Galilée et l'astronomie : ses observations

Septembre 2006

Les phases de la Lune, ses montagnes

Phases de la LuneLorsque, pour la première fois, Galilée regarde la Lune à travers sa lunette, il n'en croit pas ses yeux. Il voit qu'elle a des montagnes, des cratères et des vallées.
Il fait des dessins de ce qu'il voit et s'aperçoit que les ombres se déplacent.
Il comprend très vite que c'est exactement ce qui se passe en montagne sur Terre. La ligne qui sépare la partie éclairée de la partie sombre et que l'on appelle "terminateur" délimite la séparation entre le jour et la nuit sur la Lune. Le Soleil éclaire d'abord le sommet des montagnes tandis que les vallées restent dans l'ombre; puis, petit à petit, le Soleil pénètre au fond des vallées.

Montagnes de Cappadoce

 

<• Premières observations de Galilée à l'aide de sa lunette :
les phases de la Lune (pleine Lune, premier quartier, etc).

 

 

Sur la Lune comme ici (en Cappadoce, Turquie),•>
les montagnes  se cachent les unes les autres.

  

 

Malgré ses observations et ses calculs, beaucoup d'astronomes de son temps ne veulent pas croire à l'existence de montagnes sur la Lune car, disent-ils, s'il y en avait, on devrait les voir sur le limbe (le bord). Or celui-ci paraît lisse. Galilée explique que cette impression est due au fait que les montagnes se cachent les unes les autres...
Galilée essaye, en mesurant la longueur des ombres, de calculer la hauteur des montagnes. Il est surpris et doute lui-même de ses résultats : 8 000 mètres. Et pourtant cette valeur est très proche des données actuelles!    

Les taches du soleil

Grâce à la lunette astronomique, Galilée et trois autres observateurs découvrent en 1611 des taches sur Soleil.
Les premiers observateurs supposent le que ce sont des planètes inconnues, plus proches du Soleil que Mercure.
Galilée pense d'abord qu'il s'agit de nuages inconnus passant devant le Soleil mais il découvre vite que les taches sont liées à la surface du Soleil.
Il publie en 1613 la Storia e dimostrazioni intorno alle macchie solari (Histoire et démonstrations sur les taches solaires).
La découverte des taches du Soleil déclenche une polémique : nombre de savants aristotéliciens de l'époque ne pouvaient admettre que le Soleil, corps "parfait" selon Aristote, possède des taches !
Leur point de vue sera ouvertement réfuté par Galilée en 1632, dans le premier livre du célèbre Dialogue sur les deux principaux systèmes du monde. Simplicio, le représentant de l'aristotélisme, y est accablé d'arguments auxquels il ne peut répondre :
"Quand on n'ignore pas totalement la perspective, du changement apparent des figures et vitesses du mouvement il faut conclure que les taches sont contiguës au corps solaire et que, touchant sa surface, elles se meuvent avec lui ou sur lui ; elles ne tournent donc nullement sur des cercles éloignés de lui. A preuve leur mouvement : il paraît très lent au bord du disque solaire et plus rapide vers le centre ; autre preuve encore, la forme des taches : au bord de la circonférence, elles paraissent beaucoup plus étroites qu'au centre ; c'est qu'au centre on les voit en majesté, telles qu'elles sont vraiment, alors que, près de la circonférence, quand se dérobe sa surface, on les voit en raccourci".
Image du soleil (club astronomie)   

Image du soleil par projection.
On remarque des taches et des parties blanches plus brillantes
sur un bord ainsi que “ l’assombrissement ” des bords.

 

La découverte des taches du Soleil et leur interprétation correcte ont fait beaucoup pour dégager l’astronomie des a priori métaphysiques1 qui l'entouraient.
Par ailleurs, ces observations ont permis à Galilée de montrer que le Soleil tourne sur lui-même.
On sait maintenant que les taches du Soleil sont des régions moins chaudes, à une température de 4 000°C, alors qu'en général la température de la surface du Soleil est voisine de 6000°C.

1- « des a priori métaphysiques » : des idées non fondées sur l'observation scientifique

Attention !
Le Soleil est une étoile qu'il ne faut jamais regarder directement avec un instrument d'observation. Vous risquez de vous brûler la rétine et de perdre instantanément et irrémédiablement la vue. Pour l’observer sans risque, il faut impérativement utiliser des verres teintés spéciaux ou encore l'observer par projection. Vous pourrez ainsi observer le déplacement des taches sur plusieurs jours.

