La vie de I'ICEM au cours de l'année et projets d'avenir

Mars 1964

A la veille de notre Congrès annuel je dois apporter ici, encore une fois, le rapport général de notre activité qui servira de base à nos discussions d’Annecy, et qui renseignera en même temps les nombreux camarades qui ne pourront pas être des nôtres au cours de ces grandes journées de travail et d'amitié.

 

Impression générale

Nous avons fait cette année un grand bond en avant.

1°. Au cours des dernières vacances d’été 14 stages avaient été organisés à travers la France, touchant un millier d'éducateurs qui nous sont désormais acquis et qui sont déjà incorporés dans nos divers circuits du travail coopératif.

2°. De ce fait le nombre de nos adhérents n’a fait que croître. Chaque jour des journaux scolaires nouveaux nous parviennent, qui témoignent tous de l’intérêt des enfants et de leurs maîtres.

3°. Les circulaires ministérielles organisant les classes de transition recommandent ouvertement nos techniques. Depuis, et devant la nécessité pour les organisateurs de préparer les maîtres, les CEMEA ont été chargés de la préparation des stages de formation. Après accord complet avec notre ami Laborde, Directeur des CEMEA, nous participons activement à l’encadrement de ces stages, en attendant que soient nombreux ceux des nôtres qui iront enseigner dans ces classes de transition.

Après les classes de perfectionnement voilà un rayon nouveau où pourra s’épanouir notre pédagogie.

4°. Au cours de ces derniers mois, la crise de l’Ecole est allée s’aggravant. De plus en plus parents, éducateurs et aussi administrateurs prennent conscience de l'impasse où ils se trouvent. Des réformes deviennent indispensables. Mais ces réformes ne se feront ni avec les méthodes, ni avec les maîtres traditionnels.

Alors on se tourne obligatoirement vers notre pédagogie parce qu’il n’y en a pas d’autre actuellement qui permette au moins un commencement de solution aux problèmes posés. On adopte officiellement nos mots d’ordre : 25 enfants par classe, amélioration de nos conditions de travail, fichiers, bandes programmées, etc...

Oh ! bien sûr, nous n’avons jamais pensé qu’on allait chanter les louanges de la Pédagogie Freinet. Ceux qui emboîtent aujourd'hui le pas crieront bientôt bien fort qu’ils sont à l’avant-garde, et l’on nous accusera parfois de timidité parce que nous émettons doutes et craintes sur la pratique de nos techniques par des éducateurs qui n'y sont pas préparés. A nous de veiller au grain en nous réjouissant d'un incontestable démarrage.

5°. Du coup, un certain nombre de revues se sont intéressées à notre pédagogie. La revue L'Education Nationale a publié quelques articles et informations sur nos techniques. Elle pourrait certes, être plus soucieuse d’information, ne serait-ce que lorsqu’elle publie un n° spécial sur la lecture où il n’est pas fait seulement mention de notre Méthode Naturelle de Lecture qui connaît actuellement un tel succès.

La revue L'Ecole et la Vie (Armand- Colin-Bourrelier) publie et publiera des articles qu'elle m’a demandés sur nos techniques. Le Manuel Général nous cite assez souvent.

Il n’y a qu'une revue qui nous restera indéfiniment fermée et c’est d’autant plus scandaleux, que cette revue L'Ecole Libératrice est œuvre et propriété des éducateurs syndiqués et que les nôtres — et ils sont aujourd’hui des dizaines de milliers — y ont nécessairement des droits.

J’avais préparé pour L'Educateur n° 10, une note dans laquelle je regrettais le silence obstiné de L'Ecole Libératrice (depuis, et à force d’interventions, la revue a publié une note à peine sympathique sur L'Enfant Artiste).

Au moment où je donnais la copie à la composition, Faligand me téléphone :

« Je suis en pourparlers avec Chevalier pour un arrangement avec l'Ecole Libératrice. Mais il demande que, en vue de ces pourparlers tu t'abstiennes de toute attaque contre le SNI et l’Ecole Libératrice. Fais encore un sacrifice me disait Faligand, si je ne parvenais pas à un résultat, nous verrons ».

De fait, Chevalier m’écrit pour me demander de lui envoyer un article sur les Machines à enseigner et les bandes programmées, article que je lui avais d’ailleurs offert auparavant. J'envoie aussitôt un article documentaire où je ne parlais qu'accidentellement de nos propres techniques. Attente et silence...

