Le Nouvel Educateur n° 127

Mars 2001

A l’école de Villey le Sec : Une classe unique à deux

Mars 2001

Profitant de l’ouverture d’une seconde classe dans leur école, deux enseignants de Meurthe et Moselle, Agnès Fajon et Philippe Durand, ont fait le choix de garder la structure de la classe unique et de travailler à deux sur une même classe. Une équipe pédagogique, ça commence à deux.

 

Villey le Sec est un village rurbain à quelques kilomètres de Toul en Meurthe et Moselle.
 
Jusqu’à la fin de l’année scolaire 1997/1998, l’école a fonctionné en classe unique regroupant des enfants de cycle II et cycle III. La population scolaire étant en hausse, une ouverture de classe a eu lieu à la rentrée scolaire 1998/1999.
 
A l’ouverture de la deuxième classe, nous avons opté pour garder le fonctionnement d’une structure à classe unique, avec un seul groupe classe animé par deux enseignants : Philippe Durand et Agnès Fajon.
 
Les locaux rénovés et particulièrement fonctionnels qui sont mis à notre disposition, permettent une organisation où s’articulent des moments de fonctionnement communs à tous les enfants et des temps de séparation.
 
Ce choix nous a paru tout à fait adéquat pour l’application des cycles pluriannuels, la prise en compte de l’hétérogénéité des enfants et l’adaptation de l’enseignement à la diversité des élèves.
 
 
Nous considérons l’hétérogénéité des âges comme un enrichissement extraordinaire, permettant d’être plus proche de la vie, favorisant la communication, établissant des liens d’entraide, de découverte, d’apprentissages ...
Les situations se multiplient, se diversifient, s’enrichissent et surtout la place des adultes n’est plus une place autre, mais relève d’une participation à cette dynamique.
 
Travaux, recherches, rencontres, découvertes, projets, permettent la valorisation des différences et des compétences de chacun, ainsi que le développement du sens critique qui va de pair avec ce qui précède.
L’école souhaite être partie prenante dans son environnement et s’inscrire comme l’un des éléments de l’équilibre dynamique du village. C’est dans ce sens qu’elle essaie d’être un lieu ouvert et d’être partenaire, le plus souvent possible, des actions menées localement.
 
Le milieu rural est un vrai lieu de vie et n’est pas synonyme d’isolement
 
Dans ce même souci d’ouverture, elle travaille en réseau avec des classes rurales du toulois, participe aux émissions « Cache-cache micro » réalisées par des enfants des écoles du toulois, sur radio Déclic qui est une radio locale implantée à Villey le Sec, entretient une correspondance avec le Sénégal, la Suède...
 
 
Nous aimerions que l’école soit un lieu de convivialité et de rencontre. L'école doit être un lieu d'apprentissage mais aussi un lieu de vie ouvert sur la vie économique, sociale et culturelle. Un lieu où l'on favorise la naissance et la réalisation de projets, où l'on reconnaît les différences entre les individus, les groupes.   
 
Cette année l’école de Villey le Sec accueille 35 enfants : 7 enfants en Section enfantine, 7 au CP, 7 en CE1, 5 en CE2, 8 en CM1 et 4 en CM2.
 
Comment nous organisons-nous ?
 
 
Pour mieux cerner notre mode de fonctionnement, nous proposons de vous présenter le déroulement d’une journée type. Tout en précisant, que, bien entendu, cette trame n’est qu’une trame et que d’autres évènements ou projets peuvent facilement devenir priorité et « balayer » ou « bousculer »volontiers cet emploi du temps.
 
Dans notre quotidien, nous adoptons une organisation avec un emploi du temps rigoureux afin que des repères fiables soient établis pour les enfants comme pour nous.
 
Les périodes de fonctionnement par niveau, les périodes de fonctionnement par groupe d’âges hétérogènes et les périodes de travail collectif sont clairement distinguées par les enfants.
 
La régularité dans l’alternance de ces périodes nous paraît importante pour la réussite de notre projet. Nous pensons que les enfants apprécient aussi cette diversité.
 
Les journées de classe débutent par un temps de regroupement de tous les enfants et des deux enseignants, consacré essentiellement à l’information écrite : circulation des revues dans la classe, présentation d’articles préparés par les enfants, découverte de journaux scolaires, lecture de messages internet, de courriers...
 
Ce temps d’une demi-heure se termine par la présentation de romans, par de la poésie, du chant, de l’écoute musicale... suivant les jours.
 
Ensuite, les enfants sont séparés dans les deux salles, par cycles. Chaque adulte mène un travail collectif avec un groupe d’enfant en mathématique ou en français pendant que les autres enfants sont en travail autonome sur un plan de travail individuel et hebdomadaire.
 
Après la récréation, l’adulte qui était avec les enfants du cycle II, va travailler avec les enfants du cycle III et inversement.
 
Ceux qui travaillent sur leur plan de travail peuvent s’installer où ils le souhaitent, en haut, au rez-de-chaussée, à l’étage, dans la petite pièce... A noter que certains « coins » sont installés en permanence : peinture, bibliothèque, informatique... Ils permettent et même incitent à se déplacer, à occuper le maximum d’espace disponible.
           
Le choix des contenus des séquences de travail collectif des différents groupes sont élaborés en commun par les deux enseignants. De plus, l’emploi du temps de la classe est conçu sur deux semaines de façon à ce que les enfants travaillent autant avec l’un ou l’autre des enseignants en maths ou en français. Par exemple, si Agnès travaille en semaine I avec les CM, c’est Philippe qui prendra la suite en semaine 2 avec ce groupe.
 
Ainsi , nous avons en permanence le suivi des apprentissages des enfants et nous sommes impliqués dans toutes les étapes, sans aucune spécialisation.
 
Une petite précision cependant, en ce qui concerne les enfants de Section enfantine et de Cours préparatoire, les temps consacrés aux démarches d’approche ou apprentissages de la lecture ou de travail autour des mathématiques sont assurés par un seul référent adulte, l’un en mathématique, l’autre en lecture.
 
L’après-midi débute par l’écoute des émissions Cache-Cache Micro ou par un temps de bibliothèque suivant le public visé par les émissions .
 
Dès la fin de l’émission, débute le « Quoi de neuf ? », collectif les mardi et jeudi, séparés les lundi et vendredi.
 
Ensuite, les enfants sont regroupés par groupes de projets, d’âges hétérogènes, pour les activités qu’ils ont proposées lors de la réunion coop du vendredi précédent.
 
Les enfants, lorsqu’ils proposent un atelier, le présentent, l’explicitent, et peuvent , s’ils le souhaitent, préciser qui peut être concerné par l’atelier : nombre de participants, atelier ouvert à tous ou âge précisé... il est intéressant de noter que l’hétérogénéité est très largement privilégiée par les enfants.
Quand ce choix ne se fait pas, il s’agit souvent de jeux de société où des compétences particulières peuvent être indispensables.
 
Les enfants de CE/CM ne choisissent qu’un seul temps d’atelier d’après-midi par semaine car c’est aussi à ce moment de l’emploi du temps que se fait le travail de recherche et d’élaboration des enquêtes .
Le début d’après-midi est également un moment privilégié où des intervenants extérieurs (parents, grands-parents, amis de l’école ; tous bénévoles) animent une activité : cuisine, bricolage bois club d’anglais, jeux mathématiques par exemple.
 
Le vendredi, ce début d’après-midi est consacré à la synthèse du plan de travail et à l’élaboration du suivant par les enfants des cycles II et III. Les « petits » pendant ce temps participent à des activités sportives avec l’autre enseignant.
 
Vers 15 heures, l’après-midi se poursuit par le visionnement de la cassette d’initiation à l’anglais suivi de la récréation.
 
Ensuite, nous faisons du sport, tous ensemble ou par ateliers ou par groupes d’âges suivant les envies et les activités pratiquées.
 
La journée se termine en général par la présentation d’une ou deux enquêtes. Ce moment, suivant les sujets ou suivant les choix, les enfants assistent aux exposés ou font une autre activité.
 
Nos axes du projet d’école
 
La vie coopérative
 
La vie coopérative nécessite une gestion réelle par les enfants : organisation du travail, choix des activités, règles de vie, partage des responsabilités ....
 
Les acquisitions scolaires et les compétences attendues en fin de cycle
 
Par le travail individuel
 
Les enseignants sont responsables et garants de l'acquisition des savoirs. Ils tiendront compte au maximum des rythmes de travail de chaque enfant, ce qui implique une nécessaire individualisation des processus d'apprentissage, et par là même de leur évaluation.
 
Progressivement, par l’intermédiaire de son plan de travail, l'enfant gérera lui-même ses acquisitions et organisera son travail de façon à compléter ses connaissances.
 
Par les temps d’apprentissages collectifs      
 
Ce sont essentiellement des moments où l'on part des acquis et des connaissances des enfants pour leur faire découvrir de nouvelles notions .
 
      
Les groupes de projets
 
Dans ces groupes, les enfants seront répartis non plus par classes d’âge mais par groupes d'intérêts.
 
Un groupe d'enfants d'âges différents offre des possibilités plus riches :           
- par les échanges qui ouvrent des pistes nouvelles de travail ;
- par la communication qui apprend à s'exprimer clairement et d'une manière attrayante, apprendre à parler devant les autres ;
- par la diversité des goûts et des connaissances ;
- par la prise en compte des différences et des possibilités de chacun ;
- par le développement du sens critique (avec le groupe, critiques constructives).
 
Le travail de ces groupes consistera en recherches et productions diverses…,qui seront ensuite présentées au groupe classe, puis communiquées à l'extérieur.
 
Le groupe qui se constituera autour d'un projet aura la charge de le gérer, mettant en oeuvre les moyens nécessaires à sa réussite.
 
L'activité scolaire ne fait pas seulement référence à la vie mais part de la vie réelle et demande à l'enfant de prendre en charge vraiment sa formation et son travail .
 
Toute la vie scolaire favorise l'acquisition des connaissances et structure les personnalités.
 
L'accession à l'autonomie
 
Un objectif fondamental du projet est que l'école prenne toute sa part dans le processus qui fait accéder l'enfant au statut de personne autonome et de citoyen.
 
Une des tâches essentielles des enseignants sera d'accompagner les enfants dans leur cheminement vers l'autonomie, de chercher et de favoriser les conditions propres à la réalisation de cet objectif.
 
 
L'évaluation
 
Pour permettrede mettre en oeuvre le maximum de potentialités, une approche différente de l'évaluation a été étudiée, qui doit permettre à l’enfant de s'auto-évaluer, de se guider dans ses tâches nécessaires, de mieux préciser les aides dont on a besoin dans les apprentissages.
 
L’évaluation des pratiques des individus ou des groupes peut être assimilée à un regard sur leur "agir" : c'est à dire qu'elle est toujours subjective et momentanée.
 
