Le Nouvel Educateur n° 107

Mars 1999

Les cartables de Big Brother

Mars 1999

L’accompagnement scolaire en ligne est un formidable marché en développement qui augmente de 40 % par an. Havas-Vivendi et Hachette se partagent respectivement 70 % et 15 % du marché.
Dans le monde, l’école et son avenir intéressent les industriels. Il faut éduquer les gens pour qu’ils achètent de plus en plus d’ordinateurs.
Un groupe de pression, la Table ronde des industriels (European Round Table, ERT) regroupe des industriels ayant compris que les services publics généraient une part importante du PIB et donc une nouvelle source de revenus pour eux s’ils mettaient la main dessus.
Tous les plus grands industriels en font partie et tous leurs projets sont soumis à la Commission européenne qui les aide.
Le rapport 1998 de l’OCDE sur l’Analyse des politiques d’éducation reprend les grandes lignes de ces orientations.
Pour résumer, voici comment les « experts » envisagent l’avenir du système éducatif européen : l’école doit fournir une main-d’oeuvre  mieux adaptée aux injonctions du monde économique et financier, l’école doit davantage diversifier ses filières, l’école doit devenir plus flexible et se diriger vers un réseau d’établissements autonomes en forte concurrence mutuelle.
Un document confidentiel de la Commission européenne éclaire les moyens mis en oeuvre pour privatiser l’éducation.
On ne peut qu’être stupéfait par le cynisme de ces responsables, politiques et industriels mêlés, qui se renvoient la balle :
« Il y a une totale adéquation entre l’ERT et la Commission européenne.» (François Cornélis,président de la direction de Petrofina)
« Il nous faut battre les Américains de vitesse dans le domaine des technologies de l’information et nous travaillons en étroite collaboration avec l’ERT.» « Il faut améliorer les moyens d’information et renforcer les liens avec l’entreprise qui est la mémoire et l’observateur de la pertinence des qualifications.C’est là que l’on voit si ce que l’on a appris aux jeunes est utilisable ou pas. » (Edith Cresson)
« Il faut soutenir le plan d’Edith Cresson : apprendre dans la société de l’information. » (Jacques Chirac)
« L’action de la Communauté vise à encourager l’éducation à distance.» (Extrait du traité de Maastricht sur l’Union européenne)
Un programme de développement élaboré à la demande de la Commission européenne va même plus loin et prépare la fin des diplômes nationaux.
La logique en est simple : un contrôle électronique vous suit toute votre scolarité, puis votre vie professionnelle.
Évacuées l’histoire, la géographie (trop délicat !), on a gardé les mathématiques jugées indiscutables et fixé des compétences standard pour juger des connaissances des citoyens européens.
On inscrira vos résultats sur une carte qui sera votre passeport universel de la connaissance quand vous chercherez un emploi.
On saura aussi si la personne a passé plusieurs fois le test ainsi que le temps qu’elle a mis pour y parvenir.
Ce projet poursuit sa route et à Marseille,la première carte limitée aux mathématiques est déjà prête,les premiers tests viennent de commencer.
Voilà ce qu’on nous prépare dans les coulisses de la Commission européenne ! Former à court terme des consommateurs de produits informatiques et à plus long terme des individus conformes aux souhaits des entreprises.
Nous voilà bien loin de cette idée d’éducation du travail chère à Freinet qui alternerait formation pratique efficiente et regard critique sur la société. Car l’éducation, « c’est être capable de prendre de la distance, d’avoir un esprit critique, de se connecter avec d’autres champs de savoir, de regarder si les disciplines résonnent entre elles... » (P. Meirieu).
Nos orientations permettent de donner sens à notre opposition à ces projets en rappelant notre « perspective de transformation de l’école actuelle par la coopération, en opposition à la logique du profit et du rendement, en opposition par la coopération à la compétitivité, par une conception du travail plus valorisante, ce qui conduit à donner une autre place à l’individu dans la société.
Une école,une société,où chacun est connu,reconnu,a la possibilité de s’exprimer,de mener ses apprentissages par des démarches originales, en prise directe sur l’environnement, les autres, avec des spécificités liées à l’âge et aux cursus, de la scolarité obligatoire à l’éducation permanente (1). »
Jean-Marie Fouquer, Président de l’ICEM
(1) Collectif ICEM, Les orientations de l’ICEM, 1997

La sécurité ? d'abord un problème social !