 

Vénus et ses phases

Galilée - Phases de VénusGalilée dirige sa toute première lunette sur Vénus. Elle se présente alternativement en forme de croissant, de quartier ou de disque. Après cette première découverte, il veut attendre d’avoir fait de nouvelles observations, avec un instrument plus puissant. Quelques semaines plus tard, il annonce que Vénus présente des phases comme la Lune.
On avait depuis longtemps remarqué combien largement et régulièrement varie l'éclat de Vénus.

Mais, pour Galilée, la présence des phases de Vénus est en accord avec la théorie de Copernic : Vénus tourne autour du Soleil.
 

Une devinette2 de Galilée

"Haec immatura a me iam frustra leguntur o, y"
Cette phrase latine, Galilée l'adresse en 1610 à des savants. Le sens est fort banal: Ces choses pas encore mûres sont déjà cueillies en vain par moi.
Que signifie cette énigme ? Que Galilée a fait une découverte, mais il veut attendre de l'avoir précisée pour la publier et, en attendant, il réserve ses droits d'auteur.
Quelques semaines plus tard, Galilée est sûr de lui, il publie une nouvelle phrase : "Cynthiae figuras aemulatur mater amorum" (La mère des amours imite les figures de Diane).

Pour nous, ce n'est guère plus clair !
Mais les contemporains comprennent :
Vénus, déesse de l'amour, imite les phases de Diane, déesse de la Lune.

2-En réalité, c'est une devinette sous forme d'anagramme. Vous pouvez vérifier avec un scrabble que les trente-cinq lettres de la première phrase sont dans la seconde phrase. A l'époque de Galilée, on appréciait beaucoup les jeux de mots de toutes sortes: énigmes, anagrammes, contrepèteries (voir Rabelais).

Jupiter et ses « lunes »

Le 7 janvier 1610, Galilée distingue à la lunette trois étoiles, fort petites, à côté de la planète Jupiter. Tout d'abord, il pense qu'il s'agit d'étoiles fixes, mais leur position éveille sa curiosité : elles se trouvent alignées par rapport à Jupiter, deux à l'est et une à l'ouest.
La nuit suivante, "poussé par quoi, je ne sais", il tourne à nouveau sa lunette vers Jupiter et découvre à sa grande stupéfaction que toutes se trouvent maintenant à l'ouest de la planète. Comment, se demande-t-il, Jupiter peut-elle s'être déplacée à l'est de ces étoiles alors que la nuit précédente elle se trouvait à l'ouest de deux d'entre elles ?
Les nuits suivantes, les positions varient à nouveau. L'une des étoiles disparaît, puis réapparaît, puis est rejointe par une quatrième que Galilée n'avait pas encore vue.
Il n'y a qu'une conclusion possible : ce ne sont pas des étoiles fixes, mais des petites « lunes » accomplissant autour de Jupiter des révolutions.
Sa stupéfaction est telle qu'elle aurait pu être difficilement plus grande s'il avait su, comme nous le savons aujourd'hui, qu’une quarantaine de «lunes» gravitent autour de Jupiter.

Jupiter et ses lunesPour Galilée, Jupiter et ses « lunes » constituent un système solaire en réduction, selon le modèle héliocentrique de Copernic.

Les idées de ce grand homme semblent désormais ne plus pouvoir être rejetées. Aussi rapporte-t-on que Kepler, en apprenant les observations de Galilée, s'écrie en parodiant l'exclamation de l'empereur Julien : Galilée, vicisti (Galilée, tu as vaincu)3.    

L'astronome bavarois Simon Mayer et l'astronome allemand Scheiner semblent d'ailleurs avoir découvert ces «lunes» un mois avant Galilée mais ils n'ont pas compris leur signification. Ce sont cependant des noms suggérés par Mayer que nous leur donnons encore aujourd'hui : Io, Europe, Ganymède et Callisto. Elles sont aussi appelées "satellites galiléens" en hommage à Galilée qui les a identifiées.

