L'Educateur Prolétarien n°1 - année 1933-1934

Octobre 1933

Après l'orage, à pied d'oeuvre encore

Octobre 1933

Qu’on le veuille ou non l’affaire Freinet est aujourd’hui virtuellement terminée puisque nous n’avons pu obtenir ni mon maintien à St-Paul, ni la moindre sanction contre les coupables des événements dont nous avons été victimes.

Nous sommes vaincus politiquement : c’est un fait que nous constatons sans aucune amertume ni fausse pudeur, car nous ne nous sommes jamais fait d’illusion exagérée sur l’énergie administrative de ceux qui devraient être les défenseurs naturels de l’école.

Aussi ne nous plaignons-nous pas d’avoir été mal défendus. Au contraire. Il est profondément encourageant de considérer le nombre impressionnant d’éducateurs, de fonctionnaires, d’écrivains, d’artistes, d’hommes libres qui ont courageusement fait leur notre cause, soit qu’ils sentissent spontanément tout ce que notre œuvre apportait au progrès pédagogique, soit qu'il fussent seulement révoltés par les procédés déloyaux et iniques par lesquels on essayait de nous abattre.

Hélas ! l'honnêteté, la droiture, la justice, la vérité, n’ont pas grand-chose à attendre dans nos sociétés soi-disant démocratiques, de la dictature de l’argent, du règne de la corruption au service des nécessités politiques et des plus viles préoccupations arrivistes. Notre affaire en aura fait la preuve éclatante, ouvrant à la réalité bien îles yeux pleins encore d'illusion, et contribuant à démasquer les hypocrites adversaires de notre idéal.

Pour servir de basses préoccupations électorales, tous les hommes politiques de gauche ceux du moins qui s’obstinent à rester gouvernementaux ont laissé les mains libres à un parti royaliste qui, s’appuyant sur toutes les forces réactionnaires, a, pendant plusieurs mois, violé ouvertement toutes les lois républicaines. Ah ! comme il avait raison cet avisé professeur parisien qui, au début même de l’affaire, nous disait : Ah ! mon pauvre... nous aurions un ministère Tardieu, je vous dirais : vous êtes sauvé... Mais avec notre ministère de gauche, vous êtes fichu. Pour faire taire la réaction, on vous livrera en pâture aux gueulards. Toute la gauche se taira.

Mais il y a plus grave : Pour la première fois dans les annales de l’enseignement une attaque violente, usant de tous moyens délictueux, au mépris le plus révoltant des lois, a réussi à punir et à faire déplacer un instituteur coupable de déplaire à la réaction el cela sans que la moindre sanction ait seulement été esquissée contre les coupables.

Eloquent exemple !... Il signifie pour les traditionnels ennemis de l'école : ameutez contre les instituteurs une partie de la population ; circonvenez quelques parents d’élèves qui refuseront d’envoyer leurs enfants à l’école ; organisez s’il le faut des manifestations violentes où le sang pourrait couler ; et vous vaincrez...

L'Ami du Peuple du 22 juin pouvait avec raison lancer l’appel suivant pour organiser d’urgence une Ligue de défense des pères de famille.

« But de la Ligue. — Faire reculer la horde des instituteurs insolents. Veiller à la stricte neutralité et à la bonne tenue morale de l’enseignement primaire.

Consigne. — Attendre à la sortie de l’école tout instituteur qui aura tenté d’empoisonner l'esprit de nos enfants et... (le reste de cette consigne n'a pas été indiqué mais vous le devinez).

Résultats à atteindre. — Sans doute l’instituteur portera plainte, mais que fera le ministre devant ces faits mille fois répétés ? Il tiendra compte de la réaction du peuple.

Saint-Paul-de-Vence a donné l'exemple. Il est d’intérêt public que cet exemple soit suivi. »

Les municipalités réactionnaires n’ont pas même attendu cet appel pour suivre l’exemple. On verra plus loin, par la relation de l’Affaire Boyau, la répercussion directe que les événements de Saint-Paul ont eu clans les localités ou se poursuit, aiguë, la lutte à mort entre l'école laïque et l’école cléricale.

