Revue CréAtions en ligne "Peindre à la manière de... soi-même"- n° 219 - octobre 2014 - SOMMAIRE

Octobre 2014

 

 

CréAtions "Peindre à la manière de ... soi-même"

Revue en ligne annoncée dans le Nouvel Educateur N°219
Publication :  octobre  2014

 

Ont participé à l'élaboration du dossier « Peindre à la manière de ... soi-même ! » :  Jacqueline Benais, Simone Cixous, Ophélie Gautier, Maud Léchopier,  Katina Iérémiadis, Christiane Nicolas, Hervé Nunez, Anne Roy, Eliane Trocolo.

Crédits photographiques : Jean Astier, Florence Géroudet, Mélody Dababi


 « Peindre à la manière de ... soi-même »

  titre de l'article niveau de classe thème techniques utilisées artiste
 

"Peindre à la manière de ... soi-même" en interaction avec le groupe

maternelle : PS et MS

Méthode naturelle de peinture et dessein politique

peinture

 
 

Entrer dans une démarche de création, une expérience en cycle 3

élémentaire : cycle 3

Favoriser les projets personnels

peinture,
encres

 
 

« Batucada plastique, une fresque collective »

atelier de rue

 

peinture

 
Parents, je vous invite... maternelle Peinture libre, coopération et mathématiques… naturellement peinture  

 

 

   

 

"Peindre à la manière de"... soi-même - Méthode naturelle de peinture et dessein politique

  

Revue en ligne CréAtions n°219 "Peindre à la manière de... soi-même"
annoncée dans le Nouvel Éducateur n°219 - Publication : octobre 2014

Classe de PS et MS sections, École maternelle, Marseille (Bouches-du-Rhône) - Enseignant : Jean Astier

 


          "Peindre à la manière de"... soi-même

                              en interaction avec le groupe

 

Méthode naturelle de peinture et dessein politique,
texte de Jean Astier

 

La méthode naturelle d'apprentissage décrite par Freinet(1) s'inspire de la manière dont les bébés et les jeunes enfants procèdent au cours de leurs premiers apprentissages, la parole, la marche. Elle estime les individus suffisamment équilibrés capables de se cultiver et de se former dans un environnement stimulant. Observons un moment de pratique de méthode naturelle de peinture dans une Section de Petits-Moyens d'école maternelle.

 

  Présentation technique de l'atelier


Il s'agit plus exactement d'un atelier gouache. De temps en temps, nous proposons plutôt de l'encre et, exceptionnellement, de la peinture acrylique. La gouache est privilégiée en raison de sa facilité d'utilisation et de nettoyage à l'eau. Dans notre classe de 60 m2, le coin peinture est constitué de deux tables à hauteur des enfants, accolées et formant un carré d'environ 4m2. Logiquement, l'atelier est installé à proximité du lavabo de la classe, le matériel est entreposé sur des étagères et dans des bacs rangés sous les tables. Les enfants peignent debout. L'atelier peut accueillir huit enfants, utilisant, la plupart du temps des feuilles de 120 grammes de format A3. C'est la taille maximale pour un atelier de huit et le grammage minimum acceptable pour la gouache. Plus légère, la feuille se gondole, supportant mal une couche de peinture épaisse. Un doigt de peinture non-diluée est préparé dans des petits pots bébé, rassemblés par dix dans des barquettes afin d'éviter qu'ils ne se renversent. Après chaque séance, les pots sont triés (rincés si les couleurs ont été mélangées), puis bouchés et rangés sur les étagères. Je regrette de n'avoir pas accès à de meilleures marques de gouache comme Pébéo car la plupart ont le défaut de perdre en séchant la vivacité de leurs coloris. Des pots de brosses rondes et plates de dimensions variées sont disposés sur la table. Les poils de soie, plus souples, rebiquent. Ils sont réservés à l'encre. Pour sécher, les œuvres sont suspendues par des pinces à linge percées dans leur travers (vieille technique de séchage des feuilles à l'ère de l'imprimerie). Dans l'idéal, nous rêverions de disposer du luxe d'un espace permettant d'autres expériences où les enfants auraient le choix de peindre à même le sol, sur des formats plus importants. Dans notre réalité, ceci reste du domaine de l'exceptionnel comme dans la cour de récréation, aux beaux jours sans vent.
Ces détails minutieux peuvent paraître rébarbatifs au néophyte, ils sont pourtant impératifs au succès de l'atelier. La méthode naturelle se fonde sur une organisation matérialiste scrupuleuse optimisant les conditions et les circonstances afin de proposer les situations d'apprentissage les plus adéquates. Les maîtres s'adaptent au milieu. Ils saisissent des opportunités. Dans certains cas, ils envahissent les couloirs, optent pour le plan vertical, squattent une salle de classe désaffectée. Ils profitent des matériaux abandonnés par les collègues, offerts par des parents ou rencontrés dans la rue. Ils font œuvre de créativité, d'invention pédagogique.

