L'Educateur n°9 - année 1959-1960

Février 1960

A bas les devoirs à la maison ! A bas les notes et les classements

Février 1960

Pour une organisation moderne de la sélection et du travail

***

On se moque volontiers des dures pratiques d'initiation, qui, dans certains pays non encore «civilisés » sont appliquées aux enfants à l'aube de la puberté et qui doivent faire d’eux des hommes.

Les Français de 1960 torturent leurs enfants pour en faire des certifiés ou des bacheliers, ou tout simplement pour les faire entrer dans un centre d’apprentissage. Comme si le travail était une malédiction qui ne porte ses fruits amers qu'à force de « devoirs », de sanctions, de souffrance et de terreur.

Les parents inquiets se taisent, parce qu'ils croient l'épreuve indispensable à l'avenir de leurs filles et de leurs garçons. Ou du moins ils ne protestent pas et ne prennent pas conscience des rapports certains entre ce malmenage et les tares de comportement, les dépressions nerveuses ou les névroses pour lesquelles ils cherchent en vain des remèdes.

Voilà pourtant la voix angoissée d'une maman, en laquelle se reconnaîtront, avec leurs soucis et leurs craintes, tant de mamans de France:

« Ma fille vient de passer trois semaines de maladie : angine, rechute puis grippe. Quel « trou » pour suivre maintenant au lycée ! C’est affolant le travail qu'on donne à faire à la maison à des gosses de treize ans. Pour eux, une maladie de trois semaines est presque une catastrophe, avec les résultats annuels chiffrés dont dépend la mise à la porte ou le passage dans la classe suivante.

Pour certains de ces enfants, les bulletins de notes trimestriels sont comme la guillotine du condamné à mort.

Ma fille me dit qu'elle a moins peur maintenant des compositions mais que, jusqu'en 6e et 5°, elle ressentait des douleurs terribles dans la poitrine, des contractions de la mâchoire et des tremblements suivis de sueurs, à chaque composition ».

Et cette mère pose la question qu’il nous faut répercuter à tous les degrés de notre enseignement :

« Dans le cadre de l’Année de la Santé Mentale, s’apercevra-t-on que cette hantise perpétuelle de la condamnation que l'on impose à nos enfants, sans appel, depuis l'âge de onze ans jusqu’à la fin de leurs études, est la cause principale du détraquement des jeunes ?

Ne peut-on vraiment pas trouver un autre moyen de sélection des valeurs, que cette fausse comptabilité qui donne à nos enfants le sentiment accablant de jouer leur vie tous les huit jours pendant dix ans ».

Oui l’Année de la Santé Mentale doit d'abord s'appliquer à connaître le mal pour que les spécialistes essaient ensuite d’y parer. Et ce mal, c'est vous tous, parents d'élèves qui devez le dénoncer.

Une sorte de raz-de-marée qui accusait les devoirs du soir d'être la cause essentielle du surmenage des enfants du premier degré, avait emporté, pas toujours sans dommage, cette pratique désuète,

Il nous faut susciter d’autres raz-de-marée.

Contre les devoirs qui tiennent les élèves du second degré jusqu'à onze heures du soir à leur table de travail et qui, avec une autre organisation de la classe pourraient fort bien être exécutés durant les huit heures quotidiennes.

Mais contre aussi la folie des notes et des classements à tous les degrés à partir du primaire,

Il nous faut, documents à l'appui, dénoncer la vanité de ces notes ; pourquoi il est faux d’affirmer que tel élève a mérité durant le mois 9,35 ou 14,56, et que donc celui qui a 14,56 doit passer avant celui qui n’a que 14,50, comme si des éducateurs étaient en mesure d'établir avec une telle approximation les virtualités infinies de leurs élèves. Il nous faut affirmer que les notes sont toujours fausses parce qu'elles ne tiennent jamais compte que de quelques éléments du problème, et pas toujours des plus essentiels. Les classements, basés sur des notes fausses sont donc obligatoirement erronés,

Une entreprise peut péricliter et sombrer avec une comptabilité parfaite où aucune addition n'est à reprendre, où les pourcentages sont bien calculés et le bilan balancé honorablement. La vie de l'entreprise n'est point dans ces registres de bureaucrates, mais dans l'élan et l’allant des chercheurs, des dirigeants et des ouvriers, dans la qualité du travail, dans l'intelligence et la création qui bousculent bien souvent les chiffres, Elle est dans tout ce que l’individu porte en lui d’éminent et de prometteur.