Après de nouveaux pourparlers, Faligand m'écrit :

« Ton article passera dans L’Ecole Libératrice du 13 mars ». Il m'envoie d’ailleurs la note Dialogue SNI-ICEM que vous pouvez relire dans L'Educateur du 1er mars, p. 19.

Satisfaits, nous décidons de profiter de cette parution pour donner à L'Ecole Libératrice une page de publicité le 6 mars, et une autre le 13 mars (au tarif de 4 000 F l'une).

Mais brusquement Faligand nous annonce que mon article ne passera pas... Chevalier s’étant dédit. Je demande aussitôt le retour de mon article que je ne veux pas voir utiliser en bouche-trou quelque part, et je tire l’échelle. Je laisse bien sûr les camarades et les groupes mener l’action comme ils l'entendront, au nom de leurs droits élémentaires de syndiqués. Pour ce qui me concerne j’ai trop fait d’offres et de propositions de collaboration et de solidarité laïque ; j'ai accepté trop de vexations ; j’ai eu même la naïveté de croire que les paroles que prononçait avec tant de véhémence, Allard, au Congrès de Caen ne pouvaient pas ne pas être suivies d'effet... (1)

Je lire l’échelle, en regrettant que le SNI compromette aussi ouvertement l’idée laïque qu’il serait de son devoir de défendre en s’engageant dans la voie d’un renouveau pédagogique.

A vrai dire, c’est seulement pour servir malgré tout la solidarité syndicale et l’esprit laïque, que je m'obstinais à formuler, toujours sans succès, des offres répétées de collaboration car nous n'avons que faire de l’appui d’une revue qui sert si mal ceux qui la font vivre. Nous nous sommes passés d’elle pendant 40 ans. Nous pouvons bien continuer. Il n’y a qu’un perdant dans l’affaire, c’est le SNI. Et c’est bien regrettable pour l’esprit laïque. Comme il n’y a qu'un perdant dans l’offre que nous avons faite à maintes reprises d'une coédition avec Sudel pour une édition BT qui aurait pu sauver Francs-Jeux. Car Francs-Jeux nous regarde. Nous en sommes co-fondateurs et avons versé pour cela à sa création une somme qui apparaîtrait aujourd’hui comme rondelette. Il est normal que nous nous préoccupions des raisons qui font que Francs-Jeux est la seule revue d’enfants qui, au lieu de croître et prospérer, perd chaque années des milliers d’abonnés (les bilans que nous avons reçus en font foi). Et c’est une mauvaise action de laisser ainsi mourir la seule revue d'enfants laïque qui aurait dû avoir comme diffuseurs et comme défenseurs 150 000 instituteurs.

Nous n’avons pour nous que les milliers d'adhérents de notre mouvement, et les annonces payantes que nous donnons à L'Ecole Libératrice ; et les BT poursuivent leur marche ascendante, sans l’aide d’aucune subvention pour les renflouer.

Avec de tels faits d’armes dans le domaine de l'édition, le SNI peut refuser l’aide généreuse de l’élite active des éducateurs de France.

6°. Autre élément favorable : Le cours par correspondance qui nous a permis de prendre vraiment contact, à même leurs soucis et leur classe, avec les débutants désireux de se perfectionner. Nous avons ainsi rodé une organisation que nous allons développer à une grande échelle au cours de l’année à venir, avec l’institution de parrains qui seront la grande masse de nos adhérents fidèles. Nous avons peut-être là la formule susceptible de pourvoir à ce recyclage des éducateurs qui est pour nous une question vitale.

En effet, nos stages, si importants soient-ils ne peuvent toucher chaque année que quelques centaines de jeunes. Malgré nos efforts ces jeunes ne s'abonnent pas spontanément à nos revues, et ne viennent qu'au compte-goutte à nos groupes. Par les cours par correspondance ce sont des milliers de nouveaux venus que nous pouvons mettre en selle pour qu’ils deviennent à leur tour instructeurs pour l’année à venir.

Et aucune initiative n'est mieux dans la ligne de notre esprit coopératif que cette action par la base pour promouvoir notre pédagogie.

7°. Groupes départementaux et régionaux et bulletins : Rien n’est plus réconfortant d'ailleurs que l’action menée en permanence pars nos groupes pour l’initiation et le perfectionnement des adhérents, dans un cadre coopératif qui n'a peut-être aucun équivalent en France.

