposé nos intentions à la Municipalité de Troyes, qui ne nous a pas découragés et nous a proposé de revenir avec un projet structuré.
Les élèves avaient jeté leur dévolu sur un mur bordant un hôtel Renaissance, l’hôtel Juvénal des Ursins.
Nous trouvions, certes, ce mur séduisant, mais un projet, ici, au coeur même de notre ville, nous semblait un rêve inaccessible.
C’est alors que M.Gilet, président du Centre d’Etudes médiévales, organisateur du mois médiéval à Troyes, nous apprit l’existence d’un tableau au Musée National du Moyen-Âge des Thermes de Cluny, représentant la famille Juvénal des Ursins, dont une copie se trouvait dans l’Aube, dans le village de Trainel.
Notre rêve allait s’incarner en Jean, Guillaume, Jeanne, Eudes, les prestigieux propriétaires de l’hôtel bordant « notre » mur.

A la rencontre de l’histoire locale

Non seulement nous allions pouvoir « fresquer », mais en plus, les troyens et les touristes allaient pouvoir en profiter, et surtout nous allions en savoir plus sur ce bel édifice, et sur quelques uns de nos illustres ancêtres, qui allaient nous révéler, c’était sûr, un peu de l’histoire locale, un peu de notre histoire...
Les responsables et les élus, que nous rencontrâmes ensuite, en mars, avec Jean-Jacques Jolinon, furent séduits par le projet. Ils nous accordèrent leur confiance, ainsi que l’assurance de nous aider à réaliser ce projet par la mise en place d’un support capable de recevoir des enduits de chaux.

Un calendrier pour organiser le travail

Fresque vient de a fresco : peindre sur un enduit frais, enduit constitué de chaux éteinte et de sable. Les couleurs appliquées sont des pigments naturels compatibles avec la chaux, simplement délayés dans de l’eau pure. Ainsi, on ne peut appeler Fresque toutes sortes de peintures murales, comme celles réalisées à la détrempe, à la tempera, à l’huile, à l’encaustique, à l’acrylique…

Préparation des enduits sable/chaux

Les impératifs de cette technique sont multiples :

- la palette de couleurs est réduite car la chaux n’admet que les pigments de terre naturelle et « mange » tout autre pigment.
- chaque journée de fresque est déterminée par l’état d’avancement de séchage de l’enduit chaque jour préalablement posé, ce qui limite à quelques heures le temps d’exécution de l’empreinte puis de la pose de la couleur.
- les formes doivent donc être simplifiées à l’extrême, épurées.

Quant à nous, il ne nous restait plus qu’à :
- nous entraîner à peindre le tableau, à l’aquarelle pour tester les effets de transparence, les zones ombrées, les “ réserves ”; chacun devant posséder « son » personnage sur le bout des doigts,
- mettre sur pied des équipes roulantes,
- élaborer un document d’information destiné à l’administration, aux CPE, aux enseignants de la classe, aux parents, aux commerçants de la rue Champeaux,
- veiller à ce que nos élèves soient assurés même sur un échafaudage,
- rédiger des autorisations parentales,
- rassembler le matériel : la mairie, en nous fournissant l’échafaudage, l’eau et l’électricité nous aida beaucoup...
- commander les pinceaux en poils d’oreilles de boeuf, les platoirs de lissage, ainsi que les pigments de terres d’ocre et de Sienne,
- rassembler les matériaux : la chaux bien sûr, mais aussi le sable, du sable sec mais lavé et surtout silicieux et non calcaire.

Un enthousiasme contagieux

Que dire de ces 6 jours quasiment hors du temps, où une bande de jeunes dépoussiéra le vieil hôtel Juvénal et y installa son matériel , sous le regard interloqué, puis souvent amusé, des passants…
Que dire de leur entrain à mélanger le sable, l’eau et la chaux, transporter des sacs, des seaux, des planches, nettoyer et ranger méthodiquement les outils...
Que dire de ce rythme tantôt frénétique, tantôt stoppé pour laisser à la chaux le temps d’incruster l’enduit sur son support...
Que dire de ces instants sacrés de rencontres avec les Troyens de souche, d’adoption ou d’occasion, qui souvent s’émerveillaient à voix haute et se racontaient, spontanément...

Les élèves, redécouvrant la tradition orale, colportaient ce qu’on leur avait dit, répondaient aux questions sur la technique de la fresque, parlaient de ce que notre enquête, menée sur la 

Chantier collectif à l’Université technologique de Troyes

piste des Jouvenel/Juvénal nous avait appris, de Troyes à Paris en passant par Poitiers.

 Nous avons vu des élèves perdre cette passivité que l’on déplore souvent en classe. Ils se sont révélés courageux, volubiles, à la fois désireux de partager ce qu’ils faisaient, et à l’écoute de ce que tel ou tel, âgé le plus souvent, allait leur apprendre, mais aussi silencieux, très concentrés, quand leur tour venait de poser, lisser, strier l’enduit, déposer des pigments.

Un projet dans la durée

Ouverture des ateliers « fresque » aux écoles maternelles

Depuis 1999, un parcours culturel et artistique pour une trentaine de lycéens de chaque année scolaire se poursuit au lycée Chrétien de Troyes.
Voici quelques jalons de ce parcours :
- en 2001 : réalisation, pour le nouveau Centre d’Etudes Médiévales de Champagne-Ardenne, d’une immense Danse Macabre.
- en 2002 : réalisation en fresque de 250 cartes à jouer sur des briques plâtrières.
- en 2003 : création de l’association « Les Passeurs de Fresques » et réalisation d’une exposition « L’art de la fresque » à l’Université de Technologie de Troyes, et d’une fresque monumentale lors d’un chantier d’une semaine. (voir le site www.utt.fr/fresque).
- 2003-2005 : nombreux ateliers « fresque sur briques » dans divers lieux. La Danse Macabre est installée dans l’église de Lirey.
- Juillet 2005 : organisation d’un stage d’initiation à la fresque à l’Institut Universitaire des Métiers du Patrimoine, conduit par Jean-Jacques Jolinon.