Ce questionnement sur les pratiques permet de faire le point sur les actions entreprises, d'une manière constructive, et d'aller plus loin ou ailleurs...
 
 
Ouverture de l'école
 
- Ouverture de l'école vers les parents ;
- Ouverture de l'école sur son environnement ;
- L'école : force d'initiative dans son environnement ;
- Ouverture de l’école : à la découverte des uns et des autres.
 
Réussites et points de vigilance
 
 
Nous venons de débuter la troisième année de fonctionnement de notre projet et ce premier recul nous permet de dégager un certain nombre de points qui nous paraissent témoins de réussites. Nous avons aussi mis en évidence ce que nous avons nommé des points de vigilance qui constituent en quelque sorte des garde-fous à notre fonctionnement.
 
1) Il est nécessaire, malgré la rigueur de l’emploi du temps de rester souples et disponibles pour permettre d’être réceptifs à des projets « impromptus » émanant de l’environnement, des enseignants ou bien sûr des enfants.
 
2) Nous sommes attentifs à faire le point régulièrement par rapport aux instructions officielles et aux programmes de chaque cours de façon à ne pas passer à côté de points particuliers.
 
3) Notre mode de fonctionnement implique naturellement qu’une libre circulation des enfants existe au sein des locaux. Cela s’apprend, et doit se pratiquer régulièrement pour rester une démarche ordinaire et responsable des enfants.
 
Il convient aussi que les adultes fassent le point de temps à autre avec les enfants, car cela demande une auto-discipline exigeante et cette exigence peut connaître des fluctuations dans le temps.
 
4) Du côté des parents, il est nécessaire de communiquer régulièrement, à la fois collectivement et individuellement, car la globalité du projet n’est pas forcément perçue d’emblée et des éclaircissements sur les finalités de telle ou telle activité ou mode de fonctionnement sont souvent utiles et nécessaires.
 
Réussites
 
1) Nous constatons que les choix d’activités ne se font pas en fonction de l’adulte qui va les prendre en charge. Les enfants donnent priorité à leurs goûts personnels pour l’activité.
 
2) Nous pensons avoir établi un bon équilibre entre les travaux qui donnent lieu à choix de la part des enfants et ceux qui sont décidés par les enseignants.
 
3) Nous constatons souvent des démarches spontanées d’entraide entre les enfants d’âges différents qui vont plus loin que les simples nécessités du fonctionnement ordinaire (pendant les temps « informels » par exemple). C’est une démarche naturelle pour la plupart des enfants et nous pensons que les choix pédagogiques faits dans la classe y sont pour une bonne part.
 
4) L’école est un vrai lieu de vie pour les enfants et ils n’hésitent pas à y faire entrer des copains, des cousins de passage, ou les grands frères et soeurs qui sont au collège.
 
De même, les gens du village pensent à l’école lorsqu’ils ont quelque chose à montrer ou une opportunité qui pourrait intéresser les enfants car ils savent qu’ils seront accueillis.
 
Enfin, il nous paraît important de terminer en citant comme critère de réussite l’adhésion des parents au projet de l’école et à son mode de fonctionnement particulier. Le village s’est beaucoup agrandi ces derniers temps et une part non négligeable de nos élèves a commencé sa scolarité dans un autre établissement, le plus souvent en ville avec des classes à un ou deux niveaux.
 
Jusqu’à présent nous n’avons pas connu d’échec au niveau de l’intégration de ces enfants dans notre école ni de blocage de la part de nouveaux parents, pourtant quelquefois circonspects au départ.
 
Il nous semble que cela constitue, avec le bonheur des enfants à venir à l’école, un des meilleur encouragement qui soit pour poursuivre l’aventure.
 
Philippe DURAND et Agnès FAJON
Ecole de Villey le Sec
Place de l’Eglise
54840 Villey le Sec
a.fajon[arobase]ac-nancy-metz.fr
p.durand[arobase]ac-nancy-metz.fr
Groupe départemental 54 de l’ICEM

 

 
 
Nous aimons bien être ensemble les grands avec les petits. Il y a des moments où l’on est ensemble et d’autres où l’on fait des choses différentes.
 
C’est bien d’être ensemble comme cela on apprend des choses qui se passent quand on n’est pas ensemble.
 
On trouve que c’est bien que les grands expliquent aux petits et que les petits expliquent aux grands,comme cela, nous apprenons plein de choses.
 
On peut mieux communiquer et on peut mieux s’aider. En plus, on se connait bien alors on peut bien travailler ensemble.
 
C’est pratique, on peut échanger nos idées.

 

Cache Cache Micro
 
On écoute tous les jours Cache Cache Micro à 13h35. Cache Cache Micro est une émission réalisée par des enfants des écoles du toulois. Elles est diffusée sur Radio Déclic, 87.7 FM et 101.3 FM (dans le sud toulois).
Le lundi, c’est l’émission des grands donc CE2/CM1/CM2. Le mardi, c’est l’émission des CP/CE1 et CE2. Le jeudi, c’est l’émission des Maternelles,des CP et des CE1. Le vendredi, c’est une émission forum sur le sujet de l’émission du lundi. Les enfants des autres écoles téléphonent à Radio Déclic pour répondre aux questions ou donner leurs avis.
 
Il y a aussi le jeu Cherche Cherche mieux. Ce sont des questions posées et il faut trouver les réponses .
Cache Cache Micro, c’est intéressant et des fois c’est drôle.
Ca nous informe de ce que font les autres écoles.
 
Le réseau des écoles de Bulligny, Charmes la Côte, Francheville, Mont le Vignoble, Moutrot, Villey le Sec et Villey St Etienne
 
Les quatre écoles (au départ quatre classes uniques), Charmes la Côte, Francheville, Moutrot, et Villey le Sec, travaillaient ensemble depuis longtemps. Depuis plusieurs années aussi, elles faisaient un journal en commun ; c’est le PPJ, ça veut dire : Press’ Press’ Journal !
Il y avait plein de rubriques différentes : à l’école, en dehors de l’école, histoires extraordinaires, infos dans le monde, bric à brac, avec des poèsies, des blagues, des recettes de cuisine, des BD, des enquêtes...
 
On s’est rencontré régulièrement. Pour le journal, on le faisait par ordinateur. Chaque classe était responsable de la mise en page d’une page. Elle recevait tous les textes de la rubrique.
 
Cette année,il y a d’autres écoles qui sont venues nous rejoindre. On sort un journal commun une fois tous les quinze jours. Chaque village peut avoir des pages intérieures en plus. Ca change.
 
Un journal ensemble, c’est bien parce que ça nous apprend plein de choses, on communique entre nous, on fait des articles , des dessins et on cherche ce qui peut intéresser les autres .
C’est bien, ça peut être rigolo.
On peut communiquer et s’informer.
 
Si vous souhaitez voir un PPJ, vous pouvez nous en demander un. Vous pouvez aussi vous abonner.

 

Organisation des après-midi de la semaine
Réunion coop pour le planning de la semaine
 
Tous les vendredis, on fait une réunion pour organiser les après-midis de la semaine suivante.
Il y a un grand tableau avec les différents moments : Cache Cache Micro, Quoi de neuf, Ateliers ou Enquêtes, Anglais, Bibliothèque, sport, Présentations d’enquêtes,comptes-rendus d’enquêtes ou correspondance...
 
Si on veut proposer d’animer un atelier, il faut le marquer avant la réunion sur le cahier d’ateliers. Le vendredi, on s’inscrit où l’on veut. Celui qui propose doit expliquer ce qu’il veut faire. Il doit faire attention au matériel pour que tout soit prêt le jour de son atelier. En général, on fait les ateliers en bas ou dans la petite pièce parce que dans la salle du haut, il y en a qui travaillent en enquêtes.

 

Dans notre école, nous avons deux réunions coopératives par semaine. Elles ont toutes deux des fonctions différentes.
La première a lieu le lundi matin à 8h30 : elle est consacrée aux critiques et aux propositions quant à la vie de l’école.
La deuxième a lieu le vendredi en fin d’après-midi : elle concerne l’élaboration coopérative du programme des après-midi de la semaine suivante.
 
La réunion coop du lundi matin : critiques et propositions
 
Chaque lundi matin, à 8h30, on se rassemble pour faire la réunion coop.
On dit tout ce qu’il y a sur le cahier de critiques et de propositions. On lit les critiques.
Par exemple : « Romain dit des gros mots… » et on en discute. 
Le cahier de critiques, c’est pour mettre des propositions qu’il n’y a pas.
On essaie de trouver des solutions pour que tout se passe bien dans l’école.
On aime bien quand on doit assurer la critique car parfois ça arrange, les problèmes sont résolus.Ca nous apprend à vivre, à régler nos problèmes tout seuls.
 
C’est mieux les propositions, mais c’est bien aussi les critiques.
C’est pratique ; on peut marquer sur le cahier de critiques si on est en colère.
C’est bien, mais il ne faut pas toujours marquer la même chose, parce qu’autrement, ça ne sert plus à rien.
C’est bien de parler entre nous.
Moi, je n’aime pas me faire critiquer.
En général, les enfants arrêtent de faire ce qui ne va pas. Des fois, ça continue.
Le sujet des histoires au foot revient trop souvent.
Parfois, il y a des critiques qui n’intéressent pas tout le monde.
Moi, j’aime bien quand mes propositions intéressent tout le monde.
Quand on écrit une critique ou une proposition, il faut toujours signer.
Les critiques et les propositions servent à exprimer ce que l’on pense.

 

Les enfants gèrent leur temps de travail individualisé à l’aide d’un plan de travail hebdomadaire.
 
Tous les matins, on a à peu près une heure de plan de travail. Ca nous apprend à nous débrouiller tout seuls. Ca nous servira dans la vie de tous les jours.
Il nous sert à bien travailler.
Le plan de travail, ça nous apprend à travailler vite et tout seuls. Il y a des choses compliquées et des choses faciles. Ca nous permet de nous améliorer.
On peut gérer son temps et on peut se mettre où l’on veut.
Quand il y a des choses difficiles que l’on n’arrive pas à faire tout seuls, nous devons demander de l’aide.
Moi, je commence souvent mon plan de travail par l’atelier ou l’informatique ou la bibliothèque.
Moi, je commence plutôt par le T.O. Non, moi, ça dépend ; ce n’est jamais pareil.
Ce qui est bien, c’est qu’ il y a des thèmes différents.
Comme cela, on ne fait pas du français ou des maths toute la matinée. En plus, on peut choisir ses matières.

 

La Suède et le Sénégal : Notre correspondance internationale
 
Depuis plusieurs années, nous correspondons avec la Suède et le Sénégal.
 
La Suède : il y a un monsieur qui s’appelle Stan. Il est français mais il vit en Suède depuis longtemps .
Il vient en France de temps en temps et quand il passe par Villey le Sec, il vient nous apprendre des choses sur la Suède.
 
