Deuxième discours à des Parents sur l’Education nouvelle prolétarienne

Mars 1935

L’IMPRIMERIE A L’ECOLE

 
Deuxième discours à des Parents
sur l’Education nouvelle prolétarienne
 
L’Education, nous l’avons vu, devrait être d’abord enrichissement et épanouissement, préparation par la vie à l’activité humaine et libérée à laquelle nous aspirons tous.
 
L’Ecole actuelle prétend poursuivre cette préparation par des prêches, par des mots et des formules, par des exhortations. Et là réside la grande erreur et le grand mensonge, la subtile hypocrisie dont parlait Lénine.
 
Car le verbe, contrairement à ce qu’ont pu affirmer des générations de jésuites, d’écrivailleurs et d’avocats, tous exploiteurs à quelque titre de la crédulité humaine, le verbe est toujours mineur, l’action seule compte.
 
Vous n’avez pas encore vu un maçon étudier son métier dans les livres puis venir, d’autorité, en remontrer au vieux professionnel ; le fleuriste et le jardinier ne se contentent pas d’étudier : c’est dans la mesure où ils pratiquent et expérimentent qu’ils acquièrent sagesse et technique ; et les économistes les plus distingués, les hommes de science les plus ingénieux seraient ridiculement impuissants si on leur disait de prendre en mains les outils du cultivateur et de faire pousser ces plantes dont ils ont merveilleusement calculé le développement et les réactions.
 
C’est sur le lieu du travail, par une activité permanente et familière que l’ouvrier conquiert sa maîtrise. Et il en est de même sur le plan social ; ce n’est pas par une moralisation formelle, qui n’atteint jamais le fond intime des individus qu’on améliore leur comportement. Là aussi seule compte l’expérimentation, la vie dans un milieu normal et moral, à un rythme et selon des modalités susceptibles de réaliser un maximum d’harmonie.
 
Nous disons donc délibérément et définitivement : A bas le verbiage scolastique, à bas les formules et les mots toujours impuissants et trompeurs ; à bas la morale verbale ou se réfugient tous ceux qui reculent devant l’effort loyal que nécessite la vie !
 
Créons l’école matérialiste qui se méfiera avec raison des grands mots et des systèmes prometteurs, mais qui, à même le travail et la vie, préparera les hommes puissants et droits de l’avenir.
 
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Nous avons parlé d’éducation matérialiste, non pas pour laisser croire que nous abandonnions une partie, si petite soit-elle, de notre idéal, mais pour dénoncer l’erreur bourgeoise et capitaliste qui voudrait mettre d’un côté l’intelligence, l’esprit, la morale, et de l’autre, dans la zone inférieure des individus, les préoccupations matérialistes. C’est ce divorce entre deux fonctions vitales qui est un des plus graves dangers actuels, celui avec lequel on endort votre besoin instinctif de conquérir ce mieux-être dont vos associations s’étaient fait un flambeau, et qui nous pousse à l’acquisition formelle de notions séparées de la vie et auxquelles on vous a suggéré d’accorder pouvoir et autorité.
 
L’éducation prise dans son sens large et humain est avant tout matérialiste parce que - les découvertes récentes le prouvent - il ne saurait y avoir progrès normaux de l’individu si les divers organes du corps ne remplissent pas leur fonction naturelle. Et cela est indéniable pour nous qui n’avons jamais cru que l’idée soit une parcelle de divin mystérieusement tombée du ciel et enchaînée à une chair terrestre et périssable. L’idée n’est qu’une fonction - souvent hélas ! hypertrophiée - de la complexe nature humaine, et la preuve simple et vulgaire, celle qui devrait bien convaincre tous les ratiocineurs, c’est qu’il n’y a plus d’idée là où il n’y a plus de vie.
 