Mars 1999

 

Brèves de classes

Mars 1999

 

Lettre à mon ancien instituteur

Mars 1999

 

Le plan de travail

Mars 1999

L’outil en pédagogie Freinet

Mars 1999

Outils, mode d’emploi

Mars 1999

Le Nouvel Educateur supplément au numéro 107, mars 99

Outils, mode d’emploi
 
Prendre en compte les rythmes et les acquis de chacun
 
Fichiers, fiches et travail individualisé
 
Responsabiliser les élèves par la co-évaluation
 
        Evaluation, remédiation, différenciation pédagogique, programme personnalisé  
        d’aide… autant de termes révélateurs des interrogations de l’école confrontée à 
        l’échec scolaire. Ce dossier souhaite apporter une aide aux collègues soucieux de
        modifier l’approche frontale de leur enseignement*.
                                                                                                * Pour approfondir la réflexion sur la place de l’outil dans les apprentissages,
                                                                                                lire le dossier de J. et E. Lèmery dans le Nouvel Educateur N° 107, de mars 1999.
 
 
 
 
 
L’enfant n’aime pas le travail de troupeau auquel
l’individu doit se plier.
Il aime le travail individuel ou le travail d’équipe
au sein d’une communauté éducative. (1)
                                                               C. Freinet
 
 
Que ce soit en application de la loi d'orientation ou par conviction personnelle après avoir eu connaissance des travaux de Célestin Freinet, l'important pour l'enseignant est de mettre en place le lent processus qui vise à éduquer l'enfant à la responsabilité et à l'autonomie. En somme, faire en sorte que l'enfant s'approprie des savoirs et maîtrise des compétences en situation d'acteur de ses apprentissages et non de consommateur.
 
Utilisation des fichiers autocorrectifs
 
L’école sera sur mesure ou ne sera pas.         F. Oury
 
Une démarche progressive…
 
Il est très important de procéder par étapes et de ne pas se lancer dans la pratique du travail sur fichiers autocorrectifs sans prendre certaines précautions. En effet, la plupart des enfants ne sont pas préparés à cette forme de travail et tout changement est synonyme pour eux de déstabilisation. D'autre part s'il est hors de question que les séances ressemblent à des moments de cours magistraux pendant lesquels de petits groupes feraient tous le même travail sur fichier sous l'oeil autoritaire de l'adulte, elles ne doivent pas non plus apparaître comme des séances de travail non dirigé où les enfants seraient en situation de fausse liberté.
Une préparation rigoureuse des moments de travail individualisé est nécessaire.
 
…avec des outils appropriés
 
Les travaux liés à l'acquisition des notions fondamentales, en mathématiques et en français par exemple, requièrent des outils possédant certaines propriétés spécifiques. Ils doivent permettre :
- d'approfondir une notion,
- d'accompagner ou compléter une démarche,
- de remédier à un manque,
- de structurer des comportements visant à comprendre, expliquer, agir à l'aide d'exercices n'étant pas forcément la répétition d'exemples,
- d'inciter les enfants à imaginer des travaux du même type : réinvestissement = compréhension,
- de contrôler des acquis.
Les outils conçus par les enseignants du Mouvement Freinet et édités par les PEMF possèdent ces diverses propriétés. Ils sont adaptés aux niveaux des enfants. Ils ont tous été expérimentés dans des classes avant édition.
 
Par où commencer ?
 
L'organisation du travail
 
Mettre en place, dans la classe ou dans l'école travaillant en cycles, des moments de travail sur fichiers autocorrectifs suppose un autre mode d'organisation du groupe des enfants, du temps et de l'espace.
 