Le Sénégal:
L’EPCI de Colombey les Belles et du Sud Toulois échange depuis longtemps avec le Sénégal.
L’année dernière, nous avons beaucoup travaillé sur le Sénégal pour essayer de découvrir un peu ce pays : photos, livres, arts plastiques ...
Nous avons envoyé une grande lettre à une école du Sénégal avec des documents sur notre vie et avons reçu des lettres et des dessins en réponse !

 

Les intervenants extérieurs
 
Les ateliers : Cuisine, Anglais , Bois, Mathématique...
Il y a des personnes qui viennent pour faire des activités avec nous .
Il y a d’autres personnes qui viennent aussi dans la classe pas toujours pour tenir un atelier mais aussi pour faire un projet avec nous ; par exemple, découvrir la nature, faire des expériences...
C'est bien qu’il y ait des personnes qui viennent comme cela parce qu’on fait beaucoup de choses.
En plus, on fait des belles et bonnes choses.
On aime bien qu’ils viennent.
C’est super cool !
On fait des choses que l’on ne connait pas. C’est bien parce que l’on apprend et on peut le refaire à la maison.Cela nous fait rencontrer et parler avec d’autres gens.
 
La forêt , terrain d’aventures
 
Avec Christian, le papa d’Adèle, nous essayons de reconnaître toutes sortes d’arbres, de regarder comment ils vivent , qu’est-ce qui pousse à côté de chez nous...
On fait souvent des sorties nature le samedi matin . On met tous des bottes et on y va .
 

 

Declic : marre de répondre aux attaques sournoises

Mars 2001

Je suis éreintée de dire clairement, TRES CLAIREMENT, DE PLUS EN PLUS CLAIREMENT, que les innovateurs, dont l'association DECLIC se réclame n'ont rien à voir avec la précarité, la flexibilité, les libéraux, le chômage, la peste et le choléra.

Que j'en ai marre de répondre à ces attaques sournoises qui consistent à penser en raccourci que toute adaptation de l'école se fait au détriment des élèves, que l'usage d'internet est destiné à une préqualification au téléachat sur TF1, que l'innovation est l'action sournoise de suppôts de Madelin, Allègre, voire du diable en personne.
La liberté n'est jamais intrinsèquement attachée aux outils. Elle est dans les mains des valeurs que nous portons. Et comment faut-il dire que nous, qui luttons depuis plusieurs années pour ouvrir un établissement expérimental en Seine Saint Denis, partageons des combats depuis des années pour faire de nos classes et de nos établissements des lieux où les élèves coopèrent, discutent, confrontent, doutent ensemble, nous avons le droit à la confiance. Nous avons le droit de ne pas avoir à nous justifier sans cesse. Nous avons le droit de ne pas être attaqués, traînés dans la boue par des gens qui parfois se contentent de l'existant sans le critiquer.
Les valeurs des conservateurs, de ceux qui se réclament du refus de l'innovation comme d'un axe de combat sont-elles si favorables aux élèves, à la liberté, à la fraternité ? Je ne parle meme pas de l'égalité dont chacun sait qu'elle est chaque jour bafouée à l'école.
Alors, à regarder l'école publique, à y scolariser mes enfants, à y travailler chaque matin, je ne crierais pas, moi, vive le conservatisme parce que les valeurs de l'école d'aujourd'hui, l'arrivisme, l'individualisme, la notation, les classements, les mentions, les bons établissements, (et les mauvais), le management, les réformes avortées, les barèmes, la cogestion, et surtout, surtout, l'absence de débat, de réflexion sur les finalités de tout ça, non, il n'y a pas de quoi crier victoire !
Il y a lieu de continuer à se battre !
 
Véronique Decker (énervée), présidente de DECLIC, en réponse au billet d’humeur d’Hugues Lenoir, paru dans le numéro 124.

 

Passez le concours d'inspecteur !

Mars 2001

Ça y est, c’est décidé, je vais passer le concours d’Inspecteur… Si, si, … ah bon, vous pensez que j’ai retourné ma veste ! Eh ben non, il y a juste que j’ai assisté à une discussion intéressante concernant la formation des inspecteurs…  Ils sont bien en peine ces gens là… En substance, leurs grandes inquiétudes concernent leur avenir professionnel, bien peu rassurant pour eux, car pas du tout formés aux tâches qui les attendent ! Vous pensez ! Dorénavant, l’évolution inéluctable de leur métier fait que leur principal travail sera d’accompagner les projets d’école, d’aider à leur mise en œuvre, de coopérer à leur réalisation… et là, ils ne savent pas faire ! Au vu d’une large observation, ils savent plein de choses : commander, ordonner, exiger, s’écouter parler, se représenter, se pavaner… mais aider, accompagner, partager, … ils n’ont pas été formés à ça, et de toutes manières, ce n’étaient sans doute pas les critères qui les avaient orientés vers cette profession… Par contre, ça devient intéressant de songer à cette voie, puisque abandonnant leurs traditionnels rôles d’inspection – sanction – répression, il est désormais envisageable de bénéficier de l’aide de collègues ! Alors si ça vous tente… N’hésitez pas.

 

 

Réfléchir ou agir ensemble ?

Mars 2001

Après avoir mis les pédagogies nouvelles en question (voir le Nouvel Educateur 121), Philippe Perrenoud, sociologue de l’Université de Genève, propose ici, un cadre de réflexion sur le travail en équipe. Puisse son texte nous éviter de tomber dans les dérives qu’il évoque.

 

 

Travailler ensemble ? La formule est séduisante, elle évoque l’ouverture, la confiance, la coopération, l’échange, le partage, autant de valeurs positives, qu’on peut opposer au méchant individualisme, associé, lui, au repli sur soi, à la méfiance, au protectionnisme, voire à l’égoïsme.

 
Pourquoi faire du travail en équipe une question de vertu ? Ce n’est qu’une modalité d’organisation, qui se justifie parce qu’elle offre des avantages, dans trois registres au moins :
-celui de l’identité et de la professionnalisation ; la coopération au sein d’une équipe les renforce, permet de former des projets, de prendre des responsabilités, de devenir acteur à part entière dans l’organisation (Gather Thurler, 1996 a) ;
-celui de la formation continue ; le travail d’équipe stimule la réflexion sur la pratique, l’échange des savoirs d’expérience, le recours à des ressources externes, tout simplement parce qu’il oblige à se concerter et donne le courage d’innover ;
-celui de l’efficacité professionnelle ; travailler ensemble permet de mettre en place des dispositifs pédagogiques et didactiques plus riches et différenciés.
 
Encore faut-il que les enseignants en soient convaincus et que les avantages soient suffisants pour équilibrer, à leurs yeux, le coût, bien réel, de la coopération. Pour des praticiens entrés dans un métier individualiste, apprendre à travailler ensemble est une mutation souvent difficile et le résultat, en tout cas dans un premier temps, paraît moins gratifiant que ce que chacun aurait réalisé en restant “ seul maître à bord ”. Lorsque les enseignants qui se montrent sceptiques à l’égard du travail en équipe disent qu’ils sont plus efficaces tout seuls, ils ont en partie raison : pour agir individuellement, pas besoin de chercher un accord, de justifier ses propositions, d’écouter celles des autres ; pas besoin de “ palabres ”, de compromis et de délais avant de passer à l’action. Le passage d’une pratique assez solitaire à un travail en équipe porte rarement des fruits à court terme. Dans l’immédiat, le tout est en général moins efficace que la somme des parties, car l’apprentissage de la coopération ralentit la décision et l’action et fait, dans un premier temps, regretter le temps où chacun n’en faisait qu’à sa tête. Quant aux bénéfices en termes d’identité et de formation, on ne les mesure que plusieurs années plus tard.
 
Pour peu que les débuts soient un peu durs, en raison de conflits entre personnes ou de prises de pouvoir intempestives de l’un des équipiers, toutes les conditions sont réunies pour qu’une équipe nouvelle éclate au bout de quelques mois, chacun se retirant sous sa tente en déclarant “ qu’on ne l’y prendrait plus ”. À l’endroit du travail en équipe, on peut reprendre la formule ironique de Daniel Hameline à propos des pédagogies nouvelles : on en revient d’autant plus facilement qu’on n’y est, en réalité, jamais allé ! Nombre d’équipes pédagogiques se défont dans les commencements, avant d’avoir atteint une vitesse de croisière, laissant à chacun un goût amer et le renforçant dans ses doutes. Ou, ce qui n’est pas forcément mieux, elles sauvent les apparences en continuant à fonctionner comme une coquille vide : chacun retire ses billes, mais discrètement, de sorte que, de loin, on croit voir une équipe qui continue à fonctionner…
 
Pour éviter de succomber à ces maladies infantiles, mieux vaut être prévenu : une équipe avertie en vaut deux (Gather Thurler, 1996 b). Il ne suffit pas d’anticiper les embûches, de les reconnaître, de savoir qu’on peut les dépasser. Il faut encore, dans les moments de crise, savoir clairement ce qu’on attend du travail en équipe. Écartons la pseudo-équipe, qui n’est qu’un arrangement pour se partager des ressources, sans véritable confrontation des idées, ni échanges sur les pratiques. Deux figures d’un véritable travail d’équipe méritent d’être évoquées, selon qu’on veut en priorité réfléchir ou agir ensemble.
Ce n’est pas incompatible, dira-t-on. Comment pourrait-on agir ensemble sans réfléchir d’abord ? L’activisme de certaines équipes pédagogiques amène à nuancer cette évidence. Toute action concertée passe certes par un minimum de réflexion commune. Celle-ci peut cependant se limiter à une stricte coordination “pratico-pratique”, par exemple pour organiser des ateliers décloisonnés. On peut agir ensemble sans prendre jamais le temps de réfléchir à autre chose que la prochaine étape à franchir, sans trop s’interroger sur les idées et les manières de faire de chacun… Admettons cependant que, dans l’idéal, l’action collective implique une réflexion commune.Le contraire n’est pas vrai, si bien qu’on peut distinguer deux stades de la coopération professionnelle, le premier faisant courir moins de risques et préparant éventuellement un passage progressif au second :
-au premier stade, chacun garde la responsabilité de ses élèves, l’équipe se bornant à une réflexion collective sur les pratiques ; cela n’exclut pas certaines activités fortement coordonnées ou décloisonnées, mais à la marge de l’emploi du temps de chaque classe ;
-au deuxième stade, les membres de l’équipe assument conjointement la responsabilité d’un groupe d’élèves, dans une structure qui met fin, partiellement ou totalement, à l’enferment de chacun dans sa classe.
Ces deux types d’équipes pédagogiques posent des problèmes différents, que j’ai examinés ailleurs (Perrenoud, 1996 a). Reprenons quelques poins essentiels.
 
