Atelier : L'école du 3ème type

 

 

 

L'école du 3ème type est un terme inventé par B. Collot (des livres écrits par lui tournent dans l'atelier, possibilité de commander chez Odilon).
 
Philippe Ruelen, depuis 3 ans dans une classe unique. Avant, 5 ou 6 ans avec un bilan très positif dans des classes multi-âges. Aujourd'hui, pour lui, c'est un préalable à l'orientation vers le 3ème type. Le deuxième préalable est l'espace, le 3ème type réclame 20 m² par enfant.
C'est difficile de dire ce qu'il y a derrière le 3ème type. Les choses les plus importantes : le fonctionnement de classe est réinterrogé en permanence (ne s'accrocher à aucun outil), si possible avec les parents (mise en place d'un projet éducatif commun. Il est difficile de réinterroger le fonctionnement avec eux sans donner l'impression qu'on ne sait pas où on va), une recherche constante que les enfants aient de plus en plus envie de s'investir dans les activités et que les enfants soient de plus en plus indépendants vis-à-vis du professeur.
Nicolas Rochard, plusieurs années en pédagogies actives, change à la lecture des livres de B. Collot. Depuis deux ans, s'appuie surtout sur les pratiques de Philippe car les principes de B. Collot sont difficiles à mettre en œuvre. Philippe ajoute qu'un des écueils à éviter est d'aller trop vite ou de vouloir appliquer un modèle de fonctionnement de soi. Il faut partir de soi.
Lecture de la page de présentation de l'école du 3ème type (version de Philippe Ruelen).Une plénière 3ème type a été faite au congrès de Nice avec Philippe Lamy. Une vidéo de la classe de Philippe avait été diffusée et avait créé un débat : « c'est du n'importe quoi », « ce n'est que de la pédagogie Freinet », « quel est le rôle de l'enseignant ».
L'enseignant a une position de retrait mais ne fait pas rien. Les activités doivent venir des enfants. Exemple de Dorian qui oublie de sonner la fin de la récréation. Philippe le lui fait remarquer. Il réagit en disant qu’il ne sait pas lire l’heure. Philippe ne lui propose pas d’apprendre à lire l’heure, mais le provoquera à une récréation suivante : « Pourquoi as-tu pris ce métier ? Laisse le à quelqu’un d’autre, inscris toi à la réunion. ». Dorian s’est effectivement inscrit pour avoir la parole à une réunion suivante, mais n’a pas demandé à changer de métier, ce dont Philippe se doutait bien. « Qui veut bien m’apprendre à lire l’heure ? ». Dorian aurait pu évidemment demander directement l’aide à Philippe. Il a préféré faire appel au groupe.  A partir de là, ce n'est plus le problème de Philippe. L’enfant a enclenché son apprentissage. La semaine suivante, Philippe ne contrôlera même pas où Dorian en est dans son apprentissage. Il sait qu’il connaîtra l’heure.
Que fait l'enseignant ? Il aménage le temps et l'espace des enfants, il observe et écoute, il intervient auprès de chaque enfant (une non-intervention consciente est une intervention), il ne s'interdit rien (accompagner, encourager, conseiller, proposer, inciter, imposer).
Il fait une réunion quotidienne. Les activités obligatoires tendent à disparaître au fur et à mesure de la pratique. Dans les classes de Philippe et Nicolas, les activités obligatoires sont lire, écrire et mathématiser. Lire, c'est lire pour présenter. La lecture plaisir n'en fait pas partie. L'écrire correspond aux textes libres ou aux fiches autocorrectives. Mathématiser, c'est une fiche de numération ou une création ou une recherche mathématique. Les activités obligatoires sont faites le matin en arrivant sauf pour ceux qui veulent le faire plus tard, ce qui se règle en réunion.L'enseignant ne force pas l'enfant à participer, il lui laisse le temps de maturation, même si ça doit prendre plusieurs années.
Travailler avec les parents nécessite de mettre de côté les valeurs (coopération, solidarité, responsabilité...), notamment pour écouter et comprendre les parents, la municipalité qui n'ont pas du tout ces valeurs, ces attentes. C'est dans ce contexte que Philippe a monté un projet éducatif avec les parents et la mairie pour éviter la fermeture de la classe unique. Il a donc fait des réunions en demandant, comme point de départ, aux parents quelle était leur vision de l'école, de l'éducation... Il a pu construire ainsi une unité de la communauté éducative pour un projet défendable auprès de l'inspection. Le projet a été validé par les parents, puis le conseil municipal. Il peut aujourd'hui s'appuyer sur le projet éducatif pour valider ou expliquer ce qu'il met en place en classe. Le projet pédagogique de Philippe doit désormais être en adéquation, en phase avec le projet éducatif.
Le projet éducatif de Philippe repose sur quatre points.
· Que les enfants développent des capacités à réfléchir, à chercher, à s'intéresser, à comprendre, leur permettant l’acquisition du socle commun.
· Que les enfants aient envie de venir à l'école, de prendre des initiatives, de comprendre et de mener des projets personnels qui entraîneront des apprentissages, qui les responsabiliseront et qui développeront leur autonomie.
· Que les enfants fassent, de plus en plus, des activités dans lesquelles ils ont envie de s'investir.
· Que chacun se sente en confiance, puisse être reconnu à la fois en tant qu'individu et en tant que membre d'un groupe :que les différences soient respectées, que les intérêts et les aptitudes de chacun deviennent source de richesses et d'échanges.
Un des moyens pour remplir ces objectifs est l'organisation de réunions mensuelles avec les parents, sans forcément d'objectifs. Le fonctionnement de la classe est discuté et réinterrogé, critiqué. La critique ne doit mettre en cause les personnes.
Il faut bien rappeler que nous sommes fonctionnaires, dépositaires de l'obligation de faire apprendre le contenu des programmes aux enfants, lors de l'élaboration du projet éducatif avec les parents.
Questions(prise de notes)
 
