Le C.E.S. de Sainte-Maure de-Touraine : un essai de rénovation pédagogique

Mai 1977

 

Les dossiers de La Brèche
 
"Il faut choisir entre une école où il est facile aux maîtres d'enseigner et une école où il est facile aux élèves d'apprendre", TOLSTOI
LE C.E.S. DE SAINTE-MAURE-DE-TOURAINE
Un essai de rénovation pédagogique
ou
VERS UNE AUTRE MANIÈRE DE VIVRE
 
INTRODUCTION
UNE CONCEPTION DE L'ÉDUCATION
Sans tomber dans l'illusion pédagogiste mais sans attendre non plus que la révolution soit faite, l'objectif fondamental de l'équipe est de donner le maximum de chances à chacun :
- par une meilleure connaissance des élèves
- par une pédagogie personnalisée, différenciée, en multipliant les pistes, en favorisant les brèches, et en particulier en développant l'acquisition de l'autonomie.
 
L'ORGANISATION PÉDAGOGIQUE EST CONÇUE EN FONCTION DE QUATRE EXIGENCES
L'enfant est considéré dans sa globalité. C'est en même temps un corps et un esprit et l'éventail des activités qu'on lui propose lui permet de mettre en oeuvre les deux.
L'enfant a besoin de sécurité. Elle doit être consciente, définie, délimitée même si d'ailleurs elle est toujours à refaire. Nous favorisons au maximum tout ce qui est expression du monde à travers soi.
Il n'y a pas d'enfant abstrait, ils sont tous différents les uns des autres. Aussi l'organisation coopérative de nos classes favorise-t-elle l'harmonie des relations. Chacun accepte l'autre comme sujet et chacun s'accepte comme sujet.
L'enfant a besoin d'apprivoiser le monde qui l'entoure pour le dominer. Nous favorisons tout contact direct avec le matériau ou outil qu'offre le milieu : sorties, enquêtes, débats ... appropriation de techniques ...
C'est parce que l'enfant est un "être unique à des milliers d'exemplaires" que notre démarche pédagogique développe la créativité qui fait jaillir l'expression libre dans tous les domaines.
 
 
EN MARCHE VERS UNE COOPÉRATIVE VÉRITABLE
 
Au niveau de la classe :
- répartition des tâches rôle du professeur
- rôle du professeur principal
- rôle de l'élève/séance de coopé
Au niveau de l'établissement : l'organisation en modules.
La coopérative de classe n'est pas conçue comme une institution qui serait fantôme, bureaucratisée, rigide, structurée et régie par le maître, mais comme une atmosphère, un climat que chacun aide à créer, dans lequel l'élève s'épanouit et s'exprime, un art de vivre, auquel chacun se réfère pour affiner ses propres techniques de vie dans un contexte de groupe.
C'est donc une coopérative de travail, dynamique, essentiellement tendue vers :
- la création et l'expression personnelle de la richesse intérieure de l'enfant,
- la recherche qui permet d'assouvir toutes les curiosités,
- l'échange et la communication de ces recherches et de ces créations entre les membres du groupe, avec les autres (camarades des autres classes, élèves correspondants d'autres écoles qui travaillent dans le même esprit), avec la cité et les hommes par le journal scolaire, l'exposition ou la présentation des travaux.
Or, pour que ces richesses se libèrent et s'affirment, le groupe doit vivre
- la confiance élément essentiel de la sécurité,
- la liberté qui est accueil et respect de toutes les idées, de toutes les initiatives de chacun.
• de la part du maître qui s'efface mais conseille et anime, qui aide mais ne censure pas,
• de la part des élèves qui apprennent à s'écouter, à se critiquer avec bienveillance mais avec franchise, à s'aider et s'organiser,
- la responsabilité qui est engagement vis-à-vis des autres par rapport au travail et par rapport au milieu de vie.
Dans ce climat, il est évident que le groupe doit forger sa propre discipline pour que la vie s'organise harmonieusement ; l'échange des idées au cours des débats ou des présentations de travaux l'exige.
La coordination entre ces disciplines, que nous recherchons et favorisons au maximum, nécessite une coopération des maîtres, et de fréquents contacts.
Et le milieu de vie (classe ou atelier) doit être le plus agréable et le plus riche possible. Aussi le groupe en assume-t-il la propreté, la décoration, l'harmonie ou le contenu (apport de documents pour les fichiers thématiques).
Certes ces tâches sont prises en charge par des élèves responsables pendant un laps de temps qu'ils ont la liberté de déterminer (une séance - une semaine). Et chaque vendredi, à l'heure prévue à cet effet, le groupe passe en revue le travail exécuté, fait des critiques (négatives ou positives).
Enfin, la coopérative, en travail collectif comme en travail de groupe, c'est aussi l'aide que les plus favorisés apportent aux moins favorisés, non seulement dans le domaine purement intellectuel, mais dans le domaine technique (dessin - utilisation de matériel). Et ce ne seront pas toujours les mêmes qui seront mis en valeur justement si la palette offerte pour les créations est suffisamment variée (montages sonores - photographiques - diapositives dessinées - impression du journal...).
La coopérative est donc avant tout un esprit de travail, un milieu aidant qui favorise et permet l'épanouissement de chacun. Elle nous apparaît comme la base de toute notre pédagogie.
La coopérative d'établissement répond aux mêmes principes que ceux qui inspirent les coopératives de classes, mais au niveau du C.E.S. dont elle organise la vie profonde.
 
Au niveau de la classe
 
LA RÉPARTITION DES TÂCHES
La classe est une structure permanente socialement éducative. Elle est constituée d'enfants qui vivent ensemble mais qui ont des âges divers, des activités individualisées diverses, des intérêts divers, des caractères divers. Il faut tenir, compte de cette diversité pour éduquer.
L'élève ne choisit pas sa classe. C'est une donnée extérieure à l'individu. Obligés de vivre ensemble, les individus doivent organiser cette vie, répartir les responsabilités, choisir des activités communes ...
La classe doit être coopérative ...
 