Faire éclater le groupe unique
 
A certains moments de la journée, le groupe unique éclate en groupes de trois à cinq enfants parfois moins. Cela dépend bien entendu de l'effectif, de l'âge des enfants et de l'intention de l'adulte d'établir des groupes de niveaux ou pas.
 
Aménager l'emploi du temps
 
Au début, ne réserver dans l'emploi du temps de la journée ou de la semaine, qu'une place limitée à ce type de travail : une demi-heure par exemple pour les plus jeunes, une heure pour les grands. Il ne s'agit pas de tout bouleverser mais d'avancer prudemment.
 
Transformer l'espace
 
Regrouper les tables de manière à ce que les enfants, pendant ce moment, soient installés côte à côte ou face-à-face sans jamais se tourner le dos. La disposition doit permettre la communication. Ceci est un élément nouveau qui permet non seulement à l'enseignant de voir d'un seul coup d'oeil l'ensemble du groupe mais également aux enfants de se parler, de s'aider selon des règles sur lesquelles nous reviendrons plus loin, et libérer provisoirement, par ce biais, l'adulte, en pratiquant l'enseignement mutuel.
Une préparation pédagogique importante s'impose ensuite.
 
Expliquer comment travailler en autonomie
 
L'enseignant profite de cette nouvelle organisation de l'espace pour passer de groupe en groupe et expliquer aux enfants comment se servir des fichiers :
 
- découverte guidée des fiches,
- que présentent-elles au recto et aux verso ?
- quelles consignes à découvrir ?
- repérages, prises d'indices avec l'adulte,
- quels supports d'écriture des réponses aux questions ?
- utilisation des grilles de réponses quand elles existent,
- utilisation des plans où il faut cocher le travail fait.
 
Rien ne doit rester flou pour les enfants, ce qui suppose de la part de l'enseignant une parfaite connaissance du matériel.
Pendant ces explications, les autres groupes sont provisoirement sur des activités complètement autonomes :
 
- lecture silencieuse,
- écriture de textes ou d'une lettre à un correspondant,
 
... ou encore, suivant l’âge des enfants, ils tentent de découvrir seuls les consignes en attendant la venue de l'enseignant.
Ce n'est qu'après s'être assuré de la parfaite compréhension par les enfants du maniement du matériel de travail autonome, que l'enseignant pourra instaurer des séances au cours desquelles il n'aura plus qu’à circuler de groupe en groupe, soit pour débloquer un groupe qui bute sur une difficulté, soit pour se consacrer à un enfant seul qui a absolument besoin de sa présence.
 
 
La rapidité de mise en place dépend bien sûr du niveau des enfants, ceux du CM pouvant être plus rapidement autonomes.
Au fil des jours, la consigne de l'enseignant sera de plus en plus : « observe ce que l'on te demande, essaye de comprendre sans mon aide ».
Les consignes étant données et intégrées, il s'agit de savoir qui travaillera sur quoi.
 
 
Distribuer le travail
 
Avant que les enfants soient en mesure de faire le lien entre les difficultés qu'ils rencontrent et les fichiers, la part de l'adulte est prépondérante. C'est lui qui choisit les fiches de math, d'orthographe, qu'il donne en fonction du niveau de chacun. Pour un enfant qui a bien compris une notion, il peut s'agir de vouloir le faire aller plus loin. Au départ, il est conseillé de faire le tri parmi les fichiers qui vont être mis en service : ceux qui nécessitent une forte intervention de l'adulte et ceux qui peuvent le libérer.
 
La répartition des tâches peut se faire sous diverses formes :
- un enfant avec une fiche,
- un enfant avec plusieurs fiches,
- un groupe d'enfants avec plusieurs fiches.
Une fois le travail terminé, il est vérifié à l'aide de la fiche correction, puis montré à l'adulte qui le contrôle rapidement. Celui-ci renvoie l'enfant à une fiche similaire en cas d'erreur ou à une autre activité, si c'est réussi.
 