Contrairement à tous les théoriciens de notre école publique, égarés par leur propre verbiage, nous accordons une importance primordiale au matérialisme scolaire, à tel point que, dans l’école nouvelle que nous allons ouvrir, nous pensons solutionner sur ce plan strict tous les problèmes en apparence si immatériels et si subtils qui s’imposent aux éducateurs. Nous montrerons - et nous l’avons déjà éprouvé - que la lenteur intellectuelle, l’arriération plus ou moins caractérisée ; que les défauts plus ou moins graves dont souffre l’école : la timidité, la paresse, la nervosité, que les dérèglements même de l’imagination, qui donnent si souvent l’illusion d’une heureuse précocité ; que le mysticisme, l’intolérance, la présomption intellectuelle, et cet idéalisme maladif qui donne matière à tant de livres, toutes ces exaspérations de tendances individuelles se corrigent jusqu’à disparaître et se fondre en une bienfaisante harmonie avec un régime de vie approprié, qui rétablisse la fonction naturelle de tous les organes et le jeu normal des réactions dont l’ensemble constitue la vie.
 
Quand on nous amène un enfant paresseux, ou menteur, ou peureux, dispersé, ou fasciné déjà par le livre et ses spéculations intellectualistes, nous ne cherchons pas de solution verbale et extérieure à ces tares : nous rétablissons la santé, et, immanquablement, à mesure que la vie accomplit son miracle, que les fonctions s’harmonisent, disparaissent ces symptômes auxquels on a, à tort, dévolu comme des titres de noblesse et qui ne sont que des formes caractérisées de déchéance physiologique.
 
Ce matérialisme cependant déborde nécessairement les individus plongés dans le milieu social. Cette régénération n’est possible qu’autant qu’une harmonie générale favorise et permet l’harmonie individuelle. Et nous verrons les aménagements que nous suggère cette nécessité.
 
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De ces observations, vous le savez, l’école, toute préoccupée de meubler, de bourrer l’esprit, ne tient aucun compte. C’est pour que vous sachiez du moins formuler selon leur urgence hiérarchique vos diverses réclamations que nous avons affirmé ici la prépondérance universelle du matérialisme éducatif.
 
Surveillez avant tout la santé et la vie de vos enfants, car d’elles dépendent, quelles que soient par ailleurs les circonstances accessoires, les progrès intellectuels, moraux et scolaires dont vous vous préoccupez à juste titre.
 
Nous disons bien santé et vie pour attirer votre attention sur une conception erronée et souvent courante de la santé. Il ne s’agit pas, sous prétexte de soins, de gaver et suralimenter votre enfant jusqu’à le rendre impotent comme une bête à l’engrais, de lui éviter marches, efforts et travaux. La santé est une harmonie à la conquête difficile : elle est en danger toutes les fois que vous constatez en vos enfants une altération de ses grandes fonctions vitales, qu’elles soient diminution ou atténuation de ses réactions, ou, au contraire, excitation et déséquilibre.
 
L’Ecole s’en soucie fort peu, direz-vous.
 
C’est à vous de vous en soucier pour elle et de l’aider dans ses modestes essais en soutenant les mots d’ordre que nous avons préconisés a ce sujet pour les Ligues de Parents.
 
- Exigez de l’air, de la lumière, de la propreté en classe ; faites désaffecter les vieux locaux sombres et exigus ; exigez la construction d’écoles spacieuses et claires.
 
- Protestez contre le surmenage des éducateurs débordés par une surcharge scandaleuse des classes ; protestez contre les habitudes d’une administration qui parque les enfants, pendant six heures par jour, entre des bancs incommodes, véritables instruments de torture ; soutenez les tentatives de libération scolaire dont nous vous parlerons.
 
- A vos enfants exténués par les efforts scolaires, donnés au moins, en dehors des heures obligatoires de travail passif, la possibilité de s’épanouir selon leurs lignes de vie. Six heures par jour - si elles étaient rationnellement employées - seraient largement suffisantes pour les acquisitions indispensables.
 
Quoi qu’il en soit, pour la besogne de bourrage actuellement poursuivie, les heures de classe suffisent amplement.
 
Elevez-vous donc contre la pratique barbare des devoirs à la maison, et exigez l’organisation collective et sociale des jeux et du travail libre enfantins hors de l’école.
 