LE RÔLE DU PROFESSEUR
Le rôle du professeur est de susciter cette vie coopérative qui définit l'unité de la classe. Le groupe d'élèves est capable de se prendre en charge et le rôle de l'adulte est de mettre à la disposition du groupe les méthodes, les techniques, le savoir de divers ordres, qui peuvent l'y aider.
Ce rôle s'articule en fait autour de trois axes :
Initiateur du groupe-classe :
Le professeur aide la classe à s'organiser et à s'instituer. Il fait vivre le groupe et lui permet de s'exprimer et de se constituer.
La classe ne devient groupe que lorsque les élèves, cessant de devoir fixer les yeux sur le seul professeur, se tournent les uns vers les autres pour travailler, discuter, vivre ensemble ...
Le groupe-classe est un groupe de travail et à ce titre il doit produire. Il a donc à choisir des méthodes, à s'organiser, à se diriger et il est aux prises avec des problèmes d'autorité. Le professeur l'aide à s'organiser lui-même, à établir des relations au niveau opératoire, à se fixer des buts, des objectifs, à chercher des moyens en fonction de ses désirs et de ses attentes .
Analyste du groupe-classe :
Le professeur aide à comprendre les événements et les conflits. Il facilite les échanges et aide à élucider les processus affectifs qui font problème. On n'avance pas dans la compréhension de ce qui se passe si on se contente de critiquer, voire de condamner les comportements.
Il s'agit d'aider les enfants et les adolescents à reconnaître les phénomènes de leadership, de déviance, d'isolement, etc. et à travers eux de prendre conscience des besoins qu'ils expriment.
Médiateur du savoir :
Une classe ne sera capable de s'approprier et d'utiliser les informations que dans la mesure où elle est déjà constituée, vit et est un lien de relations et de communications. A ce moment-là, seulement, la connaissance peut être utilement assimilée par les uns et les autres .
 
LE RÔLE DU PROFESSEUR PRINCIPAL :
Le professeur principal est le véritable tuteur de ses élèves et du groupe dont il a la charge ; il assume:
des responsabilités morales (cf. ce qui précède) - esprit coopératif - politesse - ordre - discipline
des responsabilités pédagogiques : explication de l'organisation du travail (cf. partie pédagogique)
- coordination au niveau de l'équipe professeurs du groupe
- sensibilisation au problème de l'orientation professionnelle ultérieure
- coordination avec le C.D.!.
des responsabilités administratives
- diffusion des informations
- contrôle des registres du groupe (fréquentation cours/ateliers) et divers documents de liaison avec la famille
- convocation et animation des conseils de classe
- tenue à jour du dossier de renseignements sur les élèves de sa classe.
 
Chaque semaine le vendredi (15 h - 16 h ), il réunit sa classe pendant une période où il peut :
- susciter les remarques concernant la vie du groupe et de l'établissement, aider à régler les problèmes qui se posent (vis-à-vis de l'administration, des autres classes, problèmes de relations, difficultés personnelles dans une matière ... )
- aider à organiser le travail de semaine dans les différentes disciplines sur le plan collectif et même individuel.
- aider à terminer ou mettre en place des travaux destinés à la présentation à l'ensemble de l'établissement (exposition dans les couloirs, séances d'animation ... )
- animer avec d'autres collègues des rencontres inter-classes.
Chaque professeur principal peut à chaque séance permuter avec un autre professeur principal pour animer une classe où il enseigne ou non.
 
LES SÉANCES DE DISCUSSION COOPÉRATIVE - LE RÔLE DE L'ÉLÈVE
Par rapport à chaque discipline.
Les responsabilités dans la vie de la classe : les outils de travail.
Pour aider à mieux vivre ensemble, les élèves se répartissent des responsabilités
- de relation avec l'administration et la coopérative de l'établissement : les délégués de classe (président, secrétaire, trésorier)
- d'utilisation des outils : responsabilité de la bibliothèque de classe, des fichiers, du matériel audiovisuel, de la tenue des plannings - plan et bilan de travail collectif
L'organisation du travail scolaire : la réalisation du travail.
Pour chaque séance de travail, la classe dégage les pistes de travail, organise le plan de travail de la séquence selon l'horaire, répartit les interventions (maître, élève ... ) examine le travail réalisé, fait le bilan ... (cf. disciplines : techniques de travail).
Le groupe s'accorde une discussion coopérative chaque fois que le travail l'exige ...
 
Par rapport à la classe et à l'établissement.
De l'examen critique du milieu de vie commune : la séance coopérative.
Chaque vendredi après-midi, de 14 h 50 à 16 h, la classe se réunit avec son professeur principal pour:
- examiner les problèmes qui se posent au niveau de la classe : des responsabilités, des difficultés d'organisation ou d'apprentissage de chacun pour chaque discipline. Au niveau de l'établissement : des relations entre classes, des difficultés matérielles ...
A l'action sur ce milieu :
Des solutions sont suggérées, des engagements de travail pris :
des interventions auprès de l'administration ou des autres classes en réunion de délégués
des tâches concrètes au sein des modules.
 
Au niveau de l'établissement
La coopérative de l'établissement est une juxtaposition de modules.
Un module se définit par :
des tâches précises à accomplir
un responsable élève (auquel est adjoint un professeur volontaire) qui recrute son équipe, organise le travail, rend compte à la collectivité.
un pouvoir de décision
un MODULE est composé de VOLONTAIRES, c'est-à-dire d'élèves INTÉRESSÉS et ayant l'INTENTION de travailler EFFICACEMENT À LA RÉALISATION des tâches.
- un module se met en place dès que naît un besoin.
- son existence est temporaire : il cesse son activité dès que la tâche est accomplie.
Cette organisation supprime la hiérarchie entre les élèves, entre les classes.  
- La VIE de l'établissement est "photographiée" au panneau d'affichage et au planning qui se trouvent dans le hall coopérative (rez-de-chaussée au pied de l'escalier).
Les observations, les critiques, les propositions... faites à la base dans les classes sont consignées de façon précise sur des notes qui sont déposées dans les boîtes.
- Le responsable du module relève les notes et classe les tâches à accomplir en deux catégories:
celles qui ne sont pas de la compétence des élèves et qui seront, prises en charge par les agents,
celles qui sont de la compétence des élèves et qui seront notées sur une fiche mise au planning en regard du nom de celui qui se portera volontaire pour accomplir le travail.
- par note écrite diffusée au cours des séances de coopératives (vendredi deuxième période
après-midi).
Les modules qui fonctionnent actuellement :
Petites réparations. Propreté/hygiène-Présentation de travaux à la salle des fêtes - Affichage dans les couloirs - Décoration - Circulation dans le bâtiment - Cour-Garage à vélos - Vente de petits pains - Trésorerie - Soutien aux élèves handicapés.
Animation (c'est celui qui coordonne les activités des autres modules et assure l'information)

 

Notre système de vie coopérative
 
 
 

 

Les moyens financiers :
C'est grâce à l'action conjuguée des modules et des ateliers que les diverses manifestations organisées (soirée parents, expo. fin d'année) permettent de gérer un budget aussi important que les crédits d'enseignement alloués par l'Etat qui, seuls, n'assureraient pas le fonctionnement des ateliers de l'après-midi.
 
