Un temple luthérien, Montbéliard. Article

Mai 2001

 En mars 2001, le temple Saint-Martin de Montbéliard fêtait les 400 ans de sa fondation.
Considéré comme la plus pure des œuvres de l'architecte Heinrich Schickhardt, c'est la plus ancienne église réformée de France, construite sur l'emplacement d'une ancienne église fondée en 1293 et reconstruite en 1491.

Créé au XIe siècle, le comté de Montbéliard, terre d'Empire, devient une principauté luthérienne au XVIe siècle, adoptant ainsi la religion de ses princes, issus de la famille germanique de Würtemberg.
Né à Montbéliard en 1558, Frédéric, duc de Würtemberg en 1593, veut faire de sa ville natale la capitale de ses territoires d'outre-Rhin. Il dote la cité médiévale d'édifices de référence: le château, citadelle perchée sur un rocher, est restauré; les halles en bois, ou Kaufhaus, autre lieu fort du gouvernement de la principauté, sont reconstruites et abritent dès 1570 le conseil de régence, le tribunal civil; et bien sûr l'église évangélique luthérienne Saint-Martin.
Premier personnage de la principauté, le prince impose le luthérianisme à ses sujets. La capitale de l'État souverain de Montbéliard se doit de posséder un édifice du culte digne de ce nom. La conception en est confiée à l'architecte, ingénieur et urbaniste Heinrich Schickhardt, originaire de Herrenberg en Forêt-Noire.
Les formes géométriques retiennent son attention. C'est en hommage aux premiers chrétiens que Schickhardt dessine St-Martin de Montbéliard sur le plan des églises des premiers jours, anciens temples païens reconvertis. Soucieux de la mise en scène, il a disposé le grand portail sud dans la perspective rue du Pont-des-Étaux, principale sortie du château vers la Haute Saône et la Lorraine.

Le chantier de construction

Heinrich Schickhardt a rapporté de voyages en Italie de nombreux croquis, dessins et documents. En 1600, le prince et l'architecte s'en inspirent pour élaborer ensemble le projet de St-Martin.
Les travaux de fondation commencent le 14 janvier 1601. La première pierre est posée le 5 mars suivant: une plaque de cuivre est placée dans la pierre avec des monnaies et une liste des autorités de l'époque. Le 4 mai, 14 personnes travaillent sur le chantier.
De 1601 à 1607, le chantier se déroule sous la direction de Schickhardt. Fin 1605, le gros œuvre est terminé et le second œuvre achevé le 15 septembre
1607. La construction de l'église évangélique aura duré six ans et neuf mois. Les aménagements intérieurs se poursuivent de 1609 à 1615. En 1615, une consolidation de charpente, le percement de lucarnes, la réparation de la couverture en tuiles et la construction d'un avant-toit au-dessus de la corniche de la façade ouest complètent le monument.
Le coût de l'édifice, estimé à 25 636 francs forts, est partagé entre les caisses de la principauté de Montbéliard pour moitié, les finances de Stuttgart pour 14,6 %. Le reste est apporté par des mécènes et souscripteurs, au rang desquels figurent les hauts fonctionnaires de la principauté. La construction du clocher en bois, en 1677, met un point final à l'édification du temple.

Le temple protestant Saint-Martin aujourd’hui

L'édifice 

L'édifice est rectangulaire et deux fois plus long que large. Son allure générale austère et rigide, aussi bien que son plan, se réfèrent à l'architecture romaine antique et plus particulièrement à l'architecte Vitruve.
Sur chaque façade, nord, sud et ouest, est placé un portail architecturé surmonté d'un fronton.
La salle de prêche mesure 36,60 m sur 15,90 m. Le plafond est magnifique, en bois. Divisé en 45 caissons rectangulaires, il est fixé à la charpente par des crochets. Au milieu, un caisson portait à l'origine les armoiries du prince.
Ces armoiries ont été enlevées à la Révolution et remplacées depuis par un médaillon représentant le « bon berqer » (symbole du Christ).
L'intérieur, autrefois très décoré, est aujourd'hui entièrement peint en blanc.

La restauration

CIassé monument historique en 1963, ce temple est très abîmé par le temps, la pollution. Son orgue est totalement restauré de 1985 à 1987. En 1991, la décision est prise de restaurer l'ensemble du bâtiment, en liaison avec la Direction régionale des Affaires culturelles de Franche-Comté.
Dans un premier temps, les façades sont nettoyées, ce qui révèle l'état de délabrement de certains blocs. Des compagnons spécialisés commencent alors la restauration. Les pierres à remplacer sont repérées, taillées à l'identique. Les nouveaux blocs sont patinés pour parfaire le travail, qui doit rester invisible. Des outils traditionnels sont utilisés afin de préserver l'aspect de l'ouvrage.
Certains éléments horizontaux, très exposés aux intempéries, tels que frontons ou chapiteaux, sont protégés à l'aide de feuilles de cuivre.
Après un examen soigneux des éléments en place en vue de retrouver leur teinte d'origine, les boiseries sont décapées, poncées et repeintes à la brosse. En particulier, les portails sont agrémentés d'une couche qui finit de leur donner une certaine patine. Ainsi consolidé et restauré, le temple de Montbéliard, symbole de la présence luthérienne en Franche-Comté, a retrouvé une nouvelle jeunesse.

 

Source : 
Source : BT n° 1128 - mai 2001 ISSN : 0005-335X
Crédit iconographique : 
Photo Michel Mulat
Participation: 
Œuvre collective écrite sous la coordination de l’ICEM-PÉDAGOGIE FREINET. Ce reportage a été conçu par Daniel Krähenbülh et mis au point par le chantier BT de l’ICEM, coordonné par Pierre Péguin ; ontparticipé à sa rédaction Bernard Hamon, Nadine Hua Ngoc, Lucien Buessler, Irène Hamon, Roland Bolmont et le pasteur David Schrtzer (pasteur à Sainte-Marie – Consistoire de Saint-Julien, inspection de Montbéliard)