Sans que nous intervenions du sommet pour susciter ou orienter, d’importantes réunions sont organisées un peu partout, toujours très suivies, en général dans les classes même ; des expositions de valeur sont devenues règle générale pour toutes les régions et sont toujours fort remarquées par les officiels et par la presse, des cahiers de roulement circulent dont on extrait ensuite l’essentiel pour nourrir les Bulletins départementaux et régionaux.

C’est surtout sur ces Bulletins régionaux que nous insisterons parce qu’ils sont à notre avis d’excellentes réussites.

Ils font vraiment le travail à la base que nous ne pouvons pas mener à ce stade initial dans nos revues nationales. C’est bien volontiers que nous citons ici, en une sorte de tableau d’honneur : le Bulletin du Groupe Parisien.

Il faudra que nous essayions de faire démarrer des Bulletins semblables : dans le Nord, dans le Sud-Est et le Sud-Ouest.

Nous pourrions peut-être réétudier une participation plus importante de Cannes pour la couverture et le squelette de ces Bulletins. Il faudrait que les camarades essayent d'analyser les raisons de leur immobilisme et y portent remède.

Il sera discuté de cela au cours de l'Assemblée générale ICEM qui précède le Congrès.

8°. Et c’est toujours le travail qui nous unit. C’est parce que nous avons donné cette année davantage de travail à nos groupes que cela va mieux à tous points de vue.

La sortie du livre d'Elise Freinet : L’Enfant Artiste a été cette année un événement. Il répondait par un hasard heureux au thème des Conférences Pédagogiques sur le dessin. De nombreux inspecteurs s’y sont intéressés, ce qui nous a valu des sympathies que nous tâchons de canaliser dans la commission des Inspecteurs. Nos camarades ont fait certainement tout leur possible pour assurer un succès sans précédent de cette édition (3500 ex. vendus à ce jour).

Du coup, l’Art Enfantin lui-même agrandit son audience. Il faut féliciter les camarades qui ont pris à cœur l’éducation artistique de la masse des instituteurs. Jeanne Vrillon aide à l’éclosion dans tout l’Ouest, de chefs-d'œuvre enfantins ; Le Gai Beaugrand, etc... font de même. Plusieurs départements prennent l'initiative des musées d'Art Enfantin à l'imitation de notre musée de Coursegoules toujours si admiré. Nous avons fait à Milan une exposition très remarquée. Une partie de nos plus belles productions prendra place, pendant le Congrès et sans doute après, dans la salle majestueuse du musée du Château d’Annecy, qui avait magnifié l’an dernier le Chant du Monde de jean Lurçat.

Peu à peu, le dessin et la peinture d’enfants pénètrent en triomphateurs dans nos écoles. On ne parle déjà plus des peintures d’enfants comme il y a dix ans. L'obstination d'EIise Freinet et du large noyau de camarades qui l’ont aidée a, dans ce domaine aussi, modifié d’une manière irréversible l’atmosphère de nos classes et l'attitude des éducateurs en face du dessin enfantin et familiarisé l'idée d’une éducation artistique naturelle et culturelle.

9°. La genèse des chevaux : Cette genèse a été particulièrement réussie. Du coup, nombreux sont les instituteurs qui nous envoient les dessins pour les genèses qui suivront : les vaches et les bœufs, les fleurs et le soleil.

10°. Les Boites et bandes enseignantes : Nous n’avons pas voulu en commencer le lancement avant d’avoir les premières bandes à offrir aux acheteurs de boîtes.

Nous pouvons maintenant annoncer pour la rentrée prochaine :

— le cours complet de calcul (CP, CE, CM et FE);

— un cours programmé de français en 60 bandes ;

— des bandes d'histoire et de sciences.

Le chantier est ouvert. II est emballant. Nous en discuterons longuement au Congrès puisque la troisième séance plénière lui sera consacrée. Les bandes enseignantes sont appelées à transformer très rapidement tout notre enseignement.

C’est la masse de nos adhérents que nous toucherons dès avril pour que la prochaine année voit le succès de cette technique exceptionnelle.

Ne manquez pas, dès maintenant de commander les Boîtes et les Bandes dont vous avez besoin. Versez à la CEL la souscription de 50 F pour l'édition de bandes programmées.

Là aussi ce sont des milliers de camarades qu’il nous faut, non seulement comme souscripteurs et clients mais surtout comme ouvriers de notre chantier coopératif.