Réfléchir ensemble
 
Réfléchir ensemble, on le fait nécessairement, de temps en temps, pour coexister, même dans l’école regroupant les plus farouches individualistes. Mais je ne pense pas ici à la préparation de la fête de fin d’année, ni à l’organisation des classes, ni même à un projet d’établissement. Il est question de réfléchir ensemble aux pratiques pédagogiques. On voit immédiatement que cela semblera très risqué à ceux qui n’osent pas dire ce qu’ils font, et sans intérêt à ceux qui n’attendent rien d’un échange avec leurs collègues, sinon des services pratiques ou un soutien moral dans les passes difficiles. Nul n’est exempt de la peur du jugement d’autrui, et nul n’est automatiquement convaincu que le regard et la parole d’autres professionnels pourraient lui apporter quelque chose. Mais, alors que ces deux obstacles - qui peuvent aller de pair - écartent définitivement certains praticiens de la réflexion collective, ils n’arrêtent pas ceux qui ont le courage de se jeter à l’eau.
 
Lorsqu’on se borne à réfléchir ensemble, chacun conserve son autonomie d’action et la responsabilité de ses propres élèves. Sans doute, une franche discussion sur un élève ou un problème pédagogique - discipline, devoirs, évaluation - modifie-t-elle le point de vue de chacun, mais il peut, unilatéralement et sans avoir à se justifier, mettre des limites à cette influence, puisque aucun contrat ne lui enjoint de se plier aux options d’une majorité. L’équipe fonctionne alors, pour chacun, comme un écosystème, un environnement qui interroge, stimule, infléchit la pensée et en partie l’action de chacun, dans l’exacte mesure où il y consent.
 
Malgré cette garantie, nombre d’enseignants se demandent si le jeu en vaut la chandelle. Une réflexion en équipe ne va-t-elle pas ralentir chacun, insinuer le doute dans son esprit, induire des remords, voire des culpabilités pour ce qui est fait, affaiblir des certitudes, ébranler sa confiance en soi, éroder ses projets ? Ces “ dangers ” ne sont pas toujours de purs fantasmes. Dans un métier où tant de choses sont intuitives, basées sur des croyances ou une expérience personnelles plutôt que sur des savoirs rationnels et partagés, chacun est fragile et le sait (Perrenoud, 1994). Dans un métier caractérisé par l’urgence et l’incertitude, la concertation est une contrainte, elle “ complique la vie ”. Même si l’on suspend le jugement et la critique, parler de sa pratique expose à l’étonnement, au questionnement, à la comparaison. On se rend compte que tout ce qu’on tient pour évident ne l’est pas pour les autres, qu’ils font, pensent et réagissent autrement. Le risque d’être déstabilisé n’est pas nul.
 
Cela ne concerne pas quelques enseignants frileux. Si chacun ne se sentait pas en danger, il ne serait pas aussi difficile d’échanger sur les pratiques, même dans les équipes pédagogiques. Dans certaines, on parle des programmes, des élèves, des parents, du système, de l’évaluation, des horaires, des réformes, bref de tout, sauf de ce que chacun fait dans sa classe. Dans d’autres, on raconte ce qu’on fait - ou ce qu’on pense faire - très prudemment, en exposant soit des réussites présentables, soit des échecs devant des cas tellement désespérés que, face à ses pairs, le praticien en sort finalement grandi, parce qu’on admire à la fois sa persévérance, sa lucidité, son humilité. Il y a mille manières de se protéger ! Elles sont compréhensibles. Si l’on se débrouille, durant des années, pour entourer les pratiques d’une grande opacité, c’est que chacun y trouve son compte : ne pas questionner pour ne pas être questionné, ne pas s’étonner pour ne pas susciter l’étonnement, ne pas exprimer de désaccord pour ne pas risquer d’être, à son tour, mis en question. Comme le rappelle Argyris (1995), dans les organisations humaines, les routines défensives évitent de mettre dans l’embarras. Robert Gloton, l’un des fondateurs du Groupe français d’éducation nouvelle, parle dans ses souvenirs (1979) d’une école où quiconque parlait de pédagogie dans la salle des maîtres était mis à l’amende. Une équipe pédagogique ne peut recourir à des mécanismes aussi simplistes, puisque sa raison d’être est de parler de pédagogie. Le tour de force consiste à y parvenir sans que chacun s’expose vraiment, parce qu’on reste dans les généralités ou l’activisme. Parler de ce qu’il faudrait faire ou de ce que l’on va faire dispense de dire ce que l’on fait déjà…
 
On peut ironiser sur cette valse-hésitation. Il est plus équitable de reconnaître qu’elle vaut mieux que l’absence de tout échange. Il est normal d’avoir peur, la culture des enseignants n’est pas tendre, c’est un milieu où l’on cherche volontiers la faille ou l’écart à la norme affichée, plutôt que les raisons profondes qu’a chacun de faire ce qu’il fait. Parler de sa pratique et entendre les autres parler de la leur, cela s’apprend, il ne suffit pas de se lancer à l’eau. Cela passe également par des règles du jeu, un climat de confiance, une éthique, une immense discrétion, l’interdiction absolue de se servir de ce qu’on entend dans un autre contexte et une forte réciprocité dans la prise de risques. L’analyse de pratiques, comme démarche de formation (Perrenoud, 1996 c et d), propose des méthodes dont une équipe pédagogique pourrait s’inspirer.
 
Tous les garde-fous du monde ne suffiront pas, cependant, si deux conditions ne sont pas remplies :
1. Que chacun ait l’intime conviction d’apprendre davantage de l’analyse que du jugement, du doute et du questionnement que de la réponse catégorique et normative, ou encore du désordre et de la diversité que de la pensée unique.
2. Que tous abandonnent conjointement la comédie de la maîtrise et acceptent que, dans un métier de l’humain plus encore que dans tout autre, chacun fait de son mieux, sans garantie permanente de réussite, que l’échec ne manifeste pas nécessairement une incompétence, mais la résistance du réel à l’action éducative.
 
À ces conditions, un travail d’équipe a tout son sens, même si chacun garde ses élèves et son autonomie. L’enjeu n’est pas alors de conjuguer les forces de chacun pour permettre une action collective. L’équipe fonctionne comme une ressource pour ses membres. Elle est parfois un “ lieu où renaître ”, selon la belle expression de Bruno Bettelheim (1975), où retrouver confiance en soi, enthousiasme, énergie. Elle offre un cadre qui aide à mieux percevoir ce qu’on fait, grâce au regard et aux questions des autres, ou simplement en les écoutant et en cherchant à comprendre pourquoi chacun ne rit pas, ne se met pas en colère ou ne déprime pas pour les mêmes raisons, pourquoi tous ne sont pas sensibles aux mêmes élèves, aux mêmes erreurs, aux mêmes ambiances, aux mêmes tensions, aux mêmes objectifs.
 
Le travail en équipe est alors utilisé par chacun, à sa façon, pour accroître sa propre maîtrise de son métier. Ce n’est nullement illégitime, à condition que ce contrat soit explicite et que tous jouent le jeu, de sorte que chacun y trouve son compte et ait donc intérêt à rester dans le circuit.
 
Agir ensemble
 
L’équipe n’est plus alors un simple écosystème pour chacun de ses membres, elle devient un système d’action, un acteur collectif. Chaque enseignant aliène alors une part de son autonomie. Même si c’est en connaissance de cause, au gré d’un contrat librement négocié entre égaux, il lui arrive de s’en mordre les doigts, notamment lorsqu’il se sent pris entre une loyauté à l’égard du groupe et l’envie de n’en faire qu’à sa tête.
 
On ne paie ce prix fort que si la contrepartie est suffisante. Pour lutter contre l’ennui ou la solitude, il n’est pas nécessaire d’aliéner sa liberté d’action. On peut s’impliquer dans des groupes ou des activités moins exigeantes qu’une équipe pédagogique où il est question d’agir ensemble.
 
Agir ensemble n’a de véritable intérêt que si cela permet de réaliser ce que chacun ne peut faire séparément, ou du moins d’y parvenir plus sûrement, plus vite, en dépensant moins d’énergie. “ Pourquoi continuer à faire séparément ce qu’on peut faire ensemble ? ”, ai-je entendu récemment. La formule est amusante, mais fallacieuse : il faut en priorité faire ensemble ce qu’on ne peut pas faire séparément. L’action collective a partie liée avec l’organisation du travail, elle permet de s’affranchir d’une division des tâches qui enferme chacun dans sa classe et sa discipline. C’est pourquoi ce type d’équipe se construit autour de dispositifs de décloisonnement et, dans l’enseignement secondaire, de projets interdisciplinaires.
 
S’il paraît nécessaire, aujourd’hui, que la majorité des enseignants apprennent à réfléchir et agir ensemble, c’est parce que ces formes de travail, qui ont été longtemps des exceptions, choix librement consenti d’enseignants militants et innovateurs, deviennent peu à peu des formes banales d’organisation du travail, notamment avec l’introduction de cycles d’apprentissage ou de modules de formation confiés à des équipes, dans l’esprit d’une pédagogie différenciée et d’une individualisation des parcours de formation (Perrenoud, 1997). Dans de telles structures, on n’a plus le choix. L’idée même qu’on puisse “ être seul maître à bord ” perd son sens, l’organisation du système ne reconnaît, progressivement, que des équipes, dont la tâche est de gérer des dispositifs complexes, qui accueillent, pour plusieurs années, un groupe d’élèves de configuration variable et d’effectif équivalent à celui de plusieurs classes.
 
Cette évolution contient un danger majeur : faire comme si, du seul fait de la mise en place de cycles d’apprentissage, les enseignants voulaient et savaient agir ensemble. Ces structures, qui appellent une action collective, peuvent certes accélérer l’évolution des enseignants qui évoluaient déjà dans ce sens, à leur rythme. On peut aussi envisager le pire : que ces structures deviennent des décors, qui masquent le retour aux cloisonnements, que chacun se retrouve dans son degré, sa discipline, sa classe, en simulant un travail d’équipe.
 
Les structures nouvelles rendent le travail d’équipe nécessaire, sans le rendre ipso facto possible, encore moins facile. Leur avenir se jouera donc en partie sur la volonté et la capacité des systèmes éducatifs d’accompagner cette transformation, de préparer d’emblée les nouveaux enseignants à travailler en équipe et d’y aider les enseignants en place. Pour cela, il convient sans doute de leur proposer des savoir-faire : animation, délégation de tâche, organisation de la mémoire collective, gestion de projet, régulation de conflits, renouvellement et socialisation des membres. Les enseignants manquent aussi d’outils d’analyse : une équipe est un lieu de pouvoir, de décision, de confrontation, parfois de tensions, dans l’école comme dans le travail social, les soins infirmiers ou les métiers plus techniques (Perrenoud, 1996 b). Pour “ tirer son épingle du jeu ” sans “ se retirer du jeu ”, chacun a besoin d’une formation plus substantielle sur ce qui se joue dans un groupe d’adultes. Or, on peut apprivoiser la dynamique d’une équipe comme celle d’un groupe-classe, mais il n’y a pas de transposition directe, pour une raison simple : une équipe regroupe des égaux, si bien qu’il n’y a pas d’arbitre “ naturel ” (comme l’enseignant face à ses élèves), ni de bouc émissaire tout désigné (comme l’autorité scolaire). Il faut donc apprendre à vivre sereinement les différences et les conflits entre adultes, à négocier, à chercher des compromis, dans un métier dont la culture professionnelle (Gather Thurler, 1994) n’y prépare pas de toute éternité et où chacun est confronté à une telle complexité relationnelle (Cifali, 1994) qu’il ne rêve pas d’y ajouter.
 