Préparation d’un « raccord d’enduits ».

La Danse macabre réalisée sur 170 briques

sommaire Créations "Projet de classe" 

fresque

 

 

T’es qui, toi ?

Novembre 2005
 

Revue Créations n°119 : Projet de classe
publiée en novembre 2005

Classe de CE1 - Ecole Alsace, Lunéville (Meurthe et Moselle) - Enseignant : Antoine Cicolella

  

T’es qui, toi ?

 

Agir ensemble contre l’intolérance pour vivre dans la différence

 

Origine du projet

Un soir d’octobre 2004, nous avons rencontré El Yazid Kherbache et Jamal Saïd, membres de l’Association ALISCIA (association lunévilloise d’insertion par le sport et l’initiative artistique), pour discuter du projet de manifestation culturelle « Agir ensemble contre l’intolérance », prévue en janvier 2005.
Parallèlement, l’envie de mener un projet autour de l’éducation à la citoyenneté avec mes élèves m’intéresse. Cette rencontre allait en amener d’autres. Elle fut l’étincelle qui allait déclencher le réveil de nos consciences dans un sens constructif et positif que je ne soupçonnais pas au départ.

Bleu clandestin, El Yazid Kherbache

                                Créer des affiches…
Pour agir contre l’intolérance
Pour apprendre à respecter les autres
Pour rencontrer et travailler avec un artiste
Pour découvrir le métier d’imprimeur
Pour faire passer un message
Pour avoir une démarche créatrice
Pour mieux vivre ensemble
                      


Un sentiment d’impuissance de l’école

Envie de réagir suite à des incidents insidieux aux relents de xénophobie qui se sont déroulés dans notre école, école primaire Alsace à Lunéville, en début d’année scolaire. En effet, des paroles d’enfants ont été entendues mettant en avant les différentes origines des enfants : « Ouais, aujourd’hui, à la récréation, on va faire un match français contre musulmans ! » ou bien « Elle m’a traité de chocolat noir ou de fromage blanc ! ». Notre réaction d’éducateur fut de discuter avec toute l’école un samedi matin en grand groupe. Cette initiative fut intéressante, nous ne l’avions jamais fait auparavant.
Premièrement il nous fallait réagir sans pour autant tomber dans la morale simpliste. De plus, il était plus que nécessaire de « mettre les points sur les i » concernant ce qui est autorisé et ce qui est interdit dans une école.
Au-delà de la réaction « à chaud », un sentiment d’impuissance gagnait notre équipe.
Que faire ? Que dire ? Comment réagir ? A plus long terme, qu’est-ce qu’il est possible de faire pour trouver l’antidote au poison que représente le racisme ? Est-ce que le racisme et l’intolérance en général ne se nourrissent pas de notre ignorance et de notre peur de l’inconnu ? Et si oui, comment faire pour les combattre ?

L’éducation par la culture est un moyen d’agir contre le racisme

C’est ici que la rencontre entre l’artiste El Yazid Kerbache et ma classe de CE1, grâce à l’initiative de l’association ALISCIA, prend tout son sens.
El Yazid Kerbache a déjà travaillé avec l’association ALISCIA et avec les écoles sur d’autres projets. C’est un artiste reconnu car il expose régulièrement à Lunéville. Rencontrer un artiste et travailler avec lui c’est s’ouvrir sur l’autre, s’ouvrir sur la culture et s’ouvrir sur le monde. Avoir une démarche créatrice nous apprend à voir et faire autrement ensemble. El Yazid Kerbache me propose de travailler sur le support de l’affiche dans ma classe. Pourquoi l’affiche ?

L’affiche comme moyen de dire et de faire

L’affiche est un outil multiple pour dire sa pensée.
L’affiche est un média qui véhicule un message positif ou négatif. Elle est utilisée partout pour communiquer dans un but commercial, politique, culturel ou informatif. C’est une accroche, elle est composée d’un message écrit et visuel. A l’école, l’affiche est un outil priviligié de création mais également d’apprentissage de la lecture et de l’écriture.
Voilà pourquoi El Yazid Kerbache me propose de créer des affiches contre le racisme et pourquoi j’accepte sa proposition.

 

 

Lire et écrire pour comprendre et s’informer

En novembre, nous allons visiter l’imprimerie des Bosquets à Lunéville où Monsieur Daniel Vernet nous aide à comprendre comment se fabrique une affiche. De cette visite, la classe réalise un reportage riche en images et en textes. Durant le mois de décembre, nous travaillons à l’écrit comme à l’oral en classe sur le thème de la différence et du racisme. Vite, nous partons dans l’aventure documentaire. La lecture, l’écriture et l’expression orale et écrite nous emmènent à destination de textes, d’albums, de journaux, de poésies, de chansons, de dessins, de photos, de dictionnaires pour découvrir, comprendre et apprendre.
Un livre pas comme les autres

Parmi toutes ces rencontres avec les livres, un album nous ouvre les yeux : c’est l’album «Côté cœur» de Rascal et Girel (voir bibliographie à la fin de l'article).
Une histoire d’amitié entre un garçon et une fille qui nous donne des raisons d’espérer en la jeunesse malgré le poison que représente le racisme.
Au cœur du texte de l’album, deux mots retiennent notre attention : «les mots fleurs» et «les mots caca de chien».
«Les mots fleurs» désignent des mots d’amour, d’amitié, de paix et de tolérance.
A l’inverse, «les mots caca de chien» désignent la haine, le racisme et la bêtise. Au-delà de la poésie, de l’humour et de la naïveté de ces deux expressions propres à l’auteur, la classe réalise que les mots ont un sens et une force. Le langage a le pouvoir de dire des choses profondes, de dire une pensée. Cette anecdote conduit la classe à trouver à son tour « des mots fleurs, des phrases fleurs, des mots caca de chien et des phrases caca de chien». Cette recherche de mots et de phrases nous aide tout naturellement à construire nos affiches contre le racisme. Nos messages et nos accroches sont tout trouvés (voir photos des affiches ci-jointes).

