Le Nouvel Educateur n° 122

Octobre 2000

Les chemins de l'expression et de la création

Octobre 2000

Que l’on prenne n’importe quel moyen de créativité, cela nous ouvre cette porte qui permet d’exprimer ce qu’on ressent, ce qu’on a envie de dire et de partager avec les autres. C’est ce qui nous nourrit et ce qui va nourrir les autres parce qu’on va l’offrir. C’est ça qui est beau !

 

Laurence Sémonin, a d’abord été institutrice dans le Doubs durant dix années, puis est devenue auteur comédienne (la Madeleine Proust - 3 nominations aux Molières 88-90-96). Après avoir écrit plusieurs nouvelles, elle vient de terminer son premier roman, le cris du milan, Editions J.-C. Lattès.

 

 

 

Le Nouvel Éducateur : Comment arrive l’envie d’écrire ? Comment rendre l’explosion possible ? Comment se passe le processus de création chez l’adulte ? Est-ce que c’est linéaire ?

 

Laurence Sémonin : Ca remonte à loin... déjà toute petite j’avais envie d’écrire des histoires, je les écrivais non pas à l’école parce qu’à l’école je n’avais pas la possibilité d’écrire ce que j’avais envie ; on n’avait que la rédaction avec sujet imposé. Aussi je me rappelle que pour mon premier texte libre, en CE1, j’ai découvert qu’en mettant des mots les uns après les autres je pouvais créer une histoire qui n’appartenait qu’à moi. C’était « Toto a vu les fesses de maman dans les WC ». De la grande littérature quoi ! (rires) Mais là, j’ai senti que je pouvais « inventer » quelque chose. Après, il y a 10 ans environ, j’ai eu l’envie d’écrire une histoire sur une vieille paysanne qui était morte, mais je m’apercevais que mon écriture était très classique, très conventionnelle, pas assez vivante. Ca ne me convenait pas, j’ai laissé tomber. J’ai attendu encore des années.

Et en 90, quand on m’a demandé d’écrire mon histoire de la Madeleine Proust, j’ai repris les notes de mon journal de tournées, et là, j’ai eu l’envie d’écrire l’histoire de mes grands-parents. Tout à coup, ce que j’avais à dire était vivant : c’était mon grand-père qui ramenait toutes ses bêtes qu’il avait tuées à la chasse et qu’il jetait sur la table... Il y avait là matière à décrire, avec des sensations, des sentiments que je voulais faire partager. C’était peut-être la première fois que je sentais qu’avec des mots j’allais pouvoir peindre ce que je ressentais.

Maintenant que je suis beaucoup plus centrée dans l’écriture, j’ai l’impression que je vois une image comme un peintre qui voudrait représenter ce qu’il ressent. C’est comme si je laissais les mots venir à moi pour pouvoir pétrir cette chose que j’ai envie de transmettre et de montrer aux autres. Et en même temps, c’est comme si j’écoutais « la voix des mots ». Prendre conscience qu’un sujet peut devenir vivant c’est comme si c’était lui qui se transformait plutôt que l’écrivain qui se contente de décrire.

 

Le Nouvel Éducateur : Tu es en train d’écrire un livre. Est-ce que tu écris un ou plusieurs livre ?

 

Laurence Sémonin : J’ai commencé à écrire un livre. Un ami m’avait parlé d’un concours de polar, et comme je connais bien le monde des oiseaux, et en particulier celui des rapaces, j’ai voulu raconter une histoire qui se passait dans le milieu des oiseaux. J’avais donc, au déaprt, besoin de bien connaître le sujet dont j’allais parler, j’ai beaucoup lu pour enrichir ma culture sur les oiseaux, puis j’ai cherché à savoir comment j’allais écrire l’histoire. Tout de suite, comme un flash, j’ai pensé qu’un milan royal allait raconter cette histoire. Comment allait-il s’exprimer ? J’ai décidé qu’il allait parler dans un style familier, avec de l’argot, comme un petit voyou, une canaille, un prince de la charogne. J’ai alors acheté des dictionnaires d’argot. Puis, parce qu’aime les descriptions lyriques, j’ai cherché à mêler les entiments, exprimés par le héros avec son langage, avec des moments poétiques où les éléments de la nature sont mis en action comme des êtres vivants.

Mais quand j’ai commencé le livre, je ne savais pas comment il allait finir.Durant l’écriture de ce livre, mon ami est parti retrouver les anges. C’est vrai que quand on écrit, on utilise des sensations personnelles, on invente pas toujours, souvent on va puiser dans notre mémoire, notre histoire. La mort de mon ami a certainement emmené mon roman vers une fin plus mystique. Le milan allait apprendre à ne pas se laisser submerger par ses souffrances, mais il allait découvrir que sa vie est à construire par soi-même. J’ai découvert que l’écriture c’était très physique. Quand je reste 10-14h à mon bureau, je fais de temps en temps des exercices d’assouplissement, j’essaie d’être vigilante à détendre mes épaules, mes bras, ma nuque, ma mâchoire tout en écrivant.

Quand j’ai voulu raconter la révolte des oiseaux, dans « le cri du milan », j’étais très angoissée. Pendant deux jours, je n’arrivais pas à m’asseoir à mon bureau. Je tournais en rond, je bouquinais, je regardais un documentaire enregistré à la télé, une boule au creux de l’estomac. Quand je me suis lancée, ça a jailli d’un seul trait. En six heures le chapitre était bouclé. Je suis tombée dans mon lit et j’ai dormi pendant 14 heures.

Je pense aussi aux incidences, aux répercussions de tous nos actes, de toutes nos pensées dans l’univers. Je l’ai constaté avec les oiseaux : Cet hiver-là, il y en a eu beaucoup plus que d’habitude qui venaient picorer sur le rebord de ma fenêtre. A la période des migrations, c’est devant mes fenêtres qu’une cinquantaine de milans royaux est venue répéter avant le grand départ. Et, pendant que je décrivais leur révolte, d’énormes nuages de corneilles sont venues tourner en rond, en braillant autour de ma maison. Impressionnant !

Mais avant tout dans l’acte d’écrire, je ressens une vraie jouissance, un immense plaisir dans une douceur de béatitude. Quand le roman a été terminé, je me suis sentie comme après un accouchement. Terriblement seule, désemparée, vidée, dépossédée (de quelque chose qui pourtant ne m’appartenait pas). Mais mon plus grand désir est d’être à nouveau disponible pour m’y remettre au plus vite, m’offrir à la musique des mots, à la voix des mots.

 

 

Le Nouvel Éducateur : Tu écris des livres, mais avant tu étais institutrice puis comédienne… Dans quelle mesure un autre mode d’expression aide-t-il la création par l ‘écriture ?

 

Laurence Sémonin : D’abord, je crois tout peut être source de création. Par exemple, on peut faire la vaisselle et en faire un moment où on est pleinement dans nos gestes et où l’on est uni à soi-même. Ca nous permet de nous ouvrir l’intuition. Et l’intuition ce n’est pas de l’ordre de la raison. C’est quelque chose qui nous rend disponible à recevoir des idées, à recevoir des mots et des images. Dans un second temps le fait même d’écrire régulièrement nous nourrit... « Remettre vingt fois l’ouvrage sur le métier ».

Si, dans ce que j’écris, la musique des mots, le rythme des mots me plaît, alors je n’y touche pas. Mais si je sens qu’il y a quelque chose de boiteux, qu’il faut changer un mot, reconstruire une phrase, je dois retravailler la phrase. Ce travail fait parti de la création. En plus je ne travaille pas à l’ordinateur : j’aime le mouvement de la main, la main qui écrit, qui raie, qui gribouille… je découpe, je rajoute, je scotche… c’est comme si ce travail artisanal venait encore nourrir mon inspiration.

Parfois quand je butte sur une phrase, je laisse de côté, en me disant d’y revenir plus tard. Je fais confiance. Et peut-être qu’en relisant tout depuis le début, et, arrivé à la phrase en question je vais être « dans ma musique », pour trouver la juste note de cette phrase. C’est un peu comme une symphonie. J’ai besoin qu’elle sonne juste à mon oreille, qu’elle soit en accord avec ce que je ressens, qu’elle me plaise à moi d’abord.

 

Sylvain : Pour ne pas lâcher cette espèce de fil qui permet à l’histoire de se dérouler, il faut en même temps se garder des moments de respiration, de liberté complète où on dévie du chemin sans oublier le fil qui nous mène jusqu’au bout.

 

Laurence Sémonin : Dans n’importe quelle circonstance de la vie, on peut imaginer notre chemin comme n fil : je veux atteindre tel but. A partir de là, on peut prendre des chemins détournés. Par exemple, des fois je suis en panne, alors je m’arrête et je vais à la fenêtre ou je fais autre chose. Mais pendant que je regarde dehors, dans ma tête la résistance qui s’obstine à vouloir trouver une solution va lâcher. Le fait de me détourner du sujet et de voir par exemple un beau paysage, ça m’ouvre à l’intuition… Le fait d’ouvrir un livre d’un auteur que j’aime et d’y lire quelques phrases. Plus on écrit, plus on est inspiré.

 

Sylvain : Comme dans nos classes, un enfant peut écrire puis s’arrêter, faire autre chose, aller dehors,… écrire dehors, ou écrire dedans…

 

Laurence Sémonin : … Perdre son inspiration et être en panne, et aller faire une peinture, un dessin ou un exercice…

 

Sylvain : … Mais il doit aller au bout de son texte, sinon c’est un échec ! Est-ce que ça t’arrive quelque fois ?

 

Laurence Sémonin : Oui, j’écris parfois des choses que je mets de côté. Ou bien, je les reprends pour les faire aboutir à un autre moment, ou bien, je m’aperçois un jour qu’elles m’ont permis de faire autre chose. C’est comme une semence qui fait germer d’autres idées qui nous font partir sur autre chose, mais nourrie de ce premier jet. Je pense que tout acte a un sens, que rien de ce qu’on fait est inutile.

 

Sylvain : On produit, on accumule, on produit, on accumule… on se construit des règles aussi ? A travers les écrits des écrivains on peut reconnaître des styles propres qui se sont certainement construit au fur et à mesure . Quand est-ce que ça arrive ?

 

Laurence Sémonin : Je lis énormément… tous les classiques : Balzac, Maupassant, Flaubert, Hugo, Giono, Lautréamont, Proust... On est nourri par les auteurs qu’on lit. C’est très important de lire, les poètes en particulier, ceux qui mettent des mots pas forcément conventionnels sur les choses, car ce sont des mots du cœur. Pas besoin de dire « Je suis allée me promener » mais peut-être « un souffle d’air, et mon pas sur la terre »… On a une odeur, une couleur, une émotion, c’est ça la poésie. L’écrivain ne cherche pas forcément à avoir un style, mais pour ma part, je me rend compte qu’en allant vers la vérité de ce qu’on veut donner avec une envie d’offrir une belle matière qui soit vivante, pétillante de vie, qui soit avec des odeurs, des sensations, des forces, avec une vérité… c’est comme une musique : chacun a sa propre musique différente de celle de l’autre. A force d’écrire on sent que ça y est, on arrive à être en phase avec soi. Maintenant, je sens que je m’approche de mon style. Je n’en suis qu’aux balbutiements de l’écriture, mais je suis mon fil !

 

Sylvain : En quoi le fait que tu écrives modifie ta manière de lire ?

 

 Laurence Sémonin : Autant autrefois j’ai dévoré des livres pour les histoires, maintenant je m’attache beaucoup plus au style, à « la patte » de l’auteur, à sa manière de dire les choses. Et c’est infini...

 

Sylvain : Est-ce que cela peut modifier ta manière de jouer en scène ?