Il serait aussi absurde de dire que c’est facile que d’espérer y échapper…
 
Philippe Perrenoud, sociologue, professeur à la faculté de psychologie et des sciences de l’éducation
Université de Genève.
Cet article est paru dans l’Éducateur, magazine du Syndicat des enseignants de Suisse romande) (n° 12, 17 octobre 1997, pp. 8-11). Il est repris avec l’accord de la rédaction de l’Educateur.
 
Vous pouvez retrouver d’autres textes de Philippe Perrenoud sur le site :
http://www.unige.ch/fapse/SSE/teachers/perrenoud/php_main/textes.html
 
Bibliographie
 
Argyris, C. (1995) Savoir pour agir, Paris, InterÉditions.
Bettelheim, B. (1975) Un lieu où renaître. La somme de trente ans d’expérience à l’école orthogénique de Chicago, Paris, R. Laffont.
Cifali, M. (1994) Le lien éducatif : contre-jour psychanalytique,Paris, PUF.
Gather Thurler, M. (1994) Relations professionnelles et culture des établissements sco­laires : au-delà du culte de l’individualisme ?, Revue française de pédagogie, octobre-no­vembre, n° 109, pp. 19-39.
Gather Thurler, M. (1996 a) Innovation et coopération entre enseignants : liens et limites, in Bonami, M. et Garant, M. (dir.), Systèmes scolaires et pilotage de l’innovation. Émergence et implantation du changement, Bruxelles, De Boeck, pp. 145-168.
Gather Thurler, M. (1996 b) Entre dissidence et discordance : lorsqu’une équipe avertie en vaut deux, Lettre d’Équipes et Projets, n° 10, janvier, pp. 14-21.
Gloton, R. (1979) Au pays des enfants masqués, Paris, Casterman.
Perrenoud, Ph. (1994) Travailler en équipe pédagogique, c’est partager sa part de folie, Cahiers pédagogiques, n° 325, Juin, pp. 68-71.
Perrenoud, Ph. (1996 a) Enseigner : agir dans l’urgence, décider dans l’incertitude. Savoirs et compé­tences dans un métier complexe, Paris, ESF.
Perrenoud, Ph. (1996 b) Pouvoir et travail en équipe, in Travailler ensemble, soigner ensemble. Actes du symposium, Lausanne, Centre hospitalier universitaire vaudois, Direction des soins infirmiers, pp. 19-39.
Perrenoud, Ph. (1996 c) L’analyse collective des pratiques pédagogiques peut-elle transformer les praticiens ?, in Actes de l’Université d’été “ L’analyse des pratiques en vue du transfert des réussites ”, Paris, Ministère de l’Éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, pp. 17-34.
Perrenoud, Ph. (1996 d) Peut-on changer par l’analyse de ses pratiques ?, Cahiers pédagogiques, n° 346, Septembre, pp. 14-16.
Perrenoud, Ph. (1997) Pédagogie différenciée : des intentions à l’action, Paris, ESF.
 
 

 

Travailler en équipe : l’expérience des écoles Freinet

Mars 2001

A l’heure où, dans de nombreux départements, des groupes d’enseignants se mettent en place autour de projets d’établissements innovants, où le Ministère de l’Education Nationale crée le Conseil National de l’Innovation pour la Réussite Scolaire, le Nouvel Educateur a choisi de présenter un dossier spécial sur le travail en équipe.

 
Issu de la réflexion du réseau des « équipes » de l’ICEM, il fait le point sur le travail de celles-ci. Nous y présentons également la plate-forme adoptée par l’ICEM, qui sert de base à la constitution de nouvelles équipes se revendiquant de la pédagogie Freinet. Deux enseignants de Meurthe et Moselle, nous présentent le fonctionnement de leur classe unique à deux maîtres, à Villey le Sec. Quant à la rubrique « Recherches ouverture », elle laisse la parole à Philippe Perrenoud, sociologue à l’université de Genève, qui développe les implications du choix de « travailler ensemble ».
 
 
Des écoles Freinet pour le XXIème siècle
 
Le projet d’école est présenté aujourd’hui comme la pierre angulaire du système éducatif. Il serait la condition nécessaire d’une harmonisation ou, à tout le moins, d’une continuité des pratiques au sein des équipes pédagogiques. On sait combien sa mise en place s’avère chaotique, tant il heurte une culture enseignante imprégnée d’individualisme, au risque bien souvent de la solitude fragilisante. Même si on ne peut nier que cette obligation induit des changements en profondeur de l’univers scolaire, ne se heurte-t-elle pas aux contradictions d’un système très hiérarchisé ?
 
Comment éduquer des personnes autonomes et responsables alors que leurs éducateurs travaillent eux-mêmes dans un cadre infantilisant ?
Comment amener les équipes à prendre en charge le projet et l’organisation de leur école si ceux-ci restent avant tout l’affaire du directeur ?
Comment parvenir à créer du lien pédagogique entre adultes mais aussi entre enfants des différentes classes, au sein de grandes structures qui tendent à devenir la règle dans notre société urbaine, rationalité économique oblige ?
 
Le simple bon sens voudrait déjà qu’on revendique partout des petites structures à taille humaine (5 classes au grand maximum), dont les performances sont supérieures en tous points.
 
Depuis quatre ans, un réseau des « équipes » a été relancé au sein de l’ICEM . Il s’appuie sur l’expérience des différentes équipes Freinet qui se sont constituées au gré des circonstances et des conditions locales, pour la plupart en milieu urbain et souvent dans des quartiers populaires.
C’est un chantier ouvert à toutes les équipes cherchant à développer des pratiques coopératives, tant du côté des adultes que des enfants. En l’occurrence, il s’agit de se poser en véritable alternative en réponse à certains problèmes actuels de l’école primaire.
 
Premier gros travail du réseau, une plate-forme des équipes Freinet a vu le jour (voir page ). Celle-ci a été soumise à l’accord du Ministère et des syndicats enseignants, en vue de la pérennisation des équipes en place et de l’implantation de nouvelles, là où il y a volonté de le faire. Notre objectif est la mise en place d’au moins une école et un collège Freinet par département, à moyen terme. Pôles de recherche-action en relation permanente avec notre Mouvement pédagogique, ils pourraient être aussi des « pôles d’appui » au sein de l’Education Nationale.
 
A ce titre, l’installation récente par Jack Lang, du Conseil National de l’Innovation pour la Réussite Scolaire ouvre des perspectives intéressantes. L’ICEM compte bien participer activement à ce nouveau chantier, dans la mesure où il permettra la mise en réseau d’équipes innovantes, la validation et la reconnaissance de pratiques désormais éprouvées mais aussi la constitution de nouvelles équipes sur la base de contrats clairs.
 
La plate-forme met en avant les grands principes de notre pédagogie dont la mise en œuvre s’avère des plus pertinentes dans le contexte actuel. La coopération à l’intérieur de l’école est non seulement un parti pris politique et éthique mais constitue une alternative particulièrement performante quand elle s’applique à la gestion pédagogique et administrative de l’école. Nous pensons également que la coopération est un mode de formation pertinent et cohérent pour tous les enfants, dans la visée de leur scolarité et de leur vie future… et c’est bien là l’essentiel.
 
Direction collégiale ou gestion coopérative de la direction, selon la taille des structures, sont à même de répondre au malaise actuel de la direction d’école, tout en favorisant pour chacun des membres de l’équipe l’appropriation du projet de l’école (voir le Nouvel Educateur n°126). Et dans notre esprit, ce chacun regroupe, à part entière, les maîtres et maîtresses, mais aussi les autres personnes intervenant dans l’école (aide-éducateurs, personnel municipal, parents…). Au passage, cela n’exclut pas la généralisation à toutes les structures, quelque soit leur taille, d’une décharge de direction qui, rappelons-le, est à la discrétion de l’équipe et non du seul directeur.
 
L’intégration par les enfants de véritables «techniques de vie » impliquent une cohérence et une continuité de pratiques sur l’ensemble d’une école. Il nous semble fondamental d’appliquer à nous-mêmes, adultes, les exigences et les principes que nous développons avec les enfants dans nos classes. Les enfants ont besoin de sentir cette cohérence à travers les différentes institutions propres à chaque école, pour être pleinement parties prenantes dans la vie de celle-ci.
 
L’éducation de personnes autonomes et responsables réclame l’image d’adultes joignant le geste à la parole.
La plate-forme est aussi pour nous le vecteur de certaines revendications fondamentales :
-L’inscription dans les règlements intérieurs de certains droits en cohérence avec nos pratiques et la Convention internationale des Droits de l’Enfant, tels que la libre circulation des enfants à l’intérieur de l’école.
-La reconnaissance de la notion de responsabilité collective des équipes corrélative à la gestion coopérative de la direction.
 
Dans le même ordre d’idées, une autre conception de l’évaluation des équipes introduisant les notions de co- et auto-évaluation sous l’œil formatif d’intervenant(s) extérieurs, dans l’esprit des audits pratiqués ailleurs.
Sans oublier, bien sûr, notre volonté permanente de faire reconnaître chaque enfant comme véritable sujet de ses apprentissages, de sa vie sociale et comme être capable de s’exprimer, communiquer, coopérer, apprendre par lui-même et grâce aux autres, prendre des responsabilités et s’évaluer.
On le voit, ce chantier ne fait que s’ouvrir et compte bien contribuer pleinement à la recherche-action sur l’école Freinet du XXIème siècle.
 
 Pierrick Descottes
(Ecole Léon Grimault – Rennes)
Groupe départemental 35 de l’ICEM
et François Le Ménahèze
(Ecole Ange Guépin – Nantes)
Groupe départemental 44 de l’ICEM
 
 
 

 

 

 

Les équipes Pédagogie Freinet, que sont-elles ? qu’apportent-elles ?
 