 

sommaire "Projet de classe" suite de l'article 


 

 

Traces

Novembre 2005
 

Revue Créations n°119 : Projet de classe
publiée en
novembre 2005

Ecole élémentaire, Hérouville St-Clair (Calvados) – Enseignante : Danielle Maltret

  

 

Traces
 
Quand Histoire, découverte et création se mêlent
 
Sur une route toute fraîche, sur le Causse de Gramat, les bords karstiques sectionnés laissent s’épandre des poches d’ocres. J’en ai récolté plusieurs couleurs.
En liaison avec la semaine « Art et Patrimoine » prévue à l’école, les élèves ont travaillé en amont, avec des matériaux et des instruments variés permettant d’obtenir différentes traces en référence aux peintures rupestres, aux enluminures.
Par souci de développer un geste ample et souple j’ai proposé, en guise de calame, des petits rectangles de bois contreplaqué.
Je souhaitais que les enfants inventent des traces avec l’idée d’empreintes du mouvement laissées par différents instruments ou objets inattendus, mais ils sont restés dans un domaine plus conventionnel, absorbés par l’utilisation des ocres , en cailloux ou en poussière, et le maniement de pinceaux japonais pour les encres.

Détail (Antoine)

Matériel :
- ocres du Causse de Gramat,
- un mortier et son pilon,
- des passoires à thé en guise de tamis,
- encres,
- eau,
- œuf préparé (blanc légèrement monté en neige),
- chiffon,
- petits morceaux de bois,
- fourchettes,
- couteaux de peintre,
- pinceaux japonais,
- plumes et papier de qualité.


Le comportement des enfants est très variable.
Certains boulimiques essaient à tout va et découvrent de nombreux effets mais ne passent pas, dans ce moment là, à l’ébauche d’un projet. C’est le cas d’Antoine.

Premiers essais d’Antoine

 

Lancelot a généreusement tâtonné avec les ocres. Il découvre par exemple qu’il a tracé un crabe auquel il ajoute deux yeux à l’encre violette. Il s’est consacré ensuite à l’ocre sec frotté, griffé, et a obtenu un effet de matière : un guerrier est apparu.

Premiers essais d’Alice

Alice a su, en une séance, prendre possession des tâtonnements antérieurs dans le groupe et elle a cheminé vers une œuvre achevée.
Ce travail sur les traces peut inviter l’enfant à créer en essayant d’autres combinaisons entre mouvements, outils et matériaux. Il peut aussi aiguiser le regard pour découvrir tout ce que racontent les traces dans l’environnement.
Cet atelier Traces est prévu pour deux fois trois séances. A chaque reprise et au milieu de chaque séance, nous regardons ensemble le travail de chacun, nous échangeons : remarques, avis, conseils, sensations. Certains enfants s’essaient à des idées glanées, d’autres poursuivent, imperturbables, leur propre recherche. L’utilisation d’une plaquette-calame a été reprise, en recherche préparatoire, pour du travail sur les enluminures au cours de la semaine « Art et Patrimoine ». Cet outil oblige à amplifier le geste du tracé et peut servir d’initiation à la calligraphie avec un calame, objet facile à prélever dans des tiges de bambou.

Alice. Détail de l’œuvre achevée

Installation de l’atelier Calame

sommaire "Projet de classe" 


 

 

Une Pratique, un Outil: "Mémoire de passage": un bas-relief en terre cuite

Novembre 2005

 

CréAtions  n° 119 "Projet de classe"
publié en novembre-décembre 2005

Cycle 3 – Ecole d’Avroult (Pas-de-Calais) – Enseignante : Cathy Castier

 

 

« Mémoire de passage » : un bas-relief en terre cuite

Extrait du Cahier de vie de la classe (janvier 2004)

 

Tous les enfants de la classe auront une plaque en terre cuite sur le mur de l’école. C’est de l’argile comme pour les briques et les tuiles. Ça va rester toujours sauf si le mur est détruit ! Peut-être que, dans 300 ans, les plaques seront encore là ! Monsieur Castier fait cuire nos plaques dans un four de potier à 1.000° C.
A droite de la porte, se sont des personnages qui bougent, à gauche, ce sont des masques, et en dessous de la fenêtre, ce seront des animaux.

Morgan Wattez (CM1)

 

J’ai enseigné à Avroult, petit village situé au cœur des collines d’Artois, pendant quatre années en cycle 3, dans une école coopérative à deux classes.
En lien avec l’étude du milieu (les roches de chez nous), la correspondance scolaire et les projets en Arts plastiques, j’ai proposé aux enfants de réaliser des bas-reliefs sur le mur de l’école. Chacun a ainsi pu laisser la trace de son passage à l’école en modelant une plaque en terre cuite.
   

 

 

 

 

rubrique "Une pratique, un outil"  sommaire CréAtions N° 119 Projet de classe 

 

 

 

 

Une année d'arts plastiques

Novembre 2005
 

Revue Créations n°119 : Projet de classe
publiée en
novembre 2005

Classe de CM1 – Ecole Lamartine, Dunkerque (Nord). Enseignant: Jean-Marc Guerrien.

  

Une année d'arts plastiques


Le cadre de ce travail est une classe comprenant des enfants de tous milieux mais en moyenne plutôt favorisés.

Paradoxes et questionnements


Notre cheminement en pédagogie Freinet est caractérisé par une tension entre le respect de l’enfant, de sa spontanéité, de sa créativité, de sa liberté, et une «guidance» plus ou moins forte induite par la pression des programmes, le peu de temps dont on dispose, etc.
Comment, sur dix mois, permettre dans le domaine des arts beaucoup de création, tout en mettant en place des cadres propres à assurer l’acquisition de moyens techniques et provoquer rapidement un «passage à la qualité» ?

Fahima, Ronds dans l'eau.

Constance, Arbres.