 

Laurence Sémonin : Tout ce qui éclaire et qui nous élève nous fait grandir, et ceci dans tous les domaines de notre vie. Si on est plus sensible à la beauté des choses, de la nature, de la poésie, d’un sourire, et quand on arrive à la mettre dans ce qu’on fait, alors ça nous fait encore plus grandir. Ceci nous rapproche de notre qualité d’être humain qui ne demande qu’à s’épanouir et à se nourrir d’amour. Je suis sûr que dans mon quotidien, ne serait-ce qu’en balayant, au lieu de me dire « vite, je dois faire encore autre chose », si je suis pleinement dans mon geste, mon mouvement, je reçois davantage d’énergie que si je me torture la cervelle. C’est important d’oser rêver et de tenir chaque rêve au bout de ce fil. Savoir que dans l’univers tout conspire à réaliser nos rêves. Savoir aussi que souvent ça demande des efforts et du travail.

 

Sylvain : C’est une porte qui s’ouvre aussi.

 

Laurence Sémonin : Et plus j’écris, plus j’ai envie de dessiner, de peindre, de chanter. Les lettres de Van Gogh à son frère Théo sont magnifique parce qu’il cherche dire ce qu’il ressent à travers ses couleurs et son pinceau. Dire ce qu’on ressent, c’est quelque chose de fondamental et c’est quelque chose dont souvent on est privé dans cette société de technocrates et de productivité. Que l’on prenne n’importe quel moyen de créativité, cela nous ouvre cette porte qui permet d’exprimer ce qu’on ressent, ce qu’on a envie de dire et de partager avec les autres. C’est ce qui nous nourrit et ce qui va nourrir les autres parce qu’on va l’offrir. C’est ça qui est beau !

Un enfant qui va écrire une histoire, si en plus il y met de son cœur, s’il se livre lui-même, s’il ose parler de lui-même à travers un autre personnage, alors il va l’offrir aux autres enfants et les autres vont se reconnaître dans ce personnage parce qu’on est tous semblables, on a tous les mêmes souffrances, on est tous en quête d’amour.

 

Interview de Laurence Sémonin, réalisée par Sylvain Hannebique au Salon des Apprentissages de Nantes, Novembre 1999.

 

Autobiographie d'un écrivain de tous les jours

Octobre 2000

D'aussi loin que je me rappelle, l'acte d'écrire a été confusément pour moi, un objet de désir, de passion, de pouvoir, et de réalisation de soi.

De mes premières écoles, je garde le souvenir d'une grande fascination pour l'écrit : monde à la fois imposé par les nantis de la culture, mais inaccessible pour les autres... Et, des autres, quoique ayant un père autodidacte, j'en faisais partie.

Je viens de ces écoles grises des zones sidérurgistes de 1' Est de la France. La composition française était alors le seul élan scriptural que l'on nous autorisait à prendre : il nous fallait de plus écrire ces textes à la maison, sauf celui, sacré, de la "composition ". L'imaginaire muselé, nous planchions chaque semaine sur le sujet choisi par l'enseignant. Les meilleures semaines, il nous concernait un peu, les mauvaises semaines, nous serrions les dents pour rendre un semblant d'écrit, tant son contenu était éloigné de nos préoccupations.

Ma mère et moi récoltions correctes notes : elle m'aidait à émailler mes rédactions d'exemples venus de sa vie, surtout quand il s'agissait d'évoquer les animaux, la vie à la campagne, ou les époques troublées qu'elle avait vécues.

Nous avons ainsi toutes les deux, pendant toute l'école primaire, honoré les commandes qui nous étaient faîtes : elle me prêtait ses mots, les animaux familiers qu' on nous demandait de décrire portaient le nom de ceux de son enfance à la campagne. En échange de cela, ma mère se rappelait avec délice qu'elle avait été "bonne élève".

Au collège, l'exil fut terrible... Je me retrouvais seule le soir, avec la pauvreté de mes mots à offrir à l'exigence professorale... Ma mère ne m'accompagnait plus : elle avait déclaré forfait . Je surfais héroïquement sur une moyenne difficile. Je m'efforçais de ramer dans le sens du courant, n'y arrivant que peu, et tentais de reproduire le modèle d'écriture que les profs attendaient. Ceux-ci d'ailleurs, pour la plupart, ne nous l'expliquait qu'après,

alors que déjà, nous avions tous, en partie, raté notre "représentation " scripturale.

Et puis, une année, ce fut en troisième, ma famille et moi venions de regagner la Bretagne, patrie de ma mère. Au collège d'Hennebont, beaucoup de mes amis avaient un père vivant les derniers soubresauts de la dure bataille des forges de Lochrist. Nous vivions à l'heure des grèves et des ultimes manifestations, route de Lorient. Cette année-là un prof de français, habité par l'écriture, comme si elle avait été salvatrice, ouvrit, pour certains

d'entre nous, une fenêtre sur ce que nous n'avions jamais envisagé que puisse traduire l'écriture : la démarche authentique d'êtres se livrant et qui écrivent pour être lus, dits, théâtralisés, interrogés, réfutés, interprétés, contestés, libérés ... Démarche humaine d'autant plus captivante qu'elle engendre chez celui qui reçoit l'écrit, un formidable travail de la pensée.

François Villon, Rabelais, Voltaire, Charles d'Orléans et bien d'autres encore, avaient beau être du programme, ils nous furent livrés pieds et poings liés. Nous en disposions à loisir pour, tout en les lisant, les questionner sans cesse : le droit premier était de ne pas les comprendre. L'aide qui nous était nécessaire, pour accéder à la complexité de leurs oeuvres, nous était accordé sans faillir. Très vite, dans la classe, la communauté que nous

formions tenta ses premières expériences d'écriture : poésie, récits, écrits théâtraux émergèrent comme autant de prétextes à la mise en scène que nous fîmes en fin d'année.

Depuis cette époque-là je n'en n'ai jamais plus fini avec l'écriture : écriture respiratoire, existentielle, militante, pédagogique, amoureuse, poétique, révélatrice...

Sans doute qu'un mépris de plus, pour une parole première, aurait suffi pour stériliser à jamais la plume artisane de l'écrivain de tous les jours que je m'accorde à être. Il n'en n'a rien été.

Qu'en est-il aujourd'hui dans nos écoles primaires et nos collèges de la naissance de l'écriture ? On peut sans doute penser qu'un louable effort est conduit pour libérer les plumes informatiques ou autres, que des ateliers d'écriture se mettent un peu partout en place ... Les efforts, aussi louables soient-ils, s'avéreront insuffisants, s'ils ne sont pas basés sur la réelle écoute de celui qui écrit, lui, en tant que tel, dans sa particularité linguistique et culturelle. Particularité qui fait que ses mots sont celui d'aucun autre ... L'écho que l'on donnera à cette parole primitive, la mise en relation que l'on fera des différentes écritures des enfants de nos classes, l'importance qu'on leur signifiera, les liens scripturaux que l'on favorisera, la diffusion que l'on en aura, le temps que l'on accordera à ce mouvement perpétuel qu'est l'aller - retour incessant entre ce qui est écrit, et la réponse qu'on lui offre (flux et reflux...), ce lent travail d'artisan, pourra, si l'on s'y astreint, permettre à l''e9crivain de tous les jours de trouver sa place dans le monde si fermé de l'écrit. De cette territorialité première jaillira les prémisses de l'exercice d'une pensée originale, favorisant l'émergence d'un être respecté dans sa parole et dans sa différence.

 

Et j'exerce ma plume

Comme l'artisan sa main

Pour la sentir maîtresse

Prêtresse de l'écrit.

 

Jenny Desbois

 

Extrait de « Chantier 44 », bulletin du groupe Freinet de Loire-Atlantique.

 

 

Les textes

Je n’avais pas de textes.

Je cherchais une échelle

Qui devait descendre jusqu’au fond de moi.

J’en découvris une et la glissai doucement.

 

J’attendis.

 

« Peut-être les textes sont-ils sportifs ? »

Je remplaçai l’échelle par une corde lisse.

Mais les textes refusèrent à nouveau

De grimper.

 

Je compris alors que j’avais affaire

A des textes très sensibles.

Je tissai une autre échelle,

Mais cette fois en tiges de marguerites.

 

Et un par un,

Ou deux par deux,

Ou trois par trois,

Ils montèrent tous les jours.

Françoise, 12 ans.

Extrait de « Poèmes d’enfants », Ed casterman

 

 

J’écris…

Je suis devant une feuille, des idées se chiffonnent dans ma tête. Aucune ne me convient, je cherche… J’ai beau chercher je ne trouve toujours rien… C’est comme un bourgeon qui ne veut pas s’ouvrir, une vague qui ne s’éclate pas…

… Mais tout à coup, une idée s’envole comme un papillon, elle déplie ses ailes, elle naît comme une feuille qui germe, comme une vague qui s’ouvre. Je la saisis en me disant que c’est la bonne.

Mais elle ne me plaît pas.

Je continue, je n’arrive pas à me concentrer, des bruits de stylo se font entendre.

Et finalement j’ai écrit ce texte, en pensant que je devais dire ce que je ressentais en l’écrivant.

Adrien B. Ecole Brunschvicg de Lille

 

 

Le 29/04/99

Une idée.

 

Je cherche une idée,

Une idée de poème, une idée d’histoire,

Bref une idée de texte.

 

Je cherche quelque chose à dire,

A raconter, à exprimer,

Et puis je cherche aussi une idée de titre…

Je cherche, je cherche, je cherche.

Puis je trouve !

Et voilà !

Je vois les mots arriver,

Je regarde comment ils se sont accrochés les uns aux autres

Pour s’inventer un chemin, une phrase, un texte…

 

Il ne me reste qu’à le lire,

le murmurer ou le crier à tout le monde !

 

Amélie. P Ecole Brunschvicg de Lille

 

 

CREATION

Dans mon jardin intérieur

Ma fleur création est toujours en bouton.

Elle ne veut pas s’ouvrir.

Une idée papillon tourne.

S’amuse, puis se pose.

 

Puisque ma fleur création

Est en bouton,

Il ne me reste plus,

Si je veux écrire,

Qu’à vite attraper l’idée papillon.

 

Je le poursuis :

Il me joue des tours…

Il monte… descend… tourne.

S’arrête, se repose sur ma fleur.

Je le regarde fixement,

Et je pense :

Si je passe par ici…

Il va partir par là…

 

D’un geste rapide et violent

J’essaie de le capturer :

J’y parviens… mais hélas,

Je l’effraie…

Il perd toutes ses idées.

Alors ma fleur création s’ouvre

Et je récolte mes idées.

Antoine, 11 ans.

Extrait de « Poèmes d’enfants », Ed casterman

Cache-cache micro

Octobre 2000

 

Radio à l’école, une pédagogie de l’oral active

Cache-Cache Micro

Il y a quatorze ans naissait le projet « CACHE-CACHE MICRO ». Comme son nom l’indique, (ou pas d’ailleurs !), il s’agit d’une émission de radio préparée, conçue et réalisée par et pour les enfants.  Une présentation de Martin Wenz*.

 

·                Martin Wenz, membre du groupe Freinet 54 (Meurthe et Moselle), enseigne en classe unique dans un réseau d’écoles du Toulois : Charmes la Côte, Francheville, Moutrot et Villey le Sec.

 

 

Une plage horaire

réservée aux écoles

sur une radio associative  

Tous les jours, Radio Déclic, une radio associative sans publicité (et pas une radio scolaire..) prête ses ondes aux écoles. Tous les jours, à 13 heures 35, on peut brancher Radio-Déclic et entendre une classe raconter une histoire, parler d’un livre, relater une visite, présenter un débat, étudier un sujet... (encart pages II et III)

 

Le principe de l’interaction

Chaque vendredi, un débat est ouvert à tous ceux qui écoutent, en général à propos de l’émission du lundi. Les enfants téléphonent directement à la radio et donnent leur point de vue en direct. Enfin, un jeu, le Cherche-Cherche-Mieux, est proposé juste avant les émissions, il s’agit pour une classe de poser des questions aux auditeurs(tout est permis, du plus sérieux au plus farfelu). Ces derniers ont toute la semaine pour répondre par téléphone, fax, internet ou courrier. Les réponses sont données sur les ondes la semaine suivante.

 

L’oral, priorité de l’école primaire, ce n’est pas nouveau pour ces écoles !

   Mettre en situation fonctionnelle d’apprentissage et de communication, rendre les enfants producteurs et critiques nous ont déterminé pour cette aventure radiophonique.

