La création mathématique collective

Ateliers du mardi 23, mercredi 24, jeudi 25.08.2011

animés par Monique Quertier

La prise de notes de l’atelier la création mathématique n’a pu se faire sur le moment, les participants étant mis en situation soit d’acteurs soit d’observateurs. Ce compte-rendu est une synthèse des trois ateliers.
Aux deux premiers ateliers, les participants étaient trop nombreux (une cinquantaine), le groupe a été divisé en deux : une vingtaine de personnes étaient positionnées devant le tableau avec Monique, et le reste de la salle avait pour consigne d’observer le déroulement de la séance, sans le droit d’intervenir.
Le bon fonctionnement du groupe nécessite une bonne installation.
1) Tout le monde face au tableau.
2) Un groupe ne doit pas excéder 12, condition qui n’a pas pu être remplie dans le cas présent en raison du grand nombre de personnes.
3) La consigne de départ (qui n’est donnée en classe qu’une seule fois, le premier jour du lancement de l’activité, après les enfants savent, ils n’ont plus besoin de la consigne) : Avec des traits, des signes, des chiffres, des points, vous faites une création mathématique. Temps mis : quelques minutes. Ensuite six créations sont reproduites au tableau sans choix particulier de la part de Monique.
Étude des créations
Monique lance l’invitation à regarder, observer les créations à tour de rôle. Ce qui est dit d’abord, c’est ce qu’on voit. Et après les observations, les analyses arrivent. Les gens commencent à établir des liens entre ce qu’ils voient et ce qu’ils conçoivent : « c’est comme ». La discussion commence, chacun apportant sa connaissance mathématique qui peut être mise en question par le groupe. Cette connaissance est vérifiée, appliquée : « et si… », « et si… ». Quand un concept est découvert, vérifié, on élabore ensemble sa formulation, ce qui peut prendre un certain temps. Il est ensuite répété par chaque personne du groupe. Toutes les créations traitées n’aboutissent pas forcément à la découverte d’un concept et le temps passé sur chacune d’elles est variable, l’important étant de parler de toutes les créations mises au tableau. Les six créations ont été étudiées et la discussion mathématique a permis de faire émerger de nombreux concepts.
Discussion, premières impressions après la mise en situation
« À aucun moment, Monique n’a donné une solution mathématique. »
« Elle répondait toujours aux affirmations par des questions. »
« Certaines affirmations n’ont pas donné lieu à des questions de sa part. C’est parce que nous ne parlions pas mathématique. »
« Monique présentait un regard ouvert et souriant qui donnait envie d’intervenir. »
« J’ai bien compris que les concepts mathématiques se construisaient, s’élaboraient au cours de la discussion. »
« Monique est complètement à l’écoute du groupe de façon à pouvoir déceler le moindre aparté, la moindre expression de visage afin de donner la parole. »
Jeu de questions/réponses concernant l’application à la classe
- Et le demi-groupe en autonomie ?
Prévoir une activité en autonomie. Ce groupe doit être très silencieux. Mais le fait d’être observateur muet développe une capacité à entendre, à vivre les situations mathématiques du groupe en activité avec le maître. Ce demi-groupe fait des mathématiques autant que l’autre.
- La création de départ, que devient-elle ?
La création mathématique, c’est la discussion mathématique, la mathématique qu’on a construit ensemble, collectivement et pas la création mathématique, jet de départ.
- Quelles traces ?
Après la séance, le tableau est effacé. L’enseignant rédige un compte-rendu pour son journal de bord. Les concepts mathématiques découverts et convenablement formulés peuvent être écrits sur les cahiers des enfants.
- Et les enfants qui n’accrochent pas ?
On peut toujours faire parler les enfants, que ce soit sur des créations très élémentaires, par exemple une création comportant des chiffres mal écrits, ou bien sur une création plus élaborée comme un graphique, des courbes. Ceci dans une même séance. Il suffit que l’animateur soit présent, attentif, et fasse parler en premier les enfants plus en difficulté. Ceux-ci parlent à leur niveau. Il y a toujours quelque chose à dire sur une création. Ensuite les autres peuvent intervenir. Et l’enfant qui a produit une création « simple » est valorisé quand les « forts en math » ont trouvé des pistes mathématiques très riches. Même si la discussion ne l’intègre pas, il reste attentif, parce qu’on parle à partir de sa production. Lors des séances d’adultes, jamais une création n’est restée sans commentaires.
- Cette compétence d’observation, est-elle utilisée ailleurs ?
Les enfants ont un fort désir d’avoir quelque chose à dire. C’est un regard intense, examen complet en détails des créations mises au tableau. Cela développe un esprit d’observation que j’ai pu observer dans des séquences de français : en copie au tableau, ils copiaient sans erreur.
- Comment arrêter la discussion sur une création ?
C’est en général quand le groupe n’est plus suffisamment captivé, que trop ont décroché. Alors on dit : on va s’arrêter là et on passe à la création suivante. Il ne faut pas hésiter à le faire. Si vraiment les enfants sont préoccupés par la situation abandonnée, cette situation se retrouvera dans une création prochaine. Et si cela ne revient pas, on s’aperçoit que c’était l’enseignant qui avait forcé l’exploitation. Mais cela suppose des séances quotidiennes.
- Et si vraiment le groupe ne fonctionne pas ?
On s’arrête. Cette situation de création mathématique collective ne fonctionne que si le groupe fonctionne (écoute de l’autre, respect de la parole, non jugement), un groupe positif. On n’est pas obligé d’avoir tout le temps des séances qui fonctionnent au top.
- Et si les enfants n’ont rien à dire, comment tu insuffles un questionnement ou une idée ?
Je n’insuffle pas. Il ne faut pas essayer d’insuffler quelque chose. On peut toujours essayer, mais si ça ne correspond pas à l’intérêt ou à un questionnement des enfants, ça ne marchera pas, la discussion tombera. Toutefois, ce cas ne se présente jamais, les enfants ont toujours quelque chose à dire sur une création, dans un groupe positif.
- Comment les créations sont-elles choisies ?
Les créations de départ ne sont pas choisies. Les enfants ont une création traitée à tour de rôle. Avec une classe de 24 enfants, quand on étudie 6 créations par séance, chaque enfant a une création étudiée par semaine. C’est un bon rythme.
À la fin de chacun des trois ateliers du congrès, on a constaté la grande satisfaction des participants : applaudissements, nombreuses questions individuelles.
Compte-rendu : Monique Quertier et Francine Tétu