11°. Les manuels Ecole Moderne de Lecture : Ils nous ont valu de très nombreuses lettres et envois et nous regrettons de décevoir peut-être toutes ces bonnes volontés.

Quand en août à Vence j’avais lancé l'idée d’un Manuel Ecole Moderne de Lecture, j'envisageais l’édition d’un livre pour les petits (CP et CE), un livre pour les grands (CM et FE) devant suivre.

Mais les camarades me disent qu'aujourd’hui, presque partout, les classes sont homogènes et qu'une classe CP n'achètera pas un manuel comportant des pages CE, et inversement. On me dit aussi qu’il ne faut absolument pas prévoir d’exercices de chasse aux mots ou de grammaire comme nous l’avons suggéré, mais qu’il suffit d'en faire un livre de lectures de textes d'enfants.

Mais de tels manuels ne seront guère valables que dans les classes de villes, et nous sommes actuellement mal organisés commercialement pour vendre nos productions dans ces classes.

Du coup, étant données surtout les conditions toujours délicates de la CEL, nous ne pouvons pas actuellement courir le risque important d'une telle édition.

Il nous serait par contre possible d’éditer pour la rentrée un ou deux livrets de 50 ou 60 pages, genre des dernières Gerbes, qu’il nous serait facile de mettre au point. Mais nous voudrions savoir si de tels livres sont susceptibles d'intéresser les camarades et s'ils en seraient acheteurs.

C'est au Congrès que nous discuterons de tout cela, mais dès maintenant, vous pouvez me donner votre avis.

12°. La campagne BT

Nous possédons une grande richesse pédagogique, une encyclopédie de près de 600 brochures, spécialement écrites et réalisées pour les enfants par des éducateurs, 600 thèmes de travail, la réponse intelligente à toutes les questions que peuvent se poser enfants et éducateurs.

Nous avons fait de très grosses dépenses pour assurer la réédition de 200 brochures épuisées. Mais cette richesse se réalise à un rythme commercial beaucoup trop lent. Elle nous est de ce fait plus souvent une charge qu'un bienfait.

Nous avons 2 000 collections à vendre. Elles nous vaudraient une fortune qui nous permettrait d'entreprendre de belles choses au service de l'Ecole et de ses maîtres.

Il serait superflu de nous adresser ici à nos adhérents qui possèdent depuis longtemps cette collection. Mais nous faisons appel à eux pour qu’ils nous aident à faire connaître à la masse des instituteurs un outil de première valeur, l’encyclopédie qui devrait se trouver désormais dans toutes les classes.

Participez à la campagne de propagande en cours. Faites acheter les BT. C’est la meilleure façon de nous aider.

La situation internationale de notre mouvement (FIMEM)

Nous n'en parlons qu’accidentellement et nous avons tort. Nous essaierons de mieux intégrer l’an prochain notre mouvement français à l’action internationale pour nos techniques.

Nos meilleurs collaborateurs sont évidemment l’Italie, Aoste, la Suisse, la Belgique et l'Allemagne où nous avons partout des filiales bien organisées. Aoste devient de plus en plus notre point d'appui en Italie, avec le Bureau qui assurera la liaison avec les régions actives de Milan et Turin. Nous aurons au Congrès une forte délégation italienne. Les Suisses n'auront qu’à traverser le lac pour nous rejoindre et c'est d’ailleurs une Vaudoise Madeleine Guérard, qui assurera les démonstrations de maternelles à Annecy.

Notre mouvement se développe favorablement dans l’Allemagne fédérale qui aura de nombreux représentants à Annecy. Il faudra que nous essayions de mieux grouper les adhérents trop dispersés dans des Länder qui ont chacun des administrateurs différents.

La Belgique est tout particulièrement active et sa revue L'Education Populaire est du plus haut intérêt. Il nous faudrait établir de meilleures relations avec les départements français limitrophes.

Nous aurons des délégués yougoslaves, polonais et de la RDA. Voilà, sauf nouvelles complémentaires, la physionomie de notre mouvement en Europe.

Bon départ avec le Bureau Panafricain organisé par le Congrès d’Oran à Noël. Nous aurons des délégués tunisiens, algériens, marocains. Nos adhérents d’Afrique Noire sont très actifs et, malgré l’obstacle des distances nous pensons parvenir bientôt à la coordination de toutes les bonnes volontés.