Pour ce qui est de savoir si le travail d'une séance va porter uniquement sur une matière commune, la lecture par exemple, chaque adulte est libre, suivant ses possibilités, d'organiser des activités diversifiées ou pas. Bien entendu les moins à l'aise pour démarrer privilégieront la matière unique.
 
Savoir constamment ce que fait chacun
 
Pour savoir constamment ce que fait chacun, il est conseillé d'établir des tableaux à double entrée, un par domaine de travail, présentant les fichiers et les noms des enfants qui y travaillent. Voir page 6 un exemple de ces tableaux dits collectifs. A chaque instant l'adulte sait ainsi ce que fait chacun. Cela lui permet de prévoir aisément la suite des travaux d'une séance à l'autre.
 
La présentation du travail
 
L'enfant ne travaille jamais directement sur les fiches. D'une part, parce qu'il est important que la solution soit explicitée en entier et non pas sous forme d'exercice à trous - d'autre part parce que cela permet de conserver les fiches en bon état en les protégeant par un étui plastique.
 
Le travail peut être fait sur un cahier spécial. Cela permet un entraînement à l'écriture des mots, des nombres, des signes de toutes sortes, reproduction de schémas. C'est mieux que les fiches traditionnelles qui invitent seulement à compléter.
On peut envisager la transcription du travail de plusieurs façons différentes :
 
- par l'utilisation d'un cahier sur lequel figureront toutes les étapes du travail, ce qui peut être intéressant pour connaître la démarche utilisée ;
- par l'utilisation de feuilles volantes qui peuvent être détruites quand la solution est considérée comme valable et que la dernière feuille est collée ou recopiée sur le cahier spécial.
- par l'utilisation des grilles de réponses présentes dans de nombreux fichiers . Outre leur commodité, elles ont l'avantage d'entraîner l'enfant à la reconnaissance de symboles.
 
Pour chaque fiche, le numéro de la fiche est inscrit sur le cahier ou la feuille.
 
L'enseignant peut effectuer un contrôle a posteriori dans le cas où sa disponibilité aurait été insuffisante pendant l'exercice.
 
La discipline
 
L’ordre et la discipline de l’Ecole moderne,
c’est l’organisation du travail. (2)
                      C. Freinet 
 
 
Il reste à faire en sorte que les conditions de travail permettent un rendement efficace dans un climat serein. Dans ce but, quelques conseils, mais c'est sans doute la personnalité de l'enseignant qui joue un grand rôle dans ce domaine et, nous l'avons dit, la qualité de l'organisation.
 
Instaurer des règles de vie
 
Qui dit modification des habitudes dit déstabilisation et risque d'agitation et d'excitation. Beaucoup d'enseignants redoutent la mise en place du travail sur fichiers autocorrectifs parce qu'ils pensent que cela va entraîner des bavardages et par conséquent du bruit.
 
Au-delà des premières séances qui comportent une excitation normale liée à la découverte d'un fonctionnement nouveau, il est facile d'instaurer, ensemble, des règles propres à ces moments de travail. 
 
Par exemple :
 
- on ne dérange en aucun cas l'adulte en train de travailler avec un groupe ;
- on parle à voix basse avec son voisin afin de ne pas déranger les autres ;
- on se déplace sans bruit si l'on a un document à aller chercher ;
- on prend un livre de bibliothèque si l'on a terminé tout travail.
 
Si le travail a été distribué à la suite d'une préparation minutieuse, tenant compte du niveau et de la personnalité de chaque enfant, par un enseignant qui a le souci de rendre les enfants autonomes en conservant jusqu'à ce stade une certaine fermeté, il n'y a pas de raison que les séances dégénèrent en désordre.
 
Enfin il est souhaitable d'associer le plus vite possible les enfants à la mise en place de ces règles. Pour ce faire, organiser rapidement, à la fin des séances, de courts moments de bilan au cours desquels on parlera ensemble du déroulement et où l'on fera prendre conscience aux enfants de ce qui a perturbé le groupe. Des solutions peuvent être envisagées en commun et appliquées la fois suivante.
 