Que ceux qui n'avaient pas encore vu le danger ouvrent les yeux et réagissent. Il n’est jamais trop tard.

***

Les menaces et les attaques, pour si brutales qu’elles aient pu être, n’ont cependant fait que renforcer la cohésion et le rayonnement de notre coopérative qui a largement bénéficié de la formidable campagne de presse déclenchée contre nous.

On nous avait, jusqu’à ce jour, négligés comme si nous n'existions pas, comme si l’imprimerie à l’Ecole n’était représentée par ci par là que par des expériences locales sans coordination ni portée générale. Et brusquement, à l'occasion d'un événement fortuit, se révèle une véritable organisation pédagogique, avec ses services, ses revues, ses éditions. La réaction crie au scandale, naturellement, sans rien connaître. La gauche hésite dans sa défense car elle croit entrevoir sur l'œuvre incriminée l’ombre inquiétante du bolchevisme.

De tout le bruit fait autour de cette œuvre, il résulte du moins que l'imprimerie à l’Ecole est aujourd'hui connue de l’immense majorité du personnel enseignant ; que de nombreuses revues ont parlé de nos publications, reproduit des pages de la Gerbe et des Enfantines. Tous les critiques de bonne foi louent l’originalité de l'œuvre coopérative et s’étonnent des attaques immondes dont nous avons été l’objet.

Les éducateurs sont conquis, dès surtout que nous les mettons en mesure de juger sur pièces. Beaucoup d'entre eux hésitent certes à nous rejoindre, car on ne rompt pas aussi facilement avec le passé : on ne tourne pas ainsi, en quelques jours, le dos à la vieille pédagogie pour s’engager dans les chemins malgré tout chaotiques de l’éducation nouvelle.

Pour excuser leur faiblesse ou leur répugnance à tenter l'effort que nécessite l'introduction de nos techniques, ils répètent parfois même avec empressement les calomnies lancées contre nous par ceux qui ont intérêt à nous desservir et qui, ne pouvant nous prendre en défaut ni pédagogiquement ni commercialement agitent à leur tour contre nous le spectre communiste.

En ce début d’année, nous tenons encore une fois à nous expliquer en toute loyauté à ce sujet, afin que nos adhérents — et ceux qui se préparent à le devenir —sachent exactement ce qu'ils peuvent attendre de leur Coopérative.

Notre Coopérative — comme toute Coopérative légale n’a, statutairement, aucune couleur politique. L’article 4 de nos statuts précise en effet : « La présente société reste neutre dans toute ce qui touche aux partis politiques et aux confessions religieuses. »

Ce qui signifie que, tant dans les assemblées générales que dans les organes de la Coopérative, il est interdit de discuter de questions politiques et religieuses. Mais nul d’entre vous, je pense, ne pousse le dogme de la neutralité jusqu'au point de demander aux administrateurs de rester en toutes occasions, hors de la coopérative, neutres socialement et politiquement. Nous prétendons rester à ce point de vue, comme tous les adhérents libres de penser et d’agir comme nous le désirons, sans avoir de comptes à rendre aux coopérateurs.

Avons-nous une seule fois, depuis que la Coopérative existe, violé les statuts ? Avons-nous introduit au sein de notre groupement les luttes politiques ou syndicales ? Une grande partie de nos adhérents appartiennent au Syndicat national ou aux partis philosophiques et politiques de leur choix. Ont-ils eu, une seule fois. à se plaindre de faits ou d’actes statutairement répréhensibles ?

La réalité est là encore, évidente et probante : nous connaissons de nombreux adhérents du Syndicat national qui comptent parmi nos plus dévoués collaborateurs. Et dans tous nos congrès, au cours même de discussions très délicates, nous avons toujours réalisé l’unanimité, toutes tendances politiques ou syndicales réunies, sur des motions qui orientent, d’année en année, l’activité de notre coopérative.