La vie de l’entreprise France ne saurait être subordonnée à cette fausse comptabilité qui bride les efforts des enfants et des maîtres et qui n'apporte jamais avec elle que de fausses solutions.

C’est tout cela qu'il nous faut dire malgré tous ces faux comptables qui crieront inévitablement au sacrilège. Il est d'autres formes de travail, il est d'autres formes de mesure qui serviront l'enthousiasme et la vie,

Et si contre ce danger national, nous organisions notre mobilisation nationale ? Comment ? Nous le dirons dans notre prochain numéro.

C. FREINET.

 

p. . s. _ Nous serions heureux de recevoir dès maintenant tous documents qui pourront nous aider à étayer cette campagne. Excès de travail, danger pour la santé et l'équilibre des enfants, vanité des travaux qu'on leur impose, vanité des notes et des classements, etc...

 

Accord de travail entre le mouvement des coopératives scolaires et le mouvement de l'Ecole Moderne

Février 1960

Monographies

Février 1960

Club de la bibliothèque de l'école moderne

Février 1960

Nous avons fait, il y a vingt ans, un travail considérable sur lequel nous vivons encore, avec la publication de nos Brochures d’Education Nouvelle Populaire (B.E.N.P.).

Ces brochures paraissaient en périodiques mensuels, avec un nombre respectable d'abonnés qui en permettait l'édition régulière. Nous en redonnons la liste en dernière page du présent «Éducateur».

Toutes ces brochures sont encore valables. Rien de ce qu'elles contiennent ne s'est avéré faux ou inutile. Tout au plus, quelques-unes d’entre elles pourraient-elles être mises à jour et aménagées, en raison de la longue expérience poursuivie depuis, et de certains changements intervenus, grâce à notre action.

Nous avons encore, de presque tous ces numéros un stock qu'il nous faudra liquider un jour. Aussi mettons-nous ces brochures gratuitement à la disposition de nos groupes et de nos propagandistes. Nous leur demanderons seulement de payer le port, qu'ils récupéreront par la vente au prix réduit indiqué.

Tous nos lecteurs peuvent également nous passer commande au prix insignifiant indiqué, qui couvre à peine les frais de manutention.

Mais cette édition est techniquement et commercialement dépassée. Elle a été réalisée en un temps où l’édition n'avait pas encore fait les progrès spectaculaires de ces dernières années : elles étaient austères et pauvres. Elles étaient produites coopérativement et livrées au prix de revient. En ce temps, les lois Barrangé n'existaient pas encore et c’étaient les camarades eux- mêmes ou leurs coopératives scolaires qui payaient les frais de leurs recherches et de leurs innovations pédagogiques. Nous ne vendions à peu près rien par l’intermédiaire des libraires, ce qui nous permettait des prix très bas.

On n'achète plus nos B.E.N.P. aujourd'hui, parce qu'elles sont trop pauvres. Et les libraires ne veulent pas les vendre parce qu'elles sont à trop bas prix, et cela se conçoit d’ailleurs. Lorsqu'un libraire nous commandera pour vous 5 B.E.N.P, à 25 francs, il vous fera une facture de 125 francs, sur laquelle il aura une remise de 40 à 45 francs, La valeur des deux timbres de correspondance qu'il devra employer.