- N’oubliez pas, enfin, qu’il n’y a pas de pire handicap pour des enfants que la misère physiologique. En réclamant pour vos salaires, en luttant pour le travail et le pain, vous luttez pour une meilleure éducation de vos enfants ; car un régime qui attente aussi gravement que le régime actuel à votre niveau de vie, atteint encore plus profondément vos enfants dans leurs possibilités éducatives, quelles que soient les apparentes sollicitudes, foncièrement hypocrites, par lesquelles on tente de masquer ce crime social.
 
Ne séparez donc pas, dans votre lutte quotidienne, des revendications qui sont aussi intimement liées : il n’y a pas d’un côté votre vie à vous, votre travail exténuant, votre asservissement et votre misère, et de l’autre la possibilité pour vos enfants de profiter de l’école capitaliste pour s’émanciper et secouer le joug de l’exploitation.
 
Ces deux questions sont intimement, matériellement liées : votre misère, c’est la misère de vos enfants, leur défiance scolaire, leur impuissance devant la vie, un anneau seulement de la chaîne qui vous rive à vos maîtres.
 
Le problème scolaire est avant tout un problème social et un problème politique : chacune de vos victoires sociales, syndicales ou politiques est une victoire pour l’école ; chacune de vos défaites est une accentuation des difficultés de libération scolaire ; le fascisme, qui serait votre défaite totale, marquerait comme en Italie et en Allemagne, une régression pédagogique incroyable; votre victoire seule ouvrira à l’école des horizons insoupçonnés, que le triomphe prolétarien en U.R.S.S. nous fait entrevoir et espérer.
 
C’est à dessein que le capitalisme s’est obstiné à isoler l’école de la vie et de la lutte ouvrière. Nous venons de vous démontrer l’interdépendance intime de l’une et de l’autre. Problème capital, croyez-le bien, auprès duquel les questions de méthode, de morale ou de faux idéal que le capitalisme place hypocritement au premier plan, ne sont que des accessoires, des moyens pour le grand oeuvre qui ne saurait s’accomplir hors de son élément essentiel et vivifiant.
 
Non pas que nous sous-estimions l’importance de ces moyens. Encore une fois nous avons voulu rétablir d’abord une hiérarchie afin que les fumées, de l’esprit qu’on agite romantiquement devant vos yeux ne vous empêchent point de voir se lever à l’horizon le grand soleil libérateur.
 
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Et maintenant, ces forces de vie que votre puissance individuelle et sociale aura permis de maintenir en l’enfant, allez-vous les laisser contrecarrer et annihiler par un dressage et un asservissement qui sont tout à la fois l’origine et la conséquence de votre propre asservissement ? Ou bien aiderez-vous généreusement les pionniers qui veulent, par des techniques adéquates, exalter cette vie pour que se réalisent au maximum les personnalités originales qui triompheront un jour des misères de notre régime ?
 
Là est le deuxième grand problème qu’on a rarement agité devant vous et auquel nous apportons une solution pratique souhaitable.
 
Il ne suffit pas au capitalisme d’asservir matériellement et économiquement, donc psychiquement et moralement, l’enfant. Il doit encore se prémunir contre l’audace des rescapés qui, malgré la société marâtre, seraient capables encore de penser et de voir juste, et de montrer la voie.
 
Contre ce danger, le capitalisme dresse le barrage de l’asservissement intellectuel par l’école et les entreprises diverses extra-scolaires qu’elle encourage et entretient.
 
L’Ecole ne vous habitue pas à réfléchir, à penser par vous-mêmes, à voir avec vos propres yeux. Ce serait bien trop dangereux. Dès le plus jeune âge elle vous dresse à penser comme le maître et comme les livres ; elle vous force à voir à travers ces livres d’essence capitaliste les problèmes humains et sociaux ; elle vous gave de formules dont vous n’avez que faire, non pas tant pour garnir et orner votre esprit que pour vous enchaîner à ce rôle réceptif qui annihile peu à peu votre puissance active, vos velléités de réalisation personnelle.
 