Quant au Conseil d’administration, il a toujours délibéré dans la plus parfaite et la plus franche camaraderie.

Peu importe donc que, au C.A. comme dans la Coopérative, X... soit communiste, V... socialiste. franc-maçon ou syndicaliste pur. Nous ignorons d’ailleurs, totalement, statutairement, ces étiquettes et nous collaborons au sein de notre société en coopérateurs consciencieux, mais aussi en hommes qui, par-delà les questions matérielles, par-delà les petites querelles de chapelle, savent entrevoir un but et marcher hardiment, mais pratiquement vers ce but.

•••

Oui, c’est vrai, constate le secrétaire de la section de l’Isère du Syndicat National. J’ai eu tort en disant que la Coopérative de l’Enseignement est communiste. C’est d’influence communiste que j’aurais dû dire. En effet, l’article 16 des statuts place la Coopérative sous le contrôle de la Fédération de l'Enseignement, affiliée elle-même à une C.G.T.U. contrôlée par le parti communiste. Cet article 16 stipule en effet que : « La société est administrée par un conseil d’administration de cinq à dix membres, choisis autant que possible parmi les adhérents d’un département ou de départements limitrophes et présentés par le S.M.E.L. auquel ils adhèrent ».

Eh bien ! oui, cela est exact, sauf qu’il soit difficile d'admettre, actuellement surtout, que la Fédération de l’Enseignement soit contrôlée par le parti communiste parce qu’affiliée à la C.G.T.U.

Nous n’avons jamais caché notre intention de placer notre coopérative sous le contrôle des Syndicats et de la Fédération de l'Enseignement. Nous avons toujours pensé, et nous pensons, encore, que la Coopérative reste une forme mineure d'organisation qui gagnerait à être placée sous la tutelle morale ou au moins sous la surveillance de cette organisation permanente qu’est le syndicat.

La Coopérative de l’Enseignement laïc est née au sein de la Fédération de l'Enseignement ; à l’origine ses adhérents appartenaient presque tous à celte Fédération. Il était donc normal que nous demandions cette surveillance à notre Fédération et à nos syndicats.

A cet effet, nous avons fait rédiger par votre avocat l’article ci-dessus qui est le maximum légal de liaison consenti par la loi. Nous n’avons jamais rien escamoté. L’article ainsi remanié a été statutairement soumis à la discussion de notre congrès de Marseille qui l’a adopté. 

 

Mais quand nous avons demandé aux Syndicats et à la Fédération de l'Enseignement de rendre effectif ce contrôle, nous nous sommes toujours heurtés à une opposition inexplicable. Il y a un peu plus d’un an, le secrétaire de la Fédération de l'Enseignement n’écrivait-il pas que la Coopérative avait toujours été autonome ?

Le congrès de Bordeaux fit un dernier effort : à l'unanimité moins une abstention, une motion fut adoptée pour essayer de jeter une fois encore des ponts sympathiques entre les deux groupements. La Fédération refusa l'insertion de cette motion dans l’Ecole Emancipée, ridiculisant ainsi tous les efforts de conciliation.

II ne s’agit pas ici de jeter de l'huile sur des feux qui couvent. Nous nous contestons de constater calmement des faits : la Fédération de l’Enseignement n’a jamais voulu user des droits que lui conférait l’art. 10 de nos statuts. Le S.N. nous dit inféodés à la Fédération de l’Enseignement : celle-ci nous accuse d’être autonome. Il y a là un malentendu qu’il est de l'intérêt commun de dissiper.

Au congrès de Reims, divers camarades ont demandé la modification de l’art. 10. La discussion est ouverte et nous publierons volontiers, en cours d’année, les articles que les camarades voudront bien nous adresser à ce sujet en attendant que le prochain congrès se prononce définitivement.