UN VÉRITABLE TRONC COMMUN
Définition d'une division
Constitution des divisions
 
0RIGINE :
Le brassage des élèves dans les ateliers de l'après-midi créait une situation nouvelle.
Un essai pédagogie Freinet sur deux classes de 6e poursuivi en 5e (70-72) et la critique qu'en avait faite Jean Vial nous ont incités à démarrer en 1972 .
DÉFINITION D'UNE DIVISION
- groupe hétérogène à l'image du milieu de vie.
- groupe coopératif de travail
 
- relais organique entre l'élève et l'établissement où l'élève peut rencontrer des camarades ayant les mêmes motivations qui dépendent de l'ÉVOLUTION ORGANIQUE ET AFFECTIVE autant que du niveau intellectuel.
CONSTITUTION DES DIVISIONS :
- Critères psychologiques.
La constitution des divisions hétérogènes de la 6e a résulté des travaux effectués par les psychologues scolaires à partir des tests subis par les élèves de C.M.2 du secteur géographique.
Chaque division hétérogène présente une courbe homogène sur le plan des facultés d'acquisition. Le test utilisé est l'E.C.N.1. (Échelle collective de niveau intellectuel), cahier IV.
La transcription en Q.I. n'a pas été faite.
Résultats obtenus par les 119 élèves présents le jour de la passation

 

 

Répartition en six groupes, proposée par les psychologues :
 
A partir de cette année (1977), l'épreuve proposée n'est plus l'E.C.N.I. mais l'E.C.D.L. (Échelle collective de développement logique) basée sur la théorie opératoire de l'intelligence de Piaget. Tout en permettant de situer les enfants parmi les autres enfants du même âge, cette échelle vise à déterminer le niveau de développement logique atteint par chaque sujet. Un "retest" effectué en fin de 5e devra permettre de juger de l'évolution de la pensée logique, sous l'effet conjugué de la maturation nerveuse, de l'influence du milieu éducatif, des acquisitions et de l'équilibration.
 

 

On a poussé plus loin la banalisation des divisions en les nommant d'après les encyclopédistes (6 Diderot, 6 D'Alembert, 6 Marmontel, 6 Montesquieu, 6 Rousseau, 6 Voltaire) en 1972
- Chaque division ainsi formée constitue un groupe stable qui participe dans son intégrité à l'apprentissage de chaque discipline. C'est la pratique pédagogique qui, à l'intérieur du cours, doit s'adapter à l'hétérogénéité.
Cette répartition est valable pour deux années consécutives, 6e-5e du cycle d'observation. Elle est refaite en fin de 5e pour les deux dernières années du cycle d'orientation.
 
UNE DÉMARCHE PÉDAGOGIQUE COMMUNE
Une autre pédagogie :
phase de travail collectif
phase de travail personnalisé
phase de socialisation
alternance des phases
 
Un décloisonnement des enseignants qui mettent en commun :
une stratégie pédagogique
des techniques
des outils
des institutions liste des ateliers
répartition dans les ateliers contrôle
des exigences
un contrôle de l'évolution du travail
 
L'ENSEIGNEMENT SUR UN NIVEAU DÉCLOISONNÉ SUPPOSE UNE AUTRE PÉDAGOGIE
- l'enseignement sur un niveau normal (type I, II ... ), repose essentiellement sur une communication entre le professeur d'une part et le groupe "classe" d'autre part, l'hypothèse étant que la classe est composée d'individus dont les possibilités moyennes de compréhension et de travail sont à peu près identiques, même quand le professeur s'efforce de tenir compte de l'individualité de chaque élève. Les techniques sont pensées en termes d'enseignement.
- en présence d'un niveau hétérogène, les techniques doivent être pensées en termes d'apprentisage et la communication s'établit à trois niveaux :
 
Phases de travail collectif
Le professeur doit déterminer, en fonction des élèves qui constituent ses classes, le minimum exigible de tous, un "programme minimum" qui soit la base indispensable de tout travail ultérieur.
une acquisition sans faille de ce minimum exigible ne constitue pas une perte de temps pour les meilleurs.
à chaque professeur de savoir éventuellement utiliser les capacités de ses élèves pour créer une atmosphère coopérative selon laquelle l'acquisition de certaines connaissances de base se fait à partir d'échanges à l'intérieur du groupe où chaque élève peut apporter sa contribution personnelle.
L'action éducative doit prendre le pas sur la communication des connaissances, celle-ci étant d'ailleurs largement assumée par celle-là.
 
Phases de travail personnalisé
A partir du "programme minimum", chaque élève dispose d'un ensemble de pistes de travail et de matériel qui l'incitent à aller aussi loin que ses capacités le lui permettent, dans l'exploitation de ce qu'il vient de découvrir.
L'objectif fondamental doit être de faire participer davantage l'élève à son apprentissage, et veiller à ce qu'il progresse, à son rythme, qu'il choisisse et organise son travail scolaire, utilise des documents de tous ordres, fasse des expériences sans être toujours sous le contrôle du professeur.
Le rôle de celui-ci consiste à mettre à la disposition de chacun des moyens de progresser, de comprendre ses erreurs et ses insuffisances et de découvrir les méthodes de travail les mieux appropriées.
C'est à ce niveau qu'interviennent des techniques de travail de groupe (utilisation de l'audiovisuel, correspondance, expression libre ... ) qui permettent à chaque élève, non plus de recevoir des connaissances, mais de devenir un agent actif dans le processus d'apprentissage.
 
Phases de socialisation
Chaque production élaborée dans ces phases de travail personnalisé est communiquée. Elle est en général présentée au groupe-classe qui apporte une critique constructive. Le professeur intervient pour faciliter la communication, affiner la synthèse ou prolonger le travail.
L'alternance des phases est décidée coopérativement par le groupe (élèves + professeurs).
 
L'ENSEIGNEMENT SUR UN NIVEAU DÉCLOISONNÉ SUPPOSE UN DÉCLOISONNEMENT DES ENSEIGNANTS
Ce qui implique une organisation coopérative au niveau des enseignants.
Il ne s'agit pas d'organiser la coordination autour d'un thème. Ce n'est pas parce qu'on travaille sur un même thème dans des disciplines différentes qu'on fait forcément de "l'interdisciplinarité". C'est plutôt quand on travaille dans le même esprit avec les mêmes techniques (et peu importe alors le thème) qu'on en fait réellement.
C'est pourquoi, sans négliger évidemment les coordinations interdisciplinaires dès qu'elles se présentent, nous cherchons à nous accorder sur le fonctionnement de la classe ...
 