Les satellites de Jupiter tournent autour de la planète dans un même plan, c'est pourquoi, vus de la Terre, ils semblent alignés et c'est la perspective qui nous donne leurs mouvements apparents. On admettra facilement que des observateurs n'aient pas tout de suite compris que ces satellites reproduisaient un système solaire. Galilée a cette idée géniale : ainsi, si des « lunes » tournent autour d'une planète, les planètes peuvent bien tourner autour du Soleil.

3-L’empereur Julien, dit l’apostat (331-363) aurait dit au moment de mourir “ Tu as vaincu, Galiléen" en constatant que ses efforts pour restaurer la religion païenne avaient échoué et que la religion chrétienne était en train de s’imposer dans le monde romain
(Galiléen = chrétien, la Galilée étant le berceau de la prédication de Jésus).

 

Mars, "la planète rouge"

C’est seulement en 1620 que Galilée pointe sa lunette dans la direction de Mars. Elle lui apparaît comme un disque circulaire : Mars est une planète ! Visible à l'œil nu sous la forme d'une simple étoile, c’est en effet une planète beaucoup plus éloignée du Soleil que la Terre.
Rappelons que ce sont les observations, d'une précision remarquable pour l'époque, faites par Tycho Brahé, de la position de Mars dans le ciel, qui avaient permis à Kepler d'établir sa première loi.

Saturne et son anneau

Dans sa lunette grossissant 30 fois, Saturne apparaît à Galilée émerveillé comme "entourée d'un anneau". C’est la dernière planète du système solaire qui soit perceptible à l'œil nu sous la forme d'une petite étoile.
On sait aujourd'hui qu'elle possède un système d'anneaux et plus de trente cinq satellites.
 

Galilée aurait découvert Neptune sans le savoir

En 1612, alors que l'on ne connaît même pas encore Uranus, Galilée a très probablement observé Neptune, sans réaliser qu’il s’agit d’une planète4.
Depuis cette date, Neptune a été observée le 8 mai 1795 par l'astronome français Lalande, qui la prend pour une étoile, un demi-siècle avant qu'elle soit identifiée en tant que planète par Galle, à Berlin, à partir des calculs de Le Verrier.

4-Ce sont les astronomes Charles Kowal, un Américain, et S. Drake, un Canadien, qui ont avancé cette étonnante possibilité dans une intéressante étude publiée le 9 septembre 1980.

 

La Voie lactée

La Voie Lactée est une bande blanche et floue (laiteuse) que l’on peut observer certaines nuits dans le ciel.
Au Moyen Age, on l’appelait le "Chemin de Saint Jacques de Compostelle", mais on ne savait pas ce que c'était.
Galilée, avec sa lunette, voit qu'en réalité elle est formée d'un nombre considérable d'étoiles. Mais certains ne veulent pas le croire, ils disent : "Monsieur Galilée voit dans sa lunette ce qu'il y met".
Il écrit dans Le Messager Céleste (1610) :
"Ce qu'il nous a été donné d'observer, c'est l'essence ou mieux la matière dont est constituée la Voie Lactée, telle qu'elle apparaît au moyen de la Lunette ; et ainsi, toutes les discussions qui, pendant des siècles, ont partagé les philosophes, prennent fin devant la certitude qui s'offre à notre vue, et grâce à quoi nous sommes libérés des disputes verbeuses..."
Galilée écrit encore dans le même ouvrage :
"De plus, merveille encore plus grande, les étoiles que certains astronomes ont appelées "nébuleuses" sont des troupeaux de petites étoiles éparpillées d'admirable manière."      
Nous savons à notre époque que la Voie lactée est la partie de notre galaxie5 visible depuis la Terre.    

5-Galaxie : ensemble d’étoiles auquel appartient le système solaire.

 

L’univers selon Galilée

Fort de toutes ces observations astronomiques (irrégularités de la surface de la Lune, satellites de Jupiter, taches solaires…), Galilée pense que toutes les parties de l'univers obéissent aux même lois.
Il considère que la distinction qu'on faisait durant tout le Moyen Age, à la suite d'Aristote et de Ptolémée, entre la physique du monde terrestre (ou sublunaire) et la physique du monde céleste est dénuée de fondement.
Il est incontestable que toutes les déductions faites par Galilée de ses nombreuses observations ont contribué à une avancée vers la vision moderne de l’univers.

Crédit iconographique : 
dessins et photo Annie Dhénin sauf photo N&B : Jeanine Chappelet et le club astronomie de son lycée