 

  Les séances de peinture


L'atelier peinture n'est pas obligatoire. Il est proposé avec régularité (une semaine sur deux). Aucune comptabilité des « passages » n’est nécessaire. Pour preuve, nous avons relevé sur cinq séances effectuées durant une période de deux semaines, la fréquentation spontanée de l'atelier par l'ensemble des enfants de la section, nous avons noté:
- une fréquentation moyenne de l'atelier identique chez les « Petits » (PS) et les « moyens » ( MS), d'environ huit enfants par séance, soit seize par jour.
- un seul enfant (PS) n'est jamais venu peindre.
- chaque enfant a fréquenté 1,7 fois l'atelier au cours des cinq séances retenues.
- une disparité certaine quant à la quantité d'œuvres produites au cours d'une même séance: seize enfants ont fait une seule peinture par séance. Ponctuellement, quatre enfants ont réalisé entre deux et quatre peintures au cours d'une même séance. Quatre enfants ont réalisé deux à trois peintures au cours de plusieurs séances. Mais au cours de cette période une enfant s'est particulièrement distinguée par une production prolifique d'une moyenne de cinq peintures par séance. Ce dernier cas est bien exceptionnel car il est rare qu'un enfant de cet âge reste concentré sur une même activité, de façon répétée,
durant une heure environ.
Cette trop succincte étude statistique n'est certainement pas représentative scientifiquement. Il aurait fallu l'étaler sur une bien plus longue période. Mais là n'est pas notre propos. La pertinence de proposer un libre accès des activités aux enfants n'est plus à démontrer. En place d'un passage obligé de tous par chaque atelier, il est plus efficace d'adapter notre pédagogie aux besoins particuliers de chaque enfant en fonction de nos observations et de sa demande. La motivation est moteur des apprentissages. Peu importe si tel enfant a rarement tenu un pinceau dans ses mains au cours de cette période pourvu qu'il se soit adonné à une autre activité avec sérieux et engouement. La méthode naturelle d'apprentissage offre à l'enfant cette possibilité de prendre sa formation en main en explorant un langage (ici le langage pictural), en conduisant des recherches personnelles en coopération avec ses pairs, comme nous allons l'observer. La question du rythme de l'enfant est pondérée par la qualité de son implication dans l'activité en fonction de sa motivation. Cette dernière résulte d'une complexe conjonction de paramètres combinant l'histoire du sujet, la stimulation du milieu et son sentiment de sécurité dans le groupe.


 
1- Célestin Freinet, Œuvres pédagogiques, Seuil, 1994. Édition en deux tomes.

"Peindre à la manière de soi-même"  

page suivante

 

Entrer dans une démarche de création, une expérience au cycle 3

  

Revue en ligne CréAtions n°219 "Peindre à la manière de soi...même"
annoncée dans le Nouvel Éducateur n°219 - Publication : octobre 2014

Classe de cycle 3, École du Clos Jovet, Autun (Saône-et-Loire) - Enseignante, Florence Géroudet

  

 
Entrer dans une démarche de création

Une expérience au cycle 3

 

Lettres en bataille - Léonie

Je me suis toujours sentie extrêmement démunie sur le plan personnel dans le domaine de la pratique plastique. A tel point que c’était un obstacle pour mettre en place ces activités dans la classe car j’étais, comme beaucoup d’enseignants, plus préoccupée par le résultat que par la démarche qui permet aux enfants d’aller vers une expression artistique personnelle. Pendant des années je m’inspire de projets, certes intéressants, mais avec une part d’expression singulière de l’élève très réduite. Je ne suis pas satisfaite de ces temps de pratiques plastiques : c’est le bazar, très bruyant, lourd au niveau de la mise en place… Bref, cela saute souvent dans l’emploi du temps. En modifiant progressivement ma pédagogie grâce à des stages en pédagogie Freinet, c’est naturellement que j’en arrive à envisager la pratique plastique sous un angle différent. 