A la suite du Congrès d'Oran, M. Victor Andrianasy, Directeur du Premier degré à Madagascar a fait quelques semaines de stage à l’Ecole Freinet. Nous y avons préparé ce qui sera la première grande expérience d’enseignement en pays en voie de développement par le texte libre et les bandes.

Deux délégués turcs seront présents.

Parmi les pays d’Outre-Atlantique, notre principal point d’appui reste le Canada où M""' Noël a mené la meilleure des propagandes par l’exemple de son école au travail. La distance rend difficile aussi la coordination de notre action dans toute l'Amérique latine.

L'Ecole Moderne internationale, si elle veut être efficace, ne saurait être organisée du sommet, sur le papier. Elle ne peut être que la conjonction fraternelle des individus, des équipes et des groupes conscients des possibilités et de l’avenir de notre pédagogie. Il appartient aux divers pays de s'organiser sur la base de leur propre travail. Nous ne pouvons guère que les aider à coordonner leur activité.

Nous allons, au Congrès, étudier la constitution et l’action dans le cadre de la FIMEM :

— du Bureau Français existant pour la France, la Belgique, la Suisse et le Luxembourg ;

— du Bureau International d'Aoste déjà existant avec surtout comme rayon d'action : Aoste, l’Italie, la Yougoslavie ;

— du Bureau Allemand (à organiser) : Allemagne fédérale, RDA, Hollande, Autriche, Hongrie et pays de l'est ;

— du Bureau Panafricain déjà existant ;

— d’un Bureau d’Amérique latine (à constituer).

Nous étudierons alors la possibilité de mieux assurer les liaisons de recherche et de travail indispensables.

Nos périodiques et nos éditions

Comme toujours, ce seront nos périodiques et nos éditions qui seront l’objet de tous nos soins. Nous sommes tous dispersés à travers les territoires et dans la presque impossibilité de nous retrouver en cours d'année, sauf dans les stages et les Congrès. Nos publications sont l'indispensable liaison, les artères qui font circuler à travers les milliers de nos adhérents, le sang vivant qui nous unit.

Ces moyens de liaison, nous avons à les reconsidérer chaque année pour qu'ils répondent au mieux à nos besoins communs qui varient avec la fluctuation incessante de nos adhérents, l’arrivée permanente d’éléments nouveaux, les conjonctures administratives et sociales plus ou moins favorables, les fonds aussi dont nous disposons.

Qu’elles nous soient agréables ou non, un certain nombre de constatations s’imposent dont nous aurons à tenir compte dans nos décisions :

— les instituteurs, comme le public en général, lisent de moins en moins. La TV et l'auto sont pour nous des concurrents mortels. L’avalanche de périodiques en est un autre.

Je crois que nous avons avantage à concentrer et à réduire notre littérature pédagogique.

— Par la loi Barangé les communes ont la responsabilité des achats pour les écoles et même de certains abonnements. En tous cas, les instituteurs perdent de plus en plus l’habitude de subvenir eux-mêmes à certaines dépenses pédagogiques. Nous ne disons pas que c’est forcément un mal. Nous constatons seulement que cela explique la difficulté que nous avons à équilibrer nos revues accessoires : l'Art Enfantin, La Gerbe, Techniques de Vie, qu’on trouve intéressantes mais auxquelles on ne s’abonne pas assez pour les faire vivre.

Il résulte de ces considérations que :

— Nous conserverions l’ Art Enfantin, réalisation hors série qui magnifie les plus belles productions de notre Pédagogie.

— Nous donnerons un autre destin à La Gerbe (voir ci-dessous) qui ne peut pas vivre sous la forme actuelle. Tous nos essais de Gerbe ont tous échoué faute de réunir le nombre minimum d’abonnés.

— Après bien des hésitations, nous supprimons Techniques de Vie.

Nous avions créé cette revue dans l’espoir qu’elle pourrait être le lien de rencontre de notre pédagogie et des idées voisines telles qu'elles sont exprimées par les intellectuels sensibilisés aux recommandations pédagogiques en cours.

Hélas ! après un démarrage prometteur, les collaborations sont allées s’amenuisant. Nous sommes seuls actuellement, nous primaires, pour poursuivre les études envisagées.

Dans le même temps nous avons constaté avec regret que nos adhérents rechignaient trop souvent à la lecture d’articles abstraits et qu’ils considéraient en conséquence que Techniques de Vie n’était pas écrit pour eux. C’est pourquoi le nombre de nos abonnés n’a jamais atteint le plafond qui nous aurait permis de vivre.

