Du travail sur la planche

Juin 1961

Maintenant que les travaux du Congrès sont provisoirement terminés, nous voudrions apporter notre point de vue actif sur un certain nombre de problèmes qui nous paraissent de toute première urgence.

D'importantes transformations sont en cours, non seulement dans la structure de notre système éducatif mais aussi — ce qui en est dans une certaine mesure la conséquence — dans la conception elle- même de notre enseignement.

Nous regretterions que ces transformations se fassent en fonction du passé, de ce qui existe, plus ou moins valable, et non en fonction du proche et du lointain avenir.

Les options d'aujourd'hui peuvent avoir une portée décisive sur l'avenir de notre éducation.

Nous ne dirons rien de particulier sur le cadre nouveau qui est en train de se dessiner pour l’organisation, disons technique, de l'Université française et qui s'inscrit dans une poussée irréversible de la démocratisation :

Un enseignement maternel et un premier degré pour tous les enfants jusqu’à onze ans.

A ce niveau, tous les enfants qui ont des possibilités spéciales pour les études abstraites entreront au second degré ou aux Collèges d’Enseignement Général. Les autres poursuivront au premier degré jusqu’au C.E.P.E., pour aller ensuite dans les Centres d’apprentissage divers,

Mais c’est à ce niveau que la situation est dramatique, et pour plusieurs raisons.

C'est une minorité seulement qui, à onze ans, pourra pénétrer au 2e degré. Une partie d’entre eux seront même refoulés dès les premières années comme inaptes à poursuivre dans cette voie.

Or, dans l'état actuel des choses, ce second degré reste — reliquat du passé — un enseignement noble, auquel tous les parents voudraient voir accéder leurs enfants. L’échec, ou le retard, pour entrer en 6e, constitue pour ta grande masse des enfants — et des parents aussi — une première désillusion.

Cette désillusion sera encore aggravée lorsque l'enfant muni du C.E.P.E. devra choisir, trop tard, un Centre d'apprentissage où les éléments de culture sont insuffisants. La situation sera dramatique pour les candidats qui échoueront au C.E.P.E. et ne peuvent pas même de ce fait, trouver une place dans un quelconque établissement. On parle, pour eux, d'ouvrir des classes terminales qui les accompagneraient jusqu’à seize ans. Mais que sera l'enseignement dans ces classes ?

Aggravera-t-il les échecs de ceux qui n'ont pu affronter le C.E.P.E. ? ou bien trouvera-t-on une forme nouvelle d'école et de travail susceptible de rattraper et de remettre à flots ces laissés pour compte ?

Les C.E.G. et le 2e degré peuvent faire illusion en pliant les élèves à des disciplines excessives, en cultivant exagérément la mémorisation et l'acquisition des connaissances, en préparant à des examens qui sont les nécessaires portes d'accès pour les diverses options, L'illusion ne sera pas possible avec la masse des enfants qui n’ont pas la bosse intellectuelle. Les méthodes actuelles, que nous disons traditionnelles, ont contribué à les acculer à cette impasse. Il y faut une autre pédagogie, d'autres outils de travail, d’autres techniques. Nous sommes prêts à les offrir et nous savons qu'elles seront efficaces.

Quiconque raisonne avec quelque sagesse comprend aujourd'hui cette nécessité. Les circulaires ministérielles préconisent les travaux expérimentaux ; les professeurs du second degré condamnent les manuels, les leçons magistrales et l'aspect encyclopédique des examens. Théoriquement, l'accord serait presque unanime, et c'est un point d'acquis dont nous pouvons nous féliciter.

Mais la grande machine scolastique rechigne à se moderniser, les manuels scolaires rapportent trop à leurs auteurs et à leurs éditeurs pour faire hara-kiri, surtout au moment où une circulaire inattendue préconise le par cœur. Alors, il nous faut patiemment prendre le travail par la base, initier et rééduquer au cours des visites d'écoles et des stages, montrer que cette forme nouvelle d’école est possible, qu’elle est réalisée à des milliers d'exemplaires et que donc, un jour prochain l'Ecole Moderne sera la réalité dans toutes les classes de France. 

LE RAPPORT DE JEANNE LORDON SUR LES CONDITIONS DE TRAVAIL DANS L'ENSEIGNEMENT DU PREMIER DEGRÉ

Ce rapport, présenté au Conseil national de Pâques 19G1 du S.N.I., vient d’être édité en brochure.