 

Je mets en place dans ma classe des ateliers : poésie, géométrie, expériences scientifiques, jeux de société  et… arts plastiques.
Je commence par utiliser le fichier de techniques PEMF parce qu’il offre une liberté de choix aux élèves et permet un travail en autonomie. Partant de cela je fais évoluer le dispositif en discutant avec Anne Roy (Conseillère Pédagogique en Arts Visuels) et Hervé Nunez (professeur d’arts plastiques en collège), tous deux membres du chantier CréAtions de l’ICEM. Lorsqu’Hervé présente sa démarche avec ses élèves et que je vois leurs parcours et leurs propositions d’une grande créativité, cela me conforte dans l’idée que je suis dans une bonne direction.

Je me dis : « ce n’est pas parce que moi je me sens nulle en arts plastiques que je ne peux pas permettre aux élèves d’avoir une démarche créative ».  Ce qui a changé, c’est que je n’attends pas un résultat subordonné à des principes de beauté.
Je mets en place un cadre qui permet aux enfants d’affiner leur regard, de comparer et d’entrer dans une démarche de création. Pour moi cela présente une grande proximité avec l’expression écrite lorsqu’on la conçoit, non pas comme un exercice formel, mais comme la possibilité pour les enfants de s’exprimer.

Carte de France, Gregory

 

Organisation de la classe

 

L'homme émotionné,, Morgane et Lucien, 50 x 65

Les ateliers ont lieu trois fois par semaine pendant quarante-cinq minutes. Trois élèves de CLIS sont intégrés lors de ces moments. Je dispose d’une salle libre à côté de la mienne dans laquelle les élèves peuvent aller travailler en autonomie. Ils s’inscrivent de manière assez libre et peuvent rester plusieurs séances dans le même atelier : chacun va au bout de sa production avant de laisser sa place à un autre. Dans cette salle, il y a un placard avec tout le matériel d’arts plastiques. Je ne m’en occupe pas, deux responsables veillent au rangement et au nettoyage du matériel. En plus du fichier PEMF, les élèves ont à leur disposition, depuis janvier, des petits mots « déclencheurs » à tirer au sort. Ils ont été choisis collectivement et se répartissent en trois catégories : noms, adjectifs, verbes. Les règles de fonctionnement de l’atelier sont affichées, assez rapidement je contrains les élèves à élargir leurs thématiques en interdisant la reproduction de drapeaux, prénoms et cœurs…

 

Comportement des élèves

Comme l’atelier d’arts plastiques est toujours complet, nous mettons en place une liste d’attente. Au début les élèves utilisent le fichier de techniques. Si l’une d’elles plait à l’un d’entre eux, très souvent, les autres la reprennent. Ils ont plutôt envie de tester techniques et matières sans intention autre que celle du plaisir à déposer de la couleur sur la feuille. Au début, les réalisations manquent de recherche. Cela ne m’inquiète pas car je pense que c’est une étape importante et incontournable : les enfants ressentent le besoin de renouer avec des pratiques de l’école maternelle. En effet, cela fait longtemps qu’ils n’ont pas eu l’occasion de toucher à la peinture. Très rapidement, à partir d’une même fiche, les réalisations se diversifient.