UNE STRATÉGIE PÉDAGOGIQUE
Phase collective
Le lieu : la classe - L'intervenant : le professeur
POINT DE DÉPART
un manuel ,
un document écrit, iconographique ...
un document audiovisuel
apport d'un élève, d'un groupe ...
 
PRÉSENTATION À POSTERIORI
d'une leçon, d'une notion ...
 
ALORS, SE DÉGAGENT DES PISTES DE TRAVAIL PERSONNALISÉ
approfondissement
élargissement
rapprochement, idées nouvelles ...
 
Phase de travail personnalisé
Le lieu : la classe, l'atelier, la maison – L'intervenant : l'élève
TRAVAIL ÉCRIT OU ORAL
Création
- exercices de déblocages
- travail à court terme : reformulation, toute autre piste
Recherche documentaire
Soutien
reprise du travail de phase collective
entraînement
répétition ...
 
Phase de socialisation
Le lieu : en classe/entre classes - Intervenants : l'élève, le groupe, le professeur
PRÉSENTATION DU TRAVAIL PERSONNEL-->l'élève satisfait son goût de la communication qui l'enrichit, s'offre à la critique du groupe qui l'aide à progresser
CRITIQUE DU GROUPE ---------> la classe s'enrichit des expériences des autres, aiguise son esprit critique.
PART DU PROFESSEUR-- ---------> le professeur connaît mieux ses élèves, les aide (complément, synthèse, leçon a posteriori) mieux, dégage avec la classe les phases d'approfondissement dont les élèves ont besoin, et qui les intéressent.
TRACE ÉCRITE ------------> prise de notes sur un classeur, constitution d'un manuel a posteriori...
POURSUITE DE LA COMMUNICATION------> affichage journal correspondance
pour celui qui présente son travail, cette phase de socialisation
permet l'action et surtout l'expérimentation réelle
fait apparaître, par l'expérience, ses besoins, ses lacunes, ses progrès et par là, motive chez lui la quête d'informations indispensables, l'autodiscipline nécessaire à des pratiques d'entraînement, nécessaire aussi à l'acquisition ou au perfectionnement des savoir-faire pour de meilleures performances.
oblige à utiliser la compétence et le savoir-faire qu'il cherche à acquérir.
pour le "public", comme d'ailleurs pour celui qui le présente, dans la discussion qui suit la présentation, le "feed-back" n'est plus suscité artificiellement par la correction du professeur mais par les ajustements du dialogue déclenchés par la situation de communication.
Il s'établit une motivation constituée par un système d'informations auxiliaires qui facilite, selon CarroI, la mémorisation des connaissances nouvelles. C'est ce que Couffignal appelle, en cybernétique, une chaîne latérale qui s'ajoute à la chaîne informationnelle directe et que l'on peut schématiser ainsi, d'après P.R. Léon :

 


 
 
L'émetteur et le récepteur sont tour à tour inversés, c'est le feed-back, l'alternance de la communication qui permettent l'enchaînement actif des générateurs ...
Cette relation pédagogique tient compte de l'évaluation en retour que fournissent les informants extérieurs et intègre réactions et vécus du public récepteur.
- des techniques : enquêtes, reportages ... expression libre dans tous les domaines, correspondance ... (cf. chapitre "Les techniques pédagogiques")
- des outils : fiches de documentation, fiches-guides de travail, affichages, polycopies ...
- des institutions :
la séance de coopé (bilan et organisation de la vie de la classe ... )
ateliers de création et de soutien l'après-midi
Les phases de travail personnalisé permettent à chacun de travailler à son niveau, d'aller à son rythme, de disposer plus facilement du professeur et préparent sérieusement au travail autonome. Le travail démarré pendant ces phases peut se poursuivre en étude ou à la maison, mais il se poursuit plus efficacement pendant les après-midi où l'organisation en ateliers permet à chaque élève de choisir ses activités. Ces ateliers sont le prolongement ou l'amorce du travail du matin ou, à tout le moins, ils sont envisagés dans le même esprit.
- Les ateliers proposés
Maths : 3e - 4e - 5e - 6e
Langues : anglais, espagnol, allemand
Français : 3e - 4e - 5e - 6e
Travail sur archives
Presse
Éducation à la consommation
Éducation à la vie sociale
Documentation
Secourisme
Maroquinerie
Musique : chorale, initiation guitare, initiation à la flûte
Travail sur bois - sculpture
Théâtre - poésie
Couture
Cuisine
Dessin
Travail manuel
Travail de la corne
Peinture sur verre
Travail du fer
Tapisserie - tissage
Aéromodélisme
Tricot
Peinture sur soie
Photo
Ciné super 8 mm
Travail réfection vieux objets
Sténodactylo
Travail autour du conte
checs
Archéologie
Vannerie
Poterie
Linogravure
Corne
Vélo

 


Cette liste s'établit différemment chaque année selon la compétence et les motivations des professeurs en place dans l'établissement (à défaut de l'établir selon les désirs des élèves)

 


- la répartition dans les ateliers :
• Les élèves sont regroupés dans leur salle avec leur professeur principal
• Chaque élève a :
une fiche horaire ateliers pour faire son choix,
une grille pour écrire son choix (au crayon papier),
7 fiches de couleurs différentes correspondant aux 7 périodes de l'après-midi.
• Lorsque le choix est fait, un responsable fait l'appel des fiches qu'il glisse dans des enveloppes au nom des professeurs qui dirigent les ateliers choisis.
• Toutes les enveloppes sont portées au secrétariat où les enveloppes destinées au même professeur sont regroupées, puis lui sont envoyées.  
• Chaque professeur répartit ses fiches sur son planning jusqu'à concurrence des places disponibles : il sait quels élèves il recevra et il peut préparer le matériel.
Il renvoie au secrétariat :
les fiches en excédent pour certains ateliers,
le nombre de places disponibles pour certains autres.
• Le secrétariat regroupe renseignements et fiches, chaque responsable récupère les fiches refusées de sa classe et une grille des places disponibles (rapidement tirée au duplicateur).
• Les élèves qui ont été refusés expriment un nouveau choix et le processus se renouvelle.
• A la fin de l'opération, seules reviennent quelques fiches non acceptées.
• Ces cas seront examinés directement entre professeurs principaux et professeurs d'ateliers.
 