Certes, il y a bien d’autres moments et occasions pour développer l’oral dans la classe... mais, je ne pourrais qu’insister sur ce qui me semble spécifique à cette activité.

 Imaginez que les enfants qui produisent ces émissions en écoutent aussi et sont étonnamment capables de formuler des critères de « réussite » d’une émission. Chaque écoute doit correspondre à une parole et chaque parole à une écoute. Le produit fini que représente l’émission produite renvoie aux enfants la possibilité de percevoir leurs capacités à accomplir une tâche, et d’aller jusqu’au bout d’un projet.

 

Coopérer pour réaliser un projet

Imaginez les enfants accepter, décider de redire et encore redire pour que le résultat soit impeccable.... C’est aussi solliciter l’interaction ponctuelle ou continue de certaines classes ou écoles entre elles (projets communs, recherche d’information que telle ou telle autre école peut fournir.... Et aussi permettre aux parents de partager un petit moment de classe avec leurs enfants (notamment grâce au rediffusions du soir et du samedi).

 

 

Travailler l’oral ?  

Alors, un travail oral comme un autre ? Non, pas tout à fait :

· un plus un peu magique côté motivation... (c’est chouette, la technique...) ;

· un plus coté dimension (combien de classes nous ont écouté ?...) ;

· un plus côté mémoire... (on garde de la parole... pas courant.)

· un plus côté qualitatif... (enfin, le toilettage technique aide un peu...). Un oral que l’on retravaille, transforme, modèle comme un écrit…

· un plus côté classe : une ouverture des classes sur les autres classes.

(encart pages IV à VII)

 

Dans le prolongement de la radio, la fête de l’expression et de la communication  

Dès le début de ces productions est née aussi l’idée de faire se rencontrer les enfants qui toute l’année communiquent par les ondes (encart page VIII). Alors, pour créer cet événement, tous les ans, à la veille de la fête des mères, on se retrouve dans un des villages du Toulois qui décuple sa population pour quelques heures, lors d’une journée un peu folle. Chaque classe arrive avec un ou plusieurs ateliers en relation avec le thème de l’année (l’écologie, la récupération, la musique, le mouvement, le passage à l’an 2000, le merveilleux et le féerique....) et les enfants vont et viennent librement à travers tout le village fermé pour l’occasion à la circulation. En début d’après midi, une parade-défilé clot la participation des écoles. Le village peut reprendre le flambeau des animations jusque très tard... ou très tôt.

Martin Wenz

http://www.ac-nancy-metz.fr/ia54/site/sitecom/

 

NOS LIENS:

 

@ L'école: http://www.ac-nancy-metz.fr/IA54/site/moutrot/default.htm

@ Le journal à 4: http://www.ac-nancy-metz.fr/IA54/site/ppj/default.htm

@ LE SECTEUR DU TOULOIS, avec plein de copains dynamiques : http://www.ac-nancy-metz.fr/IA54/site/frame.htm

@ La fête Expression et communication : http://www.ac-nancy-metz.fr/IA54/site/ccm/fetcom/sommaire.htm

  

Une interview réalisée en classe pour la radio.

 

 

Réaliser une émission : différentes approches.

 

 

Première approche :

La réalisation d’émission est vue par certains enseignants comme une mise en valeur d’une production des enfants. L’enseignant réutilise un travail déjà fait en classe. Autrement dit, le travail, les recherches qui ont été faites n’avaient pas pour finalité de devenir une émission.

L’enfant est mis en position de production d’un certain savoir, d’une certaine maîtrise d’un sujet et avec l’émission ”on fait profiter” les autres d’une recherche que l’on a accomplie. Dans ce cas, l’émission revêt une double fonction : celle de mettre en valeur une production au sein de la classe et celle, dans la situation de communication propre à la radio, de donner à d’autres enfants, à d’autres classes la possibilité de bénéficier d’un travail que l’on a fait, avec l’enjeu que l’émission profite aux autres.

Deuxième approche:

On saisit les situations quand elles se produisent. Le thème n’est pas prédéfini, il est capté “au vol”, dans le feu d’une discussion, d’un événement, d’une situation de communication présente dans la classe. Là, il n’y a pas, ou peu d’écrit support à l’expression, ce n’est pas “ de l’écrit oralisé”, mais un oral spontané, peut-être moins parfait, mais plus “vrai”.

Troisième approche:

L’enseignant apporte lui-même le sujet. Voici un exemple dans l’une des premières émissions de l’année : il s’agissait d’imaginer ce que penseraient les hommes en l’an 20 012 en découvrant des objets de l’époque actuelle: une télé, un four... Le but était de capter l’attention des auditeurs en les amusant, et il leur était proposé de prendre d’autres objets, d’en faire une interprétation futuriste et d’exposer ces devinettes au forum. Les enfants ont donc effectué des recherches, ont écrit le scénario, puis ont enregistré leurs descriptions étonnantes. Ce qui est important dans ce type de démarche, c’est la prise en compte de l’auditeur, dans ce que l’on veut produire comme effet. La situation de communication “émetteur-récepteur-code-message” détermine la forme de l’émission.

 

 

Extraits d’interview d’enseignants, pratiquant ou non un pédagogie coopérative :

 

 

- Pourquoi faîtes-vous écouter les émissions de radio Cache Cache Micro aux élèves?

- Pour diversifier l’écoute. On a l’habitude d’écouter la maîtresse, les autres enfants de la classe ou de la musique mais avec Cache-cache Micro, c’est une voix qui vient d’ailleurs ; pour les enfants cela a quelque chose de magique, ils sont drôlement attentifs. C’est un moyen de savoir ce qui se passe ailleurs. Ils s’aperçoivent que d’autres écoles ont travaillé sur la même chose que nous, c’est intéressant, ça donne des pistes nouvelles.


- Utilisez-vous, prolongez-vous parfois les émissions de radio?

- Presque à chaque fois, soit par un débat, soit par une vérification d’écoute, soit par un travail sur le sujet traité dans l’émission.

- Il y a toujours une discussion libre à l’issue de l’émission écoutée. On ne peut pas préparer l’écoute car on n’a pas les sujets des émissions à l’avance, donc le débat reste parfois peu approfondi. Quand il s’agit d’un thème qui a été abordé en classe, on essaie de comparer , de se souvenir de ce que l’on avait fait.

D’autre part, j’enregistre les émissions qui ont plu aux enfants, ce qui me fait une banque de documents sonores pour mon coin écoute.


- Qu’est-ce qui conditionne la qualité d’écoute des élèves?

D’une part sa qualité technique : des émissions pas trop longues, mais entrecoupées de comptines, chants pour que les enfants ne soient pas obligés de rester attentifs trop longtemps.

D’autre part, le rituel : les enfants savent qu’on écoute la radio tous les mardis et jeudis, au même moment. Cette habitude est important, ils s’attendent à devoir être attentifs, et à bien écouter.


- Que se passe-t-il du côté des élèves pendant l’écoute ?

- Ils se sentent concernés par certains sujets. Parfois certains se fixent sur un mot, une phrase et en restent là, mais quand l’émission est inductrice de débats ils voudraient alors intervenir tout de suite. C’est gros un travail d’écoute, car il ne faut pas réagir dans l’instant, sinon on perd le fil. On apprend à attendre et à préparer son argumentation.



 

 

Page I

Radio à l’école, une pratique au quotidien

Cache-Cache-Micro

 

Un réseau d’écoles du toulois (54) :Charmes la Côte, Francheville, Moutrot, Villey le Sec.

 

 

Page II

La programmation actuelle offre quatre émissions hebdomadaires diffusées à 13h35 :

- lundi : émission à destination des grandes classes apportant des informations précises et proposant un sujet d'enquête, de réflexion ou de débat pour la semaine ...
- mardi : émission préparée par, et pour les enfants de Cycle II.
- jeudi : émission préparée par, et pour les enfants de Cycle I et II.
- vendredi : émission Forum faisant suite à celle du lundi. Grâce à un Triplex téléphonique avec le studio, les enfants peuvent confronter leur point de vue, débattre ou questionner des invités adultes ...
Une rediffusion de l'ensemble des émissions est faite le samedi.

 

Page III

 

Quels contenus d’émissions ?

 

Des documentaires :
l’œil
le Groenland

Des reportages, des enquêtes, des interviews :
le maire et la mairie de Villey Saint Etienne
le boulanger d’Allamps
le patrimoine culturel de nos villages
une journée chez nos correspondants
visite de Verdun
interview de Renaud
interview des Muvrini

Des devinettes ( classiques et sonores)

Des débats
la chasse
les événements marquants de 1998
les bêtises
le racisme
la pollution
Le bonheur

Des histoires :

lectures de contes d’auteurs ou inventés
les archéologues de l’an 20 010

Des poésies :

lectures de poésies d’auteurs ou inventées

Question de Louis (Cp) au boulanger interrogé
“ -Pourquoi t’as voulu faire ça comme métier?
-Ben, l’école, j’aimais pas ça, alors j’ai appris avec mon père, comme ça.
- Qu’est ce que tu aimes dans ton métier?
- Faire du bon pain, et répondre aux questions des enfants.”

 

Page IV et V

Cache-Cache Micro, dans une classe maternelle (PS MS GS)
Témoignage de Yolande Valentin, enseignante en maternelle à propos de l’émission réalisée cette année par sa classe.

Au départ les enfants écoutaient l’émission d’une oreille distraite avant d’avoir eu l’occasion de produire pour les autres. C’est en faisant l’effort d’être producteurs qu’ils ont compris l’importance du récepteur (ici auditeur).

1ère étape : Il a d’abord fallu que le micro nous apprivoise.

Tout un travail d’acceptation de soi au travers d’un enregistrement a permis de se sentir à l’aise. C’est pour cela qu’on a inventé des devinettes sonores (imitations du chat...), pas besoin de parler, il suffisait d’imiter un bruit, on a bien ri et c’était si confortablement anonyme !
Mais lors de la séance suivante un petit bout de chemin avait été parcouru : « moi, je veux bien parler dans le micro,... oh, c’est drôle, on dirait pas que c’est moi… ».

 Et tout le monde a voulu essayer : « ah, oui ça c’est N. .… parce qu’elle dit toujours, comme ça !... Mais on ne comprend pas ce que tu dis » .

2ème étape : il a fallu envoyer des messages que les copains puissent comprendre.

Finalement, après tous ces jeux, l’oreille est devenue de plus en plus attentive aux émissions des autres… mais aussi très sévère au niveau des critique : « il n’explique pas bien, on n’entend rien, parle plus fort … »
Ce que les enfants préfèrent ce sont les émissions drôles, avec des chansons rythmées ou bizarres et surtout avec beaucoup de devinettes faciles...
C’est de là qu’est partie l’idée de chanter du Steve Waring « le son de ta peau », de raconter et surtout de faire le bruitage de l’histoire « PROUT, l’éléphant qui pétait tout le temps » ainsi que d’inventer des devinettes sonores faciles.
Les enfants ont construit l’émission en rapport avec ce qu’ils attendent en tant qu’auditeurs. Ce qui leur a surtout permis de comprendre que les auditeurs sont réels ce sont les réponses envoyées par les enfants de l’école de Moutrot : un poster géant sur lequel toutes les réponses des devinettes étaient dessinées.

La boucle est bouclée !

On n’a plus peur de parler au micro, on sait qu’on est écouté, et en plus maintenant on respecte les émissions des autres , c’est ça Cache-Cache Micro… mais ça n’est pas que cela , désormais nous allons à la rencontre d’autres plaisirs… à la radio !

Les émission sont enregistrée en classe…

 

… ou en direct en studio

 

 

Page VI et VII

Préparer

l’émission

 

Page VIII

La fête de l’expression et de la communication

 

   Créer l'événement chaque année dans un village où se rencontrent 1500 à 2000 enfants issus des écoles du toulois à travers des ateliers de créatiAon, de découvertes, et surtout d'expression et de communication, tel est l'esprit de cette fête.
Ces enfants réunis quotidiennement sur les ondes de radio Déclic lors de l'émission Cache-Cache-Micro ont ainsi l'occasion de se rencontrer et de partager.