La place de l’expression dans la classe : quelques constats


Pierre Clanché explique dans «L’enfant écrivain» (éditions Païdos – Le Centurion) qu’il faut enlever à la langue écrite son statut privilégié de moyen d’expression si l’on veut que le texte libre soit réellement investi. Nous constatons d’ailleurs tous, sans vraiment pouvoir l’expliquer, qu’il existe une sorte de «synergie» entre les différents moyens d’expression que nous mettons à la disposition des enfants, et que ceux-ci s’enrichissent mutuellement. Il serait très facile de repérer des influences, des passerelles, des thèmes transversaux entre les différents domaines dans la production de la classe. De manière évidente, les textes sont meilleurs si l’on pratique en plus le dessin, la peinture libre, et meilleurs encore si des possibilités d’expression corporelle sont offertes, etc.

Je pense qu’il existe, sous-jacentes à ces améliorations, des ouvertures symboliques qui se diversifient et font prendre la mesure aux enfants, consciemment ou non, de l’étendue de leur pouvoir de dire, élargi à différents domaines…
Etant bien entendu que la parole et les intérêts des enfants sont centraux dans tout le travail de la classe, ne serait-ce qu’à la suite des «Quoi de neuf?», et partant de l’idée émise par Pierre Clanché, j’ai privilégié dans ma classe trois grands axes d’expression: le texte libre; les arts plastiques (notamment dessin, peinture, gravure et modelage); l’expression corporelle. Il y a eu également quelques balbutiements de création musicale, mais c’est un domaine où il me reste tout à faire!

 

Les ateliers d’arts plastiques

1. Le cadre
Lors des séances d’arts plastiques à proprement parler, les enfants se répartissent dans des ateliers:
- Peinture : quatre places, soit quatre chevalets, sur lesquels sont fixées des feuilles 50 x 70. La cantine fournit une grande abondance de raviers en plastique de toutes tailles qui servent de palettes. Les pinceaux sont volontairement des brosses plates de grande taille qui rendent impossibles les petits détails.

- Craies grasses et pastels secs : comme je dispose d’un local assez vaste, il y a des ateliers « à demeure», des groupes de quatre tables, soit douze places. On y utilise une boîte pour deux. Le papier est choisi librement parmi des formats A5, A4 et A3.
- Linogravure: deux places.
- Pâte à sel ou terre (synthétique, séchage à l’air): quatre places.
- Il y a également la possibilité d’illustrer les textes libres dans le cahier d’écrivain ou les lettres aux correspondants.

Brian, Poissons.

2. Souplesse et réajustement dans le cadre
Le travail expression/arts plastiques occupe deux séances par semaine, de 45 minutes chacune. Certains enfants y consacrent en réalité davantage de temps, puisqu’ils investissent, en fonction de «leur permis de circuler», des moments à l’accueil du matin, pendant la récréation ou après le repas.
Les enfants dessinent également durant certains temps de parole: «Quoi de neuf?» et présentations de textes (soit huit fois 20 minutes dans la semaine). Ceci afin de ne pas être contraints d’écouter avec les mains inoccupées, ce que supportent très mal quelques uns d’entre eux… La règle est alors de ne pas faire de bruit : le matériel doit donc être sorti avant le début des prises de parole et il ne peut consister qu’en un petit cahier de dessin et un stylo noir.
Je permets aux enfants de « ne pas faire »… à condition de s’occuper à autre chose !
Le passage dans les différents ateliers se fait sans trop de problèmes en s’inscrivant sur une fiche, et par la discussion entre les enfants. S’il y a blocage, on en discute en Conseil.

suite de l'article : la production

 

 

 

Carte blanche à l’Ecole maternelle Anatole France de Quéven

Novembre 2005


 Créations n°119 - Projet de classe  - novembre 2005 (Editions P.E.M.F.)

MS/GS - Ecole Maternelle Anatole France- Quéven (Morbihan) - Enseignante : Jacqueline Benais

  


Carte blanche à

      l’Ecole maternelle Anatole France de Quéven

Dans notre jardin, il y a des fleurs, des citrouilles, des tomates. Maxime

 

Les enfants dans la cour - Manon

 

Des enfants à la porte d'entrée - Hugo J

C'est les deux écoles, l'école maternelle et l'école élémentaire - Louise

 

Notre école, notre jardin
 
Vendredi 2 septembre
 
Dans la classe, on peut

JOUER
DESSINER
FAIRE DE LA PEINTURE
ECRIRE
FAIRE LE CALENDRIER
FAIRE DU TRAVAIL
JOUER DEHORS
DES JEUX DE CONSTRUCTION
DES PUZZLES
L’ORDINATEUR
DESSINER SUR LE TABLEAU AVEC DES CRAIES
 
 
On a envie de

LIRE DES LIVRES
FAIRE LA SEMOULE
 
 
 

On a fait presque le même dessin : « Coucher de soleil sur l'école » Hugo B et Chloé

 

C'est toi, maîtresse ! - Léa - Marion

 

 photos de Cléo, Hugo S., Maëlys, Marion, Matthieu et Tessa.
 
                                  sommaire Créations "Projet de classe"  

 

 

 

Le pinsé

Novembre 2005
 

Revue en ligne CréAtions : Projet de classe
publié dans la revue Créations n°119 -
novembre 2005

Classe de CM1/CM2 – Ecole Célestin Freinet, Brest (Finistère) – Enseignant : Yvon Gac – Intervenant : Jean-Jacques Petton

  

 

Le pinsé
 


 

On est en plein quoi d'neuf, l'animateur vient de donner la parole à Malwenn qui, depuis l'entrée en classe, traîne un gros sac plastique bien lourd.
«Je vous ai apporté des trucs que j'ai ramassés sur la plage.»
L'aventure du pinsé venait de commencer.
En effet de son sac, Malwenn a sorti pêle-mêle: une cannette métallique cabossée, un morceau de filet de pêche, une poignée de bouchons multicolores, du bois flotté, des coquillages, un vieux bidon, des gants de manutention…, même une boule de pétrole bien dure! Un trésor de «laisses de mer”, «pinsé» en breton.