1. Comment démarrer ?
Pour Philippe, « Vive les instits », émission diffusée en 1995, montrait B. Collot à Moussac. A travaillé sur les arbres de connaissances, Marelle, … mais la mise en place a été difficile pendant 5 ans. 8 ans supplémentaires avant d'être serein. A utilisé la PI, PMEV… Nicolas a commencé par la PMEV et satisfait. Beaucoup travaillé, organisé, produit … Aujourd'hui travaille beaucoup moins, les problèmes se résolvent plus facilement en 3ème type. Mais très embêté par la hiérarchie. Est peut être allé trop vite : espace, ateliers permanents, réunion, …
Conclusion : installer des plages d'activités personnelles (choix d'activité), commencer une heure par semaine, puis une heure par jour.
 
2.Que font les maternelles pendant la réunion ?
Chez Philippe la réunion dure ½ heure à ¾ d’heure. L'ATSEM part au milieu de la réunion au moment on formalise le tableau de bord de la classe. Ils participent aux rituels (connaître le nombre d’absent puis les identifier après avoir compté les présents), et au moment où les inscrits sur la feuille d’ordre du jour auront la parole. Les petits, timides, passent par l'ATSEM. Philippe espère que sur les années, les petits vont prendre la parole de plus en plus tôt.
 
3.Pendant un temps collectif (magistral, conférence..) qui n’est donc pas obligatoire, que font les autres ?
Ces temps collectifs proposés par l’instit, un parent, le médecin scolaire … sont facultatifs. Ce sont donc des activités supplémentaires possibles. Ceux qui n’y vont pas continuent leur journée comme lorsqu’il n’y a pas de temps collectif proposé.
 
4.Est-ce que la réunion est obligatoire ?
Actuellement, la question ne s’est pas posée dans la classe unique de Philippe. Dans sa classe précédente, elle a été parfois obligatoire, limitée dans le temps. Elle a été à d’autres moments facultative, et même parfois non-limitée dans la durée. Ça se discute en réunion avec les enfants, et dépend du contexte.
 