Il est certes excellent de mettre ainsi noir sur blanc, avec une documentation sûre, la situation, en bien des points catastrophique, de notre enseignement. Et nous nous réjouissons que divers mots d’ordre que nous avons lancés en un temps où on les jugeait utopiques soient maintenant inscrits dans le chapitre des revendications syndicales :

« Réduire progressivement l'effectif des classes pour arriver à 25 enfants pour les classes normales et 15 élèves par classe dans l'enseignement spécial ;

« Fonctionnement cohérent et harmonieux de l’unité pédagogique comprenant : cinq classes élémentaires accueillant au maximum 25 élèves correspondant aux diverses étapes de la scolarité élémentaire normale, complétées obligatoirement par une classe de perfectionnement recevant au maximum 15 élèves ».

Ce rapport dit aussi la nécessité de veiller à la construction, à l'aération, à l’insonorisation, au revêtement, à l'ameublement des classes nouvelles, toutes questions qui ne peuvent être débattues rationnellement et utilement qu'en collaboration avec les techniciens qui, hors de l'Ecole, sont chargés de la construction et l’aménagement des écoles. C'est pour l'étude de ces problèmes que nous avons créé notre Association pour la Modernisation de l'Enseignement, que le S.N.I. a si soigneusement boycottée l'an dernier.

Ce que nous reprocherons tout spécialement à ce rapport, c’est de ne présenter aucune réalisation pratique susceptible d'encourager les maîtres à mener la bataille. Le S.N.I. en est encore à l'Ecole Idéale, sous- entendu qui ne peut pas être réalisée, ce qui incite les instituteurs à ne rien changer à leurs pratiques en attendant que soit réalisée cette école idéale.

Le S.N.I., et Jeanne Lordon (qui avait promis de présenter au moins notre questionnaire sur l'Education A la Croisée des Chemins), se croiraient-ils déshonorés s'ils citaient quelques-unes des réalisations effectives des milliers d’instituteurs syndiqués qui s'efforcent à promouvoir dans leurs classes une portion de cette école idéale ? L'Ecole laïque ne devrait-elle pas se glorifier au contraire du travail d’avant-garde de ses meilleurs ouvriers ?

Parmi les remèdes proposés à la désadaptation de tant d'écoles, Jeanne Lordon inscrit; «D'abord, une conception nouvelle de la vie de l'Ecole ».

C'est tout. Mais que sera cette conception nouvelle ? La trouvera-t-on dans L'Ecole Libératrice ? En a-t-on jeté les bases ailleurs ?

Nous ne réclamons pas de L'Ecole Libératrice qu'elle cite nos noms. Nous protestons contre le silence systématique qu'elle s'obstine à maintenir sur une œuvre de milliers d'éducateurs qui honorent l'Ecole laïque et contribuent à réaliser progressivement l’Ecole libératrice.

L'ENSEIGNEMENT DOIT-IL VISER A LA MEMORISATION DES CONNAISSANCES OU A LA CULTURE ?

Nous croyions le problème définitivement résolu, tellement sont unanimes toutes les personnalités logiques et sages qui pensent que l’acquisition des connaissances est indispensable, mais dans la mesure seulement où elle sert l’éducation qui est culture.

La circulaire du 27 octobre 1960 est venue jeter le trouble dans l’esprit et la pratique des enseignants en leur recommandant de faire acquérir d’abord les connaissances, même s’il le faut par un par cœur qui est abêtissant, donc destructeur des efforts de culture.

Ce qu’il y a de regrettable, c’est que de nombreux enseignants s’en accommodent avec satisfaction et que le S.N.I. leur fasse écho lorsqu'il dit par exemple, par la plume de Lauvergnat : « Les recommandations de la circulaire doivent se concrétiser par une modification des horaires et par une nouvelle rédaction des programmes officiels... La valeur reconnue de nos jours à la grammaire conduit à conseiller ce que l'étude de tels mots, de telle expression doit contenir.,, Clairement, il faudra qu'on dise si l'enseignement de l'histoire, de la géographie et des sciences a sa place à l’Ecole primaire, qu'on le dise et qu’on en précise le programme ; s'il ne l’a pas, qu'on l'exprime également une fois pour toutes ».

Nous estimons absolument monstrueux qu’un responsable syndical envisage ainsi de gaîté de cœur la disparition de notre programme d'enseignement de l'histoire, de la géographie et des sciences, au bénéfice des matières qu'il sera possible d’ingurgiter «par cœur »,

Il ne s'agit pas d’attendre que des circulaires homologuent cette monstruosité, Il nous faut dès maintenant dire et crier que le français et le calcul peuvent être appris intelligemment sans obligatoire par cœur, et que l’étude vivante de l'histoire, de la géographie et des sciences est absolument indispensable dès notre premier degré.

