Table ronde de Sylvain Grandserre

19ème salon Freinet de Nantes

notes de Maïwenn

SALON DES APPRENTISSAGES

25 MARS 2009

 

TABLE RONDE SYLVAIN GRANDSERRE

 

Présentation de François Le Ménahèze:

dédicace aux enseignants en résistances, aux parents qui portent plainte contre le fichier Base Elèves, à la collègue RASED qui a osé prendre la parole dans Là-bas si j'y suis.

 

Intervention d'une représentante du comité de soutien à Sami Benméziane. (Trésor Public se retourne contre Sami: 206 jours d'ITT + frais d'hospitalisation: entre 20 000 et 30 000 euros) Souscription lancée 28 000 signatures de la pétition, + de 700 adhérents au Comité de Soutien.

 

Point sur la situation concernant l'avenir des IUFM:

Casse des IUFM et de la formation. Lettre de Darcos aux syndicats: maintien des concours tels quels pour un an, mais masteurisation maintenue.

Demande du retrait total de la réforme, présidents des Universités étant avec nous. Recrutement des remplacement actuellement passe déjà par l'ANPE. D'où danger de précarisation qui va augmenter encore par la suite (à défaut de concours, on embauchera les étudiants « master »pour remplacement...)

F LM:Un questionnement sur la formation actuelle dans les IUFM (est-on acteur et auteur de ses apprentissages?)...

 

Sylvain Grandserre:

 

Une école pour penser et penser pour agir: cf atelier

 

Repenser l'école ou re-panser l'école?

« Allo maman bobo, Darcos comment tu m'as fait je suis pas beau... » Nos missions sont en train d'être modifiées..

Certaines personnes pensent qu'il n'y a pas besoin de repenser l'école: un simple retour à un « âge d'or » suffit (cf. Marc Le Bris: ancien désobéisseur:refus d'appliquer programmes 2002: chevalier national de l'ordre et du mérite!)

Une cascade de changements...

 

Notre société est en pleine mutation:

Les différentes composantes de l'école sont en mutation complète: société de sur-consommation qui fonctionne sur le principe général de la satisfaction (et création) directe des désirs et des caprices (services ouverts 7 jours sur 7 et 24h sur 24) Tout s'accélère! Ce qui est malvu chez l'enfant, le « caprice », est en fait la norme pour les adultes de notre société (cf.« parce que je le vaut bien! »)...

 

Institution scolaire obsédée:

Obsession du moindre coup: suppression de postes pour seulement 500 000 000 euros d'économie (dérisoire en comparaison aux plans de sauvetage des banques)... Credo sous-jacent: Liquider les soixant-huitards...

Ministère de l'Education Nationale (MEN): tentée par 2 figures: celle de Bartabas qui s'est fait connaître car il galopait à reculons, comme le MEN: il s'agite, se cabre, et... recule!

Supprimer les RASED alors qu'on voulait diviser par trois l'échec scolaire, suprimer les IUFM car on donne l'impression qu'on n'a pas besoin d'apprendre à enseigner: c'est inné..

Darcos est aussi comme Karl Lagerfeld: prendre des mesures pour faire de l'habillage...

Un épisode historique a eu lieu dernièrement: l'évaluation CM2: on nous a dit officiellement qu'il fallait faire passer des évaluations sur des compétences non travaillées en classe: très dommageable pour la relation de confiance vis-à-vis des inspecteurs...

 

Plus de problème de recrutement: on propose un Agence nationale du remplacement, qui pourrait recruter des étudiants ayant par exemple échoué au concours... à peu de frais!

 

Les parents changent:

Ils subissent eux-mêmes un monde du travail très violent, voire sont exclus du travail (8 millions de personnes vivent en France en dessous du seuil de pauvreté). On demande aux salariés une implication, ils n'ont plus d'horaires mais uniquement des délais (cf. François Becbéder): le travail ne s'arrête plus. D'où l'impression qu'on est des privilégiés. Les parents d'élèves travaillent de plus en plus loin, on constate un éclatement géographique des familles... Divorces de plus en plus nombreux...

La consommation d'anxiolytiques, calmants, alcool et tabac bat des records en France...

 

D'où: les parents sont de plus en plus consommateurs d'école (autrefois on pouvait rater l'école et réussir sa vie). Aujourd'hui, même si on réussit à l'école, on ne trouve pas forcément de travail.. les parents pensent pour certains que quelques matières n'ont plus leur place à l'école (arts/sciences, langues anciennes)...

 

Les collègues changent:

Dans le 1er degré: autrefois être instituteur convenait et était une promotion sociale pour un enfant d'ouvriers/agriculteurs. Aujourd'hui: le recrutement à bac +5 a des retentissements sociologiques: seuls ceux qui ont des conditions sociales élevées pourront y accéder. D'où un décalage par rapport aux parents et aux élèves au quotidien, et un danger si trop d'homogénéité au sein de notre corps. Le corps enseignant se féminise : cela signifie que les hommes n'en veulent pas... La conception qu'on se fait du métier est parlante: cela permet un salaire d'à point, c'est un métier second, ça permet de s'occuper des enfants avec le mercredi libéré et des vacances scolaires. Or: les collègues sont en fait débordées par leur vie de famille et un travail très prenant! Une partie des écoles se vident à 16h30 (les collègues se remettant à travailler de 22h à minuit).

On constate un désenchantement généralisé: le discours lancinant est dangereux... Autarcie de la répression est entretenue!

Dépolitisation: les enseignants sont moins inscrits politiquement, syndicalement, pédagogiquement: pourtant, il faut vouloir changer la société pour changer l'école: la pédagogie ne peut pas tout... Une action extérieure est nécessaire. C'est le prix à payer pour faire avancer le système.