Qu’on ne croie pas que nous acceptons aujourd’hui cette proposition parce que nos espoirs ont été déçus. Si même la Fédération avait accepté notre offre, nous devons à la loyauté de répéter ici ce que nous avons dit dans divers congrès: le C.A. ne prétend imposer aucune dictature; il reste l’élu et le serviteur des adhérents de la Coopérative. Ce sont les assemblées générales qui restent souveraines : dans le cadre des statuts, ce qui a été créé par une assemblée générale peut être détruit par une A. G. Nous ne tenons nullement à avoir dans notre Coopérative des adhérents mineurs : nous vous demandons à tous, au contraire, d’agir énergiquement pour que la Coopérative réponde toujours davantage — et au maximum — à vos besoins et à vos désirs.

En attendant, appliquez-vous partout à rétablir la vérité des faits, persuadés que la Coopérative sera exclusivement ce que vous la ferez : nous savons que, en éducateurs conscients, vous en ferez une belle œuvre, au service de notre idéal éducatif et du progrès social.

 

La Gerbe devient mensuelle

Octobre 1933

 

L'Ecole Nouvelle de la Coopérative

Octobre 1933

La nécessité où nous avions été de donner en juillet une hâtive information concernant la création prochaine de cette école, ne nous avait pas permis de nous expliquer avec une suffisante clarté. Il en était résulté divers malentendus qui se sont fait jour — et ont été aplanis — à notre Congrès de Reims.

Le bruit s’est répandu d’abord — avec une hâte inconsidérée — que je quittais l’enseignement public pour créer une école privée.

Il n’a jamais été dans mon idée d’abandonner aussi à la légère l’enseignement public. Je crois avoir suffisamment prouvé que je n'avais point par habitude d’agir par coup de tête ou d’obéir à un quelconque sentiment de dépit. Mais je suis en face d'un état de fait : chassé de Saint-Paul, je serai partout, dans les Alpes-Maritimes l’indésirable, que parents et inspecteurs prévenus surveillent de très près pour l’arrêter au moindre geste non conformiste. Ne parlons pas d’expérience pédagogique : le seul fait de laisser les enfants choisir leur place en classe est susceptible, selon l’avis de l'inspecteur d’Académie, de «choquer les parents d’élèves ». Il me sera peut-être même impossible d’employer régulièrement l'imprimerie qui « choque aussi des parents qui n’ont rien connu de ces techniques étant enfants ».

Je sens pourtant, plus impérieux encore que jamais, le besoin de continuer les expériences qui nous ont mené à la technique actuelle. C’est pourquoi j’ai pensé à lu création d’une école dont je ne serais pas forcément le directeur ni le professeur, mais dans laquelle je pourrais suivre de près l’évolution des essais jugés nécessaires.

J’ai vu la possibilité matérielle de créer cette école : j’en ai lancé l’idée que nous nous appliquerons à réaliser.

***

Des camarades s’écrient aussitôt : Une école nouvelle pour les enfants riches ne saurait être pour nous une bonne école expérimentale. Nos écoles expérimentales, ce sont les écoles populaires dans lesquelles nous travaillons.

Ils ont partiellement raison : c’est bien malgré moi que je me vois interdire pratiquement la possibilité de poursuivre dans ma classe, connue au cours des années écoulées, mes expériences pédagogiques.

Ils se trompent pourtant quand ils croient que notre école nouvelle sera une école pour enfants riches. Il se peut que, tout comme dans nos classes normales, nous ayons un certain nombre d’élèves de la classe moyenne : nous ne penserions pas à créer une école nouvelle si nous ne voyions pas lu possibilité d’y accueillir une bonne proportion d’enfants de petits fonctionnaires ou d’ouvriers, selon des modalités à envisager.

***

Cette école libre ne serait pas forcément une école aristocratique ; elle ne sera pas une école aristocratique, mais une école ouvrière et paysanne. Il faudra certes qu’un niveau économique approprié soit réalisé comme base normale de la vie de notre école, car rien d’effectif ne peut être créé pédagogiquement si on ne combat pas d’abord la misère physiologique qui met dans une intériorité manifeste tant de fils de travailleurs.