 5.Comment évaluer les enfants dans leur travail personnel ? Que fait-on par rapport au programme ?
Laisser les enfants choisir leur activité est antinomique avec l'application transmissive du programme. Les compétences du programme sont des langues, des codes à développer chez l'enfant. En 3ème type, c'est la construction du langage qui est importante : c'est à dire la construction de ce qui va lui permettre de comprendre la langue (mathématique, historique…).
Le tableau de bord ne sert qu'à inciter l'enfant à passer dans tous les ateliers (histoire, géographie, mathématiques, lecture, écriture, codage…). Il ne permet pas de le situer par rapport aux apprentissages, ni aux programmes.Dans l'école de B. Collot, il n'y avait plus d'évaluations, plus de programmes, et les enfants réussissaient comme les autres au collège.Philippe fait passer les évaluations nationales trois fois dans l'année. Ce sont ces évaluations et leurs corrections personnalisées qui font le lien avec le programme. Cela s’effectue 3 jours sur 4 entre 13h30 et 14h10. Les évaluations permettent de nommer certaines notions (préfixe, parallèle, …) à l’enfant qui a le niveau de langage (maturation du cerveau) lui permettant de les intégrer instantanément mais dont il ne connaît pas le vocabulaire. Ca permet aussi de travailler des notions qui ne sont pas forcément travaillées lors des projets ou des ateliers (grammaire, technique opératoire,…) et de les orienter pendant ce temps-là vers une activité dédiée.
Lorsque le niveau de langage ne permet pas l’appropriation de la notion (appréciation de Philippe), l’exercice n’est pas corrigé. Les évaluations passées correspondent aux évaluations nationales CM2 et CE1 pour tous les enfants du CP au CM2.
 
6.Que faire des enfants en difficulté ?
Tu as du temps pour eux justement, puisque les autres sont autonomes. Le fait que les autres soient autonomes permet d'intervenir si besoin A partir du moment où l'enfant initie son questionnement, enclenche l’activité, l’enfant ne se bloque pas. Il n’y a plus de raison d’avoir des enfants « bloqués »..
 
7.Quelle est la position de l'institution par rapport aux classes uniques ?
L'étude de Dijon met à mal l'étude de Françoise Oeuvrard, mais ils n'ont comparé que des classes à 1 ou 2 niveaux. Les classes multi-âge ont de meilleurs résultats ; l’étude de Françoise Oeuvrard n’a jamais été démentie.
 
8.Quelle relation avec les parents ?
Etablir une relation avec les parents se fait dans la durée. Cela paraît inconcevable avec des classes à un ou deux niveaux. Il ne faut pas poser de principes, de valeurs. Si tous les parents réclament une dictée par exemple, on a intérêt à le faire.
Mais il faut surtout définir avec eux la problématique : « Comment améliorer les performances en orthographe ? ». Si tous les parents veulent une dictée, on a tout intérêt à la mettre en place mais après avoir défini avec eux la problématique. Ainsi, il sera possible d’évaluer les effets (directs et indirects) ensemble (et oui ! puisqu’ils deviennent eux-aussi impliqués !). L’identification de problématiques permet de sortir des enjeux affectifs, c'est à dire que les parents ne doivent pas se dire que l'enseignant est faible et se plie à leurs desiderata. Il s'agit plutôt d'extraire la problématique sous-jacente à la demande des parents, et de les inclure de manière professionnelle afin d’éviter les « guerres » d’opposition.
Le problème c'est que devant les parents, on ne montre alors pas de certitude. C'est pourquoi il est important d’avoir de bonnes relations avec les parents, ne pas être proche (par exemple ne pas habiter le village où on enseigne) et rester le professionnel référent.
9.Que sont les ateliers permanents ?
les piliers de la pédagogie du 3ème type ?
 
L'un des piliers du 3ème type est la réunion quotidienne. Un autre pilier : les ateliers permanents. Ca peut être un coin aménagé avec du matériel, des outils (de mesure, de numération, d'histoire) pour venir les utiliser n'importe quand dans la journée. Mais ça peut être aussi disséminé dans la classe ou immatériel. Ce qui est important, c’est que l’atelier offre des possibilités de faire. L’enfant peut y laisser une trace, l'inscrire dans l'arbre des connaissances de la classe, pour inciter les autres à venir refaire ou enrichir. Le choix des outils disponibles à l'atelier est important.
« Il faut avoir une infinité de provocations d'apprendre ».