 

Les enfants changent:

Ils vivent dans un grand confort moyen, nous visvons dans un des pays les plus riches du monde (il est presque indécent de présenter nos écoles ou notre mode de vie aux correspondants africains). L'enfant est aujourd'hui un projet très programmé... d'où une projection de désirs très lourds... Il y a un fantasme parental très fort et très lourd sur l'enfant, ce qui est assez nouveau. Les parents ne supporte plus l'échec scolaire: moins il y a d'échec en france, moins on le supporte, car aujourd'hui cela équivaut à être voué à un échec social.. D'où une montée de la pression.

 

Dommage: notre école est dépassée mais elle ne recule pas. On constate mêm certains progrès (langues, accueil enfants handicapés). Dommage que ces progrès soient souvent basés sur la contrainte (beaucoup de collègues voudraient se cantonner à instruire, non à éduquer).

 

Un sondage à Paris à établit un bilan de santé des élèves de 3ème: la consommation d'alcool régulière est à la hausse chez les collégiens: 30% chez les garçons/ 33% filles) . Il y a 17 % de fumeuses en 6ème .. Au contraire seulement 10 % des jeunes consomment des végétaux tous les jours... Quant au petit déjeûner: 40 % n'en prennent pas.

Sommeil: une heure et demie de sommeil en moins depuis 30 ans... un tiers des élèves de collège se couchent après 22h, un quart se couche après minuit..

D'où des conséquences énormes sur la santé (obésité, problème de mémorisation, stress...)

40 % du temps de loisirs des élèves de Cycle 3 se déroule derrière un écran (activités dans la passivité) où l'on trouve des images de plus en plus violentes.

Baisse de la pratique d'une activité physique: 15 % seulement chez les filles de 3ème.

 

Bilan:

Surconsommation, incapacité à surmonter la frustration (qui est pourtant la base de toute pédagogie, notamment la pédagogie freinet). Pédagogie Freinet à l'opposé du laxisme: la souplesse nécessite énormément de rigueur.

 

Nous ne sommes pas sur la théorie du don: tout ce qu'on fait en classe est long à mettre en place, difficile, en perpétuel ajustement, jamais une pratique n'est l'exacte application d'une théorie.

 

Exemple du groupe scolaire Concorde, près de Lille: mise en place d'une équipe freinet dans une école périclitante: résultat: réussite aux évaluations.

Ecole Ballard Montpellier, avec uniquement des classes uniques. Ecole de Sylvain Connac (Auteur du livre: Apprendre avec la pédagogie coopérative): on veut toujours essayer de trouver une solution seul alors que les enfants ont la solution... Excellents résultats aux évaluations.

Autre exemple : le Collège Clisden « un plaisir de collège » près de Bordeaux: un fonctionnement à la carte et les meilleurs résultats de l'Académie au Brevet.

Autre modèle: la Finlande: or basé sur une pédagogie active, pas de redoublements.. Et: a les meilleurs résultats au monde. Pris en main de tous les leviers par l'équipe (temps, lieux..) et un travail sur la communication (parents, élus...).

 

Notre collège français a été fait pour les meilleurs élèves (structure de départ) et les accueillent tous.

 

Questions:

 

Pédagogie freinet n'est pas une pédagogie de luxe uniquement valable pour les écoles sans problème. Nous devons faire de l'élève tout sauf un consommateur de cours... Donner une place différente aux élèves en les responsabilisant, en les inscrivant dans le temps, les projets à long terme.

Les valeurs : il faut assumer notre militantisme, on n'est pas une école neutre (entraide, mixité, ne sont pas neutres). D'où l'ambition des valeurs freinet. Pas de principes tout terrain: une réflexion au cas par cas.

 

Féminisation : ancienne? (depuis déjà une vingtaine d'années) Dépolitisation des enseignants (comme de la société en général): quel parcours avant l'IUFM pour être si peut engagé?

 

La féminisation s'accélère: 85% des nouvelles recrues, où est la figure symbolique masculine pour les enfants? Pour les petits garçons, pas de projection, de modèle possible...

Politisation: On pourrait demander une attestation de « colonie de vacances » une année scolaire équivaut au nombre d'heures de vie commune avec les enfants lors de 2 mois de colonies de vacances.

 

Autorité:

Une représentation souvent faussée de l'autorité (interdire/obéïr ) l'autoritéc'est aussi « autoriser ».

Les élèves qui ont des représentations archaïques de l'autorité sont très surpris de nos réactions. Avoir toujours un décodeur sociologique: se questionner sur le sens que nos actions ont sur nos élèves.

Sylvain Grandserre s'est dit décomplexé sur l'idée de l'autorité traditionnelle (pas aller trop vite en démarrage en Pédagogie Freinet) sinon on risque de tout abandonner « ne vous lâchez pas des mains avant que les pieds touchent par terre » disait Célestin Freinet...

Notre rôle est de freiner les débutants qui ne doivent pas aller trop vite, au risque de se mettre en danger.

 

Désobéisseurs: un carotte du MEN sont les « primes », mais il fonctionne aussi avec un bâton:attaque au portefeuille. Cf: Alain Refalo : 2 jours de salaires de moins par semaine parce qu'il prend toute sa classe au lieu de quelques-uns.

Sylvain Grandserre: pour son refus de faire passer les évaluations CM2: 4 jours de salaire en moins (en plus de la prime en moins).

 

Le but du Ministère: qu'il n'y ait plus de carte scolaire, plus de salaire au mérite (à l'obéissance), l'idée dissimulée là-dessous est d'avoir un système pour pouvoir choisir l'école de son enfant, mais cela risque d'être l'inverse: ce sera l'école qui choisira ses élèves... D'où la formation de ghettos..

cf. livre: Main basse sur l'école publique.