Dès maintenant, nous avons lancé, dans notre supplément Techniques de Vie un questionnaire sur le par cœur que nous reproduirons en fin de cet article. Nous serions heureux de voir nos camarades s’intéresser à cette enquête et y intéresser les personnes compétentes qu’ils pourraient contacter.

LE MI-TEMPS PÉDAGOGIQUE ET SPORTIF

Nous insistons d’autant plus sur la nécessité de prendre dès maintenant position contre les intentions des auteurs de la fameuse circulaire que ces premières mesures ne sont peut-être que la préface d'un plan d'ensemble axé sur le mi-temps pédagogique et sportif.

Nous ne risquons certes pas de défendre le « plein temps » pédagogique tel qu'il est pratiqué selon les méthodes traditionnelles, et nous savons combien il est antihygiénique de tenir des enfants et des adolescents immobiles à leur place pendant six ou huit heures par jour et qui, plus est, sont contraints, dans un air confiné, à se livrer à des travaux sans intérêt et sans but qui ratatinent les personnalités. Et nous pensons avec le Dr Fourastié, que les résultats ne seraient pas plus mauvais au point de vue pédagogique, et qu'ils seraient certainement meilleurs au point de vue physiologique si l'après-midi était occupée par des exercices divers en plein air.

Le mi-temps pédagogique et sportif est une solution ; dans l'état actuel des choses elle a ses raisons d’être. Nous pensons seulement que d'autres aménagements pourraient intervenir dès maintenant, qui n'auraient pas les dangers de ce mi-temps et seraient plus bénéfiques.

Nous voyons en effet de graves dangers à l'institution d'un tel mi-temps :

— D'abord nous n'aimons pas l'accent qui est mis ainsi sur le sport, alors que c'est en définitive la formation physique qui devrait être l'enjeu des mesures à intervenir. Nous voyons mal des enfants subissant, dès le degré primaire, un véritable entraînement sportif, qui évolue très vite vers tes compétitions dont le danger ne fait pas de doute.

Les fonds votés pour l'organisation de stades montrent bien qu'il ne s’agira pas de culture physique, mais bien de sport.

— La culture physique demande à être dosée aussi minutieusement que la culture intellectuelle. Il serait donc nécessaire que les professeurs ne soient pas seulement sportifs mais qu'ils soient aussi pédagogues, ce qui suppose une formation que possède sans doute le noyau de professeurs diplômés, mais qui sera certainement très imparfaite chez les instructeurs recrutés hâtivement sans préparation sérieuse au double point de vue sportif et pédagogique.

Pour l'instant, les enfants seront trop souvent l'après-midi entre les mains de sportifs non éducateurs, avec toutes les conséquences qui peuvent découler de cet état de fait.

— Cette mesure prématurée — tant du moins qu'on n'aura pas les cadres appropriés — réduira le travail scolaire à la matinée, avec peut-être une heure d'étude le soir. Et comme le temps sera réduit, il faudra faire vite. On ne perdra plus de temps au texte libre, au calcul vivant, à la correspondance, aux expériences scientifiques, aux maquettes d'histoire ou aux conférences de géographie. Pour faire vite, il suffira de pratiquer le par cœur intégral, ce qui vaudrait à notre Ecole laïque un recul d’un siècle.

Nous aurons peut-être des sportifs avec du muscle, nous n’aurons plus ni des hommes ni des citoyens; nous n’aurons plus de culture ; nous n’aurons plus de progrès. Ce sera la faillite inévitable de tout le bel idéal de l'Ecole laïque et démocratique.

Tout se passe comme si la circulaire du par cœur avait été rédigée et publiée pour préparer le mi-temps pédagogique et sportif, qui aurait désormais la voie libre. Et qui sait si, quand le mi-temps fonctionnera normalement on ne dira pas aux instituteurs : « Vous n'avez pas de travail l'après-midi. Pour rationaliser votre emploi, vous ferez une deuxième classe ». Et nous aurons alors tout naturellement les classes à mi-temps qui apparaîtront comme la solution idéale à la crise actuelle, presque avec les mêmes locaux. Avec les mêmes éducateurs, on pourra instruire le double d'enfants. Seulement, ces enfants n'auront plus qu'une demi-journée de travail intellectuel.

C’est simple mais, comme on dit, il fallait y penser.