- Le contrôle :
Le contrôle de la fréquentation est fait régulièrement, par des élèves à tour de rôle. L'équilibre de la fréquentation est contrôlé par le professeur principal.
Le contrôle du contenu
les productions sont présentées et discutées au sein de l'atelier
elles sont présentées aussi à l'extérieur de l'atelier :
- pour les ateliers "intellectuels", ou d'expression (théâtre, poésie, danse, musique, gymnatique ... ), elles sont présentées, à tous les élèves pendant un après-midi dans la Salle des Fêtes en fin de premier trimestre. Certaines sont présentées aux parents une soirée en fin de deuxième trimestre et les autres sont présentées à l'exposition/week-end portes ouvertes en juin.
- pour les ateliers "manuels" (bois, fer, tissage, poterie, photo, peinture ... ) elles sont affichées ou exposées au fur et à mesure dans l'atelier, dans les couloirs et présentées à l'exposition de juin.
à la fin de chaque répartition, un bilan de travail en atelier est joint au carnet de correspondance.
 
DES EXIGENCES COMMUNES
Il faut que les enfants découvrent, mettent en oeuvre et s'approprient
LA LIBERTÉ : qui est
LA RESPONSABILITÉ: qui est
- celle de s'organiser ensemble pour mieux vivre
- celle de se mesurer à soi-même pour grandir
L'ENGAGEMENT : qui est
- celui de respecter les plans de travail élaborés coopérativement
- celui de participer à l'oeuvre commune
par une attention vive
par un esprit critique toujours en éveil
par un souci de soin et de sérieux.

 

 

Il convient donc que l'action quotidienne de l'équipe des enseignants favorise, ou tout au moins ne contrarie jamais, cette appropriation.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

CONTRÔLE DE L'ÉVOLUTION DU TRAVAIL AU COURS DU TRIMESTRE
Notre pédagogie est une pédagogie de rendement : rendement de plaisir, de confiance, de climat détendu, de travaux riches et sérieux, de connaissances dont le niveau monte souvent à notre insu.
Le contrôle est pour nous gênant dans la mesure où nous ne sommes pas libérés tout à fait des contrôles traditionnels et où nous avons à communiquer avec des parents dominés par le souci du contrôle majeur par les notes et le classement.
UNE SIGNIFICATION NOUVELLE DU MOT CONTRÔLE QUI OUVRE L'HORIZON AU LIEU DE LE REFERMER
Cela va du contrôle permanent (pédagogie projective : le projet, les étapes, les adaptations de conduites, de moyens ... en style de monographie élaborée), au contrôle plus lointain (l'équipement instrumental de l'enfant, son optimisme ... ).
Ce qui nous paraît le plus important, c'est de pouvoir cerner les progrès, jusqu'ici inhabituels et non mesurés, en socialisation, curiosité, sens artistique ...
LA ROSACE TRIMESTRIELLE contient des critères très généraux et peu définissables mais - elle est un instrument efficace de fédération de l'équipe pédagogique
- pédagogiquement, ces critères permettent de valoriser les productions et les efforts d'un
enfant.
C'est le professeur principal qui remplit la rosace grâce au bilan qu'il peut faire à partir des appréciations que les différents professeurs ont reportées sur la grille ci-dessous, qu'il a fait circuler.

 

 

Chaque professeur apprecie les différents aspects du comportement et traduit par un chiffre qui va de 1 (capacité très faible ou non encore révélée) à 5 (capacité très bonne).
Si dans le cadre de ses activités, un professeur ne peut apprécier telle ou telle capacité, il ne met aucune appréciation.
Le bilan reporté sur la rosace est l'appréciation qui obtient la plus grande fréquence.
Exemple : 2-3-5-2-4-2-3-2 - - -► bilan : 2
(cf. documents page suivante)

 

 

LES TECHNIQUES PÉDAGOGIQUES
Documentation
Éducation physique
Français
Histoire-Géographie
Langues
Maths
Sciences Naturelles
Ce chapitre développe, à l'aide d'exemples précis, la mise en oeuvre de la stratégie pédagogique définie dans le chapitre précédent ; ces techniques varient selon la spécificité de chaque discipline.
Il faut souligner que ces techniques ne sont pas considérées en tant que telles, comme susceptibles de rendre l'enseignement plus attrayant ; elles découlent des considérations d'ordre psycho-sociologique définies par ailleurs et visent à favoriser l'apprentissage.
Il faut remarquer enfin que celles qui sont décrites ci-après proviennent de certaines classes, mais elles sont identiques ou très voisines de celles employées dans des contextes différents, par d'autres collègues dans d'autres classes.
Documentation
 
Les élèves peuvent fréquenter le C.D.I.
- pendant leur temps libre
- le matin avec la classe et le professeur
- l'après-midi en atelier
TRAVAIL PERSONNALISÉ
Quand et pourquoi les élèves viennent-ils au C.D.I. ?
PENDANT LEUR TEMPS LIBRE POUR :
chercher des documents choisir un livre
se détendre
lire
---► très forte fréquentation
heures d'étude récréation demi-pension
travail par groupes sur un thème choisi
 
LE MATIN AVEC LA CLASSE ET LE PROFESSEUR :
travail par groupes sur un thème choisi à l'avance traitant du sujet.
- la documentaliste a auparavant regroupé B.T., livres, dossiers ...
* sciences naturelles
* géographie

 

Thèmes traités en ce moment
Français : la montagne, les sports, les chemins de fer
Histoire : le Moyen Age, l'Égypte
Géographie : L'Afrique
Sciences Naturelles : les animaux face à l'hiver
 
Durée : deux à trois semaines à raison d'une ou deux heures par semaine.
Avantages : plus grand espace (important pour les 6e) changement de cadre, nouvel intérêt, familiarisation avec le C.D.!. et ses ressources.
Il est net que les élèves (en particulier les 6e) qui sont venus travailler le matin avec la classe et un professeur fréquentent plus que les autres le C.D.I. et viennent beaucoup plus facilement vers la documentaliste.
 
L'APRÈS MIDI EN ATELIER
Exemple des travaux effectués pendant un atelier
Deux lisent Le mystère de la chambre jaune de Gaston Leroux ······· Cours
Deux lisent L'enfant et la Rivière de Henri Bosco ···························· Cours
Trois lisent La Nuit des Temps de Barjavel.. ··························· . Cours
Un lit La Grande Crevasse de Frison-Roche . …....................Cours
Un lit Miguel de la Faim de Vidal . ….....................................Personnel
Deux lisent Le Vieil Homme et la Mer d'Hemingway · …...........Personnel
Un fait une recherche sur le téléphone . ….............................. Technologie
Un fait une recherche sur le Sahara . ….....................................Géographie
Deux font une recherche sur les Pays-Bas . …........................... Géographie
Un fait une recherche sur l'escargot . …................................. Sciences Naturelles
Deux font une recherche sur la peine de mort . …................... Français
Un fait une recherche sur l'aéropostale . …......................... Histoire
Un fait une recherche sur la drogue . ….....................................Français
 
SOCIALISATION
Le travail personnalisé aboutira à une présentation de l'exposé à la classe
Exposition au C.D.I.
et/ou
AFFICHAGE dans la classe
dans le couloir
au C.D.I.
 