Cette fête est l'aboutissement d'une volonté mise en oeuvre depuis le début de l'année scolaire dans chacune des quelques cinquante classes du groupe Cache-Cache Micro.

 

Chaque année, un travail pédagogique est entrepris autour d'un thème fédérateur (les thèmes de ces dernières années : la musique à travers le temps et l’espace, le mouvement dans tous ses états, l’enfant écocitoyen, le cinéma a 100 ans, une fête au Moyen-Âge, le jeu, l’air…)



 



 



 

 

 

Construire des équipes, un chantier ambitieux

Octobre 2000

Pour beaucoup de militants des mouvements des pédagogiques, travailler en équipe semble être une réponse à l’échec scolaire. Ils y voient un lieu où la cohérence et la continuité des apprentissages permettent de mettre en œuvre leurs principes et d’en montrer la validité.

Nombreux sont les projets anciens ou actuels de constitution d’équipes, appuyés sur les acquis des recherches pédagogiques.

Pourtant, des critiques virulentes, venant parfois de milieux progressistes, mettent en cause la pédagogie. Celle-ci serait responsable des échecs persistants des jeunes issus des milieux défavorisés. Peut-on ignorer cette interpellation ?

Le travail en équipe est-il un simple moyen permettant aux enseignants de travailler autrement ? Ne constitue-t-il pas une fuite ? Ces projets ne risquent-ils pas de constituer des îlots, des ghettos, des excuses pour le conformisme ambiant ? Comment peuvent-ils échapper au risque de l’enfermement et diffuser leurs démarches ?

Tels sont quelques-unes unes des questions que posent les projets de constitution d’équipes dans le premier ou le second degré.

Conscients de ces écueils, l’ICEM et son chantier équipes se sont engagés depuis quatre ans dans une réflexion tant pédagogique qu’institutionnelle. Ce travail a débouché sur l’élaboration d’une plate-forme des équipes Freinet.

À la suite à son congrès, l’ICEM a pris l’initiative d’une rencontre des mouvements pédagogiques, des équipes en voie de constitution et des individus concernés par cette démarche.

Le moment semble propice. Le ministère a annoncé que quatre structures publiques innovantes pourraient ouvrir dès la rentrée 2000/2001. D'autres projets rencontrent encore des difficultés administratives ou cherchent leur spécificité. Des individus isolés souhaitent certainement participer à la constitution de nouvelles équipes. Le comité de l’innovation, présidé par Anne-Marie Vaillé, peut ouvrir des perspectives intéressantes pour ces initiatives.

Il nous semble important que les mouvements pédagogiques, les groupes et les individus intéressés mettent en commun leurs projets avec, toutefois, la volonté de respecter les principes du service public d’éducation.

Dans le premier degré, des équipes Freinet fonctionnent depuis de nombreuses années. Leur expérience peut être profitable et aider à l’élaboration de nouveaux projets au premier comme au second degré.

À tous les niveaux d’enseignement, il faut aussi travailler à l'émergence d’équipes qui pourraient participer activement à la formation de jeunes enseignants en relation avec les IUFM ou avec les organismes de formation associés , tout en offrant des terrains d’évaluation à des recherches menées par des chercheurs, des universitaires ou l'INRP.

Il s’agit d’apporter la preuve que la réussite de tous les enfants, sans distinction d’origines, au sein des établissements publics est un objectif réaliste.

Il n’est pas question pour nous de développer des établissements privés sous contrat au sein de l’éducation nationale. C’est pourquoi nous avons mis au point, après concertation avec les syndicats, un système de nomination au sein des équipes clair et transparent.

C’est à ces conditions que nous pouvons nous fixer cet objectif ambitieux : faire vivre, au minimum, une école et un collège Freinet dans chaque département

 

Jean-Marie Fouquer

Président de l’ICEM-Pédagogie Freinet

 

Faire vivre l’écrit

Octobre 2000

 

Faire vivre l’écrit

Mettre en scène l’écrit, jouer librement avec l’écrit, par exemple en le transformant en dessin, ou en l’intégrant dans un dessin... jouer avec l’écrit, c’est dédramatiser le rapport à l’écrit et ouvrir l’enfant à une maîtrise, joyeuse, de l’écrit.
 
Nos prénoms mis en scène - CE1 École annexe de Mende (48) - Classe de Mado Deshours
 
 
Extrait de Press’ Press » Journal. RPI des écoles du Toulois (54)
 
 
Extrait du « P’tit reporter ». École Lavoisier de Gagny (93)
 
 
Le mot dessiné
Dans un Cours Préparatoire - Anne-Marie Mislin.
Cette réflexion d’un enfant au sujet du mot « bateau » me met la puce à l’oreille : « Si je fais la barre du T plus grande, on dirait que c’est le mât du bateau et le petit trait je le dessine comme un drapeau ! »
 
 
 
Je me souviens alors d’un « jeu » d’observation et d’imagination proposé par Jean-Hugues Malineau dans le petit recueil « L’enfant et la poésie » (Coll. Poésie 1) : le mot dessiné.
Il s’agit de typographier un mot (nom, verbe ou adjectif) en essayant d’en faire comprendre le sens grâce au dessin, comme si l’enfant expliquait par le graphisme un mot à un étranger. Il doit respecter la forme des lettres mais il peut en varier la disposition ou la grandeur, il peut en outre répéter le mot plusieurs fois et le disposer à sa guise dans la page.
Voici les mots proposés par les enfants :
 
 
Dans une classe de 5ème -
Classe de Monique Bolmont
 
 
A lire également l’ouvrage de Joël Guenoun, Les mots ont un visage, Editions Autrement.
Article paru dans Chantiers Pédagogiques de l’Est.



 

 

La campagne d'Alexandre le petit

Octobre 2000

 

CHRONIQUE DE L'ÉCOLE ORDINAIRE

 

La campagne d'Alexandre le petit

 

Alexandre le petit a quitté pendant les vacances la banlieue parisienne et sa classe de perfectionnement. Il habite maintenant un village regroupé avec deux autres pour la scolarité des enfants : 3 écoles, 3 villages.

A la rentrée, il est un peu perdu ; les maîtres sont bien embarrassés : les effectifs sont chargés. Il a 8 ans, une petite taille, un petit niveau de cours préparatoire, mais il lui faut quand même une place assise. La directrice se dévoue et lui en trouve une dans son CM2.

Le premier jour il s'embête un peu. Il bouge sur sa chaise, bricole ses petites affaires. Ce n'est pas tolérable pour la directrice-maîtresse. Elle convoque le conseil des maîtres. Il reste une place dans la grande section de maternelle d'un autre village. La maîtresse veut bien l'accueillir. Alexandre le petit devient donc le grand de sa classe. Une promotion ! Ça se passe plutôt bien. Il est au calme. Il refuse quand même certaines activités trop bébé à son goût et n'apprend pas grand-chose.

Arrive par hasard le conseiller pédagogique qui s'étonne, va négocier avec la maîtresse du CE2 et alerte la commission de circonscription. Alexandre aura au moins des camarades de son âge avant de rejoindre la classe de perfectionnement de la ville voisine. Il "fait" des polycopiés de grande section de maternelle, participe un peu aux activités d'éveil, à l'éducation physique, se fait remonter les bretelles le jour où il apporte une souris...

La locomotive administrative s'ébranle. La Commission n'a pas encore reçu les tableaux d'effectifs. La décision d'affectation en classe de perfectionnement mettra un mois pour parvenir au CE2 (30 jours pour 9 km soit 300 m par jour).

Début novembre tout est réglé. Alexandre le petit prend l'autocar jusqu'au collège... Là il devrait sauter dans un bus pour rejoindre sa nouvelle école, où sa nouvelle maîtresse l'attendrait certainement si elle avait été prévenue... Mais il n'a pas bien compris; il visite le collège... Grâce au téléphone on finit par s'arranger : Alexandre est enfin dans la classe où il avait été "orienté" un an avant. Il progresse.

Pendant toutes ces (et ses) pérégrinations, ses parents ont fait preuve d'une empathie inoxydable ressemblant beaucoup à de l'indifférence : ils n'ont rien dit.

Heureusement, leur indignation éventuelle aurait pu retarder l'intégration scolaire de leur enfant...

 

Jean Louis Maudrin

 

 

Les bulletins départementaux de l'ICEM

Octobre 2000

A l’exemple du journal scolaire, le bulletin est vraiment un outil d’expression et de coopération du groupe départemental. En ce sens il reflète parfaitement la vie du GD : ses points forts comme ses faiblesses. Il est vrai que, dans nos structures de travail, nous avons toujours la fâcheuse habitude de mettre plus en avant nos problèmes que de constater nos réussites ! Or, combien de mouvements pédagogiques peuvent revendiquer l’existence de plus d’une trentaine de bulletins départementaux, régionaux et de secteurs ?

Éducateurs, nous sommes tous confrontés aux mêmes questions et aux mêmes difficultés, pour lesquelles il faut sans arrêt trouver des réponses. Nos bulletins marquent la trace de notre travail coopératif et le compagnonnage pédagogique. Échanger nos compétences et nos savoir-faire, mais aussi parler de nos tâtonnement, de nos essai-erreurs, dans l’esprit de nos choix pédagogiques, tels sont les objectifs de nos bulletins départementaux.

Patrick Pierron

 

Dans la voie d’une construction permanente d’une pédagogie où l’expression libre, la recherche, la création et la coopération, à la suite de Freinet, sont des lignes de force, tous les éducateurs ne sont pas engagés de la même manière ; ils n’ont pas tous la même aisance pour témoigner par écrit de leur pratique... mais, tous ont la possibilité de participer au contenu du bulletin : décrire et théoriser une pratique, présenter la recherche d’un enfant ou d’un groupe, analyser l’évolution d’une classe, envoyer des textes ou des dessins d’enfants, envoyer le journal scolaire de sa classe, signaler voire commenter la parution d’un article ou d’un ouvrage intéressant notre pédagogie, décrire un petit truc pour répondre à une difficulté de la vie quotidienne de la classe, etc.

 Chantier Pédagogiques de l’Est.

 

 



Les Bulletins Départementaux de l’ICEM

 

13 - Educadoc -

 Liliane Corre, chemin du jas blac 13840 ROGNES

tél : 0442502191 fax : 0442502191

Email : Xalil.Nicquevert[arobase]wanadoo.fr

 

14 - ICEM 14 -

Ecole Freinet - 14200 Hérouville Saint Clair

tél/fax : 0231956439

Email : ec.freinet2.caen[arobase]etab.ac-caen.fr

 

19 - L'éducateur corrèzien -

 Louis Planche, le Bourg 19270 Ussac

 

20 - Info - ICEM2B -

 Jacques Marchi, école, route de Revinco - 20290 Borgo

 

25/39/67/68/70/90 - Chantiers Pédagogiques de l'Est -

Lucien Buessler, 19 rue du vallon 68700 Steinbach

tél : 0389398403

Email : idem68[arobase]aol.com

 

31 -32 - 64 - 82 - Brocolicem -

Elisabeth Barrios, école de Monsaunès 31260 Montsaunès

tél : 0561906801

Email : michel.barrios[arobase]wanadoo.fr

 

33 - Liaisons 33 -

Ecole Martinon, rue C. Freinet 33170 Gradignan

tél : 0556891881 fax : 0556896833

Email : jl.bellue[arobase]wanadoo.fr

 

34 - 81 - 30 - 11 - Artisans Pédagogiques

Annick Lemahieu, CR 61, route de Pézenas, 34500 Béziers

Email : a.lemahieu[arobase]wanadoo.fr

 

35 - 56 - L'Echo Producteur

 Sylvie Guergnon, Ecole L. Grimault -22 Bd Léon Grimault 15700 Rennes

Email : pierrick.idem35[arobase]wanadoo.fr

 

41 - La petite porte -

Philippe Wain, 27b, rue des Malvas, 41200 Romorantin

tél : 0254769318

 