 
Et l'évaluation  ?
 
Il importe d’aider les apprenants à devenir maîtres
de la construction de leur propre savoir et donc
conscients de leur évolution, à partir de leurs
représentations implicites. (3)
                           A. de Peretti
 
 
L'évaluation est un élément important d’une bonne organisation des apprentissages…
L’élève doit s’y impliquer activement. En effet, des expériences portant sur l’évaluation (cf. P. Osterriech, Faire des adultes, Ed. Mardaga, 1973, 1995) ont montré que les enfants en tirent un maximum de profit quand ils peuvent se repérer, apprendre à s’évaluer.
Constater que l’on progresse est un formidable levier de motivation. D’où la nécessité de rendre les critères d’évaluation explicites pour tous les enfants (cf. les brevets définis par C. Freinet, les grilles de nos fichiers, les fiches permettant l’autocorrection).
Liés aux activités de la classe, les brevets guident les enfants dans une plus grande maîtrise des compétences nécessaires à ces activités.
 
En attendant de mettre en place une telle organisation avec le concours des enfants (voir plus loin), on peut commencer, chaque fois que cela est possible, par recommander aux enfants de recourir à l'autocorrection afin de les responsabiliser à leur propre réussite.
Le rôle de l’adulte n’est pas pour autant évacué, soit que l'enfant ait besoin de sa caution pour entériner sa réussite, soit que le résultat du travail proposé ne puisse faire l'objet d'une fiche de correction en raison du grand nombre de solutions possibles.
D’autre part, pour les plus petits, il se peut que la solution doive être exprimée oralement à l'adulte.
 
Pour chaque fichier, un plan général avec les objectifs à atteindre est affiché dans la classe, parallèlement aux tableaux collectifs déjà cités plus haut.
 
Par ailleurs, chaque enfant possède un plan de travail individuel lui permettant de noter ses réussites et ses échecs.
 
 
Au-delà du travail sur fichiers
 
 
Après un certain nombre de séances de travail sur fichiers autocorrectifs ainsi mises en place, l'enseignant va se trouver devant des situations qui vont le faire s'interroger sur bien des points. Des enfants devenus rapidement autonomes proposent de choisir des fiches eux-mêmes en fonction de leurs manques.
D'autres proposent des travaux à mener seuls en fonction de leur intérêt du moment : lire un livre apporté de chez eux, inventer une situation problème, faire une recherche sur l'insecte qu'ils ont découvert le jour même, écrire une lettre à un correspondant...
Le climat instauré par les séances de travail sur fichiers autocorrectifs les incite à devenir inventifs, à faire des propositions.
Autre surprise pour l'adulte, il constate rapidement que les enfants ont du mal à s'arrêter de travailler à la fin des séances et que certains osent demander de continuer pendant la récréation quand celle-ci jouxte l'horaire prévu. Certains enfants préféreraient-ils le travail aux jeux de la cour ?
Il ne faut voir là que les conséquences d'un climat de confiance qui commence à s'instaurer entre l'enfant et l'adulte : je te pense capable de mener à bien un travail sans mon aide et de devenir acteur de tes apprentissages, tu commences à t'intéresser de près à ce que tu fais et à collaborer à l'élaboration de tes propres savoir et surtout de tes savoir-faire.
 
Quand un tel degré de confiance est atteint, d'une organisation relativement simple, on est en mesure de passer à une organisation plus complexe.
 
Gérer les séances de travail individualisé en commun avec les enfants
 
Quand ?
 
Dans la plupart des cas, c'est le lundi matin que le groupe remplit en commun les plages de travail individualisé pour la semaine ou la quinzaine. Cela peut ne concerner que la journée quand il s'agit de jeunes enfants.
 
Comment ?
 