Les travaux effectués en atelier seront présentés aux professeurs des disciplines concernées.
Après présentation, certains travaux viendront enrichir les dossiers du C.D.I.
 
 
Éducation physique
Un exemple de séquence de travail (qui n'est qu'une possibilité parmi beaucoup d'autres).
Cycle de six semaines ( 1 h 10 par semaine ).
1 ère séance phase de socialisation initiale
* présentation initiale (mise en commun du savoir-faire et du savoir-être)
* phase collective en fin de séance
2e séance
* approfondissement de la phase collective (en classe ou au tableau noir)

 

 

TRAVAIL PERSONNALISÉ
Le lieu :
La classe
L'atelier
La maison
 
L'intervenant: L'élève
 
ORAL
réponse à la correspondance sonore
préparation de l'exposé, la lecture,
interviews
conversation libre
sonorisation de diapositives
travail sur bandes éclatées
 
ÉCRIT
reforrnulation travail collectif
réponse à la correspondance
préparation compte rendu, exposé ...
scripts montages audiovisuels
rédaction de textes, poèmes, chansons .
travail à long terme : "chef-d'oeuvre" .
 
SOCIALISATION
Le lieu : en classe, entre classes ...
Intervenants : l'élève, le groupe, le professeur
 
L'ORGANISATION DU TRAVAIL
Pour plus de détails sur les Langues cf Live English, dossier pédagogique nO 102-103-104.
 
Chaque semaine, on fait le bilan du travail de la semaine passée (mise à jour du bilan individuel, du bilan collectif mural).
Et on programme le travail pour les heures de cours de la semaine à venir.
Selon le rythme du travail, on décide, coopérativement que telle période sera une phase de travail collectif, telle autre une phase de travail personnalisé ...
 
Le contrat de travail (exemple pour un trimestre)
une animation : qui consiste à venir au début du cours présenter un document, un texte ... et animer une discussion sur le fond, pendant dix minutes.
une diction : qui consiste à venir dire un texte, un poème ... dans le meilleur anglais possible et s'exposer à la critique du groupe sur le plan de la diction.
quelques textes d'expression spontanée dont un au moins sera présenté au groupe.
un travail personnel écrit (fiche de lecture, dépliant enquête, dépliant recherche documentaire ... ) qui sera également présenté au groupe.
 
Sciences naturelles
Un exemple de séquence de travail
Étude d'un insecte "le gendarme" ou Pyrrhocore
 
Observation : un grand nombre d'insectes rouges et noirs sont réunis au pied des tilleuls
 
EN CLASSE
étude de cet insecte, organisation externe, dessin d'observation, recherche de documents, liste de questions :
lieu de vie - pourquoi ces endroits ?
Quelle est leur nourriture ? Comment est-elle prélevée? Quelles sont leurs sensibilités ? Que préfèrent-ils comme couleur, luminosité, humidité ? Température ? Quelle est leur reproduction ? Ont-ils des ennemis naturels ? Sont-ils utiles, nuisibles ?
Choix d'une question,
éclatement de la classe en groupes,
répartition des tâches,
observations complémentaires ou dissection, ou ... formulation des hypothèses,
réalisation des expériences,
schémas des expériences
résultats (ils sont discutés au sein du groupe)
rédaction des résultats, provisoirement pris au brouillon
socialisation : oral/écrit
contrôle des connaissances.
 
HORS C.E.S.
Notes d'observation, dessins observer le comportement :
- dans la nature
- en élevage
Rédiger au propre les notes, rechercher des documents, réfléchir à l'expérimentation et réunir le matériel 'nécessaire, rédiger correctement le compte rendu, les schémas, mémorisation

 

CONCLUSION :
C'est la réponse à la question retenue au début dans chaque groupe de travail.
Considérer la discipline en tant que discipline d'éveil :
Ouvrir des voies vers les maths, la techno, le français ... et utiliser les techniques et le langage qui leur sont propres avec la collaboration des professeurs de ces disciplines.
 
TRAVAIL COLLECTIF
Observation de la nature quelle que soit la saison : sortie, même brève, élevages ... Etude de l'organisation externe de l'insecte ; observations, dessins, apprentissage de la manipulation des appareils.
Liste des questions. A partir de ces questions élaboration d'un "PLAN DE TRAVAIL COLLECTIF". Le professeur intervient pour en augmenter ou en limiter la portée. Puis viennent :
La répartition des tâches : en fonction de la question retenue, éclatement de la classe en groupes de quatre à six élèves au maximum.
La détermination du temps d'achèvement : notion de contrat.
 
TRAVAIL PERSONNALISÉ
Forme spontanée
AU NIVEAU ET AU RYTHME DE L'ÉLÈVE
- au sein des groupes : réflexion sur la question choisie
- observation du comportement : dessins, prises de notes dissection (éventuellement)
- recherche de documents : textes, illustrations, questions à poser à l'entourage
recherche du matériel expérimental
réalisation, montage des expériences - apprentissage du schéma
résultats : discussions, remise en cause
conclusion

 

 

 
Technique du compte rendu : chaque élève rédige son compte rendu à partir du travail du groupe. Mémorisation : en vue de la socialisation
pour l'acquisition des connaissances
en tant qu'exercice de fortification de la mémoire.
 
Il y a INTERVENTION ET CONTRÔLE DU PROFESSEUR tout au long des différentes phases .
Forme imposée par le groupe
contrat d'achèvement
organisation du travail au sein des groupes de travail exigences de qualité et d'effort
socialisation : mémorisation/affichage
Outils de travail personnalisé
échantillonnage de manuels scolaires de divers niveaux comptes rendus expérimentaux :
les meilleurs sont à conserver sous forme de schémas, de résumés, de montage photo ...
Ils peuvent être utilisés comme compléments au point de départ des travaux à venir.
 
SOCIALISATION DU TRAVAIL PERSONNALISE
Au niveau classe
- ne pas remplacer par un exposé le cours magistral,
- critiques et suggestions du gro~pe classe, d'un prof ... qui peuvent être le départ de recherches
complémentaires,
- auto-évaluation
- apprentissage de la prise de notes
- affichage
Présentation à une autre classe
interdisciplinarité : plus grande disponibilité des professeurs présents, motivation réciproque
phases de contrôle : immédiates ou plus tardives au niveau du groupe pour les notes rédigées, les schémas, les connaissances et beaucoup plus tard, oralement par sondage rapide.
 