 

 

Après de multiples échanges (la magie du quoi d'neuf!): «berk, les pollueurs!» ; «bravo les marins!»; «regarde le gant on dirait un punk!»; «avec les deux berniques sur le bidon, on fait un vieux ronchon», etc, je demandai la parole à mon tour, et proposai de prendre contact avec un artiste local qui travaille à partir des laisses de mer, Jean Jacques Petton, afin qu'il nous initie à son travail: enthousiasme communicatif, certains enfants ayant vu ses expositions. Deux années plus tôt, par l'entremise d'un parent d'élève de l'école, Jean-Jacques Petton, initiateur du courant artistique du pinsé dans le Nord Finistère, avait, dans le cadre des Grands Ateliers du samedi, participé à un atelier pinsé.
Contact fut pris: la classe à Projet Artistique et Culturel commençait à voir le jour.
L'année suivante tout était en place, le cadre réglementaire posait ses exigences mais finançait le projet dans son intégralité!

 

 

Une première rencontre est organisée sur le lieu de travail de l'artiste, à Lampaul Plouarzel. Au menu, une petite exposition et des éléments sur la démarche de l'artiste: tout matériau rejeté par la mer est bon à prendre mais à condition que la mer l'ait «travaillé»: poli, râpé, cabossé, déchiré, fendu, etc., ensuite place à l'inspiration, qu'elle soit le fruit de la spontanéité ou d'une réflexion intense. Souvent les matériaux décident!
Puis vient la visite de la caverne d'Ali Baba: le hangar, ouvrant sur la plage et la mer d'Iroise, servant à la fois d'atelier d'artiste et de lieu de stockage, un bazar... organisé! on y aurait passé des heures, à fouiner tout en écoutant Jean-Jacques raconter, dans un mélange détonant, sa vie et son œuvre: l'émerveillement était sans fin.
 
Mais le plus dur nous attendait. Nous avions en classe défini deux objectifs: ramasser des matériaux sur les deux plages proches mais aussi les nettoyer. Plusieurs gros sacs n'y suffirent pas! Quel boulot, une fois rentrés à l'école, pour trier tout ça, et quelle bonne odeur iodée dans les couloirs!
La récolte dura plusieurs semaines encore. Les familles étant mises à contribution lors des week-ends, les lundis matins étaient animés des trouvailles des uns et des autres. Notre salle atelier prenait elle aussi des airs de caverne d'Ali Baba : on trouve de tout sur les plages bretonnes!
Du coup chacun repérait, mettait de côté, passait commande. Antoine, ramasseur d'une belle et grande branche, stockait tout ce qui était bois, Jérôme ne ramassait que des objets métalliques bien rouillés, d'autres étaient attirés par les couleurs laiteuses du verre poli ou par celles, plus vives et fluo, des plastiques.

 

Et chacun de réfléchir: un tableau? une structure en volume? un totem? ou tout à la fois?

 


C'était bien compliqué déjà, mais pas assez encore sans doute. Débarque (c'est le cas de le dire) dans notre classe, un beau jour, Gilles, scientifique-explorateur-écologiste, habitué des lieux, avec une proposition qui ne se refuse pas.

Il partait en effet bientôt, en famille, à bord d’un voilier à balancier, pour un périple de plusieurs mois à destination de Madagascar et nous proposait de communiquer tout au long de son voyage par internet. Il voulait nous associer à un projet de sensibilisation à la protection d'espèces menacées (tortues marines) et au développement durable. Intéressé par notre projet pinsé (qui ne passait pas inaperçu en classe), et surtout par la réflexion engagée sur la pollution marine, il s'engagea à nous expédier, de chaque lieu d'escale, des laisses de mer.
C'est ainsi que nous reçûmes régulièrement des colis odorants, de Sicile, de Crète, d'Egypte ou de Djibouti jusqu'à ce que son voyage soit sérieusement perturbé par une attaque de pirates en Mer Rouge.

 

Le déballage des colis était moins exotique: les déchets des côtes méditerranéennes et africaines ressemblaient fortement aux nôtres! seuls les caractères imprimés différaient parfois: briques de lait en caractères cyrilliques, cannettes en caractères arabes qu'on s'est escrimé à déchiffrer!
Toujours est-il que la matière s'accumulait, au grand dam du personnel de service.
Il était grand temps de concrétiser.
Les séquences collectives succédaient aux moments plus informels, ponctuées par les visites de Jean-Jacques Petton qui s'informait régulièrement de l'avancée de nos travaux, discutant les choix des uns, ajustant un clou pour les autres.
Les choix, les échanges de matériaux furent âprement discutés mais toujours dans un esprit coopératif. Les manipulations en tout genre, du plus petit bouchon de plastique à la branche polie géante qui manquait d'éborgner au passage, en passant par les kilos d'une chaîne rouillée, le tâtonnement dans leur utilisation, créaient une agitation permanente. Coups de marteaux, bruits de visseuse, malaxage du mastic, «dégoulinures» de colle, rien ne nous fut épargné. Même pas la séance soudure grâce au savoir faire d'Henri, ancien parent d’élève, irremplaçable!
Et au final une exposition à faire pâlir les «pros». De la tendresse, de la tristesse, de la poésie, de l'humour, chacun y avait mis une petite partie de lui-même.
Gilles ne fut pas oublié : plusieurs enfants ont collaboré à la réalisation du tableau: «Les pirates de la
Mer Rouge», composé exclusivement des déchets qu'il nous avait expédiés!


 

sommaire "Projet de classe"  

 

 

Ecrire autrement

Novembre 2005
 

Revue en ligne CréAtions : Projet de classe
publié dans la revue Créations n°119 -
novembre 2005

Classe de CE1/CE2 - Ecole René Goscinny - Beaulieu sous la Roche (Vendée) - Enseignant: Lionel Marchand

  

 

Ecrire autrement

 

Des romans-photos pour la Fête du Livre
 
 

Quoi de plus motivant qu’une fête du livre, une fête des livres dans le but de créer une histoire?
De plus, Aizenay, ce n’est pas loin…
Que pourrais-je leur demander?
Nous avons travaillé sur la bande dessinée et nous participons au projet Ecole et cinéma.
En classe, je propose aux enfants de travailler sur un nouveau support: la création de plusieurs romans-photos. Je précise que nous les présenterons à la fête du livre d’Aizenay et que nous irons visiter l’exposition. Cette année, le thème retenu est « Histoires d’animaux».
 