Nous pouvons parvenir à ce but sans demander aux parents un prix de pension prohibitif. Nous pensons même accueillir gratuitement un certain nombre de fils d’ouvriers si les concours de tous ceux qu’intéresse cette expérience ne nous sont pas ménagés.

Dans cette école, il sera continué, dans les conditions matérielles à peu près normales, mais dans des conditions pédagogiques beaucoup plus favorables, les expériences que nous poursuivons depuis plusieurs années. Et cela, en collaboration constante avec les écoles de notre groupe. Les éducateurs pourraient d’ailleurs périodiquement, venir visiter leur école, y travailler même à contribuer pratiquement au développement de l'œuvre. Toutes questions à régler pratiquement quand nous serons vraiment à pied d’œuvre.

Nous voudrions, de plus, tenter une grande expérience qui, par-delà l’évolution de nos techniques, influencerait certainement toute la pédagogie : en matérialistes convaincus, nous voudrions récréer cette pédagogie, penser au corps avant de torturer les esprits, agir sur le milieu avant de vouloir façonner des individus ; mettre pratiquement les enfants dans des conditions physiques et économiques susceptibles d’améliorer et de libérer leurs corps; organiser ensuite leur vie de façon à conserver intact cet enthousiasme créateur dont nous avons fait un des pivots de notre pédagogie ; alimenter cet enthousiasme pour que nos élèves se saisissent vigoureusement de la civilisation ambiante et bâtissent ainsi leur pari d’avenir.

Préparer une école nouvelle ne signifie nullement que nous tournions aujourd'hui les yeux vers la bourgeoisie. Nous n’en avons jamais rien obtenu ni rien attendu et nous savons combien il faudrait nous prostituer pour passer à son service.

Notre école ne sera pas une affaire. Nous savons quelle importance spéciale il faut attacher à l’organisation matérielle et économique d’une œuvre semblable et nous nous y employons de notre mieux. Nous ne ferons pour cela aucun sacrifice au régime ni à la classe que nous combattons.

Nous ne voulons certes point créer une institution de pauvres et substituer à. la misère des taudis une misère de l'école. Nous accepterons tous les enfants dont les parents, connaissant nos buts, approuvent nos efforts. Nous ne renierons rien de nos principes pédagogiques, mais nous disons d’avance que nous entendons rester en plein cœur du mouvement pédagogique, que notre école nouvelle sera une école nouvelle prolétarienne ou elle ne sera pas.

***

Nous n’ignorons aucun des obstacles que nous pouvons rencontrer. Nous n’irions pas plus loin dans notre projet si nous n’espérions les surmonter.

A vous de populariser l'idée de cette école, de faire connaître ce projet, de nous donner l’adresse des personnes, des groupements qui s’y intéressent — et nous réussirons.

 

L'affaire Boyau

Octobre 1933

 

L'affaire Freinet

Octobre 1933

Malgré le désir que nous aurions de ne plus parler ici de celte affaire, nous croyons qu'il est de notre devoir d'apporter les derniers éléments qui jettent un jour nouveau sur ceux qui, au lieu d’être aux côtés de Freinet comme ils le devaient, se sont ingéniés à le trahir.

Le déplacement d'office, dont nous connaissons les raisons véritables, est motivé notamment par l’« agitation que, postérieurement aux événements d'avril, j'aurais tenté de maintenir dans le village ».

Les preuves ? Nous savions qu’il ne pouvait pas y en avoir. L'administration s'est servie pour parvenir à ses buts, d’accusations calomnieuses portées contre nous par le jeune suppléant, M. Causse.

Mais comment, pourquoi, ce M. Causse que nous nous étions appliqués à recevoir fraternellement à son arrivée à Saint-Paul a-l-il rempli ce triste rôle de calomniateur et de mouchard ?