UN ESSAI DE DESCRIPTIF DE LA DÉMARCHE EN ATELIER
 
Compte tenu des limites de notre compétence technique dans ce domaine, si les ateliers de l'après-midi ne sont pas abordés dans le même esprit que les matières traditionnelles (français-maths ... ), ils risquent d'être perte de temps, bricolage infantile, faillite du sens de l'effort et de la rigueur.
Nous ne les envisageons pas du tout comme des activités de loisir et de bricolage et nos objectifs principaux visent au développement de l'individu aussi bien dans les domaines sensoriel, moteur et affectif, que dans celui de la connaissance.
Notre démarche est avant tout une interrogation sur l'organisation du travail, le respect du contrat, la maîtrise technique (le geste, le verbe ... ) et ensuite seulement une réflexion sur le contenu, c'est-à-dire l'activité qui n'est qu'un moyen et non une fin.
Nous n'avons pas la prétention d'enseigner le dessin, la danse, la poterie ... mais nous avons le souci d'éduquer par le biais de toutes ces activités dont la liste a été donnée par ailleurs.
Le bref descriptif qui suit donnera peut-être une idée du sens de notre recherche.

 
LES PETITS RIENS QUI FONT
QUE LA VIE QUOTIDIENNE EST PLUS SIMPLE
Ce chapitre a été rédigé à partir des observations faites par des professeurs qui ont dû quitter le C.E.S., des surveillants qui "voyagent" beaucoup et d'anciens élèves.
Les élèves ont la possibilité de prendre part à l'organisation de la vie de la classe grâce à la coopérative, de la vie de l'établissement, grâce aux modules.
_ Pas de grille d'accès ni de contrôle à l'entrée du C.E.S. Libre circulation (régulée par le module) dans l'établissement
_ A la sonnerie, pas de mise en rang en silence sous le préau ou à l'entrée des classes
_ Au restaurant, les élèves ont choisi leur place au début de l'année et peuvent en changer s'ils le désirent et si cela ne remet pas en cause l'organisation générale
_ Pas de sanctions systématiques et imposées par l'administration
_ Les élèves qui le demandent peuvent se regrouper pour un temps déterminé en atelier autogéré _ Des enfants "à problèmes" qui nous sont envoyés se plaisent et s'épanouissent.
_ C.P.P.N. complètement intégrés dans les ateliers de l'après midi : ils vont où ils veulent ; leur professeur ouvre à tous les élèves du C.E.S. un atelier CUISINE et un atelier INITIATION à la VIE SOCIALE. S'ils ne sont pas intégrés le matin, cela tient uniquement au fait que la collègue ne se sent pas prête a travailler dans une discipline particulière. Cette C.P.P.N. est connue sous le nom de 4e Morelon (les autres sont Killy, Besson, Drut), ce qui ne la différencie pas des autres. (Le cas des C.P.A. est différent, l'exiguïté des locaux les ayant fait "émigrer" dans un autre lieu de la ville). _ Des élèves de 3e prennent en charge, dans une salle, de 13 h à 13 h 30, des élèves de 6e qui ne savent pas lire ou qui ont des difficultés en calcul.
_ Les élèves organisent eux-mêmes le challenge interclasse de basket-ball et de hand-ball chaque jour de 12 h à 13 h 30.
_ Le dialogue avec les professeurs peut s'instaurer à n'importe quel moment
_ L'accès de la salle des professeurs est autorisé aux élèves
_ Par ailleurs, pas de vandalisme systématique
_ Un vocabulaire relativement châtié dans les relations entre élèves, toujours correct avec les surveillants et les professeurs .
Entre professeurs, il y a un style de communication particulier qui se traduit par une bonne entente et une ambiance détendue très appréciées des élèves. (C'est toujours souligné par les anciens élèves qui reviennent souvent quand ils le peuvent)
_ Tutoiement général
_Pas de hiérarchie ni par le diplôme, ni par la situation administrative
_ Conditions favorables créées par le statut volontairement mal défini du sous-directeur qui assure des cours dans une classe et contribue ainsi à fondre administration et équipe pédagogique en une plus grande équipe au service de l'intérêt de l'élève.
Ces heures de cours ne sont pas faites au détriment d'un demi-poste qui pourrait être créé car elles ne figurent pas dans la structure pédagogique décidée par le Rectorat.
Elles permettent :
aux professeurs ainsi libérés d'ouvrir des ateliers
au sous-directeur de garder le véritable contact avec élèves et collègues
_ Dans le même esprit, des ateliers ouverts par le Principal, la secrétaire, la documentaliste, les surveillants, les agents, des parents et même des anciens élèves à l'occasion.
- Matériel pris en charge par les professeurs et leurs élèves
_ Les fonds gérés par la coopérative permettent de faire face à des achats indispensables et immédiats
_Possibilité de modifier matériellement les locaux (W.C. transformé en labo-photo, vestiaire en vivarium ... )

 

_ Utilisation des locaux du Foyer de Jeunes pour la gymnastique, la danse, la poterie ...
_ Surveillants présentés aux élèves par leur prénom et qui sont en liaison permanente avec les professeurs par le canal de la séance de coopérative pour résoudre les problèmes de relation qui se posent en dehors des cours.
_ Rencontres avec les parents fréquentes : il y a deux réunions organisées par an
_ Les professeurs se réunissent une fois par mois en conseil d'enseignement (il n'y a pas de concertation pédagogique instituée dans l'emploi du temps)
_ Emploi du temps établi au début de l'année avec les volontaires. Il est possible de le modifier
à tout moment pour une rencontre, une sortie ... )
- Emploi du temps de l'après-midi remis en cause à chaque répartition (deux par trimestre) et modifié en fonction des critiques des élèves et des professeurs (Ceux-ci choisissent librement les ateliers qu'ils désirent ouvrir)
- Chaque année pendant une bonne partie du mois de juin, toute l'organisation structurée décrite
dans cette brochure se dilue dans un cadre de vie plus riche et plus authentique motivée par la transformation du C.E.S. en fonction du thème que l'on s'est donné (La Vigne en 76, Le Cirque en 75, L'Afrique en 74 ... ) et qui débouche sur un week-end portes ouvertes.
Ce week-end et sa préparation sont la matérialisation de tous les rêves que l'institution nous empêche d'assumer pleinement tout au long de l'année, et la preuve que ces rêves sont réalisables.
- Dans toutes les activités décrites, l'individu (professeur ou élève) garde la possibilité de rester lui-même à l'intérieur d'un groupe tout en participant à l'oeuvre commune .
Pour conclure ce catalogue, on peut dire que beaucoup de ces conditions ont été progressivement réunies par l'équipe pédagogique et permettent à tous, professeurs et élèves, de modifier les structures et rendre la vie quotidienne moins contraignante et plus enrichissante.
 