Une équipe pédagogie Freinet, c’est un lieu culturel
- par la place qui est celle de l’enfant (différent de « l’élève »)
- par les possibilités d’expression permises
- par les échanges
- par les lieux culturels spécifiques qu’on y trouve (exemple : la BCD)
- par les projets annuels donnant des ouvertures vers l’extérieur
- par le métissage des classes sociales qui s’y côtoient souvent
- par l’hétérogénéité des classes
- par la prise en compte de la vie de l’enfant hors l’école (sa culture, son langage, ses savoirs autres que scolaires, ses représentations...)
L’équipe développe une idée de communauté (il suffit de savoir comment les anciens continuent à se rencontrer)
- par le type de relation de confiance et de respect
                ° entre enfants (pas de compétition scolaire, donc pas de mépris)
                ° entre enfants et enseignants (ce n’est pas un élève, mais un enfant qui peut se raconter, inventer, prendre confiance)
                ° entre enfants, enseignants et parents (informations - coopération)
                ° entre enseignants.
 
La durée de l’équipe fait de l’école, au fil des ans :
                un lieu habité
                un espace de vie
                une communauté dans laquelle chaque enfant est chez lui sans doute parce que :
- on y respecte ses droits fondamentaux
- on y assure sa sécurité affective (respect(s) «» règles de vie)
- on y prend en compte les différences (culturelles, de « rythme », de savoirs)
- on lui donne le TEMPS.
- on fait émerger ce qu’il sait déjà - on tient compte de ses représentations - il peut s’exprimer - communiquer - parler - se dire (ailleurs, c’est l’instit qui parle, l’enfant répond quand on l’interroge)
- on l’écoute, on lui sourit « quelquefois » !
 
 Il peut se nourrir à des heures convenables, se reposer si besoin, boire quand il a soif, faire pipi quand il en a envie.
Il peut circuler seul (pour aller aux toilettes ou à la BCD,...) à 2 ou 3 et non en troupe, en rang, ou en faisant le « petit train ».
Il a le droit de ne pas avoir de devoirs le soir, un cartable surchargé, etc.
BREF, à être un ENFANT : ni un mythe, ni un entonnoir, ni un miroir, ni un marathonien, ni...
 
TRAVAILLER dans une équipe, c’est une mise à l’épreuve du TEMPS d’une pédagogie et de sa réussite :
démontrer par A + B, de A à Z qu’il peut y avoir REUSSITE, en tous cas apprentissage(s) en prenant en compte des enfants dans leurS individualitéS et leurs possibilités d’expression(s).
 
TRAVAILLER en équipe apporte aux adultes une sérénité :
- on n’a pas sans cesse à se justifier par rapport aux résultats de la classe « d’avant » ;
- on n’a pas à craindre la classe « d’après »,
     parce qu’il n’y a pas de confrontations brutales entre des pratiques pédagogiques trop « différentes », divergentes (voire des idées « politiques » - au sens large - opposées)... une sérénité...
     parce qu’elle apporte des complémentarités de savoir-faire des enseignants.
 
Une équipe pédagogie Freinet, c’est un lieu de formation pédagogique, institutionnel.
 
Et une technique de vie, pour les adultes aussi :
par les échanges qu’on y vit ;
par les stagiaires qu’on y reçoit et qui nous obligent à expliciter nos pratiques.
Par notre participation au Groupe Départemental, aux chantiers, aux stages.
 
Une équipe pédagogie Freinet, c’est un lieu de recherche...
- quand on peut y analyser ses pratiques ;
- quand on peut réajuster des objectifs, des résultats ;
- quand on peut projeter, mettre en œuvre, tâtonner (pas dans le flou, ni dans le noir, mais par tâtonnement expérimental), débattre ;
donc, qu’on accepte le regard des autres, la critique, sa propre remise en cause.
 
Une équipe pédagogie Freinet, c’est un lieu de promotion pour la pédagogie Freinet
On y construit, on y vit une autre idée de l’école, une autre idée de la réussite « scolaire » (donc de l’échec scolaire), une autre idée (non besogneuse) du travail, un autre rapport entre les gens, une autre idée du métier d’enseignant (donc de transmettre), une autre idée de la culture.
 
Annie Bard
(groupe départemental 13 de l’ICEM)
 
Extrait d’un article paru dans Educadoc, revue du groupe Freinet des Bouches du Rhône - mai 99.
 
 

 

Direction collégiale, LA condition au travail d’équipe
 
 
Le texte qui suit tente de poser un regard sur des pratiques en mouvement perpétuel, et cela du point de vue des adultes.
Il va sans dire que cette expérimentation quotidienne du travail d’équipe n’a de sens que s’il met les enfants de l’école au cœur même de cet esprit d’équipe.
La coopération, la responsabilisation, l’esprit d’initiative, la cohérence des pratiques et des attitudes ne sont plus alors de vains mots pour les enfants ; ils peuvent constater en effet quotidiennement que les adultes expérimentent eux aussi dans ce sens (conseil d’adultes, règles de vie, responsabilités...), partagent cette vie avec eux (conseils d’enfants, élaboration des règles, gestion des conflits...)
Ils apprennent aussi que l’être humain (et même le « sacro-saint » adulte), malgré ses essais de cohérence et de volontarisme, possède des failles, commet des erreurs... mais comprennent aussi qu’il est possible à ces adultes d’accepter ses erreurs, ses moments d’énervement... et d’essayer de les comprendre un tant soit peu.
Il est vrai que l’efficience de ces pratiques est parfois longue à voir le jour, car les chemins qui y mènent ne sont ni rectilignes ni tracés d’avance. Mais quand on commence à voir un enfant rappeler à son copain telle règle dans l’école, quand un autre rappelle à un parent que pour les inscriptions il faut aller voir tel adulte de l’équipe… on se dit que des étapes ont été franchies.
 
Une idée semble depuis quelques années faire doucement (mais sûrement) son chemin, c’est le travail d’équipe.
Ce « principe » semble mis en avant dans tous les rapports sur l’école (qui fleurissent regulièrement… pour faner aussitôt !). Pourquoi donc cette si soudaine attention envers une idée qui a traversé le siècle dans la plus grande indifférence ... à part bien sûr pour quelques utopistes de l’Education Nouvelle ?
Mon propos ne sera pas d’essayer d’expliquer cette illumination de nos « instances officielles » pour le travail d’équipe ... j’en laisserai ce soin à d’autres !
Je peux simplement montrer en quoi il est indispensable à la bonne marche d’une école et à la reconnaissance de tous les partenaires de l’école, enfants, parents, enseignants.
Je partirai de mon expérience de quelques années maintenant à l’intérieur d’une équipe, et d’une direction collégiale, à l’école publique ouverte Ange Guépin à Nantes.
 
La place de chacun
 
Un vrai travail d’équipe ne peut commencer sans que chaque personne de l’équipe ait une place, une reconnaissance. Ce statut évoluera ensuite vers une responsabilisation au sein de la structure afin de pouvoir agir sur celle-ci,de prendre des initiatives.
Et alors, comme dans tout groupe, chacun aura sa reconnaissance : l’empêcheur de tourner en rond, l’organisateur, le penseur, le législateur, le diplomate, ...
 
La répartition des responsabilités
 
De la structure même, des conditions matérielles, de l’environnement... naissent un certain nombre de tâches à effectuer, d’actions à mener. Une des premières oeuvres de l’équipe sera donc de définir celles-ci, puis de se les répartir. La première épreuve du travail d’équipe se situe sans doute à ce moment, car il faut commencer à organiser avec les envies de chacun, les tâches dont personne ne veut, les responsabilités assumées déjà par certains ...
Voilà ce que ça peut donner par exemple pour notre école actuellement.
 
L’équipe pédagogique se compose de cinq enseignants organisés en classes de cycle : deux classes de cycle 2(CP-CE1) et trois classes de cycle 3 (CE2-CM1-CM2). S’ajoutent à l’équipe selon les besoins les responsables du restaurant scolaire, le gardien de l’école et les membres du RASED (psychologue scolaire, ...). Une sixième enseignante est également présente un jour par semaine pour la décharge de direction.
Le Conseil des maîtres est l’instance décisionnelle de l’école et est garant du bon fonctionnement de l’école. Il permet la réflexion et la coopération. Les responsabilités sont partagées au sein d’une direction collégiale. (voir le tableau joint des diverses tâches). La responsabilité juridique reste au directeur en titre, mais chaque enseignant accepte sur le plan moral de partager celle-ci. Les décisions sont prises à l’unanimité, sauf cas exceptionnel.
Le Conseil des maîtres se réunit une fois par semaine au moins, le mardi de 17h à 18h. Il régule les questions de fonctionnement, les projets, les débats pédagogiques et éducatifs, les problèmes rencontrés, les informations à partager, ....
Les décisions prises sont appliquées par les membres de l’équipe.
 
Le ¼ de décharge est affecté en fonction des décisions du Conseil des maîtres selon les responsabilités et projets en cours.
L’équipe pédagogique organise également une réunion mensuelle afin d’analyser ses pratiques, avec l’intervention d’une personne extérieure. Des animations pédagogiques au sein de l’école et à l’extérieur permettent également le travail de recherche, d’ouverture et de co-formation indispensable au travail d’équipe.
L’indemnité perçue (impôts et charges retirés) par le directeur est mise en réserve et peut servir à tout projet décidé en commun. (documentation pédagogique - sortie culturelle - repas ...)
Chaque enseignant est responsable de son action pédagogique dans sa classe et dans l’école en référence à la Charte de l’école.
Les parents s’adressent en premier lieu à l’enseignant de leur enfant. En cas d’incident ou de conflit grave, le Conseil des maîtres les recevra et informe l’inspecteur.
Pour tout sujet concernant l’école, les parents s’adressent au responsable de la direction collégiale concerné par le sujet.
 
Voici donc ce qui est affiché dans l’école en début d’année. Après l’inventaire des tâches, nous passons aux responsabilités que chacun va prendre et essayer d’assumer durant l’année. Certains postes sont doublés, soit en raison de la charge du travail (inscriptions ...), soit pour motif de co-formation (fournitures, BCD...). Il faut précise que, pour un nouvel arrivant dans l’équipe, la responsabilité de celui-ci est fonction de son désir et d’une charge de travail mesurable.
Les noms en italique sont les personnels non-enseignants, que nous essayons de mettre également dans le coup.
Le poste de direction tenu par un « directeur officiel » (car il faut bien que quelqu’un prenne en cas de coup dur...et, selon l’administration, ce poste ne peut être partagé ! ? à nos éternels grands regrets) qui reverse ses indemnités aux membres de la direction collégiale.
On peut dire qu’après quelques années d’expérience, certaines « instances » commencent à comprendre (mairie, en particulier… et inspection, selon l’inspecteur nommé) et les relations peuvent s’établir directement entre le partenaire et le responsable de l’équipe.
 