Fin juillet, j’ai demandé aux deux Syndicats de l’Enseignement de venir faire à Saint-Paul une enquête commune pour faire justice de ces accusations. Une commission comprenant trois camarades de chaque syndicat s’est rendue à Saint-Paul, le 23 juillet dernier, a entendu les jeunes suppléants, Mme Freinet et moi-même.

Une révélation importante devait lui être faite. Je cite le compte-rendu de l’enquête :

« Par lettre, l’inspecteur primaire avait demandé à Causse de lui fournir chaque samedi un rapport détaillé sur :

La fréquentation scolaire ;

Les difficultés rencontrées :

La discipline ;

Les leçons particulières données par qui ? Où ? Comment ? Et quand ? »

Causse s’exécute et, approuvé par la directrice de l'école de filles qui est chargée, au 2° degré, de cette surveillance, il nous accuse formellement :

D’avoir poussé les élèves contre lui pour lui rendre impossible toute discipline ;

D'avoir excité les parents qui sont allés le prendre à partie :

D'avoir poussé les parents il faire faire grève à leurs enfants.

Aucune de ces accusations n'est fondée sur un semblant de preuve car elles sont de vulgaires calomnies. Je demande à l’Académie de venir enquêter sur ces faits. L’Académie refuse.

En attendant, voici, sous forme de motion adressée à l'I.A., au Préfet et au Ministre, les conclusions de la commission d'enquête :

« La Commission d'enquête comprenant des délégués des deux syndicats de l’Enseignement, après s'être rendue à Saint-Paul et avoir étudié impartialement les raisons invoquées par l’Administration pour motiver le déplacement d'office de Freinet, les juge non fondées et demande aux pouvoirs publics de revenir sur leur décision.

Elle déplore les procédés utilisés par l'Administration pour dresser des instituteurs les uns contre les autres pour le plus grand profit des adversaires de l’Ecole ».

Après cela nos camarades jugeront. Quand l'administration n’a pas d'arguments pour donner satisfaction aux réactionnaires ennemis de l’école, elle organise le mouchardage et, des renseignements obtenus elle se sert, sans en vérifier la valeur pour condamner un instituteur contre lequel elle n'avait pris aucune accusation sérieuse.

Si nous ne pouvons faire rendre justice, crions au moins notre dégoût en face de procédés qui déshonorent l'administration de l'Enseignement.

C. F.

P.S. — Je suis effectivement nommé à Bar-sur-Loup où j’ai fait classe un jour, le 29 juillet (mes anciens élèves, aujourd’hui dans la grande classe, ont, spontanément, cherché au fond des placards, notre vieux matériel d’imprimerie, reclassé les caractères et travaillé tout le jour à 4 ou 5 pour imprimer un texte que chaque élève emportait le soir. Triomphe normal et spontané de l’imprimerie à l’Ecole !)

A l’heure où j’écris ces lignes, je ne sais pas encore le sort exact qui me sera réservé, les déclarations ministérielles contredisant les actes de l’inspecteur d’Académie.

Quoi qu'il en soit la Coopérative continue à fonctionner normalement à Saint-Paul où doit être adressée toute la correspondance.

 

Assemblée Générale des 3 et 4 août 1933

Octobre 1933

 

Congrès de Reims

Octobre 1933

 

L'Imprimerie à l'école au congrès du S. N à Paris

Octobre 1933

 

Fichier Scolaire Coopératif

Octobre 1933

 

L'Imprimerie à l'école en Espagne

Octobre 1933

Il est assez curieux que, au moment même où, sous les criailleries intéressées de toute la meute réactionnaire, le Gouvernement français sévit contre Freinet et s’essaye à entreprendre une action de grande envergure contre l’imprimerie à l'Ecole, notre technique s’implante solidement dans les pays voisins.

Depuis de nombreuses années, nous avons en Espagne des camarades dévoués qui s’intéressent à notre technique. A Tours, en 1927, Manuel Cluet assistait en délégué officiel à notre Congrès de l’imprimerie à l’Ecole ; il retournait il Bordeaux l’an dernier et n'avait cessé pendant ce temps de faire en faveur de notre technique une ardente campagne.