L’Ecole ne vous apprend point à agir par vous-mêmes, à vous diriger et a vous commander vous-mêmes. Quel déplorable exemple, en effet, si l’expérience prouvait un jour que des sociétés d’enfants peuvent s’organiser, vivre et prospérer sous la despotique autorité adulte.
 
L’autorité ! Elle domine l’école, matériellement et intellectuellement parce qu’elle domine toute la masse ouvrière, et il faut nécessairement retarder le plus possible l’émancipation de ceux dont les mains puissantes sont prêtes à se saisir de la vie nouvelle.
 
Il semble parfois que nous disions les choses avec quelque brutalité du fait que nous sommes naturellement contraints de schématiser et d’éliminer les accessoires pour mettre en lumière les directions essentielles où doivent se porter vos efforts.
 
Des éducateurs eux-mêmes protesteront devant nos affirmations. Dites-vous bien qu’ils sont des victimes déformées et asservies par des dizaines d’années d’abrutissement scolastique, que chez eux aussi cette culture de classe, obsédante et perverse comme le luxe et les parures des riches, a exercé ses ravages et estompé les vérités premières que vous devez vous autres, ouvriers et paysans, affirmer et faire triompher.
 
Quant à nous, une technique nouvelle que nous avons introduite dans nos classes nous a permis de mieux sentir et de mieux comprendre à quel point l’école déforme le peuple et de redresser nos méthodes conformément aux découvertes pédagogiques récentes, et aux actuelles nécessités sociales.
 
Il s’agit de l’Imprimerie à l’Ecole.
 
La pédagogie actuelle ne part jamais de l’enfant qui est considéré comme incapable d’effort altruiste et de pensée personnelle. C’est l’adulte qui impose ses sentiments, ses pensées, ses habitudes, et jusqu’à son rythme de vie. Et quel adulte ? Le bourgeois jaloux de ses prérogatives, le financier ou l’industriel rapaces qui, par leurs institutions et leurs livres commencent sur les bancs de l’école le dressage qui est pour eux nécessité sociale.
 
Nous connaissons les résultats de ces pratiques : la distraction et la paresse, le dégoût de l’étude, la fatigue inutile et obsédante, la diminution catastrophique du potentiel de vie des individus - cette passivité qui nous ferait désespérer de notre propre cause.
 
Contre cette inappétence et cette passivité, l’école traditionnelle ne peut réagir que par la force. Par les récompenses et les punitions, elle contraint les enfants à accepter ce gavage intellectuel, comme ces malheureuses oies du Périgord qui, l’entonnoir dans le gosier, se débattent en vain contre cette nourriture superflue qu’on ne peut, hélas! ni rejeter ni assimiler.
 
Nous prenons exactement le contre-pied de cette pédagogie. Nous abandonnons nos préjugés d’hommes et de « maîtres » ; nous nous mettons au niveau de l’enfant ; nous tâchons de penser avec lui, comme lui ; et surtout nous mettons à sa disposition une technique merveilleuse qui lui permet de s’affirmer, de s’extérioriser, de faire connaître et de développer ses pensées et sa vie.
 
L’enfant écrit librement - ou raconte librement dès le plus jeune âge - ce qui l’intéresse et le passionne.
 
Avant notre expérience, on croyait volontiers que l’enfant ne saurait vibrer qu’au récit de contes et d’histoires extraordinaires. Et, à notre grande surprise, c’est sa vie surtout qui l’a passionné et dont il ne se lasse point de conter ou de lire les péripéties : vie intime, joies, peines, rêves, jeux, vie des autres enfants, des parents, vie puissante et émouvante de la nature qui seule, dans le désordre actuel, semble avoir conservé sa bienveillance et sa bonté.
 
Ces textes absolument libres et personnels, les enfants les impriment eux-mêmes avec un matériel d’imprimerie que nous avons adapté à nos besoins et dont l’usage est aujourd’hui simple et à la portée de tous (plus de 400 écoles à ce jour pratiquent en France notre technique).
 