42 - Au fil de Lo -

 Roland Huguet, Ecole Publique, place du bourg, 42310 Le Crozet

tél : 0477641681 fax : 0477641948

Mail : roland.huguet2[arobase]wanadoo.fr

 

44 - Chantiers 44 -

 Yves Fradin, 47, levée de la Divatte, 44450 St Julien de Concelles

tél : 0240368343 fax : 0240493845

Mail : Christian.Dupuis[arobase]wanadoo.fr

 

59 , 62 - Ch'ti qui -

Daniel Villebasse, 52B, rue du calvaire 59200 Tourcoing

tél : 0320251128

Email : union.post.scolaire[arobase]free.fr

 

60 - 80 - Sur la brèche -

 Olivier Francomme, Le Plouy Louvet 60112 Herchies

tél : 0344810191

Email : ofrancom[arobase]club-internet.fr

 

69 - Freinésies -

Michèle Bovagnet-Mignon, 5, chemin des hauts de Cellette, 69540 Irigny

tél : 0478463647

Email : claude.bochard[arobase]wanadoo.fr

 

71 - GEM 71 INFO -

Claude Crozet, le bois de Laye, 71800 St Julien de Civry

tél : 85706013

E mail : crozetcc[arobase]aol.com

 

75 - 93 - 94 - 95 - L'autre Ecole -

 Rémi Brault, 41, grande rue, 95270 Asnières/Oise

tél : 0130353778

Email : remi.brault[arobase]freinet.interpc.fr

 

77 - La Roue -

Philippe Lamy, 1, rue de Douy, 77410 Annet/Marne

tél/fax : 0160267260

Mail : philippe.lamy[arobase]freesbee.fr

 

83 - L'Ajuda -

Patrick Aslanian, Campagne les six vents, quartier les Piéjaux, 83170 Tourves

Email : pka[arobase]wanadoo.fr

 

89 - Echange 89 -

IDEM Yonne - 3, Route d'Auxerre, - 89110 Aillant/Tholon



NB : Cette liste n’est pas exhaustive.

 

Mac Do, mac-esclavagiste

Octobre 2000

Mondialisation, multinationales, marchés financiers, spéculation, système libéral... des grands mots. Au quotidien, cela veut dire que tout est bon pour les profits. Que les enfants participent à la croissance semble ne pas déranger les multinationales, surtout si cela ne se sait pas. L'exemple de Mac Donald's, entre autres, est significatif de ces pratiques.

Éducateurs Freinet, qui militons pour les droits des enfants, nous ne pouvons fermer les yeux sur les conditions de vie offertes aux jeunes à travers le monde. Nous ne pouvons passer sous silence le travail forcé des enfants, surtout lorsqu’il est destiné au plaisir ou à l’amusement de nos propres enfants ou de ceux qui nous sont confiés. C’est pourquoi, il m’a semblé indispensable de reprendre ici le texte communiqué par ATTAC Suède[1].

« La majorité des 400 travailleurs qui produisent les jeux destinés aux Joyeux Repas (Happy Meals dans les restaurants français) des Mc Donalds n'ont pas encore 14 ans. La journée de travail est de 16 heures tous les jours de la semaine et ils dorment entassés dans des chambres tout près de la manufacture.
Cette fabrique a été découverte par le South China Morning Post grâce à une information du Comité Industriel Chrétien dont le siège est à Hong Kong. La fabrique City Toys est située aux environs de Shenzhen, dans le Sud de la Chine. Les jeunes ont seulement deux jours libres par mois mais ils ne peuvent sortir de la zone parce qu'il n'y a aucun transport vers la ville.
Les dortoirs ont une surface de 18 mètres carrés, sans services sanitaires et les lits n'ont pas de matelas. Quinze jeunes dorment dans chaque pièce. Une jeune travailleuse a raconté au journaliste qu'elle n'avait pas encore 14 ans mais qu'elle avait reçu de l'aide pour falsifier ses documents d'identité.
Wang Hanhong, un autre de ces jeunes, a raconté que ses parents n'aimaient pas qu'il travaille chez City Toys mais qu'il devait le faire pour pouvoir les soutenir.
Le plus étrange, selon le représentant du syndicat, c'est que tous dans la région savent que ces jeunes falsifient les documents pour augmenter leur âge, même si on peut voir facilement qu'ils n'ont pas
12 ans. Le divertissement dans les temps libres consiste en des films sales et le contact avec les parents est difficile puisqu'il n'y a qu'un téléphone généralement brisé.
Mats Lederhausen, membre de la direction internationale de Mc Donalds s'est montré très surpris de la découverte de la fabrique même si les jouets pour les Joyeux Repas sont commandés directement à la Chine.
Pour couronner le tout, le gérant de City Toys a déclaré qu'il n'était pas au courant de la présence d'une force de travail infantile dans la fabrique.
Le gérant de Mc Donalds en Suède, Anders Bylund, s'est montré lui aussi très surpris et il a imploré Dieu que ce ne soit pas vrai. (…)
Il est vrai que le rapport de l'Organisation Internationale du Travail indique qu'en Chine 11% des travailleurs, c'est à dire 13,3 millions d'enfants sont exploités dans des manufactures qui fournissent divers articles aux compagnies transnationales.
(…) Les jeunes travailleurs de City Toys racontent que les symptômes les plus communs sont: les crampes, les douleurs à la poitrine, les maux d'estomac et de tête, des étourdissements permanents de même que des infections broncho-pulmonaires, des diarrhées et des parasites.
Marx dans ses écrits sur l'Inde dépeint un monstre qui aime boire son nectar dans le crâne des sacrifiés ; il est encore bien vivant et remue la queue.
Je m'arrête ici parce que je sens déjà les nausées provoquées par un sentiment d'impuissance momentanée devant une opinion qui croit aux miracles de la globalisation et devant l'existence d'autant d'impostures doctrinales au service des multinationales.[2] 
»
Le sentiment de révolte est trop fort devant de telles injustices. Nous devons les dénoncer. L’ICEM a commencé en s’associant à la campagne lancée par le collectif De l’éthique sur l’étiquette[3]. Multiplions l’information auprès des jeunes de nos classes et de leurs familles. Agissons avec eux pour que les multinationales cessent de voler l’enfance de tant de jeunes pour en amuser d’autres, tout en s’engraissant au passage. Relayons les sites d’information qui dénoncent ces pratiques scandaleuses. Ensemble, faisons pression pour obliger les multinationales comme la grande distribution à garantir la qualité sociale des produits qu’ils vendent. Déjà un texte de loi « visant à inciter au respect des droits de l’enfant dans le monde, notamment lors de l’achat des fournitures scolaires[4]» a été voté. Dans la foulée de la campagne « Pour l’école consommons éthique », dénonçons l’exploitation scandaleuse à laquelle se livre Mc Donalds  et le cynisme avec lequel il la camoufle ! 

 

Jean-Marie Fouquer
 
 

 


[1] sverige[arobase]attac.org (sverige[arobase]attac.org)

[2] Ricardo Bonett Locarno. Membre d’ATTAC en Suède.

[4] Loi n° 99-478 du 9 juin 1999.

 

Semaine de la poésie

Octobre 2000
Le temps de lire

Semaine de la poésie

Chaque année, il est décidé de vivre un temps fort autour de « l’Écrilire » sur l’ensemble du groupe scolaire Léon Grimault* de Rennes. Cette fois, c’est la poésie qui va nous fédérer durant une semaine et plus...
 
« Le temps d’Écrilire », une institution désormais à l’école Léon Grimault. Chaque année toutes les classes se retrouvent pour une semaine au minimum autour d’un thème, prétexte à des échanges « écrits-lus ». L’année dernière, c’était la BD, avant ça a été le conte ou encore la presse… Cette année, la poésie.
 
L’équipe Freinet de l’école Léon Grimault de Rennes...
 
En amont
· Information auprès des familles à qui nous proposons cette année de coopérer en apportant à l’école un poème recopié ou créé sur une feuille ou sur un objet. Le but est de se les offrir, entre parents, enfants, intervenants et enseignants.
· Installation dans le hall d’entrée de « murs de poèmes », supports de ces apports et des créations réalisées durant la semaine.
(en carton ondulé maintenu debout, agrémenté de tulle noir, ainsi que des panneaux muraux.)
· Aménagement de la salle d’expression corporelle où nous installons « une tente à poèmes » (la maternelle installe aussi sa tente).
· Contrat passé avec une poète, Mme Nicole Laurent-Catrice, qui interviendra auprès des cycle 3.
· Préparation avec les intervenants réguliers et les stagiaires IUFM.
 
Projets collectifs
Les objectifs :
- permettre à tous les enfants de rentrer dans la magie de la poésie par sa lecture, son écoute, sa création ;
- développer les échanges entre les classes et le tutorat petits-grands ;
- s’associer au projet de quartier , en lien avec les travailleurs sociaux : « Talents anonymes » (expressions artistiques et culturelles des habitants du Landrel)
- réalisation de productions à partager, à écouter (gazettes, Cdrom, CD son, recueils, représentations courtes..
En cycle 2, création d’un panier à poèmes.
 
 
Légende :
- Qu’est-ce que vous aimez comme poésie ?
- Sacha (GS) : J’aime bien les poésies parce que c’est rigolo et ça fait rêver.
 
 
Un projet d’ouverture
A la différence d’autres semaines « écrilecture » où on s’attarde coopérativement sur un type d’écrit pour mieux le maîtriser, une semaine de poésie est une parenthèse où la familiarisation se satisfait facilement d’un bain d’écrits et de lectures poétiques. Chacun(e) peut se noyer allègrement dans le flot des œuvres enfantines ou adultes exposées dans le hall aménagé spécialement.
 Il y a bien eu l’initiation à la technique des haïkus ou « le jeu de l’énigme poétique » (évoquer un mot concret sans le nommer, en mettant des jeux, des indices) avec la poétesse. Les haïkus lancés dans chaque classe étaient appelés à tourner dans les différents classes pour susciter des suites d’haïkus.
Les haïkus, dans leur petite gymnastique, ont agi comme un véritable échauffement, en ouvrant pour de nombreux enfants sur d’autres créations personnelles essentielles. En même temps, ils permettaient à tous de se mettre en action facilement.
Et puis nous sommes allés porter quelques-unes des œuvres de la classe au forum du Landrel où sont organisés « Les talents Z’anonymes », manifestation annuelle sur le quartier où les habitants viennent afficher leurs œuvres en tout genre.
Cette dimension d’ouverture et de lien au quartier et aux autres générations, dans l’esprit de l’action autour des Arbres de Connaissances pour le développement d’un espace éducatif et coopératif permanent, reste à explorer. On a pu rencontrer des personnes plus âgées du quartier s’essayant à la poésie et avec qui nous restons en contact pour de nouvelles rencontres, à l’école par exemple, pour des échanges autour des créations respectives.
Pierrick descottes
 
Légende : Extrait de « Accord’léon - Spécial Poésie  »



Le temps d’Écrilire dans une classe de cycle 3
Enseignant : Pierrick Descottes
Dans la classe, depuis le début de l’année, au-delà de cette parenthèse d’une semaine, la dialectique lecture libre de poésies au groupe—écriture libre (dans le temps comme dans la consigne) engendre un brassage créatif dans lequel chacun s’engage peu ou prou à un moment ou à un autre.
Cela m’arrive régulièrement de commencer la journée par la lecture de quelques poésies d’auteurs, sans commentaire. Bien souvent, des textes libres poétiques sont écrits dans les heures qui suivent. Mais ce sont souvent les mêmes enfants qui rebondissent.
 … A savoir si, après ce temps fort, le cercle des poètes apparus s’élargira…
 
Le temps d’Écrilire dans une classe de CE1-CE2
Cycle 2-3 (15 CE1—9 CE2). Enseignante : Sylvie Guergnon.
Depuis septembre, la poésie était très faiblement apparue. Les livres et albums d’enfants rangés sur les étagères de notre bibliothèque de classe et portant sur la poésie n’attiraient que très peu…
J’ai donc « provoqué », au cours du mois de janvier, en lisant de la poésie régulièrement… Et puis sont arrivées des productions personnelles (faites à la maison), des livres trouvés à la bibliothèque… La mèche s’allumait.
Le courrier qui invitait les parents à participer au « temps de lire » à fait tilt :
K., dont la maman est particulièrement distante de l’école, est arrivé un matin avec un poème écrit ensemble, à la maison !
S. a débarqué avec des livres de la bibliothèque du quartier ! (sa maman qui n’aime pas la lecture a fait l’effort, me dit-elle, de s’y rendre et de prendre du temps pour en chercher avec lui.
 