 
OBSTACLES ET PROBLÈMES
 
LIMITES MATÉRIELLES
LIMITES IMPOSÉES PAR LE SYSTÈME
- hiatus entre les buts poursuivis et les couperets sélectifs, notamment au niveau de l'orientation
- mutations autoritaires du personnel non titulaire qui remet chaque année en cause la cohésion de l'équipe de recherche
- nomination d'éléments qui refusent de s'intégrer à l'action
par facilité : ils ont fait un choix entre la poursuite de leurs études et leur action pédagogique
par conservatisme : qu'il résulte de leur personnalité, du conditionnement de leur fonction universitaire, ou simplement du fait qu'il est plus reposant de critiquer sans agir et de s'en tenir à la routine que de se remettre en question.

 

EN GUISE DE CONCLUSION
Tel est donc, sans doute imparfaitement rapporté, ce qui s'est mis en marche depuis dix ans dans notre C.E.S.
D'aucuns trouveront cela anodin, d'autres inquiétant, certains compliqué, mais nous nous y sentons bien car nous pensons honnêtement faire front à ces évidences qui nous interrogent hors de nous et en nous ; et la quête des réponses est vivifiante :
A l'enfant qui, pour libérer ses pulsions profondes, confronter ses forces vives à la réalité des êtres et des choses, n'a plus le recours ni de la nature sauvage au coin de sa maison, ni la sérénité familiale le soir au retour au foyer, à qui la société n'offre souvent que des barrières de règlements et d'interdits, des ouvertures illusoires vers des horizons factices (télévision ... )
A l'enfant constamment agressé par les médias ( 60 % de ses connaissances acquises le sont en dehors de l'école) qui ne peut distinguer, seul, l'accessoire de l'essentiel, le mythe de la réalité, la vérité du mensonge, qui ne peut guère éprouver ses "certitudes", confronter ses interrogations sans cesse renouvelées tant les structures de relation sont absentes à son niveau,
NOUS RÉPONDONS :
- permanence, chaleur et richesse des échanges entre lui et ses camarades, lui et ses maîtres
- éveil et accueil de ses émotions, de ses convictions, de ses rêves, à travers ses créations élaborées ou ses réactions immédiates.
A l'enfant qui victime de l'inégalité première, celle de ne pas avoir la "facilité" intellectuelle ou manuelle et qui face aux apprentissages, a besoin d'un plus long tâtonnement,
A celui qui a quelque chose à dire, à porter hors de lui-même pour se valoriser et à qui les disciplines "scolaires" n'ont jamais apporté le moyen de le faire avec succès,
NOUS RÉPONDONS :
- adaptation du rythme de travail à l'individu par des structures souples (travail personnalisé ou en atelier)
- mise à la disposition de lieux, de moments d'expression et d'action que l'individu peut choisir (ateliers ou modules de coopérative)
- une autre façon de le juger par rapport à lui-même plutôt que par rapport aux autres, en privilégiant dans les appréciations, le succès par rapport à l'échec.
A l'adolescent aux prises avec ses phantasmes, ses désarrois devant les injustices du monde, les premiers rêves déçus, les convictions ébranlées,
A l'adolescent qui, déjà, par sa personnalité naissante, conteste le monde et voudrait agir sur lui, sans jamais pouvoir le faire, dans une société où les moyens d'expression sont la propriété des adultes (de certains adultes plutôt),

 

NOUS RÉPONDONS :
- écoute de tous les appels, de toutes les propositions, de toutes les critiques,
- mise à la disposition de moyens d'expression et de communication Journaux-exposition-séances
coopératives),
- pouvoir sur l'organisation de la vie scolaire.
A celui qui sera homme demain, qui aura à harmoniser son individualité avec les exigences d'une vie sociale, qui aura à préserver sa personnalité de l'action paralysante des pesanteurs collectives,
A celui qui devra savoir s'affirmer, lutter, persévérer, maîtriser son temps de loisir enfin,
NOUS RÉPONDONS:
prise en charge d'activités de recherche ou de création ou d'expression (ateliers) coopération effective au niveau du travail
mise à l'épreuve des aptitudes à la responsabilité et dynamique permanente du groupe .
A l'enseignant qui se sent écrasé par la hiérarchie administrative, hanté par la rigueur des instructions et des programmes, isolé dans le secret de ses classes,
NOUS RÉPONDONS AUSSI QUE :
_ par la force d'une conviction, d'une équipe, la dynamique d'une recherche, la conscience et le refus des alibis, nous pouvons modifier .d es structures, changer une atmosphère, engager un processus
de concertation pédagogique. •
A l'enseignant qui conscient des défauts du système, voire des schémas politiques que ce système entretient et perpétue, milite au sein d'une organisation politique ou syndicale,
NOUS RÉPONDONS :
_ que nous le comprenons et que nous sommes d'accord pour dire que la pédagogie ne changera pas le monde,
Toutefois nous ajoutons qu'il est possible d'agir aussi dans son travail de tous les jours
_ en proposant aux élèves des structures qui permettent de vivre la liberté, d'intervenir sur leur milieu
_ en s'acheminant par un travail d'équipe, par une autre forme de communication entre les maîtres, vers une prise de pouvoir sur la vie de l'établissement, car comment lutter là contre une relation d'autorité qu'on perpétue ici? Comment revendiquer une liberté d'expression là qu'on ne favorise pas soi-même ici? Comment inviter à tout changer là quand on ne bouge rien ici ?
Oui, nous répondons tout cela et à la fin du compte, nous gagne parfois une réconfortante sérénité : celle d'avoir exigé de nous-mêmes d'agir comme nous souhaiterions qu'on le fît avec nous, de mettre, autant que faire se peut, en conformité nos pensées et nos actes, celle d'avoir, à notre échelle, modifié le cadre de vie pour qu'il soit lieu d'accueil et d'expression.
Mais, si chaque année ajoute un maillon à la chaîne des tâtonnements, lègue une expérience nouvelle en face des certitudes reposantes, semble apporter une réponse à une inquiétude, elle entretient aussi de multiples inquiétudes au niveau de nos réponses et interroge sans cesse cette sérénité.
 

 

 

 

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