Un emploi du temps à trous, mural, est préparé par l'enseignant. D'autre part, chaque enfant dispose de son propre plan de travail hebdomadaire dans lequel il coche ce qui est décidé pour lui. Dans un aller-retour enfants-enseignant et en fonction des travaux non terminés la semaine précédente, sont inscrits les travaux prévus pour chacun : fiches de math ou de français, livrets programmés ou de libre recherche, lectures silencieuses ou dirigées, textes ou lettres à écrire, etc. Un contrat est passé avec l'adulte quant à la charge de travail hebdomadaire.
 
Les bilans
 
Evaluer et contrôler les acquis dans un tel système ne peut se borner à une simple correction de l'enseignant comme cela se fait traditionnellement. Là encore, il doit y avoir échange entre l'adulte et l'enfant et il s'agit d'instituer ces moments d'échanges.
 
A quel moment ?
 
Pour ce qui est des enfants jeunes, c'est pendant l'activité même ou dès la fin de la journée, que l'enseignant contrôle ce qui a été fait. Dans certains groupes, un moment est prévu à la fin de la journée pendant lequel chaque enfant vient présenter aux autres ce qu'il a réalisé et cela donne lieu à des échanges fructueux favorisant la socialisation et l'enrichissement mutuel.
 
Chez les plus grands, et quand les effectifs sont nombreux, cette mise en place est difficile, voire impossible. C'est donc au cours des séances de travail individualisé, souvent le samedi matin, que l'adulte circule de groupe en groupe et examine les travaux faits, s'asseyant à tour de rôle auprès de chaque enfant. 
N'oublions pas que pendant la semaine il a été également amené à corriger des travaux ponctuels qui lui ont permis de repérer les échecs et les réussites de certains.
 
Des enseignants placent, le samedi matin, le passage collectif des tests prévus dans les fichiers. Et ils n'hésitent pas à bâtir eux-mêmes des tests si cela s'avère nécessaire.
 
Le travail est-il noté ?
 
Il n'est plus question, dans ce système, de note attribuée arbitrairement par l'adulte. Pendant le bilan l'enseignant discute avec chaque enfant et ensemble ils déterminent soit une note, soit une appréciation que l'enfant est donc amené à comprendre, à admettre, voire à s'attribuer, même si elle est défavorable.
 
Le tout est reporté à la fin du plan de travail hebdomadaire qui est collé dans le cahier de travail individualisé et emporté à la maison en fin de semaine ou de quinzaine pour être visé par les parents.
 
 
 
 
Les moments collectifs ou de retour au groupe
 
La communication avec ses pairs produit un effet
sur les apprentissages cognitifs. […]
Cette découverte des interactions réciproques dans
la personnalisation, est un des thèmes forts des
découvertes de ces dernières années. (4)
                                      F. Best.
 
Quand les séances de travail individualisé sont gérées en commun par les enfants et l'enseignant, leur succèdent des séances de retour au groupe vécues collectivement.
 
En effet, tel enfant qui a entrepris une recherche peut être amené à buter sur un problème que les apports d'autres enfants pourraient lui permettre de résoudre. L'adulte lui-même peut éprouver le besoin, à partir d'erreurs répétées sur une fiche, de faire une mise au point collective sur une notion mal acquise. Une recherche pour un exposé demande le retour au groupe. De même, dans le cas d'une lecture que l'on a envie de présenter aux autres parce qu'on l'a aimée. Les exemples foisonnent dans ce domaine et tôt ou tard les moments de travail individualisé ont besoin d'être suivis de moments collectifs déterminés ensemble dès le début de la semaine et mis à l'emploi du temps du lundi. Quelles richesses dans ces échanges qui font se confronter les enfants dans un souci de compréhension mutuelle et d'entraide.
Quand la prise en charge commune des apprentissages prend cette dimension, il n'est plus possible à l'enseignant d' être le seul à faire régner la discipline. Il s'appuie également sur le groupe réuni en conseil de coopérative pour faire respecter les règles de vie déterminées en commun.
 