La semaine qui a précédé le « temps de Lire », les enfants et moi avons cherché ensemble tout ce qui pourrait nous donner envie de lire, d’écrire, de se dire des poèmes.
 
 
Bonne nuit, belle étoile…
 
Tu brilles comme un diamant.
Tu brilles comme des paillettes.
 
Tu brilles, brilles
Dans le ciel.
 
Dans la nuit
Tu files dans le ciel.
 
Tu es belle comme l’or,
Tu es belle,
Belle étoile.
 
Su le sapin,
Je pose une étoile filante.
Elle disparaît dans le ciel.
 
Marly, Maël, Charline, Elise.
 
 
Coquillages
Sur la plage
Où ? Où ? Où ?
Sont les plus beaux ?
 
Les chapeaux chinois
ou les bigorneaux ?
Les coquilles Saint Jacques
ou les couteaux ?
 
J’en remplis mon sac à dos !
 
Quand tu iras sur la plage,
Ramasser des coquillages,
Tu ne trouveras plus rien.
 
Camille
 



 

 

Suite au dossier théâtre

Octobre 2000

Suite au

dossier théâtre

 

Curieusement, je trouve ce dossier très concret. Les témoignages, limite monographie, mettent en évidence les problèmes, les questions et offrent une esquisse de solution. Des témoignages qui n'épuisent pas le sujet, et qui donnent envie.

Aussi curieusement, je n'ai pas lu une seule fois la formule "tâtonnement expérimental". J'aurais aimé retrouvé l'extrait du lire d'Elise Freinet "Naissance ou Pour une éducation populaire", où elle expliquait les questions que Freinet et sa classe s'étaient posées au moment de monter une pièce pour les corres : tout simplement sur proposition d'un enfant, ils avaient joué et mis en scène leur vie quotidienne à l'école. Par ailleurs, sur la liste Freinet, Paul LeBohec avait lancé l'idée de texte libre corporel et je trouvais cela intéressant. Mais il est vrai que ce n'est peut-être plus tout à fait du théâtre.

Thierry Focquenooey - 59

 

 

J'ai eu l'impression que ceux qui ont écrits ont beaucoup plus confié leurs pratiques et aussi leurs doutes. Pour autant dans le dossier, ne sont pas encore conciliés le théâtre, expression de l'enfant et représentation devant public parental

Mais peut-être que nous recherchons trop d'ambitions dans le spectacle ?

Hervé d'Abadie,

École rurale - cycle 3


 

 

Billet d’humeur
Séquence Pub ou billet d’humeur ?...
 
Quelle ne fut pas ma surprise lorsque j’ai découvert, pas moins de 5 pages du Nouvel Educateur n°103 (devinez où) dans l’un des sujets du concours interne de prof d’école de l’académie de Montpellier (dont j’étais correctrice).
Il s’agissait d’un article de Patrick Pierron sur la pratique de classe de Joëlle Martin concernant l’étude de langue au travers du texte libre et de ses prolongements. C’était le premier document d’une série de 4. Cet article ayant pour objet les activités réflexives sur la langue servait en quelque sorte d’illustration aux documents numéros 2 et 3 plus théoriques* et pouvait être mis en parallèle avec le document numéro 4, avant propos du livre du maître d’un manuel de grammaire dans lequel “chaque leçon s’appuie sur un texte initial”.
De là à parler de reconnaissance officielle de la pédagogie Freinet!
La place, en début de dossier et la teneur des deux extraits qui suivent largement inspirés des I.O. lui confèrent par effet d’association, un caractère novateur, j’irais même jusqu’à dire exemplaire. Alors que ces dernières années le texte libre a été plutôt décrié, ce sujet contribue à lui redonner toute sa place, tout son sens et montre comment on peut aborder coopérativement les activités réflexives sur la langue.
De ce point de vue, cet article à sa place dans un tel concours et, au delà, dans les annales.
 
Par contre, un esprit frondeur pourrait se demander s’il est bien venu que cela se fasse dans le contexte d’un concours visant à sélectionner et départager les “meilleurs instits” qui auront droit à accéder au grade de professeur. L’auteur du sujet s’est-il préoccupé de savoir si cette utilisation était en accord avec les fondements philosophiques de la pédagogie Freinet qui refuse la compétition et la récompense des meilleurs ?
 
A sa décharge, on peut lui savoir gré d’avoir associé à cet article sur une pratique de classe coopérative, un passage sur l’enseignement du français en 6°, soulignant l’importance de “la langue maternelle (...) reconnue comme objet d’une pratique sociale hors de l’école et d’une pratique scolaire devant conduire à certains apprentissages...” et même si l’on ne va pas jusqu’à parler de prise en compte de la personne de l’élève, il est fait allusion à “l’insistance sur l’initiation au travail autonome et la prise en considération de l’hétérogénéité des élèves”.   
De plus ce sujet, tel qu’il est constitué me paraît utilisable en formation initiale avec des PE2 qui ont parfois du mal à mettre en oeuvre des activités d’approche analytique de la langue (orthographe, grammaire, vocabulaire) autrement que comme ils les ont perçues dans leur propre cursus scolaire: comme étant une fin en elles mêmes alors qu’elles doivent être des outils au service d’une meilleure lecture, expressions orale et écrites et sont donc articulées avec celles-ci.
En conclusion, gageons que si des militants de l’I.C.E.M. ont passé ce concours, ils se seront sentis en confiance devant un tel sujet! Et ceux qui envisagent de passer des concours de l’E.N. pourront les préparer en trouvant une aide précieuse dans le Nouvel Educateur par la diversité des pratiques coopératives de classes présentées ... Ils pourront même les citer sans retenue dans leur copie!
Elisabeth DUMAS DOMERGUE,
 Institut Gardois de l’Ecole Moderne
* (Extrait de “La maîtrise de la langue à l’école” C.N.D.P. 1992 et “Pratiques de l’enseignement du français observées en classe de 6°” les dossiers n° 103,1998)
 
Réponse de l’auteur du sujet d’examen :
La commande institutionnelle était un sujet sur l'enseignement du français et comme je fais souvent (en formation initiale ou en formation continue) j'utilise le Nouvel Educateur. Il faut dire que peu de revues (en existe-t-il d'autres vraiment ?) présentent avec autant de sincérité, de vérité, de professionnalisme, de détails, d'intérêts pédagogiques, .... des pratiques de classe.
 Non je n'ai pas pensé que cet article (mêlés à d'autres plus officiels ceux là!) servirait à départager des instituteurs car en Lozère ce concours est largement ouvert, pour illustrer cela par exemple cette année 99/00, 5 candidats à l'écrit, 4 candidats à l'oral et 4 reçus.
 Par contre j'avais pris contact avec Joëlle Martin pour lui demander si je pouvais utiliser ce témoignage dans le cadre de ce concours interne. Encore aujourd'hui et avec l'analyse réflexive menée par Elisabeth, si c'était à refaire je recommencerai sauf si, bien entendu, l'auteur ou le comité de rédaction du Nouvel Educateur s'opposaient à cette utilisation.
Madeleine Deshours

 

 
 
 



Magnifier l'expression de l'enfant !
Lorsqu'on entre dans un Mouvement, une organisation ou une association, on s'aperçoit rapidement que le langage de ce groupe de personnes a des spécificités : par exemple il utilise un vocabulaire particulier, il y a des mots qui reviennent fréquemment, qui ont pris des significations particulièrement fortes, etc. Il en va évidemment de même dans le Mouvement Freinet.
En rencontrant le Mouvement Freinet, j'ai été plus particulièrement frappé par une expression : « magnifier les réalisations de l'enfant ». Et c'était une injonction forte à l'adresse de l'éducateur car il lui appartenait, et il lui appartient toujours, de faire le nécessaire pour que l'expression de l'enfant puisse être magnifiée.
Il y avait là une révolution, dans le sens d'un retournement complet, dans la manière dont on considérait les productions de l'enfant : non seulement sa production doit être écoutée, accueillie mais elle doit faire l'objet de soins attentifs pour mettre en évidence ses richesses. Comme une pierre précieuse qui est encore plus belle enchâssée dans un bijou exposé aux rayons de la lumière.
Magnifier l'expression de l'enfant !
Lucien BUESSLER
en introduction à une rencontre Samed'lcEm de l'IDEM 68, consacrée à la fabrication d'albums, de recueils et de mini-livrets.

 

 

Voyage aux sources de la pédagogie Freinet

Octobre 2000

Une exposition d’oeuvres d’enfants réalisées dans les classes d’Émile et de Simone Sence, pionniers de la pédagogie Freinet

 

 

Voyage aux sources de

la pédagogie Freinet

 

«  Cette exposition, présentée durant le mois de mai 2000 à l’Université de Lille III, concernait un ensemble de documents stockés dans le grenier familial : ce sont des dessins et des écrits d’enfants de primaire, d’une petite école de village, en effet, mes parents avaient été instituteurs, en pédagogie freinet, dès le début de ce mouvement éducatif…

    Par cette exposition, ce que nous souhaitions montrer, c’est qu’il y a près de 50 ans, sans obligations et ni incitations ministérielles, des enseignants ont créé des conditions de vie à l’école où les enfants allaient devenir des hommes capables d’exprimer leurs émotions, leurs opinions… et que cela ne nuisait pas (motivation oblige !) à l’acquisition d’un niveau scolaire excellent !  »

Dominique Hautekèete - Sence, fille d’Émile et de Simone Sence,

Nina - Coralie Hautekèete, Guillaume Hubert.

 

Introduction

 

Une petite école de village pas tout à fait comme les autres : à l’École C. Freinet d’Estourmel, Nord.

 

     C’était dans une petite école de village, du Nord de la France (moins de 500 habitants, mais plus de 30 élèves par classe…) à cours multiples !

     Dès 1945, bien avant les directives ministérielles et les incitations à changer la relation de l’élève à l’apprentissage et à l’école, deux enseignants, Simone et Émile Sence, portés par l’enthousiasme de la pensée de Célestin Freinet, écrivaient un petit chapitre de l’histoire de l’éducation : l’école y est partie intégrante de la vie…, la vie est le champ d’expériences et d’apprentissages de l’école, et l’homme est central…, une perspective holistique.

Célestin Freinet était un grand inventeur, il y a 70 ans déjà…! Et depuis ? Les idées ont fait leur chemin… doucement… Il faudra encore beaucoup travailler, beaucoup convaincre (et les mouvements Freinet en France et à l’étranger s’y emploient !), pour que cette conception, pourtant tellement « naturelle…! », soit réellement intégrée et que l’éducateur la vive sans la contrainte de textes officiels.

     Il faut être optimiste. Dans le monde, actuellement, des dizaines de pays ont des « mouvements Freinet » très actifs, même quand leurs conditions culturelles et donc d’enseignement, sont très difficiles…

     Paradoxalement, (apparemment !), c’est en citant, non pas Célestin Freinet lui-même, mais Albert Jacquard, que je résume la finalité de cette pédagogie. Je lui emprunte donc sa conception de l’éducation… Il faut inciter chacun « à prendre conscience de la prodigieuse aventure qui se déroule en ce lieu magique qu’est l’école, les jeunes y acquièrent l’indispensable savoir qui leur permettra d’agir, mais surtout, ils y forment l’esprit critique qui leur permettra de choisir ». Alors, « chacun peut construire sa liberté », et encore : « le rôle du système éducatif n’est pas de préparer les jeunes à entrer dans la société, mais les préparer à construire une société nouvelle ».

      Cela, Célestin Freinet l’aurait approuvé avec enthousiasme, de même que tous ceux qui travaillaient avec lui, hier…, et ceux qui travaillent aujourd’hui… !