Il y a deux ans, plusieurs instituteurs de la province de Lérida, encourages par un jeune, actif et sympathique Inspecteur, Herminio Almendros, se lancèrent avec enthousiasme dans l’Imprimerie à l’Ecole. Un professeur de l’Ecole Nationale de Barcelone, J. Sanz, ancien élève de l’Institut J.-J. Rousseau, les secondait avec dévouement. C’est grâce à H. Almendros et à J. Sanz que le groupe de Lérida fut, dès sa naissance, en relations suivies avec notre Coopérative. C’est à eux encore que je dois d’être allé parler de notre technique devant les quel-ques centaines d'instituteurs et d’institutrices qui participaient à l’Ecole d’Eté de Barcelone.

Nous ne dirons rien de ces conférences, sinon que notre technique y a soulevé l'enthousiasme des auditeurs et qu’elles ont été l'occasion de jeter définitivement les hases de la Coopérative espagnole d’imprimerie à I Ecole.

Dès le premier jour une réunion de 15 à 20 camarades travaillant à l'imprimerie ou se préparant à acquérir le matériel, permettait de discuter de l'organisation définitive de la Coopérative, de la fabrication du matériel, des conditions d’administration. Le groupe naissant décidait notamment de repousser l’offre d’un éditeur de Barcelone qui désirait lancer sur le marché pédagogique notre matériel d'imprimerie à l’Ecole.

Le lendemain soir, un simple avis à l’issue de ma première conférence, avait amené dans une salle de l’Ecole normale 150 éducateurs qui désiraient se familiariser avec nos réalisations.

Réunion encourageante et émouvante au plus haut point

Tour à tour, trois camarades travaillant à l’imprimerie — nos pionniers espagnols — vinrent, avec leur matériel en mains, raconter comment « l'imprimerie à l'Ecole » avait rénové leurs classes. Eux aussi vinrent dire la joie des enfants qui pouvaient enfin s’exprimer et fixer leurs pensées ; ils dirent l'enthousiasme de tous les collaborateurs de l'œuvre commune à la parution du premier journal, l’intérêt porté par les parents à leurs réalisations : ils montrèrent les beaux clichés réalisés et dont nous pourrions être fiers en France.

L’assistance était conquise parce qu'on sentait qu'il n’y avait là aucun verbiage, que ces expériences, chaque éducateur pouvait les faire à l’avenir dans sa classe puisque la Coopérative espagnole aujourd’hui en fonctionnement, et avec notre appui fraternel, fabrique son propre matériel et organise l’activité commune.

Notre technique est sûre maintenant de prospérer en Espagne parce qu’elle s’appuie sur une organisation qui peut compter sur des camarades enthousiastes et dévoués.

Selon nos conseils, un bulletin officiel de la Coopérative va être publié prochainement pour coordonner et stimuler les efforts des adhérents.

La richesse des documents obtenus à ce jour est telle que nos camarades préparent plusieurs opuscules, genre Enfantines, qui seront publiés en Espagne et dont nous donnerons la traduction. Une Gerbe verra peut-être le jour prochainement.

Si on pense que l’école espagnole, surtout l’école rurale, n'est pas muselée comme la nôtre par des programmes, des horaires et des examens et que les inspecteurs eux-mêmes, qui dépendent directement du pouvoir central, ont un rôle plus strictement pédagogique que nos inspecteurs français, on comprendra que le terrain soit propice à l’introduction et au développement rapide de notre technique.

Et quand je pense à cette soirée émouvante passée au sein du groupe Battek constitué par ces premiers adhérents de l’imprimerie, quand je ressens cette fraternité avec laquelle m'ont accueilli tous ceux que passionne cette rénovation scolaire, je me dis que notre technique peut fort bien, par-dessus les frontières, contribuer à l’effort commun de toutes les bonnes volontés prolétariennes.