Nous souhaitons que tous les laïques, tous les républicains fassent opposition à ce projet si ostensiblement réactionnaires,

Nous ne pensons pas pour cela qu’on doive conserver le statu quo. Nous préconisons un mi-temps pédagogique et actif que nous avons longuement expérimenté avec succès ;

La matinée sera consacrée à l'enseignement plus spécifiquement intellectuel, avec si possible des méthodes qui, dépassant le par cœur, permettent les acquisitions intelligentes des matières ou des disciplines à dominer,

Deux heures de l'après-midi seraient occupées par ce que Jean Zay avait appelé d'un mot qu’il serait bon de remettre en honneur : les activités dirigées, y compris les activités physiques et sportives.

L’avantage de ce système c'est que les travaux de l’après-midi ne seraient pas indépendants de ceux du matin. Ils en seraient la continuation naturelle, conformément au plan de travail : imprimerie, dessin, expériences scientifiques, sorties en forêt ou dans les champs non seulement pour service physique et oxygénation, mais pour observations de la nature, visites d’installations, recherches d’insectes, de plantes et de fossiles, fouilles historiques...

Nous demanderions alors qu'on ne se contente pas d'envisager des fonds pour les constructions de stades, mais aussi pour l'aménagement de locaux de travail et d'expériences : outillage minimum, ateliers d'imprimerie, de dessin, de gravure, de fiches, de menuiserie et découpage, de céramique, de travaux des champs etc...

Nous aurions ainsi tout à la fois les avantages physiologiques du mi-temps sportif et l’amélioration considérable de l’atmosphère et du rendement scolaire.

La dernière heure — comme dans le mi-temps sportif — serait consacrée à nouveau à des activités intellectuelles découlant si possible des travaux effectués avec : travail libre, compte rendu de travaux, conférence d'enfants, etc...

L'Ecole ne peut plus longtemps rester ce qu'elle est ; le décalage et la désadaptation qui la paralysent nécessiteront d'indispensables aménagements. Nous avons tous notre mot à dire dans ces aménagements. A nos camarades d'agir pour que la masse de nos collègues prennent conscience des dangers du mi-temps à l’étude et s'orientent vers des solutions immédiatement possibles et qui ont fait leurs preuves.

A TOUS LES DEGRES, L'ÉCOLE FRANÇAISE PRÉPARE DES EXAMENS !

Cette réaction pédagogique du par cœur est d'ailleurs à la mesure d'une institution tout aussi réactionnaire : les examens.

La démonstration est, hélas ! trop facile à faire pour le C.E.P.E. qui est encore exactement en 1961 ce qu'il était au début du siècle avec prédominance à l'orthographe, à une époque où celle-ci devient, qu'on le veuille ou non, mineure par rapport à tous les éléments indispensables d’une formation moderne.

Il nous faut transformer l'examen du C.E.P.E.

Je suis incompétent pour ce qui concerne les autres examens, mais il nous est facile de nous référer à des « autorités ».

Ce sont les Inspecteurs généraux Obré et Campan qui, dans les Cahiers Pédagogiques du second degré écrivent :

« Cette valeur formatrice de l'enseignement, les professeurs auraient souhaité la contrôler au niveau du baccalauréat. Ils voudraient pouvoir consacrer de la meilleure manière toutes les qualités acquises par leurs élèves et qu’ils se sont efforcés constamment de développer... Ils sont dans l'obligation de juger sur une seule épreuve écrite qui ne permet guère de mesurer le savoir des candidats... Ils considèrent que la nouvelle formule du baccalauréat va à l’encontre de leur volonté d’évolution et marque même une régression ».

« Rappellerons-nous aux examinateurs, écrit Maurice Desprès, professeur à Janson de-Sallly, en quel état les candidats restituaient, en fin d'année, les fruits verts d’un enseignement trop massif... Les sanctions, si nombreuses dans notre système scolaire, ne mesurent les progrès accomplis et le niveau obtenu par les élèves, que si elles s’accordent très exactement aux buts et aux méthodes d'un enseignement de culture. Autrement, la portée de cet enseignement se trouve compromise, l'élève adaptant son travail à l'épreuve qui va le sanctionner... Jusqu'à une date très récente, la nature des épreuves écrites du B.E.P.C, et du baccalauréat (croquis annoté et questions de cours) accordaient vraiment trop de chances au « bachotage » ; trop de candidats avaient appris dans leurs manuels (remarquables documents, mais en même temps recueils de sujets traités et de problèmes résolus) parfois même dans leurs cours ce qu'ils auraient pu observer, constater, établir par eux-mêmes, Si nous voulons qu'un enseignement de formation soit la préparation la plus efficace et même la seule préparation possible aux examens, travaillons à mettre au point et proposons un type nouveau d'épreuves écrites : elles pourraient bien ne plus se présenter sous la forme de sujets imprimés en quatre lignes, sans figure ».