Simone et Emile Sence ont créé, dans cette petite école, les conditions qui ont permis que, pour des centaines d’enfants, cette aventure existe…

 

 

C’est quoi

la pédagogie Freinet ?

Petits ou grands les enfants se posent les mêmes problèmes, ont les mêmes préoccupations d’avenir, de vie… (pourrait-on dire existentielles ?)

 Quand on prend le temps de les écouter, ils osent le dire... et on les entend…

Dans cette école, entre 6 et 12 ans, ils pensent et écrivent : l’amour, la mort, le bonheur et l’espoir…, et, ils réfléchissent sur l’école, la leur et celles des autres.

 

Ces textes,

comment sont-ils nés ?

       « Créer en écriture…

écrire en liberté »…

…Le « texte libre »

doit être vraiment libre…

     Il faut écrire quand on a quelque chose à dire et qu’on en éprouve vraiment le besoin.

 

Dans la classe, les motivations à écrire sont le plus souvent :

- l’ambiance de classe : l’accueil du matin, le bonheur d’être écouté, le besoin de raconter ce que l’on ressent devant les grands évènements de la vie : la mort, la naissance, la guerre, la paix, l’amitié…

- partager « les petits bonheurs » : …voir la pluie tomber,… la première neige,… se sentir vivre, simplement…

- les discussions qui apportent les idées des autres que l’on confronte aux nôtres.

- les correspondants, de tout près en France ou de très loin dans le Monde…

- espérer que son texte soit choisi pour apparaître dans le journal de classe…

 

Donner envie d’écrire ?... Comment ?

C’est l’enseignant qui crée le climat de complicité et de confiance dans la classe…, il peut dire à l’enfant :

« n’écris pas seulement ce que tu vois…, mais aussi ce qui te fait réfléchir…, ce que tu ressens…, pourquoi tu aimes ce que tu écris…, ce que tu en penses…, ce que les autres ne voient pas et qui les rendrait heureux !…»

 

 

 

Texte « narratif » ou texte « réfléchi » ?

 

«  Dans la journée, il y a souvent deux lectures de textes, totalement différentes :

 - la lecture du « texte-libre » du matin, le plus souvent narratif… Ici on lit dans l’espoir d’être choisi, de paraître dans le journal collectif de la classe…

 - et le moment de lecture-confidences : souvent, en fin d’après-midi, on arrête le travail, tous, petits et grands, et les enfants lisent, se lancent la balle à la façon des conteurs. C’est une lecture gratuite, de textes plus intimes, plus secrets, plus personnels. Il suffit que les camarades apprécient, admirent et le disent… On est heureux d’avoir pu exprimer ses pensées profondes.

C’est toujours un moment de vie intense… un moment exceptionnel !

 

   Une de ces fins d’après-midi privilégiée, M.L. nous a lu, coup sur coup, ses deux derniers textes : La vie - La mort. Alors s’amorce une discussion et S. (10 ans) dit :

- « Une pensée, c’est court, mais quand on reste longtemps sur la même pensée, on peut en dire des choses ! La vie semble la même pour tout le monde…, mais, au fond… c’est différent pour chaque personne.

Nous, les enfants, on pense loin, mais on n’ose pas tout dire…, les grands vont se moquer de nous…»

- « Si tu n’oses pas tout dire, tu peux au moins tout écrire…, pour toi, si tu en as envie… »

 S., pensif,… - « C’est vrai… »

 

De ce jour est née une quantité étonnante de textes que les enfants appelaient… « textes réfléchis ».

 

     Ce ne fut pas un feu de paille, ils avaient compris la différence entre un simple " texte narratif " et leur propre réflexion sur un sujet grave qui les préoccupait en ce moment.

  Je tiens beaucoup à ces moments de communication sans concours, sans compétition… C’est un « moment-cadeau » pour tous… » (*)

 

     Pourquoi les enfants ne ressentiraient-ils pas le besoin et le droit d’écrire, de confier leurs pensées ?…

- poser et se poser des questions, même sans en avoir la réponse immédiate et réfléchir...

- être capable d’exprimer ses opinions.

- réfléchir sur des thèmes tels que : C’est çà aussi l’école - La vie, la mort - Le bonheur et les petits bonheurs - L’amour - L’espoir…

 - savoir dire ses émotions, n’en avoir pas honte, et souhaiter les partager…

 - être capable d’écouter…

 - savoir qu’on est capable d’inventer…

N’est-ce pas par là que l’enfant se construit et se crée en tissant des liens réciproques entre l’environnement, les hommes et lui-même ?

 

Pourquoi le cheminement des pensées de l’enfant à l’adulte n’intéresserait-il pas l’enseignant ?

 Est-ce un désintérêt ou un évitement devant les inévitables questions inattendues et dérangeantes que l’adulte ne souhaite pas se poser ? « Pourquoi faut-il mourir ? » ; « Comment ferons-nous le monde de demain ? » ; « Quel rôle y aurons-nous ? »

...Apprendre

à aimer inventer...

et l’éducation dans tout çà ?...

La pensée créative est exploratoire. Elle se donne le droit de relier des connaissances et des savoirs qu’il n’était pas prévu de rapprocher.

De là pourra naître l’idée originale…

     La création est un processus qui prend du temps. On collecte de façon consciente ou non-consciente des informations de tous ordres…, on laisse vagabonder les idées, sans sentiment d’urgence… et brusquement (parfois !), l’idée nouvelle s’impose en un éclair, quand on s’y attend le moins !

On essaie de la réaliser, et on est créateur !

 

     Les connaissances et les compétences sont indispensables, l’inventeur ne crée pas à partir de rien. Les matériaux, tout autant que les idées, sont essentiels. La démarche créatrice est la même quel que soit le domaine de création.

 

     L’éducation traditionnelle prépare les élèves à appliquer des démarches spécifiques pour résoudre des problèmes spécifiques, dans des domaines particuliers. Rien ne dit qu’ils inventeront une solution dans des domaines nouveaux. On apprend trop souvent qu’un problème n’a qu’une solution, et que l’erreur est condamnable, alors….on n’ose pas essayer.

     Pourtant, les idées et les solutions créatives ne peuvent naître que si l’on est capable d’envisager le fait que des réponses correctes, mais rares, peuvent exister et être valorisées. Il faut donc prendre le risque d’expérimenter et d’utiliser les non-réussites. Une éducation d’" esprit Freinet ", fait sienne cette pensée de Tagore :

"Si tu fermes la porte aux erreurs, alors, la vérité aussi restera dehors. "

 

     Seules les méthodes actives, par leurs modes d’apprentissages, favorisent cet état d’esprit, cette approche de la vie… On apprend à être créateur dans l’art, la musique, l’écriture, les mathématiques, les sciences…

 

L’enseignant et la création artistique

Le rôle de l’enseignant

 

     L’important, c’est de donner aux enfants confiance dans leur capacité d’inventer, de les amener à ressentir le plaisir de faire surgir des idées nouvelles... de leur donner de l’audace !

 

     - D’abord, créer une ambiance de classe favorable, attentive, chaleureuse, solidaire et aidante. C’est encourager les essais, valoriser les réussites, petites ou grandes, aider à persévérer, à s’améliorer, à continuer.

     C’est aussi apprendre aux enfants à avoir, entre eux, des échanges positifs, à être capables de réfléchir sur le travail de l’autre, à être respectueux des différences, à s’y intéresser et surtout à être capables de dire ce qu’ils en apprécient.

 

     - Ensuite, regarder ce que d’autres ont créé...

Comment ? Pour qui ? Pourquoi ?...

   Ici, il n’y a pas apprentissage de l’histoire de l’art au sens classique.

A l’école, ensemble, il arrive que l’on regarde des œuvres d’artistes reconnus. On discute leur liberté d’expression par rapport au réel, leur rejet du conformisme, leur singularité (tous différents, mais quelquefois proches, de par le choix de la même démarche), leur choix de recherche de l’originalité, tant dans les techniques que dans les idées,

et comment ils valorisent l’invention, sans laquelle on n’est pas créateur…

     Cette culture qui se construit est aussi une connaissance de l’interculturel :

 - dans le temps : préhistoire, Celtes, moyen âge, renaissance…

 - dans les lieux : art d’Afrique, d’Australie, de l’Arctique, de l’Asie…

     On pense et on échange des impressions, on discute sur ce qui se concevait auparavant, sur ce qui se conçoit maintenant, chez nous ou ailleurs.

     On se penche attentivement sur les idées de l’artiste : - Comment a-t-il fait ? - Qu’est-ce qui était important pour lui ? - Que voulait-il faire comprendre ?

- Comment se faire comprendre ?…       On réfléchit, on ne copie pas !

 

    - Enfin, organiser l’environnement...

 La diversité des matériaux est importante (peintures, craies, encres, argile, supports papiers divers, tissus...). Avoir à disposition tous ces matériaux n’entraîne pas l’éparpillement : un enfant (ou plusieurs), approfondit une technique, puis passe à autre chose quand l’intérêt de la recherche diminue, quand commencent à naître les automatismes et l’utilisation des «  trucs  ». Tout dépend de la motivation, de la réussite évaluée, des projets qu’elle fait naître… D’autres facteurs aussi interviennent, telles les saisons… l’envie de faire de la sculpture apparaît plutôt en été, quand le travail peut se faire en extérieur, tout comme le travail de la terre ou la soudure !

La disponibilité du matériel est essentielle… Perdre du temps en installation serait rebutant ou impossible, il y a tant à faire dans une journée de classe ! De plus " voir " les matériaux, même lorsqu’on n’est pas en train de les utiliser, est souvent déclencheur d’une " idée de génie " qui sera réalisée plus tard…

 

L’individuel et le collectif...

 

    La création de l’enfant est toujours née d’une démarche individuelle, inspirée et soutenue par l’ambiance environnante. Elle peut être en accord avec l’environnement, en opposition, ou encore indépendante et solitaire, mais toujours existe une originalité personnelle. Le style de l’enfant apparaît et évolue avec les années et les influences extérieures.

     Les commentaires des élèves entre eux, s’ils sont rares pendant le temps de travail, sont toujours positifs, encourageants et constructifs, ce qui est primordial !

     Il peut apparaître, dans une classe, à certaines périodes, un "chef de file ". Il naît de la reconnaissance sociale, de sa compétence dans le domaine, reconnue par les autres élèves et de l’approbation explicite ou tacite de l’enseignant qui l’avance comme référant ou simplement approuve l’admiration des autres élèves… Alors apparaîtra, pendant un temps, une certaine proximité entre les œuvres de certains enfants.… Mais les grands peintres connaissent çà… : l’ " effet d’école" !!! Cependant, le style de chaque enfant persiste, identifiable par tous… la signature est inutile !

     C’est la culture de l’enseignant qui, dans ses choix et ses approbations, va créer la culture de l’élève. Quand la culture de l’enseignant se modifie, la culture de l’élève évolue.

Si d’autres caractéristiques de l’expression de l’enfant sont valorisées, d’autres créations apparaissent… Dans la même école, à d’autres époques, les écrits comme les peintures étaient différents. Dans d’autres écoles, en France et à travers le monde, la diversité des expressions des enfants le confirme.

«  Dans les classes traditionnelles, on ne demande jamais à l’enfant :

    - d’écrire les résonances en lui de tel ou tel fait qui se passe dans le monde extérieur,

   - d’écrire s’il est triste ou gai,

   - d’écrire ce qu’il est en train de rêver, (ou alors on crie à l’invraisemblance ou au mensonge).

Jamais on ne lui parle de ses pensées personnelles et l’enfant finit par croire qu’en passant la porte, il doit taire ses soucis, ses peines, sa conception de vie.

 

Pourtant, les enfants ont leurs préoccupations personnelles qu’ils n’oublient pas quand ils passent le seuil de l’école. L’éducateur les ignore quand il se contente de distribuer les tâches sans jamais discuter d’autres sujets que la Gaule ou Charlemagne, la Bretagne ou l’Angleterre… » (*)

 

Les textes-poèmes que vous lisez ici sont des écrits un peu dérobés à l’intimité des enfants …ils vous les donnent…

Un jour, ils se les sont offerts dans une ambiance de confiance incomparable que l’on ne retrouve à aucun autre moment de classe…

Prenez-en soin…

Dominique Hautekèete - Sence

Maître de conférences, UFR de Psychologie, Univ Lille 3 - V. d’Ascq.