C'est ainsi que naît progressivement la vie coopérative avec ses réussites et ses difficultés. La vie tout court en quelque sorte, jamais simple ni uniforme, avec ses joies et ses conflits, ses statu quo et ses avancées.
 
L'enseignant est devenu un éducateur, l'enfant l'acteur de ses apprentissages dans un milieu socialisant.
 
 
D’après un dossier réalisé par Monique Ribis à partir de témoignages d’utilisateurs d'outils de travail individualisé ( Nouvel Educateur N° 41, sept. 1992).
Actualisation : J.-C. Saporito, Chantier-0utils de L’ICEM ( janvier 1999).
 
(1) et (2) :C. Freinet, Les invariants pédagogiques, Œuvres pédagogiques, tome II, Editions du Seuil, 1994.
(3) : sous la direction de A. de Peretti, Encyclopédie de l’évaluation en formation et en éducation, ESF Editeur.
(4) : F. Best, in Réussir par l’école comment ? Actes du 2° Salon national des Apprentissages, Nantes 1990. (60F) Editions ICEM, 18 rue Sarrazin, 44000 Nantes.
 
 
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Brève présentation de quelques outils…
 
Les fichiers Numération-opérations
 
Dans ces fichiers, les fiches sont rassemblées par séries comprenant :
- six fiches apprentissage,
- une fiche réponses,
- une fiche test.
 
Une forme d’organisation pratique. 
Classe de M. Bardonnenche , école de Manduel (30).
 « J’ai attribué une couleur à chaque fichier. Pour chaque série, les six fiches d’apprentissages sont placées dans une grande pochette en plastique. La fiche réponses (autocorrection) est dans une petite pochette scotchée sur la grande (fixée sur un seul côté pour permettre l’accès au verso).
Chaque élève a dans son cahier de travail personnel le plan de travail individuel du fichier et une petite pochette en plastique dans laquelle il glisse la fiche qu’il emprunte.
Quand il a terminé son travail, il va vérifier sur la fiche réponses. En fin de série, il prend la fiche test que je corrige moi-même. »
 
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Les cahiers de techniques opératoires
 
L’objectif de ces cahiers autocorrectifs n’est pas d’entraîner les enfants à mécaniser des algorithmes imposés au préalable, mais de leur faire saisir les relations entre les nombres. Les cahiers de T.O. offrent des formes diverses de raisonnement qui amènent les enfants à calculer sur des nombres et non sur des juxtapositions de chiffres.
Sur le plan pratique, et à la différence des fichiers, les élèves écrivent directement sur les cahiers.
 
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Les fichiers utilisation du dictionnaire
 
Le dictionnaire est un instrument de culture fondamental. Il doit être un compagnon permanent de l’enfant au cours de sa scolarité… encore faut-il que ce dernier puisse en maîtriser l’usage car c’est un outil complexe.
C’est l’objet de ces deux fichiers. Le premier est centré sur la pratique du classement alphabétique pour entraîner à la recherche efficace des mots ; le deuxième aborde la polysémie des mots et leur formation (radical, préfixe, suffixe, etc.), il initie l’enfant aux nuances de la langue et à la rigueur de la relation sens/orthographe.
 
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Les fichiers d’orthographe
 
Le fichier 0 ( pour CP) vise à donner à l’enfant des repères orthographiques par une manipulation de la langue sans en avoir énoncé les règles.
Les suivants de la gamme sont utiles pour dédramatiser l’apprentissage de l’orthographe et l’adapter aux besoins de chacun. Ils constituent une réponse à la grande hétérogénéité des niveaux d’une classe en ce domaine.
L’approche des difficultés se fait par l’analogie, évitant les rapprochements en opposition, sources de confusions futures.
(Par exemple, on ne « travaille » pas en même temps à et a).
 
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Apprentissages mathématiques en maternelle

Mars 1999

Arts et Créations

Mars 1999

 

Des "étourdissements" de mots

Mars 1999

La pédagogie Freinet au Mali

Mars 1999