Les doigts se lèvent

 - « J’ai une ferme chez moi », dit l’un. « Alors, des animaux, j’en ai plein ».
- « Chez moi, j’ai un cochon d’Inde », dit l’autre.
- « Moi, j’ai plein de peluches ».
- « On a le droit d’emmener à l’école des animaux »?
- « Moi, ma chienne, elle est gentille, je peux l’emmener ?
- Ce n’est pas vrai, un jour, ta chienne, eh bien elle a mordu la mienne ».
- « On peut choisir des animaux sauvages ? »
Et le dernier :
- « Mais, au fait, qu’est-ce que c’est qu’un roman-photo » ?

La lecture de romans-photos nous permet de définir ce type d’écrit.

L’idée est lancée, plus moyen de reculer, il faut aller au bout de ce projet. Mais déjà de nombreuses questions se posent:
- Comment fournir un appareil numérique à chaque groupe?
- Et si on ne peut pas installer les photos numériques sur les ordinateurs?
- Et comment faire avec les animaux vivants?
Au fur et à mesure, des réponses y sont apportées et nous sommes amenés à différencier les étapes de fabrication d’un roman-photos.

 
     

Quand soudain...

Je vais la tuer pour avoir sa fourrure.

PAN !

 

Le chasseur est tombé dans un piège.

Sortez-moi de là!

 

Ne reviens jamais.

Oui c'est promis.

     

Extrait de « Petite promenade entre amis ».

 
Ecriture des histoires

Deux séances suffisent et toutes les histoires abordent un des thèmes familiers : l’amitié, la solitude, l’amour, la guerre, l’enfance ou la séparation.

 

Découpage du scénario et réalisation d’une planche dessinée

La plupart des enfants de Cours Elémentaire ne peuvent pas scinder le scénario en plusieurs scènes. C’est trop abstrait et cela relève de compétences de lecture très élaborées.

Chaque histoire est découpée en plusieurs scènes puis dessinée par les enfants. Par exemple, je demande de représenter sur une petite feuille le gros plan d’un personnage expliquant un passage numéroté de l’histoire; mais pour ce passage, l’enfant doit aussi créer des bulles, des cadres de texte ou encore des onomatopées. Après une mise au propre, chaque groupe dispose d’un classeur servant de guide pour l’étape suivante. Quatre à cinq séances sont nécessaires, selon les groupes, pour achever cette étape.

Certains enfants (surtout les CE2) divisent leurs vignettes en deux. Ainsi précisent-ils l’histoire en rajoutant un plan. Ils ont assez de recul pour intervenir activement dans l’écriture de leur planche dessinée. Ils réussissent à se situer dans la chronologie de l’histoire et à apporter plus de cohérence dans la production écrite.

Mise en scène et prise de vue

Devant se dérouler en une seule fois, il fallait qu’elle soit encadrée surtout pour la manipulation du matériel. En photographie, les enfants, encore plus que les adultes, ont bien du mal à cadrer les images. Avez-vous essayé de transposer en photo un dessin imaginé? Ça bouge, et quand on croit avoir le bon cadre, un mauvais geste survient et tout est à recommencer.

Les enfants prennent beaucoup de plaisir à ces mises en scène. Ils investissent leur histoire dans l’espace. Ils se rendent compte des obstacles que l’on peut rencontrer dans la création d’un film et des différentes personnes nécessaires à sa réalisation. 

 

La planche est pensée : les masses et les points de vue sont variés.

 

Saisie et mise en page des textes sur ordinateur

Les enfants écrivent dans les bulles ou les cadres de texte. Elle a nécessité une séance d’une heure pour chaque groupe.

Voici Lisa...

Voici Kebdji, son ancienne amie.

Myrtille, la chatte et Kiwi son chaton suivent Lisa.

Veux-tu aller à la ferme voisine ?

D'accord, mais avec Myrtille et Kiwi.

En route pour l'aventure.
En route pour l'aventure.

Je suis beau
Je galope bien
Moi aussi
En chemin, ils rencontrent Apache, Gonix et Portos les trois chevaux.

Voulez-vous venir avec nous à la ferme voisine?

Heu... oui, OK!

Au secours!
A l'aide
GLOUGLOU
Soudain, ils voient des chèvres qui s'enfoncent dans les sables mouvants.

Ho !

Lisa voit une corde et a une idée.

HO HISSE !!

Elle la lance aux deux chèvres en danger qui s'agrippent. Les trois chevaux tirent de toutes leurs forces.

Les deux chèvres avaient eu de la chance, beaucoup de chance

Merci, vous êtes très gentils.

De rien.

Si on faisait la fête? On va inviter tous les animaux de la ferme.

Ils font la fête et sont très contents. Ils décident alors de tous se faire le tatouage.
ANIMAL
AMITIE

Mise en place et finition

C’est l’étape décisive. Elle permet aux enfants qui ont le plus de mal à visualiser la chronologie de l’histoire de replacer les images dans l’ordre afin de finaliser le projet.

 

 

 

Le travail présenté n’est évidemment pas parfait mais nous avons réussi à surmonter la plupart des obstacles rencontrés sans altérer notre plaisir à le réaliser, à l’exposer. Lorsque l’on nous a proposé de le publier dans la revue CréAtions, nous avons trouvé formidable de pouvoir partager cette expérience avec d’autres personnes.

 

sommaire "Projet de classe"

 

 

 

Le carnet de bord des élèves de l'atelier danse - carnet n° 2 - au retour d'Oléron

 

 

Carnet n° 2

 

Poursuivre après un stage intensif, tel est le pari, loin de l’île d’Oléron et de Christine Quoiraud.

 

De ces moments rien pourtant ne s’échappera même si nos routes ne se croisent plus.

Elargissement du monde, nécessité dans notre présent devenu si individuel, si solitaire sans reliance au sol, à l’espace, à la vie.

Que faire sans les autres. Qu’est-ce que l’autre ?

La question est devenue notre question.

Catherine, février 2005.
 