 

 

Quand l’ambiance d’un environnement scolaire permet à un enfant d’être créateur, il ne peut pas l’être uniquement dans un domaine… on ne peut pas dire : voilà, il est 9 heures , vous avez jusqu’à 10 heures pour inventer, c’est l’heure de créativité ! après…, chapitre 13, exercice 52. 

 

Il y a une cohérence dans la vie d’une classe…

On apprend à être créateur dans l’art, la musique, les sciences…

 

(*) S et E Sence—Extraits doc perso.

 

Pour un enfant, penser la vie, la mort, la guerre, la paix, le bonheur,…

non ! ce n’est pas possible,

c’est affaire d’adultes,…

voire de philosophes !…

Ce n’est pas imaginable que des enfants pensent à cela tout seuls…

…avoir un avis … et le dire,… non !

 

… à ton âge, on écoute et on obéit…

 … mange ta soupe…

   … tais-toi et rame… !

 

Mais si… c’est imaginable ! … et, " ce que des hommes ont imaginé un jour, d’autres hommes le réaliseront " (Jules Verne )… et ils le réalisent… !

 

Ils ont des âges différents, mais entre leurs créations, quelles différences ?… bien légères… du concret à l’abstrait…, ils ne se racontent pas sous la même forme, mais l’histoire est la même… Ils pensent,… et savent dire l’émotion !

 

…dans une éducation

d’ "esprit Freinet "…

à cet enfant, on dit…

" …pense, réfléchis, invente, et tu construis ta liberté… "

 

 

A l'usage des enfants,…

              quelques petits principes,

              qui tuent la créativité…!

  - réfléchir sur le sens de la vie, ce n’est pas de ton âge… !

   - tu n’as pas à juger les adultes…

   - tu ne comprends pas tout, tu es trop jeune…

   - tu comprendras plus tard,… tu n’as pas d’expérience…

   - les grands parlent d’abord, les petits se taisent et écoutent…

   - les adultes ont toujours raison, obéis…

   - seuls les adultes peuvent juger les adultes… (et il y a des règles à respecter !)

 

 

L’essentiel reste à faire...

 

 

L’ expérience d'Emile, de Simone Sence n'est pas séparable de Célestin et d'Elise Freinet, dont ils étaient amis ! leur vie de classe s'est enrichie de leur manière d'être avec les enfants ! Et c'est ainsi qu'ils ont marqué l'histoire pédagogique de ce département et même de ce pays par les rencontres qu'ils ont suscitées et les congrès qu'ils ont animés ! Elle ; exubérante et passionnée, lui, attentif et ingénieux ! C'est la conjugaison de l'expérience humaine et pédagogique de ces deux êtres qui rend compte du trésor intellectuel et esthétique que des centaines d'enfants ont peu à peu construit dans leurs classes.

Des enfants qui, d'abord, ont réussi leur scolarité, en dépit de pronostics parfois très défavorables des experts de l'orientation scolaire ; en effet, des parents de villages éloignés venaient, en dernier recours, confier leur enfant à ce couple d'instituteurs, dont on avait entendu parler ; et l'enfant, quasiment muet et illettré, un jour, se découvrait modeleur d'argile et exprimait alors autrement ce que, jusqu'alors, l'école ne lui avait pas permis d'écrire scolairement !

Et finalement, scolairement, il apprenait de nouveau à réussir !

Des enfants - celui dont je viens de parler et d'autres - qui, alors, se sont mis à écrire et, par voie de conséquence à comprendre la langue et les langages, outils de vie et non principes scolastiques qu'il est nécessaire d'apprendre !

Des enfants, à qui il n'a pas été nécessaire de faire de longues leçons rébarbatives de morale du devoir, parce qu'en groupe ils ont compris que, pour vivre ensemble, il fallait qu'ils s'organisent et qu'ils inventent des contrats et des règles ! C'est de pareilles convictions qu'est né l'esprit coopératif à l'école, à Estourmel comme ailleurs !

Des enfants qui, dès qu'ils se sont sentis écoutés et compris dans ce qui constitue l'essentiel de leur vie ; ont libéré leurs énergies pour grandir et pour apprendre ! Car, ce qui est premier dans l'être vivant, c'est non pas l'inactivité, la paresse et l'ennui, mais la volonté de grandir ! La différenciation en éducation et instruction est première alors qu'elle est souvent pensée comme remédiation !

                                                                          

Ce sont ces convictions qui leur ont permis de rencontrer l'Institut Coopératif de l'Ecole moderne, construit par Freinet ; l'ICEM, c'est en effet d'abord la prise en compte de ces intuitions pédagogiques, que l'on retrouve ensuite dans sa charte : l'éducation est épanouissement et élévation et non accumulation de connaissances, dressage ou mise en condition ; l'école est centrée sur l'enfant.

Les démarches de l'Ecole Freinet - ou plutôt des maîtres de l'Ecole Freinet, car chaque maître est initiateur de sa démarche -, procèdent de cet état d'esprit : pas de système préétabli de progression ou d'apprentissage dans tel ou tel domaine disciplinaire mais une mise en situation pour être l'acteur d'un travail puis, avec l'aide d'un maître toujours attentif et intensément présent, un tâtonnement expérimental incessant !

 

Aujourd'hui, l'institution « Ecole » a appris à parler le même langage que Freinet et elle tente même, difficilement il est vrai, de l'instrumenter : la pédagogie de projet, la différenciation, le traitement de l'erreur comme élément de l'apprentissage, la nécessité de moments d'autonomie et de recherche personnelle, le maître comme élément ressource sont ainsi parmi d'autres, autant d'éléments que les textes officiels recommandent à leurs enseignants !

L'empirisme de Célestin Freinet et de tous les maîtres, qui, avec lui et comme lui, ont voulu faire confiance à la vie, a donc triomphé, théoriquement, de la scolastique !

Les recherches pédagogiques et des sciences humaines confirment donc les intuitions des pionniers.

Mais, vous qui avez envie de donner l'essentiel de votre énergie à la pédagogie, sachez que vous n'arrivez pas trop tard !

L'essentiel reste à faire !

La généralisation n'est pas qu'un processus mécanique car les enfants ne sont pas des machines ; mécaniser Freinet serait dénaturer Freinet. Le pédagogue peut être très instruit ; il lui restera toujours à être disponible et ouvert à l'enfant, c'est-à-dire à ce qui malgré lui, n'est déjà plus lui.

 

Albert Richez, directeur de l’IUFM d’Arras


 

 

Deux livres sur la pédagogie Freinet

Octobre 2000

 

 Viennent de paraître en Roumanie et aux États Unis

Deux livres sur la pédagogie Freinet

 Mihaela St. Radulescu, La pédagogie Freinet, une démarche novatrice, Edition Polirom, 1999. Roumanie.

William Lee et John Sivell. French Elementary Education and the Ecole Moderne. Phi Delta Kappa, Bloomington, Indiana, U.S.A. 2000

 

 

French Elementary Education and the Ecole Moderne

DeWilliam Lee et John Sivell.

 

William Lee et John Sivell ont approché l’œuvre de Freinet par des voies différentes. Le premier, professeur d’université à Los Angeles a participé depuis plus de vingt ans à des congrès de notre mouvement, visité des écoles pratiquant cette pédagogie et établi des contacts avec de nombreux responsables de l’ICEM. Le second, professeur canadien, naturalisé français a étudié le fonctionnement des classes d’école moderne à Aix et à l’école fondatrice de Vence. Il a eu l’idée originale d’utiliser leurs méthodes pour la formation des maîtres tout en traduisant en anglais plusieurs ouvrages de Freinet.

 

   Avec Lee et Sivell, nous découvrons les réactions des américains à nos traditions scolaires et universitaires. Ce qui étonne d’emblée des visiteurs américains, c’est la survivance en France d’écoles à faible effectifs, la nomination des enseignants par les autorités régionales et centrales, l’existence d’une inspection des écoles à tous les degrés, l’influence des syndicats d’enseignants dans la nomination des enseignants, l’intensité des échanges interscolaires.

 

   Lors d’un séjour aux USA, j’avais montré des journaux scolaires français et ce type de production avait séduit mes auditoires mais non le fait d’en limiter le tirage à l’école, aux familles et aux correspondants. Ils estimaient, dans une optique très commerciale, une diffusion copiant celle de la presse adulte… L’artisanat pédagogique relevait selon eux d’une autre époque.

 

   Les auteurs de ce livre abordent successivement, de manière très documentée l’organisation de l’enseignement en France avec les conflits des relations école et églises, le fonctionnement des classes Freinet selon les méthodes naturelles, la vie du fondateurs à travers le film « l’école buissonnière » perçu longtemps comme une œuvre de fiction, les démêlés de Freinet avec sa hiérarchie, le développement de son mouvement d’imprimeurs, les engagements politiques et sociaux de ses militants, l’accueil mitigé fait à la charte du XXIè siècle d’Allègre. Autres révélations : l’existence et le rôle des inspecteurs, le recyclage des enseignants, le fonctionnement des groupes d’École moderne en France et à l’étranger, et même la place prise par Internet dans la vie des écoles. L’effort de mise à jour des informations a dominé ce travail sérieux et enthousiaste. Il met en perspective notre histoire et explique les difficultés de pénétration des idées du fondateur en milieu anglo-saxon.

Roger Ueberschlag



La pédagogie Freinet, une démarche novatrice

de Mihaela St. Radulescu,

En Roumanie, ce livre aborde un thème de grande actualité et d’un réel intérêt pour les spécialistes et le grand public.

L’ouvrage paraît dans un moment où nous assistons à une ouverture officielle vers les alternatives pédagogiques de la part du Ministère de l’Education Nationale de Roumanie et la constitution de la commission nationale pour les alternatives pédagogiques (novembre 1999).

Dans l’enseignement roumain, en pleine quête de rénovation, ont apparu de nouvelles situations pédagogiques qui réclament à la fois de nouvelles ouvertures pédagogiques ainsi que des évaluations critiques et pertinentes. Dans ce contexte, le livre de Mihaela Radulescu représente une remarquable et nécessaire contribution.

Pourquoi Célestin Freinet ? Parce que, affirme Mihaela Radulescu, « c’est lui qui a réalisé plus qu’une synthèse, plus qu’il s’était lui-même proposé, en trouvant son propre chemin qui l’a conduit vers des résultats dont l’originalité ne peut pas être aujourd’hui objet de controverse ».

Le premier chapitre présente les repères de la vie et de l’œuvre de Célestin Freinet et le contexte socio-culturel dans lequel est initié le plus fervent mouvement pédagogique de renouvellement de l'enseignement développé autant sur le front des idées que sur celui des pratiques éducatives.

La génèse et l’évolution de la pensée de Célestin Freinet font l’objet du deuxième chapitre. L’auteur analyse et interprète les raisons théoriques et pratiques sur lesquelles C. Freinet fonde ses accusations à l’égard de la pédagogie traditionnelle et démontre avec finesse et persuasion que Freinet n’est ni démolisseur, ni nihiliste, mais un ouvreur des chemins vers l’édification d’une école à la mesure des besoins fondamentaux des élèves et à la mesure des commandements sociaux.

La conception de C. Freinet est analysée et présentée en comparaison avec les plus représentatives théories pédagogiques, en relevant les fondements philosophiques et pédagogiques qui les approchent et notamment qui les différencient et qui confèrent la spécificité et l’originalité du « système Freinet. » .

Les idées-force de C. Freinet : centration de l’école sur l’élève, l’attitude active de celui-ci, le changement du rôle du professeur, l’assurance du succès scolaire, le tâtonnement expérimental comme méthode naturelle d’apprentissage, l’expression, la communication, l’éducation personnalisée sont présentées dans le troisième chapitre.

Georges Bellot