Dans ce domaine aussi nous sommes dans l’obligation de nous moderniser si nous voulons répondre aux besoins et aux possibilités de nos adhérents présents et à venir. Il nous faut une édition plus moderne, plus lisible, plus maniable, ayant la présentation d’un livre plus que d’une brochure, et vendue à un prix variant entre 100 et 200 francs, permettant la vente normale par le circuit libraire.

Tel était le problème posé.

Le résoudre était encore un autre problème. Ces livres n’auront certes pas, nous le savons, une vente spectaculaire. Nos anciens camarades penseront parfois qu’ils sont des redites et hésiteront. Ce sont les récents et les nouveaux adhérents qui seront particulièrement intéressés. De sorte que nous ne pouvons guère compter que sur un millier d’exemplaires écoulés en un an pour chaque numéro. Et l’édition dans une imprimerie nécessitait un tirage d’au moins 3 000 exemplaires. D’où dépense trop importante, non couverte, créant à chaque numéro dans notre budget un trou allant s'agrandissant.

Cette solution était impossible.

Nous avons heureusement trouvé une formule pratique avec notre offset.

Nous composons nous-mêmes le texte à nos monotypes, qui nous donnent donc un caractère toujours neuf, à l'œil parfait. Voyez le tirage cette année de nos B.T., dont tous les textes sont aussi composés à nos monotypes.

Ces textes sont ensuite montés par feuilles, format 33 x 50, à raison de huit pages recto et huit pages verso, soit un cahier de seize pages. Il suffira ensuite de relier et de mettre sous couverture 6, 8, 10, 15 de ces cahiers, pour avoir des livres de 96,128,160, 240pages, selon l’importance, au format 12 x 16, facile à manier et agréable à consulter.

Mais la nouveauté pour nous — et là nous faisons un petit cours technique qui ne manque pas d'intérêt — c’est que les textes ainsi composés ne sont pas tirés à l'imprimerie, ce qui serait évidemment possible. Ils sont reportés sur un carton spécial qui, traité chimiquement fixe à la perfection ces textes. Les cartons sont alors placés sur notre machine offset qui en tire autant d'exemplaires qu'on veut. Les premières pages de l'Educateur, ce texte lui-même sont tirés selon ce procédé. Avec un beau papier spécial, la présentation est parfaite.

L'avantage de cette technique, c'est que nous pouvons ne tirer qu'à 500 exemplaires. Nous tirons les premiers numéros à 1 000 exemplaires. Quand cette édition est épuisée, nous n'avons pas besoin de recomposer, ce qui serait trop onéreux, Nous plaçons à nouveau le carton-report sur la machine, qui tire avec la même perfection 500 ou 1 000 nouveaux exemplaires.

A ce moment-là, nous n'avons qu'une dépense de base réduite et aucun stockage. L’édition que nous commençons et que nous appellerons :

BIBLIOTHÈQUE DE L’ÉCOLE MODERNE

se continuera donc au rythme d’environ un livre par mois.

Les prix de vente de ces livres varieront selon leur importance. Il sera de 0,20 franc par cahier de 16 pages, ce qui nous vaut les tarifs suivants :

5 cahiers 80 pages = 1,00 NF

8 — 128 — = 1,60 NF

10 - 160 - = 2,00 NF, etc...

Les numéros seront annoncés à parution avec leurs caractéristiques. Nous en ferons un service de presse aux journaux et revues. Nous en enverrons un exemplaire gratuit aux délégués départementaux et aux responsables de commissions, pour qu’ils puissent les faire connaître autour d'eux.

Nous avons en mains l’instrument d’information technique et de diffusion dont nous avions un urgent besoin.

Ainsi conçue, cette édition peut tenir et se développer. Mais nous voudrions cependant faire mieux à l’intention de nos adhérents et plus particulièrement des jeunes, en envisageant également une formule de vente coopérative, genre Club de Livres.