Et ce sera aussi notre conclusion :

A tous les degrés de l'enseignement, on ne travaille pas pour s’instruire et se cultiver ou pour devenir meilleur ; on travaille pour réussir aux examens ; les meilleures méthodes sont celles qui mènent le plus d'élèves aux examens, même si elles doivent pour cela compromettre leur formation et leur avenir ; le meilleur maître est celui qui a le plus de succès aux examens. Les parents eux-mêmes se préoccupent fort peu de l’aspect formatif de l’enseignement donné à leurs enfants. Il n’y a qu'une chose qui compte : qu'il réussisse à l'examen.

Comment dans un corps aussi riche, aussi cultivé que celui de l'enseignement, et qui se veut scientifique, logique, sensé, comment tolère-t-on que soient si radicalement faussées les données mêmes des processus essentiels. Car enfin, un examen est fait pour contrôler les connaissances et la culture des individus, alors que tous nos examens sont des buts à atteindre et ne contrôlent rien. Ils sont le poteau d'arrivée auquel il faut parvenir le plus vite et le plus sûrement possible.

Les manuels eux-mêmes ne sont pas des manuels de culture mais seulement des manuels de préparation aux examens.

Le bachotage est sans conteste une des tares majeures de l’enseignement français.

Préparons, réalisons une technique de contrôle qui échappe au bachotage et qui mesurera vraiment objectivement en l'individu ce qu'il y a à mesurer et tout notre enseignement en sera transformé.

On ne sait pourquoi, nul encore ne s’est attaqué à cette œuvre essentielle, alors que des systèmes de tests existent — ne serait-ce qu'à l'armée — qui permettent de mesurer non seulement les acquisitions pour quelques disciplines, mais la mémoire, l'intelligence, le sens artistique, littéraire, scientifique, l'aptitude manuelle, l’intuition et la décision.

Il faut que nous nous mettions au travail pour la réalisation nouvelle d’une forme de C.E.P.E. comportant d'une part des brevets et des chefs-d'œuvre pour déceler les aptitudes générales et les éléments de culture ; des séries de tests pour les acquisitions.

Nous avons déjà en mains de nombreux éléments. Nous allons entrer immédiatement en relations avec les camarades de pays étrangers pour savoir ce qui a été fait dans leur pays. Qui pourrait nous renseigner sur les tests de l'armée ?

Voilà une œuvre urgente pour laquelle nous devons et pouvons être à l’avant-garde.

***

COLLEGES D'ENSEIGNEMENT GÉNÉRAL

Un nombre important de nos camarades sont entrés dans les C.E.G.. Ils seraient heureux de vivifier leur enseignement selon les techniques qui leur avaient si bien réussi au premier degré. L’organisation presque spontanée et le travail d’une Commission des C.E.G. qui compte une centaine de camarades nous incite à nous préoccuper tout spécialement de l’introduction de nos techniques dans ces établissements.

Le travail est amorcé ; un groupe actif était au Congrès. Nous préparons les outils nouveaux qui permettront les techniques modernes souhaitables. Encore faut-il faire connaître les uns et les autres.

C’est dans ce but que nous publierons à partir d’octobre une édition spéciale de L'Educateur destinée aux C.E.G., au cycle d’orientation, à l’enseignement technique et au 2e degré.

Nous aurons dans chaque numéro une partie commune avec articles généraux. C’est la partie centrale plus technique qui sera différente selon l’édition.

Pour cette publication il nous faut avoir recours en permanence aux camarades qui travaillent à ce degré. C’est pourquoi nous avons constitué un Comité de Rédaction qui comprend les camarades suivants :

- G.-M. THOMAS et Mme MENA

- RAYNAUD pour les maths

- Gilberte FABRE pour le français

- POITRENAUD pour les sciences

- PERAMMANT pour les langues

- PETITCOLAS pour le cycle d'observation

La besogne ne nous manque pas, ni les bons ouvriers.

A l'ouvrage !

C. F REINET.

P.S. : Nous pensons que nos camarades doivent intervenir toutes les fois qu'ils le peuvent : dans les Assemblées générales des sections syndicales de fin d'année, dans les associations diverses, auprès des journaux et revues pour :

— dénoncer le mi-temps pédagogique et sportif, faire connaître et recommander le mi-temps pédagogique et actif;

— lutter contre le par cœur, répondre et faire répondre à notre questionnaire ci-dessous ;

— préparer la réorganisation technique des examens à tous les degrés ;

— faire connaître l'Association pour la Modernisation de l'Enseignement ;

— demander que le S.N.I. discute de ces problèmes, prenne position et nous aide.