Nous le regrettons, mais c'est un fait. Et nous aurions tort de n’être pas sensibles à ces enseignements.

Nous n’abandonnerons cependant pas les études dont, avec nos divers collaborateurs, nous avons essayé de nourrir la revue. Ces articles trouveront place avec une meilleure audience, dans notre magazine L'Educateur, dont nous continuerons à faire le service à nos amis I.P. et professeurs intéressés.

— Le rajeunissement incessant de nos effectifs nous pose sans cesse de graves problèmes :

— Nos vieux camarades, fondateurs et soutiens de nos associations, nous quittent un à un pour la retraite. Eux, les initiateurs du mouvement, nous demandaient une certaine littérature qu'il nous faut partiellement reconsidérer quand nous nous adressons aux vagues de nouveaux venus. Il y a notamment un problème très grave qu’il nous faudra essayer de régler. Nous vendons chaque année des centaines de matériels d’imprimerie à des éducateurs, souvent anonymes pour nous, les commandes passant souvent par les libraires et par les Mairies. Or, ces acheteurs, nous ne parvenons pas à les raccrocher. Nous les perdons au moins à 60%.

Je me demande si nous ne devrions pas créer une Gerbe bon marché, de 4 à 5 F qui serait servie à tous les nouveaux venus, même s’ils n’ont aucun autre abonnement et qui seraient entre eux et nous le premier et indispensable trait d’union. Nous raccrocherions peut-être à cette Gerbe l’action que nous allons mener pour les Cours par correspondance parrainés.

Cette Gerbe ne ressemblerait en rien à celle que nous nous évertuons de sortir et qui ne parvient pas à trouver un public. Il faut nous orienter vers d’autres formes de relations, non seulement entre les anciens que nous ne voulons pas oublier, mais aussi avec les nouveaux qui sont malgré tout l’avenir.

Nous proposons donc pour nos éditions la formule suivante :

1°. Pour les maîtres un magazine mensuel L'Educateur, paraissant le 1er du mois, enrichi et amélioré, avec études de tout ce qui touche de près ou de loin à nos techniques. Psychologie et Pédagogie. Les méthodes pédagogiques. Les journaux scolaires avec citations et reproductions de quelques belles œuvres (textes et poèmes). Livres et Revues, etc... Le tout illustré et de lecture facile.

Son Supplément mensuel technologique paraissant le 15 du mois avec l’étude des outils et des techniques, fiches et bandes.

Le tout à 20 F d’abonnement (nous aurons une édition CEG de ce supplément).

2°. Pour la classe :

Un magazine pour enfants, les BT : Les fortes augmentations intervenues nous obligeraient à majorer d'au moins 20 à 30% le prix de l’abonnement à cette revue — ce qui risquerait de nous faire perdre des abonnés.

D’autre part, la liste de nos BT est aujourd'hui suffisamment copieuse. Nous allons donc sortir 20 BT par an au lieu de 30, mais nous en ferons un beau magazine bien illustré en couleurs, avec un nombre de pages accru, qui pourra soutenir la concurrence avec les meilleurs magazines actuellement édités.

(Un prototype paraîtra en fin d’année).

Le prix restera inchangé : 35 F par an.

Un supplément BT pour les maîtres, continuant la collection en cours, embellie et enrichie, à raison de 30 nos par an : 20 F par an.

3°. Une revue artistique: l'Art Enfantin que nous devons continuer en augmentant légèrement le prix : 6 nos 20 F (à cause des augmentations d’impression).

4°. Editions spéciales qui ne sont pas de grande masse, mais pour lesquelles nous invitons tous nos camarades à s'abonner.

a) Gerbe de travail, réservée à ceux de nos adhérents qui veulent perfectionner leurs techniques (textes d’enfants, cours par correspondance, etc...)

Nous en préciserons mieux le contenu.

b) Bibliothèque de l’Ecole Moderne.

Souscription annuelle : 10 F.

c) BT sonore: 5 nos par an: 75 F.

Nous discuterons de tout cela à Annecy. Mais nous serions heureux de recevoir dès maintenant l’opinion de ceux de nos camarades qui ne peuvent assister au Congrès.

C. F.

 

(1) Voir la note de Faligand dans ce numéro page 43.