Une école populaire, une école pour tous

Juin 1997

 Lorsque vous lirez ces lignes, le résultat des élections législatives sera connu.

La page des promesses sera tournée. Celle de la mise en œuvre s’ouvrira.
Quel que soit le gouvernement qui se mettra en place, il nous appartiendra, à nous, militants de l’École moderne, de rester vigilants.
Vigilants car, de programme en plate-forme, certaines propositions des deux principaux partis en présence paraissent étrangement semblables.
Vigilants, car libéralisme sauvage, libéralisme modéré ou libéralisme social, c’est toujours sous des masques différents le même système capitaliste que nous aurons à subir, à affronter, à combattre, en particulier dans le domaine de l’éducation.
– « Partenariat systématique* » ou « rapprochement** » avec les entreprises, « généralisation de l’alternance y compris par apprentissage* » ou « valorisation de l’apprentissage** », n’est-ce pas organiser la mainmise du privé sur le public ?
– « Libérer les initiatives* » ou « garantir l’autonomie** » des établissements scolaires, n’est-ce pas aussi un moyen pour briser l’idée d’une école pour tous en introduisant, en même temps : palmarès, classement et compétition entre les établissements ?
– « Adapter* » ou « généraliser l’aménagement** » des rythmes scolaires au niveau des communes, n’est-ce pas plutôt une formidable source d’inégalité puisque soumis aux choix des collectivités locales ?
Peut-être n’avez-vous pas senti l’opposition qu’on aurait pu imaginer trouver entre ces propositions ?
Ce sont pourtant là celles qui devraient marquer les différences entre deux « choix de civilisation ». Ceci augure mal d’un changement profond !
Oui, nous devrons rester vigilants et nous opposer à toutes les attaques contre le service public, à la dérèglementation aussi bien qu’aux redéploiements, aux suppressions de postes comme aux licenciements.
Une autre conception de l’école est pourtant possible. Nous en avons rappelé les fondements lors de notre congrès à Valbonne en 1996. Nous en avons redessiné les contours en définissant des orientations pour l’ICEM-pédagogie Freinet votées lors de nos Journées d’Étude de 1997 à Biarritz.
Ces orientations se situent dans une perspective sociale alternative, une perspective de transformation de l’école actuelle. Elles revendiquent une pédagogie en opposition à la compétitivité, à la logique du profit et du rendement. Elles proposent une école où chacun est reconnu, a la possibilité de s’exprimer, de mener ses apprentissages par des démarches originales en prise directe avec l’environnement, les cultures, l’autre.
En 1997, l’ICEM a cinquante ans. Fédérer autour d’un projet d’école populaire renouvelé tous ceux qui, dans le champ politique, syndical ou pédagogique pensent que transformation de l’école et trans-formation de la société sont indissociablement liées permettrait de mettre en avant d’autres perspectives critiques. Que notre Mouvement pédagogique soit la cheville ouvrière de ce projet, ne serait-ce pas une bonne manière de fêter cet anniversaire ?
Puisque nous y sommes bientôt, bonnes vacances à tous ! Profitons-en pour approfondir notre réflexion et reprendre des forces. Nous en aurons besoin pour préparer une rentrée où l’ICEM sera au cœur de la réflexion et des luttes pour une véritable école populaire.
* Programme électoral du parti socialiste.
** Plate-forme électorale RPR-UDF.
 
J.-M. Fouquer
Président de l’ICEM