Pour moi beaucoup de choses ont commencé à Oléron. Pendant une semaine, marcher, coupée du monde extérieur. Coupés du monde, on est dix dans le groupe avec Christine, c’était comme « rentrer dans son monde... »
On marche avec chacune d’entre nous, deux à deux, on s’apprend, on s’apprend à travers l’Autre, la personne d’en face, mais aussi à travers la nature.
On ne dit rien, on ne fait que respirer, profondément, et on s’aperçoit que, avec juste un regard ou bien un souffle du vent, on apprend beaucoup sur l’Autre et à l’intérieur de l’autre, soi-même.
                                 Audrey, juin 2005.

 

Ici à Saint-Nazaire nous avons une semaine pour travailler encore ensemble autour de ces questions. En effet au lycée expérimental nous avons choisi de découper le temps scolaire par quinzaine durant lesquelles tous les matins sont consacrés au travail autour d’un sujet que nous nommons atelier. Les projets artistiques s’incluent dans ce rythme comme tout ce qui s’apprend ici dans le cadre de la formation des élèves. Cette structure pédagogique est par ailleurs un ancrage fort de la cogestion pédagogique. Pour notre travail de danse nous avons décidé élèves et MEE (membre de l’équipe éducative) que nous partirions une semaine et que nous poursuivrions le travail à Saint-Nazaire. Dans le processus de programmation de tous les ateliers que nous faisons au lycée expérimental, il y a une étape de discussion des sujets puis un temps où nous élaborons avec les élèves les limites du sujet, les méthodes d’apprentissage ainsi que les outils et pour finir quel doit être l’objectif que nous fixons à la fin de la quinzaine. Nos ateliers se terminent toujours par une présentation d’atelier à l’ensemble du lycée (nous pouvons accueillir au maximum 180 élèves) qui témoigne du travail de chaque groupe.

  L'auto-portrait, qu'est-ce ?

Moi - l'autre
Auto = soi-même
portrait = reflet de soi
reflet de soi = l'autre
l'autre = moi

Qui suis-je ? qui sont-ils ?

                                             

  Pour notre atelier nous ne pouvions définir quel travail précis nous ferions puisqu’il serait dépendant de notre séjour. Nous avions prévu de reprendre nos écrits, de poursuivre des pratiques, mais que nous ne travaillerons pas à proprement parler de la création que nous devons présenter au mois de mai au public. Pour la présentation des ateliers nous avons choisi de montrer une séquence corporelle, qui s’appuyait sur des soli, ébauches peut-être de nos autoportraits et de reprendre un travail proposé par Christine parce qu’il mettait en lumière l’attention à l’autre que nous avons expérimentée.

Mars-avril-mai, de nombreuses semaines pour cheminer sur notre travail d’autoportrait. Avec Christine et sans elle. Nous communiquons beaucoup toutes les deux pour ne pas perdre le fil.

 

témoignages début de l'article

suite du carnet n°2

 

 

Jeux d’empreintes

Novembre 2005
 

Revue en ligne CréAtions : Projet de classe
publié dans la revue Créations n°119 -
novembre 2005

Classe de G.S - Ecole Maternelle du Centre, Hennebont (Morbihan) – Enseignante: Michèle Coudé.

  

Jeux d’empreintes

 

Après la visite de l’exposition de Claude Viallat

 


Seulement préparés par la lecture de l’album Viallat de la collection L’art en jeu, dès l’entrée dans la salle, les enfants sont séduits par les couleurs.
Après un temps de découverte personnelle, seul ou en groupe, la responsable de la galerie, par un échange de questions-réponses (en demi-classe) les amène à découvrir les clés pour lire les productions : empreintes, rythmes, couleurs. C’est à partir de ces 3 axes que nous travaillerons ensuite en classe : c’est toujours au cours des visites, en fonction des réactions des enfants que se dessinent des pistes de travail.

 

Le premier atelier est collectif.
Après une relecture d’une des productions de Viallat, - algorithme* de couleurs et empreintes du «haricot», je leur propose de jouer avec les couleurs et les empreintes. Comment? Quelles couleurs? Quelles empreintes?
Les enfants échangent des idées; nous listons les propositions et en retenons une; chacun réalisera séparément un élément de l’algorithme puis tous les éléments seront rassemblés.
Lors de l’assemblage, une autre proposition est faite:
«Et si on mettait nos empreintes entre les bandes?»
Après discussion, les enfants décident d’utiliser le mélange des couleurs des deux bandes adjacentes pour réaliser leurs empreintes La classe commente, critique la réalisation, un enfant émet une nouvelle piste de travail,
«On pourrait refaire des bandes mais avec des couleurs différentes et d’autres empreintes».

   

Le deuxième atelier est un atelier de productions individuelles.
Nous recherchons dans la classe des objets qui peuvent laisser des empreintes : jeux de construction, bouchons, crayons, etc.
Nous avions déjà travaillé les empreintes : semelles de chaussures, éléments de jeux, dans la pâte à modeler, dans le sable avec moulage, etc.
Pour obtenir les couleurs, chacun expérimente à partir des couleurs primaires à la spatule très large dans des assiettes en carton, avec pour consigne d’employer une petite quantité d’une couleur et une grande quantité de la seconde.
Les réalisations sont présentées au groupe.

 

                       


Le choix de l’empreinte est l’idée de départ du troisième atelier.
Viallat utilise toujours la même empreinte, les deux premiers groupes ont choisi des empreintes déjà existantes. Et si on en inventait ?
Avec des patates sculptées, des peaux d’oranges, des papiers froissés, en boule, pliés. J’oriente vers différents papiers (mous, rigides), mais aussi cartons et plastiques.
Les couleurs ? Chacun inventera les siennes.
Les rythmes ? Pas d’idée précise dans un premier temps.
Très vite la difficulté de conserver la forme de l’empreinte prend le dessus et fait oublier le rythme. Chaque enfant couvre plusieurs feuilles sans savoir ce qu’il va en faire.
Le support terne n’est pas mis en valeur par les couleurs, le groupe classe réagit peu. Je suggère de découper les feuilles pour en faire des puzzles. Le format carré nous permet de choisir une découpe soit en diagonale, soit en verticale. La production finale associe des réalisations de plusieurs enfants.
Chaque enfant a participé à un seul atelier. C’est lors de la présentation des réalisations en cours ou abouties que chacun peut bénéficier des tâtonnements, des découvertes des autres. C’est ainsi que la fabrication des couleurs du deuxième atelier débouche sur une autre piste : les enfants qui avaient remarqué chez Viallat l’irrégularité des supports, retrouvent les aspérités obtenues par le travail à la spatule et décident de les mettre en valeur en les frottant à la craie grasse. L’empreinte retenue pour ce dernier atelier est celle de la main, l’un d’entre eux commence et chacun à tour de rôle doit faire une proposition différente.