Ainsi la pensée libre de l’enfant devient une vivante et émouvante page de son livre de vie. Il la lit et relit ; il l’illustre et la décore ; ses parents la commentent le soir. Des exemplaires multiples de ces pages, réunis et agrafés sous couverture spéciale, forment le journal scolaire qui est échangé avec celui de plusieurs dizaines d’autres écoles, lu donc par Plusieurs centaines d’autres écoliers.
 
La pensée enfantine, loin d’être réprimée on le voit, prend des ailes elle se précise et s’affine ; elle se frotte à la pensée d’autres enfants et ainsi, sans aucun dogmatisme, par la vie et l’activité, nous jetons les fondements inébranlables d’une culture à la mesure de nos enfants et de leurs possibilités sociales.
 
Car cette pensée nous la faisons aussi se confondre avec la. pensée des adultes. Et cela est naturel. L’école actuelle suscite chez les enfants une aversion caractéristique de toute la culture qu’elle voudrait leur imposer et dont ils ne sentent point la nécessité. Nos élèves, au contraire, ont gardé intacts leur curiosité et leur intérêt. Le jeune bambin qui promène avec son père ne cesse de l’interroger sur les phénomènes mystérieux qui l’entourent. Nos enfants, puissamment animés par leur joie de connaître, nous interrogent de même ; ils interrogent ensuite les livres, les films, les disques, tous les documents adultes que nous avons mis à leur disposition. Ils y puisent selon leurs besoins, sans cesser un instant d’exercer souverainement leur sens critique, s’assimilant donc au maximum, et avec sûreté, toutes ces notions qu’ils rejetaient obstinément tant que nous n’avions point trouvé la voie royale qui unit l’individu au monde ambiant, motive et autorise la connaissance.
 
Mais partir ainsi de la base, laisser les enfants s’exprimer librement suppose pose qu’on a jeté bas l’édifice hypocrite de la société scolaire avec sa morale verbale et formelle. L’enfant libre ne dira pas toujours ce qui nous plaît, ne fera pas toujours ce qui est prévu par les règlements. Il suffit que nous soyons persuadés qu’il n’agit pas anarchiquement comme ces pauvres êtres en qui l’oppression a fait disparaître toute personnalité et toute harmonie, et qui s’agitent et s’énervent, à la recherche d’une ligne directrice jamais entrevue ni atteinte. Nos enfants suivent hardiment la ligne de leurs intérêts dominants, leur ligne de vie. Or, la vie est conquête et ascension, enrichissement et harmonie ; la vie est moralisatrice ; la vie enfin est seule éducatrice.
 
Par notre technique, par la fabrication et l’édition du matériel nouveau nécessaire aux activités que nous préconisons, nous avons jeté des fondements solides pour l’éducation nouvelle prolétarienne.
 
Demandez aux éducateurs de se renseigner sur notre mouvement ; intéressez-vous-y vous-mêmes. Apprenez à comprendre tout ce que le livre représente de dogmatisme et d’oppression ; et, à l’enfant qui, la tête dans ses mains, mémorise bêtement et passivement une leçon non comprise, préférez toujours l’élève qui vit, qui frémit sous l’impulsion d’une pensée intérieure ou d’une possibilité de réalisation, qui s’exprime fortement, dédaigneux de tout l’hypocrite conformisme scolaire ou social ; penchez-vous sur ces petites vies et, comme nous, vous nous sentirez renaître au contact de tant de candeur et de tant d’espoirs ; vous comprendrez alors la puissance de l’activité libre ; vous apprécierez l’effort des éducateurs qui préparent vos enfants à secouer les chaînes séculaires du mensonge et de l’erreur.
 
Et pourtant, cet élan lui-même que nous réservons en notre jeunesse, cette base inébranlable de la nouvelle vie ne seraient rien encore si l’enfant devait continuer à étouffer dans les cadres conformistes d’une société autoritaire. Nous verrons dans notre prochain et dernier article comment l’organisation coopérative du travail et de la vie scolaire, la liaison entre l’école et la vie, sont les conséquences naturelles et inévitables de notre Innovation, l’aurore d’une conception nouvelle de l’effort social, embryon et promesse de la société libérée pour laquelle se dévouent tant de cœurs généreux.
 
C. FREINET.