La réforme du C.E.P.E., 1er janvier 1938

Freinet rappelle les propositions du mouvement pour un accès au second degré pour tous ceux qui ont suivi l’enseignement du premier degré. Le second degré deviendrait ainsi la suite naturelle du premier degré. 

Et améliorer cet examen pour éviter le bachotage et le bourrage de crâne.  

 

Le Conseil supérieur et le ministre devant se prononcer à ce sujet au cours des premiers mois de 1938, les diverses associations et personnalités s'agitent et présentent des suggestions.

Le rapport que nous avons établi en commun avec le Groupe du Nord et le Groupe Français a été un des éléments les plus sérieux qui a été en bien des ras la base de toutes discussions. Nous avons fait certainement, en l’occurrence, besogne utile et profitable.
Trois tendances se font jour actuellement :
1) Les secondaires, en général partisans d’une culture qui pour être la culture doit, selon l’avis de M. Piéron lui-même, commencer très tôt, sont opposés à un certificat d’études unique donnant accès au secondaire, parce que cet examen ne pourrait pas, pratiquement, intervenir avant la 12e année. On préconise alors soit un examen spécial (c’est ce qui existait), soit un C.E.P.E. en deux parties, l’une très tôt, donnant accès au secondaire, l’autre à la fin de la scolarité, comme fin d’études.
Le mal serait, à notre avis, doublement aggravé.
2)  Il existe dans l'enseignement primaire même un courant créé par les fabricants de certificats d'études en série, et pour lesquels il ne saurait exister de travail effectif et d’éducation qu’en fonction de cet examen. On propose alors dans ces cercles de reporter le C.E.P.E. à la fin de la scolarité.
3) D’autres enfin, et nous souhaitons qu’ils soient écoutés, maintiennent les conditions générales de notre rapport de juillet. Ils rappellent que si l’on veut un 2e degré comme suite naturelle du premier degré il faut que tous ceux qui ont satisfait à l’enseignement du premier degré puissent y avoir accès. Un examen spécial, même si c’est sous la forme d’une première partie du C.E.P.E. ne fait qu’opérer un triage prématuré et rejette aussitôt la grande masse hors de cet enseignement qu’on voudrait démocratique.
Et surtout que le C.E.P.E. ne soit pas reporté à la fin de la scolarité, sinon ce sera, qu’on le veuille ou non, le bachotage qui étendra ses ravages à la scolarité prolongée qui semblait s’en dégager et s’orientait résolument, de ce fait, vers les techniques nouvelles.
Nous choisissons naturellement pour le moindre mal et demandons un examen unique, amélioré pour réduire les causes de bourrage, donnant accès aux classes d’orientation et laissant l’instituteur libre pour les dernières années de la scolarité.
Les examens tels qu’ils sont conçus et organisés aujourd'hui sont un mal pour quiconque envisage la formation des enfants et les conditions de travail des éducateurs. Nous sommes d’avance partisans de toutes solutions qui réduisent ce mal nu minimum. De toutes façons ce n’est pas l’organisation des examens en elle-même qui régénérera l’enseignement, mais les possibilités que cette organisation laisse aux enfants et aux éducateurs pour les véritables tâches d’éducation dans le sens des techniques nouvelles.
 
Célestin Freinet
 
L’Éducateur Prolétarien, n° 7, 1er janvier 1938 dans son intégralité