 

Quelques réalisations intéressantes de notre Coopérative

Octobre 1933

 

Classement des fiches du F. S. C.

Octobre 1933

 

Matériel C.E.L.

Octobre 1933

 

Avec l'enfant, pour l'enfant

Octobre 1933

 

Dans les Ecoles Maternelles

Octobre 1933

Dès le début de notre expérience, nous avons attaché une importance particulière à l'usage de l'imprimerie à l'Ecole dans les classes maternelles; et grâce surtout à notre regrettée M.-L. Lagier-Bruno, de grands progrès furent laits dans ce sens il y a quatre ans. L'Histoire du petit chat qui ne veut pas mourir reste comme un exemple émouvant de ce que nous pourrions attendre de cette technique.

Le nombre des éducatrices maternelles n’a fait que croître dans notre groupe. Mais si toutes sentent la nécessité de profiter des efforts communs, rares sont les camarades qui osent vaincre leur regrettable timidité et apporter, sans prétention, mais fermement cependant, le résultat de leurs expériences.

Au cours de l’année écoulée, Lina Darche a heureusement redonné vie à cette rubrique et ses articles ont été extrêmement goûtés et appréciés par nos lecteurs.

Nous avons déjà dit que, à notre avis, ils ne répondent pas encore à la préoccupation essentielle de nos adhérents, et nous savons que Lina Darche a fait de son mieux pour enrichir encore la rubrique.

Nous ne demandons nullement la disparition d'articles comme ceux de Lina Darche. Au contraire, nous pourrons, s'il le faut, leur consacrer une place encore plus grande pour étudier au maximum le matériel et les techniques susceptibles d’aider l'évolution pédagogique des écoles maternelles. La Coopérative étudie même la réalisation et la mise en vente de matériel et jeux éducatifs pour maternelles.

Mais il faut absolument que nous étudiions cette année l’introduction de l’Imprimerie à l’Ecole dans tes classes maternelles et enfantines.

De plus en plus, les éducatrices à ces degrés s’intéressent à notre technique ; dans les congrès ce sont elles qui sont les plus curieuses et enthousiastes ; elles voient tout ce que la méthode globale, l’activité enfantine, la vie de la classe ont à gagner à l'emploi de notre matériel.

L'expérience a été tentée 20 à 30 fois déjà. Il faut absolument que nous fassions le point maintenant, que nous jetions les grandes lignes de la technique, que nous indiquions avec précision l’initiation, l’emploi, l'exploitation éducative de notre matériel, que nous en disions, courageusement et les avantages et les inconvénients.

Pour cela, il faut absolument que toutes les camarades travaillant dans les écoles maternelles et enfantines envoient à Lina Darche leurs réflexions, qu’elles indiquent comment elles procèdent, quels résultats elles obtiennent, comment l’imprimerie aide à lier l’école à la vie, aux centres d'intérêt, comment elle peut faciliter les acquisitions.

Pas de fausse pudeur ; ne gardez point pour vous ce que vous avez découvert, expérimenté. Joignons tous nos efforts de façon que, à l’avenir, toute nouvelle adhérente puisse bénéficier totalement de votre travail et, ainsi préparée et encouragée, puisse pousser toujours plus en avant sur la voie nouvelle la pédagogie maternelle.

Une atmosphère pour nos jardins d'enfants

Octobre 1933

 

Notre organisation, nos services

Octobre 1933

 

Impressions et réflexions de vacances

Octobre 1933

 

Office des correspondances scolaires internationales

Octobre 1933

 

Que pouvons-nous attendre du cinéma?

Octobre 1933

 

La radio - A propos d'un décret

Octobre 1933

 

Pédagogie du disque

Octobre 1933

 

Documentation internationale

Octobre 1933

 

Journaux et revues

Octobre 1933

 

Documentation Coopérative

Octobre 1933

 

Supplément à l'Educateur Prolétarien n°1

Octobre 1933