Nous constituons donc un

CLUB DE LA BIBLIOTHÈQUE DE L'ÉCOLE MODERNE

Mous demandons à nos camarades d'y adhérer en versant une provision de 1000 francs, qui leur vaudra de recevoir à parution tous les livres de la B.E.M, avec remise de 50 %. Autrement dit, en adhérant au club B.E.M., ils auront ces livres au prix de revient.

Nous ne pouvons pas faire plus. Mais nous pouvons assurer ce service coopératif si nous avons quelques centaines de souscriptions, qui couvrent une partie des fonds nécessités par cette édition.

Adhérez donc au Club B.E.M. en versant 1 000 F (10 NF) à C.E.L., Cannes - C. C. P. 115 03, Marseille.

Si le nombre d'adhésions était important comme nous l'espérons, nous pourrions même envisager d'autres réalisations intéressantes.

Vous ferez, adhérents E.M. de 1960 l'effort coopératif que vos aînés de 1935 n’avaient pas ménagé pour la réalisation d'une œuvre qui nous a permis les progrès que vous connaissez.

Il s'agit là de la présentation technique, primordiale puisqu’il serait inutile de faire de beaux projets pédagogiques si nous n’avons pas la possibilité de les réaliser.

Nous pouvons maintenant parler programme pédagogique de cette édition.

Le premier n° a été un n° d’essai et de rodage. Je voulais avant d’écrire ce que je vous dis ci-dessus, être sûr que la combinaison était valable et rentable.

Le premier n° donc reproduit une étude écrite cet été et que nous avons intitulée à l’origine : Blousons Noirs. Le nouveau titre sera : Formation de l'enfance et de la jeunesse.

Cette brochure analyse le phénomène Blousons Noirs à la lumière de notre pédagogie et surtout, nous apportons des solutions dont nous pouvons garantir l'efficacité — et il n’y en a pas d'autres — l'Education du Travail.

Nous indiquons dans cette brochure comment on pourrait, à l'école, dans la famille, en dehors des heures de classe, prévoir des techniques de travail qui seraient susceptibles de donner un but à l'activité des jeunes et créerait dans leur milieu une nouvelle humanité.

Cette brochure de 5 cahiers sera donc vendue 1 N F.

Les adhérents du Club B.E.M. la recevront au prix de 0, 50 NF.

Le numéro 2, déjà sous presse, sera beaucoup plus copieux et sera consacré à Classes de Neige, expérience de l’Ecole Freinet, par Elise Freinet et Claude Pons, avec illustrations.

Le numéro 3, déjà à la composition sera la réédition complète et mise à jour du Texte Libre, la brochure correspondante et pourtant si demandée étant totalement épuisée.

Dès maintenant nous envisageons, avec l'aide de nos meilleurs collaborateurs, la réédition de celles de nos B.E.N.P. qui sont épuisées, qui donc étaient les plus utiles : Lecture globale idéale — Dessin libre — Méthode Naturelle de Lecture — Plans de Travail — Brevets et Chefs-d'Œuvre — Ecoles de Villes — L'Enseignement du Français dans les Pays bilingues, etc...

Et sans doute aussi quelques-uns de nos suppléments E.M. de l’an dernier et notamment : La lecture globale, cette galeuse qui a eu une certaine répercussion dans les milieux pédagogiques.

Mais nous ne devons pas nous contenter de rééditer, même après mise à jour. Des thèmes nouveaux demandent études et discussions. Nous saurons en enrichir, en temps voulu notre B.E.M.

Nous avons donc désormais entre les mains des possibilités nouvelles de recherche et d’expression. Nous savons que les collaborateurs ne nous manqueront pas. Il faut que, par votre adhésion au Club B.E.M., vous donniez à cette réalisation nouvelle l'élan coopératif qui en assurera d'emblée le succès.

PS Si nous avions un nombre satisfaisant d’adhésions, nous pourrions faire une couverture spéciale pour 1es adhérents du Club qui auraient ainsi une édition spéciale.

 

 

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Vers une méthode naturelle d'enseignement scientifique

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