 
Régulation de l’équipe :
 
Une concertation par semaine est instituée un soir après la classe. Quelques outils ont été mis au point :
-un tableau Velleda sur lequel tout au long de la semaine chacun a pu noter ses points à mettre à l’ordre du jour,
-un cahier de concertation sur lequel nous notons les décisions prises,
-le courrier tournant, pour élaborer un projet, un courrier important ... ; un lance le courrier, il est critiqué, annoté par les autres et il revient au premier qui propose une mouture finale.
 
Cette concertation nous permet de traiter les urgences, les projets en cours ou à démarrer, le courrier ... Il permet à chacun de demander l’avis de l’équipe pour une décision à prendre, au sujet de sa responsabilité, à propos d’une difficulté avec une famille, un enfant...
Nous prenons depuis plusieurs années le temps d’animation pédagogique du samedi matin entre nous afin de travailler, d’échanger sur des projets communs, des outils pour l’école... : livret de formation, orthographe, stages enfants...
 
Les prises de décision, du fait sans doute d’une petite équipe et de personnes aptes à ce fonctionnement, ne pose que très rarement problème. Elles sont souvent prises au consensus ou à l’unanimité.
 
Il va sans dire que cette organisation quelque peu figée et austère de début d’année n’est qu’un point de repère dans le travail de l’équipe. La vie quotidienne va faire le reste et l’on peut constater que les rôles de chacun dépassent, empiètent, sortent très souvent des tâches réparties ; qu’à l’instant T, untel aura la disponibilité et les compétences pour remplir ce rôle dont l’équipe a besoin.
 
La direction collégiale (sachant tout ce qui en découle et va s’y dérouler) nous paraît bien le pivot du travail d’équipe, l’endroit où travail et vie vont pouvoir exister et cohabiter.
 
                               François Le Ménahèze

 

 
 
DIRECTION COLLEGIALE
 
*Relations mairie : (indemnités-travaux...)                                                         Cath        
*Relations extérieures:          inspection                                                                              Yves
                                               syndicats                                                                Yves-François
                                               collèges                                                                  François
                                               maternelles-réseau d’aide/ équipe éducative                          Patrice-Françoise                                                                                                   presse-communication (+convivialité)                  Patrice
                                               6ème enseignant      (1/4 de décharge)                    Conseil des maîtres
*Coopérative/OCCE :                                                                                          Yves-Patrice
*Fournitures-gestion du matériel :                                                                      Yves-Françoise
*Inscriptions (+journée portes ouvertes) :                                                                          Cath - Françoise     
*Restaurant scolaire :                                                                                          Anne-Sylvie-AAPEN
*Relations avec restaurant scolaire et AAPEN                                                   Françoise
*Entretien de l’école                                                                                            Anne-Sylvie-Olivier
*Courrier / Affichage-Calendrier:                                                                      Cath        
*Assurances :                                                                                                        Yves                      
*BCD / Relations parents et association/ élections Conseil d’Ecole:                    François
*Matériel : audio-visuel-musique-sport                                                                               Patrice
*Journal /Internet-Informatique : maintenenance                                                             Cath - Yves
*Animation pédagogique-concertations équipe-projets :                                   Conseil des maîtres
*Suivi projet d’écoel-CEL…:                                                                                              Cath-Françoise
*Parrainage nouveaux collègues :                                                                       Conseil des maîtres
 
La plate-forme des équipes Freinet
 
Issue du travail de réflexion du réseau des équipes Freinet, cette plate-forme se veut une base de travail pour la constitution de nouvelles équipes et la reconnaissance de celles qui fonctionnent déjà. Elle s’articule autour de deux points : les incontournables d’un fonctionnement qui se revendiquerait de la pédagogie Freinet et l’organisation coopérative de l’équipe enseignante.
 
A) Charte des équipes Freinet
 
 
1-Principes pédagogiques et politiques
 
Une société de justice, de fraternité, de liberté a besoin de personnes responsables, autonomes, capables de critiques sur le monde dans lequel elles vivent pour le faire évoluer selon les finalités de la Charte de l’Ecole Moderne.
 
Les équipes Freinet s’inscrivent dans le cadre de l’école laïque et du service public de l’éducation. Les écoles qui les accueillent bénéficient des mêmes moyens financiers et conditions de fréquentation que toutes les autres écoles (financements, sectorisation…).
 
De la sorte, elles se donnent entre autres buts la diffusion et la transférabilité de leurs pratiques et fonctionnements.
 
Visant la réussite et l’épanouissement de tous les enfants, elles portent cependant une attention particulière aux publics dont le système scolaire est culturellement distant. En ce sens, l’hétérogénéité sociale constitue une nécessité.
 
Les équipes Freinet défendent les petites structures scolaires et cherchent à constituer des écoles à taille humaine, dans un cadre architectural adapté.
Dans cette optique, l’école doit pour réussir :
·reconnaître l’enfant comme une personne
·respecter le rythme de travail de chacun, son originalité et tous les aspects de sa personnalité et son vécu social et culturel
·être ouverte sur la vie
·donner à chaque enfant la place et la reconnaissance dont il a besoin pour se développer.
·favoriser l’autonomie, développer le sens critique, permettre une réelle prise de responsabilités
·favoriser l’apprentissage de la liberté au sein d’un groupe
·avoir le souci des démarches d’apprentissages et de l’acquisition des connaissances, dans l’esprit de la méthode naturelle.
 
 
Une école centrée sur l’enfant pour :
·le respect de l’enfant, de ses spécificités et de son rythme, en cohérence avec les cycles d’apprentissage.
·le développement de sa personnalité, de ses potentialités
·l’apprentissage de la liberté
 
La Pédagogie Freinet tend vers la mise en œuvre de :
·la méthode naturelle et le tâtonnement expérimental
·l'expression libre et la création par la pratique et la valorisation de
tous les langages : oral, écrit, artistique, mathématique ou corporel.
·la communication (en réseaux internes et externes)
·la pratique de la citoyenneté par une vie coopérative (propositions, choix, projets, décisions, bilans, droits et devoirs, Conseil d’enfants)
·la prise en compte de l’environnement
·l’individualisation du travail
 
Une école qui permette à chacun de construire ses apprentissages par :
·une personnalisation des apprentissages à l’aide d’outils et d’une organisation appropriée du temps et de l’espace.
·une construction des connaissances en interaction avec les pairs et les adultes.
·une évaluation formative et socialisée.
 
Ce projet éducatif se réalise pour nous à travers la Pédagogie Freinet :
·Pédagogie pratiquée par des équipes coopératives d’enseignants au sein d’écoles publiques.
·Pédagogie ouverte aux recherches des Sciences de l’Education.
·Pédagogie qui met en œuvre la Convention Internationale des Droits de l’Enfant.
 
Ce projet éducatif reconnaît à chaque personne partageant la vie de l’école un statut spécifique :
 
Statut des enfants :
 
·Acteur de ses apprentissages
·Co-responsable de la vie du groupe et de l’école
 
Statut de l’équipe éducative :
 
·L’équipe pédagogique (maître(sse)s) est garante du projet spécifique de l’école et de sa mise en œuvre.
Elle se réunit régulièrement en Conseil des maîtres.
·L’équipe élargie aux autres personnes partageant la vie de l’école (délégués-enfants, parents, intervenants extérieurs, aide-éducateurs, partenaires médico-sociaux et agents municipaux) se réunit régulièrement dans un souci de cohérence et de sécurité des enfants.
·Elle se réunit régulièrement en Conseil coopératif (y compris le Conseil d’école).
 
Le rôle de chacun(e) sera ici bien défini en fonction de sa spécificité.
Notre visée reste la prise en compte de l’enfant dans sa globalité et sa singularité.
Cette continuité éducative installe durablement et pour chacun des « techniques de vie »
 
 
2-Règlement intérieur type
 
Le règlement intérieur des écoles Freinet se réfère au règlement départemental auquel chaque école est soumise en tant qu'école publique. 
 
Il comporte des spécificités propres au fonctionnement coopératif des écoles Freinet, en cohérence avec les textes réglementaires actuels et à venir, et dans le respect de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant.
 
Il s’attache à mettre en oeuvre les libertés fondamentales reconnues à l'enfant par celle-ci tout en garantissant son droit à la sécurité et à la protection.
 
Il vise particulièrement à développer les conditions d’une circulation libre et responsable dans l’école.
 
Les Conseils d’enfants permettent aux enfants en coopération avec les enseignants de participer à la gestion démocratique du travail et de la vie de l’école par l’apprentissage vécu de la citoyenneté. Ils élaborent les règles de vie propres à l’école et à chaque classe.
 
La vie coopérative permet aux enfants de gérer les projets des classes et/ou de l’école.
 
3-La gestion coopérative de la direction dans les écoles Freinet
 
Principes de base
 
L’organisation et le fonctionnement des équipes se doivent d’être cohérents avec l’esprit coopératif défendu par la Pédagogie Freinet.
La gestion coopérative de la direction offre une alternative performante au mode de direction traditionnel.
 
Organisation - Fonctionnement
 
Décharge de direction
 
Quand elle existe, le temps de décharge de direction est à discrétion de l’équipe pédagogique et non du seul directeur. Chaque équipe doit pouvoir en user coopérativement, en fonction des tâches de chacun(e) ou des responsabilités respectives dans les projets en cours.
 
Temps de gestion - organisation de l’équipe
 
Concernant la gestion de l’école (décisions à prendre, projets à discuter, problèmes rencontrés, informations à partager...), des réunions d’équipe s’imposent régulièrement, en plus des temps de concertation institutionnels.
 
Répartition des tâches - Outils de partage
 
Les tâches qui incombent à chacun(e) sont assurées avec un souci de totale responsabilisation.
En début de chaque année, les différentes tâches de direction (matérielles, administratives et pédagogiques) sont listées et réparties entre les membres de l’équipe.
L’organigramme est communiqué aux administrations et aux partenaires locaux. 
 
Mode de décisions
 
Les décisions sont prises par le Conseil coopératif de l’école.
 
Les membres de l’équipe en appliquent les décisions.
 
Le Conseil des maîtres reste garant du bon fonctionnement de l’école.
 
4-Système de nomination dans les écoles Freinet
 
·    Tous les postes vacants ou susceptibles d'être vacants dans des écoles Freinet sont indiqués comme postes « à contraintes particulières » dans le mouvement des instituteurs et professeurs d’école.
 
·    Les maîtres(se)s intéressé(e)s par ces postes doivent prendre contact avec l’équipe avant de faire acte de candidature.
 
·    Une réunion est organisée entre les maîtres(se)s intéressé(e)s et l’équipe de l’école. Accord et engagement sur les « contraintes particulières » : les postulants doivent adhérer à la Charte des écoles Freinet, de l’Ecole Moderne et signer le             contrat de coopération de l’école demandée.
 
·    A l’issue de cette prise de contact, il est proposé à la CAPD une liste de personnes ayant effectué les démarches ci-dessus.
·    Les postulants n'ayant pas effectué toutes ces démarches verront leurs vœux sur l'école neutralisés lors du mouvement.
 