 

Feu d'artifice, Axel, 50x65

 


"Peindre à la manière de soi-même"

   

une technique, différentes productions
exposer, écrire, échanger
un échange autour de trois productions
une production collective


peinture, atelier

Peinture de rue

  

Revue en ligne CréAtions n°219 "Peindre à la manière de soi...même"
annoncée dans le Nouvel Éducateur n°219 - Publication : octobre 2014

Au village d’Arzeliers, Laragne Monteglin (05) – Intervenante : Mélody Dababi

 


« Batucada plastique, u
ne fresque collective »


La « fresque » collective offre à des passants, groupe informel, la possibilité de réaliser puis de s’identifier à une œuvre qui existe pour tous et à laquelle chacun peut être heureux et fier d’avoir participé.

Elle est réalisée sur un sol dur ou compact ce qui nécessite un grand espace, 5 m x 12 au minimum, couvert ou sous abri et demande environ une dizaine d’heures.

 

 

Dans cette situation, j’essaie d’être à la fois
 
- metteur en scène : placer le support, accueillir les acteurs et régler leur pas avec celui des autres ;

- animateur et technicien de surface : préparer les pots de pigments, nettoyer les pinceaux, nettoyer les pots renversés sur la fresque,
protéger les petits peintres à l'aide de sacs poubelles ;
 
- « Security guard » : préserver les enfants de l’influence de leurs parents, les aider à sortir des formatages scolaires, éviter de recouvrir ce que vient de faire le copain ;
 
- cascadeur bricoleur lorsqu’il s’agit d’accrocher la fresque une fois terminée.

J’assume cette « incompétence » et revendique l’incertitude du résultat.
 

 

"Peindre à la manière de soi-même"     

 
 

peinture

 

Parents, je vous invite...

 

Revue CréAtions en ligne n° 219 "Peindre à la manière de ... soi-même"
annoncée dans le Nouvel Éducateur n° 219 - Publication : octobre 2014

Classes de 1ère et 2ème de maternelle, Belgique - Enseignante : Isabelle Van de Walle

 

 

Parents, je vous invite ....

 

Peinture libre, coopération et mathématiques... naturellement

 

Information aux parents

Dans la classe, les enfants circulent librement, choisissent un atelier (à condition qu’il y ait de la place) ou peuvent rester observateurs. L’atelier investi peut être occupé par le même enfant aussi longtemps qu’il en ressent le besoin (seuls récréations, repas, etc...peuvent interrompre le travail). Il y a : bac à sable, jeux de calcul, bibliothèque, jeux symboliques, constructions, dessin, découpage-collage et … peinture.

Chaque matin, je prépare les couleurs : douze à dix-huit tons différents. J’installe de bons pinceaux, j’accroche de grandes feuilles aux chevalets. Parfois l’un ou l’autre m’aide en me passant les pots de peinture, en mettant dans chaque pot un pinceau, etc.
Des consignes simples :
- tablier,
- à chaque pot son pinceau,
- que ce soit beau.

 

Petit à petit, les gestes spontanés et exploratoires vont se préciser : se contrôler, affiner son intention. Au fil des productions, des « styles » se dégagent :
- les « tout rempli » : la feuille est complètement recouverte, parfois même épaissie par plusieurs couches ;
- les traces, les taches, les lignes de toutes sortes : horizontales, verticales, médianes, diagonales, courbes, spirales, etc. ;
- les étoiles, les points, les cœurs, les formes géométriques (carrés, cercles, triangles,etc.), les personnages, les animaux, les êtres imaginaires, les maisons et autres châteaux, etc.

Naturellement, des aspects mathématiques apparaissent.
Naturellement, les enfants s’imitent, se copient, s’influencent.
Naturellement, les enfants s’enrichissent et augmentent leur puissance créative qui évolue au fil du temps.

Ces peintures sont régulièrement regardées, observées et commentées lors des mises en commun (regroupement de tous les enfants au « coin tapis ») Un tri peut être réalisé et des « séries » constituées. Ces observations m’amènent à aborder et à amorcer avec les enfants des notions mathématiques (symétrie, formes géométriques, lignes, comptages, alternances, comparaisons,…)

Cette démarche se rencontre aussi dans d’autres ateliers (dessin, constructions,…)

Je vous invite à venir de temps en temps jeter un œil dans le couloir qui mène à la classe (escalier à côté de l’entrée de la crèche). Chaque mois, vous pourrez y découvrir une nouvelle production de chacun.

 

"Peindre à la manière de soi-même"