 


(*)
Algorythme constitue un ensemble d’instructions qui permette à une personne agisssant mécaniquemennt ou à une machine, d’obtenir, à partir de données ou en un nombre fini d’étapes, la solution d’un problème.

 sommaire "Projet de classe" 

 

 

 

Le musée valise : jeux deux mains

Novembre 2005
 

Revue en ligne CréAtions : Projet de classe
publié dans la revue Créations n°119 -
novembre 2005

Audrey Wittek - stagiaire I.U.F.M. de Lille (Nord).

  

 

Le musée valise : jeux deux mains

Pour créer une dynamique : les productions voyagent dans une valise.

 

 

Contexte

Je suis professeur des écoles stagiaire. Dans le cadre de ma formation et en lien avec les arts plastiques, je me suis questionnée, cette année, sur les apports d’un musée de classe, depuis sa conception jusqu’à sa réalisation.
Aussi, lors de mon premier stage en responsabilité, les élèves de CE1 de l’école Maurice Bonnot et moi-même avons décidé de confectionner un «petit musée» afin de rassembler les productions des élèves, nos œuvres artistiques de référence ainsi qu’une collection d’objets divers; le thème fédérateur de l’ensemble étant la main.

 

L’idée ? Un musée compact !

Face au manque de place dans la classe, le musée devait être compact, susceptible de se déployer en temps voulu avec une aisance d’utilisation et de manipulation.

Ouvrir, déplier, déployer, organiser, spatialiser : les petites mains se font muséographes.


Itinéraire de création

C’est en s’inspirant de la « boîte en valise » de Marcel Duchamp, qu’a été créé «le musée valise: Jeux deux mains».
Cet objet nomade réalisé en contre-plaqué est constitué de compartiments de rangement, de deux paravents se déployant et d’un support transparent qui s’accroche.

 


Comme pour un musée réel, les compartiments sont les réserves ; les paravents et le support plastifié sont les lieux d’accrochage. La structure étant modulable à souhait, chaque nouvelle exposition est unique et adaptable à tout espace.


Les élèves de CE1 ont réalisé un mode d’emploi incorporé à la valise, permettant à celle-ci de voyager dans d’autres classes de l’établissement mais aussi dans d’autres écoles.

Aussi, ce musée mobile a traversé des lieux et des cycles scolaires différents (CM2 et petite section de maternelle), dans lesquels il s’est enrichi des productions plastiques de ces nouveaux propriétaires…
Audrey WITTEK

 

 

 

sommaire "Projet de classe" 


 

 

Bibliographie

Novembre 2005
 

 

CréAtions "Projet de classe"
publication : novembre 2005
- Editions PEMF

Bibliographie

  

 

Bibliographie

Éduquer à l’environnement par la pédagogie de projet, un chemin d’émancipation, Réseau École et Nature, Éd. l’Harmattan, 1996.
 
Faire des projets (dossier), J.F. Dortier, J.P. Boutinet, N. D’Almeida… Revue Sciences Humaines N° 39, mai 1994.
 
L’Éducation du Travail, Célestin Freinet, Éd. Delachaux et Niestlé, 1978 (1ière éd. 1946)
Le processus éducatif que Freinet définit ici redonne sens au travail scolaire en réorganisant temps, espaces, environnement pour une école « par la vie, pour la vie, par le travail ».
 
Marc Bru, Louis Not, Où va la pédagogie du projet ?, Éd. Universitaires du Sud, 1987.
Marc Bru et Louis Not distinguent 5 fonctions principales a pédagogie du projet :
- une fonction de motivation : les élèves s’engagent dans des activités dont ils perçoivent le sens
- une fonction didactique : le traitement des connaissances est restitué dans l’action du projet
- une fonction économique : le projet doit intégrer des contraintes de gestion du temps et des moyens
- une fonction sociale : c’est la médiation avec les partenaires
- une fonction politique : dans la perspective de participation à la vie collective, c’est une formation à la vie civique.
 
L’alternative jeunesse, Véronique Bordes et Alain Vulbeau, coll. « les savoirs de la ville », Éd. de l’Atelier, 128 pages.
Comment allier projets personnels - de personnes à qui on a dénié la capacité même de se projeter - et projet de changement social ? Une réponse, autre que sécuritaire, aux jeunes caricaturés en « jeunesse dangereuse, jeunesse chômeuse ».
 
Une autre école pour nos enfants, André Giordan, Éd. Delagrave, 2002.
Il y est question de « « la pédagogie du projet personnel », où s’apprend un autre rapport au savoir, dans l’autoformation et la socialisation.
 
Les compétences transversales en questions, B. Rey Éd., ESF 1996.
Elles sont en jeu dans tous les projets abordés dans la complexité.
 
Concevoir une affiche à contenu scientifique en équipe : initiation à la méthodologie de projet et au traitement de l’information documentaire, F. Dubreuil et M.C. Lebart, Université Paris 6.
 
Du bon ou du mauvais usage du projet, Jacques Ardoino, entretien avec R. Etienne, revue « les Cahiers pédagogiques », mars-avril 1991, n° 292-93.
 
Une école du troisième type ou la pédagogie de la mouche, Bernard Collot, Éd. l’Harmattan.

Construire un cathédrale, E. Cucci ; J ; Beuys ; J. Kounelis
 
Le Bauhaus, Revue Dada n.91, Ed. Mango 2003
 
sommaire "Projet de classe"