5-l’évaluation des équipes
 
L’évaluation des équipes est nécessaire, mais il y a inadéquation entre l’évaluation traditionnelle et le travail d’équipe.
L’inspection individuelle repose sur un système hiérarchisé.
 
Le travail en équipe Freinet implique une transformation du métier.
Le (La) maître(sse) appartenant à une équipe pédagogique Freinet fait partie d’un système évolutif, coformateur et coévaluateur, impliquant la responsabilisation de chacun(e).
 
L’équipe définit ses objectifs en fonction d’un constat de terrain et en se référant aux orientations politiques et pédagogiques de l’ICEM - Pédagogie Freinet.
 
L’évaluation des équipes doit pouvoir prendre en compte :
-les projets de l’équipe,
-les bilans des différentes étapes des projets et leur évolution, dans un souci permanent de régulation,
-les innovations dans leurs réussites et leurs niveaux de réussite,
-l’aspect formateur du travail en équipe coopérative.
 
L’évaluation du travail d’une équipe coopérative ne peut donc être une évaluation uniquement individuelle et normative mais doit prendre en compte l’ensemble des projets de l’école et leur cohérence, en ouvrant des nouvelles pistes pédagogiques et de recherches.
6-La formation et co-formation entre équipes
 
Les équipes Freinet sont ouvertes aux recherches menées dans les sciences de l’éducation, à l’INRP et dans les organisations liées au CLIMOPE.
 
Pour atteindre ses objectifs l’équipe peut faire appel à d’autres partenaires (spécialistes, chercheurs…). Elle doit gérer de nombreux projets auxquels participent des structures ou des personnes du quartier ou du village (Maison de quartier, parents…). Chaque projet fait l’objet de bilans avec tous ces acteurs. Ces bilans servent de base de travail pour d’autres projets.
 
L’ensemble des équipes Freinet entretient des échanges réguliers et a besoin de rencontres nationales, régionales et départementales dans le cadre de l’ICEM – Pédagogie Freinet et des plans de formation du Ministère de l’Education Nationale.
 
Les équipes Freinet choisissent d’accueillir sur la base d’un contrat, individuel et /ou institutionnel, les personnes désirant approcher la Pédagogie Freinet.
 
7-Relations avec les partenaires
 
L’organisation coopérative des équipes implique une reconnaissance particulière de ses spécificités par les différents partenaires et donc un nouveau mode de relations.
 
Relations avec les municipalités
 
·Reconnaissance de la direction collégiale ou coopérative.
·Reconnaissance de la Charte des écoles Freinet ainsi que du caractère spécifique de recherches pédagogiques qui en découle ce qui implique que le personnel communal (cantine, garderie, surveillants, intervenants culturels) doit prendre en compte le projet pédagogique de l’école et se conformer à son esprit. Il doit participer à des réunions de concertations au sein de l’équipe éducative.
 
 
Relations avec les parents
 
Le souci des équipes pédagogiques des écoles Freinet est d’ouvrir l’école aux parents pour construire avec eux un projet d’éducation qui saura prendre en compte leurs demandes, leurs attentes, dans l’intérêt des enfants, au regard des textes officiels de l’Education Nationale, de la Charte des équipes Freinet et de la Convention internationale des Droits de l’Enfant.
 
En plus de ces relations institutionnelles, les équipes pédagogiques donnent la possibilité aux parents qui le désirent et le peuvent de collaborer à certaines activités scolaires et extra-scolaires.
 
Relations avec les syndicats
 
La reconnaissance de la charte des écoles Freinet n’a pas pour but de donner des avantages aux écoles et aux enseignants qui s’en inspirent mais de donner la possibilité de fonctionner dans cet esprit.
 
L’ICEM-pédagogie Freinet travaille en liaison avec les syndicats afin de tout mettre en œuvre pour que de tels projets aboutissent et puissent garantir le respect par l’administration (IA, municipalité…) de cette charte, en vue de la rénovation de l’école.
 
Relations avec le monde environnant (associations et voisinage de l’école)
 
L’école se doit d’être ouverte sur le monde environnant, c’est pourquoi l’équipe pédagogique ale souci de faire découvrir ce monde aux enfants mais aussi de faire participer celui-ci à la vie de l’école.
Il est primordial de développer des échanges réguliers et constructifs entre école, quartier ou village et familles, vers l’instauration d’un espace éducatif permanent.
 
B) Contrat de coopération en équipe Freinet
 
Les équipes pédagogiques en convention avec l’ICEM sont constituées d’enseignants travaillant dans l’esprit de la pédagogie Freinet dont ils respectent les orientations et principes fondamentaux.
Leurs membres s’appliquent à mettre en oeuvre le projet pédagogique spécifique de l’école.
 
PRINCIPES ET FONCTIONNEMENT DES EQUIPES
 
L’organe représentatif et décisionnel de l’équipe est le conseil des maîtres, en concertation avec le Conseil coopératif.
- il demeure un organisme de réflexion et de décision.
- Il fonctionne de façon coopérative, aucune voix n’étant prépondérante.
 
1.Les décisions y sont prises à la majorité des membres de l’équipe et appliquées par tou(te)s.
 
2. Il se réunit régulièrement à date fixe. Il tient à jour le cahier des décisions. En cas de nécessité, il peut se réunir exceptionnellement à la demande d’un seul de ses membres.
 
3. Les absents consultent ce cahier et tiennent compte des décisions prises.
 
4. Chaque enseignant participe à l’animation pédagogique de l’école (conférences, portes ouvertes, réunions avec des partenaires extérieurs, commissions...).
 
5. L’équipe met en place des objectifs, des techniques et des outils cohérents entre toutes les classes, dans le souci d’une harmonisation des pratiques.
 
6. Des conseils des maîtres et des commissions de travail seront régulièrement consacrés à des échanges et des mises au point pédagogiques entre maîtres.
 
7. La répartition des enseignants sur les différentes classes n’est pas figée. Elle peut évoluer, notamment en suivant les enfants sur plusieurs années.
 
8. Problèmes relevant du conseil des maîtres :
- évolution des projets pédagogiques
- inscriptions
- répartition des locaux, des élèves et des niveaux de classe
- utilisation des crédits
- gestion de la coopérative
- répartition des services entre tous les membres de l’équipe
- aménagement de l’école
- discipline générale
- vie des enfants à la cantine, à l’étude
-relations avec les partenaires sociaux (parents, psychologues, assistantes sociales, animateurs du quartier, mairie...)
- gestion des classes transplantées.
 
 
CONTRAINTES ET SUJETIONS
 
Travailler enéquipen’est pas sans contraintes. Celles-ci se définissent et se modulent selon la mise en place des projets.
 
En voici quelques caractéristiques :
 
1.Disponibilité en temps :
 
1.1.Participation à la réunion hebdomadaire du conseil des maîtres, en sus des réunions réglementaires.
1.2.Nombreuses concertations entre enseignants, avec les partenaires socio-éducatifs et les parents, particulièrement les parents d’enfants en difficultés.
 
2.Ouverture et esprit de recherche :
 
2.1.Aptitude à réajuster son action pédagogique, en fonction des résultats et bilans menés en équipe.
2.2.Permanence de la volonté d’oeuvrer en « praticien-chercheur » dans l’optique de la pédagogie Freinet.
2.3.Respect de l’unité et de la cohérence pédagogique définie.
2.4.Ouverture de sa classe, confrontation des pratiques de façon continue, acceptation du principe de coformation.
2.5.Ouverture vers le groupe ICEM-Pédagogie Freinet ; participation à des stages, rencontres et/ou chantiers de travail.
 
3.Acceptation du principe de partage de certaines charges traditionnellement attribuées au directeur (à la directrice).
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Sommaire
 
A) La charte des écoles Freinet
-Principes pédagogiques et politiques
-Règlement intérieur                                        
-La gestion coopérative de la direction
-Système de nomination dans les écoles Freinet
-L’évaluation des équipes Freinet 
-La formation et la coformation entre équipes
-Les relations avec les partenaires               
B) Le contrat de coopération en équipe Freinet                    
 
 
 
BASES UNE EVALUATION FORMATIVE DE L’EQUIPE
suite à l’entretien avec l’inspecteur de circonscription
 
Extrait de la Charte de l’école :
« Les enseignants de l’école engagés dans leur travail sur la base de la présente charte sont solidaires et co-responsables. Leur évaluation est coopérative, formative et continue. A ce titre, ils revendiquent le droit à être évalués selon les modalités qui respectent ces pratiques. »
 
Les points incontournables à l’équipe :
 
* La docimologie a démontré la subjectivité et l’incohérence de toute notation ; une évaluation formative ne peut donc s’accomoder d’une note.
Il sera indiqué au début du « rapport » que les notes de chacun des membres de l’équipe ne bougeront pas, d’un commun accord entre l’équipe et l’IEN.
 
* L’inspection individuelle seule n’aurait aucun sens, dans le cadre d’une évaluation formative d’enseignants au sein d’une équipe.
Les critères d’observation et d’analyse sont donc définis, avant toute visite, lors d’un entretien préalable entre l’équipe et l’IEN. Ils ont pour but de permettre à l’équipe, et à chacun au sein de celle-ci, d’analyser ses pratiques et de rechercher les améliorations à apporter. L’  « observateur » sera donc accompagné en toute circonstance, lors de ses visites, d’un membre de l’équipe.
 
Les critères d’ observation :
 
*Principes et organisation définis dans la Charte de l’école
*Analyse du travail d’équipe - direction collégiale - concertations hebdomadaires
*Gestion de l’hétérogénéité au niveau des cycles : classes de cycle - outils de suivi, d’évaluation
*Appropriation par chacun du projet collectif, du projet de cycle ...
 
Organisation de l’évaluation de l’équipe :
 
*Temps de préparation en commun
Equipe pédagogique et IEN, (d’autres observateurs  peuvent être envisagés : équipe de circonscription ...)
Définition coopérative des critères d’observation, d’analyse et d’évaluation.
 
*Temps d’observation
Accompagné d’un membre de l’équipe, l’IEN passe un temps conséquent à l’école et dans chaque classe. Il est prévu, lors du temps de préparation, trois journées dans l’école plus une, lors du temps de concertation de l’équipe. Ces temps sont prévus essentiellement le vendredi en raison du temps accordé pour la décharge de direction.
Chaque temps d’observation sera suivi en fin de journée d’un temps de discussion avec l’équipe. L’analyse définitive aura lieu lors d’un temps ultérieur.
 
*Temps d’analyse / réflexion collective
Reprise des observations réalisées en fonction des critères prévus : analyse et auto-analyse des « réussites », des problèmes rencontrés, des dysfonctionnements, des évolutions souhaitables, des améliorations à apporter... éléments de réflexion, de pistes de recherches, de besoins en formation...
                                                          
La direction collégiale de l’école Ange Guépin