Atelier n°18 : «Quelle transférabilité aux adultes ? FLE, alphabétisation»

23/08/2017

Atelier 18 : Quelle transférabilité aux adultes ?
FLE, alphabétisation

 

 

Sommaire

Tour de table
Les passeuses
Objectifs de l'atelier
Contexte d’exercice de Françoise et Sybille
Débat : faut-il ou non travailler la combinatoire quand on travaille en alphabétisation avec des adultes ?
Une séance d’alphabétisation
Quelques remarques en vrac
FLE
Les outils d’écriture

 

Tour de table

Quelques attentes des participants (de nationalités multiples!) : quel travail en co-éducation (association Étincelles pour La Villeneuve) ; comment tirer parti du plurilinguisme dans un groupe ; formation des futurs enseignants (pas à la PF mais en utilisant la PF) ; MNLE ; de plus en plus de jeunes étrangers en CFA → besoins ! ; jeunes adultes en IME ; inclusion des réfugiés dans les structures scolaires (travail de recherche au niveau européen) ; formation de futurs pédagogues en FLE ; formation des adultes en général ;

Et chez nos voisins ?
en Belgique : un cours de psycho-pédagogie est obligatoire pour les futurs enseignants. Ainsi, à Liège, 7 établissements travaillent en PF donc les futurs enseignants sont tenus de faire un stage d’au moins 1 mois dans une classe en PF !

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Les passeuses

Françoise Vassort est PE à la retraite. Elle a rejoint le secteur adultes de l’ICEM il y a 2 ans. Elle a une grande expérience en CP CE1 en MNLE ; comment le transférer aux adultes ?
Sybille Grandamy n’est pas PE mais professeur de FLE, formée en Angleterre. Elle a rencontré Danielle De Keyser, qui a montré comment la Méthode naturelle de lecture-écriture a été transposée avec succès à l’apprentissage du lire-écrire des adultes illettrés débutants. Elle a beaucoup travaillé avec elle, et a à présent pris son relais. Elle est formatrice en MNLE, et a créé le Secteur Adultes de l’ICEM il y a 3 ou 4 ans. Elle est co-auteur du Diclé.

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Objectifs de l’atelier

Il s’agit d’étendre le secteur adultes. Un forum sera ouvert le 15 septembre pour faciliter les échanges entre formateurs. Il permettra aussi de mettre en place des correspondances entre les associations d’alphabétisation ou de FLE.

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Contexte d’exercice de Françoise et Sybille

F. et S. sont dans la même association (celle-ci). Elles travaillent en PF (malgré les réticences de certains formateurs...)

Dans cette association, il y a 7 groupes d’apprenants. Elles s’occupent du groupe de grands débutants en lecture / écriture mais qui parlent déjà un peu français. Les apprenants sont principalement des femmes qui sont en France depuis longtemps et qui veulent apprendre à lire etécrire pour accompagner leurs enfants ou pour travailler. Ce groupe se retrouve 3 fois par semaine, 2h par séances, avec 2 ou 3 formateurs à chaque fois et comprend entre 8 et 12 apprenants.
Pour ce groupe, il y a 7 bénévoles en tout qui n’ont pas tous les mêmes méthodes mais chaque binôme de bénévoles fait un compte-rendu au binôme suivant ; ils essaient d’utiliser les mêmes outils même si la réflexion n’est pas toujours suffisamment approfondie. Ainsi, le journal peut donner une idée de ce qui est faisable en alphabétisation (analyse de séances, ... ) C’est le groupe qui marche le mieux dans l’association, avec la meilleure assiduité.
La continuité n’est pas facile. En effet, il y a des entrées et sorties permanentes en cours d’année. La MNLE est idéale dans ce genre de contexte parce qu’on prend les gens où ils en sont. On n’est donc pas confronté au problème d’avoir raté quelque chose.
 

Dans l’association, il y a aussi deux soir par semaine un atelier qui regroupe tous les niveaux d’apprenants (alphabétisation et FLE). C’est important qu’il y ait cet atelier pour sortir des manuels : les bénévoles sont obligés de faire autrement ! Le groupe travaille à la fois sur l’oral, l’écrit, et la lecture. Elles ont mis en place une grille de suivi des textes pour que l’écriture-expression reste au centre et puisse déboucher sur les journaux, les recueils, ... Le recueil est sorti quand la grille est remplie, puis distribué à tout le monde, afin que chacun puisse lire son texte et les textes des autres.
En tant que formateur, on est souvent face à des bénévoles qui veulent des recettes magiques pour que ça marche. Il faut donc leur proposer des outils pour enclencher les choses.

exemple :
Le Mini dico sur le principe d’Odilon auquel se référer lors de l’écriture de textes libres. Il est adapté à l’adulte.
Chaque apprenant a son dico. Il est évolutif avec des pages blanches pour prendre des notes.
C’est un outil en construction, il manque sans doute des choses (des pages sur le travail, les textos,... ) mais il ne faut pas qu’il devienne trop gros pour être transportable facilement.
Le fait d’y rajouter des illustrations fait débat. Le choix qui a été fait est d’avoir une petite image qui permet de repérer facilement le thème de la page, mais pas une image pour chaque mot.
C’est un vrai apprentissage pour s’approprier cet outil : qu’est-ce que je veux écrire ? Je prends mon dico ; dans quelle page je vais chercher ? Où est le mot ?
Quand on travaille avec des adultes, il est important de ne pas utiliser d’outils infantilisants.

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Débat : faut-il ou non travailler la combinatoire quand on travaille en alphabétisation avec des adultes ?

Danielle De Keyser estime que, avec le peu de temps qu’ont les adultes, il faut en passer par la combinatoire.
Les avis divergent dans le groupe.
Sybille est d’avis que l’étude du code est nécessaire. Ce n’est pas le but ultime, mais elle fait partie des habiletés d’un lecteur expert. Françoise ne partage pas cet avis, parce que c’est un outil, pas un objectif d’apprentissage.
Une congressiste remarque qu’elle n’a pu apprendre l’arabe qu’en apprenant à écrire sa combinatoire.Sybille répond que c’est très différent pour les migrants parce qu’ils n’ont pas de conscience
phonologique. Celle-ci vient longtemps après. Au départ, ils n’entendent pas les consonnes, seulement les voyelles. Pour écrire, ils ne peuvent pas s’appuyer sur le son parce qu’ils ne peuvent pas le prononcer correctement.
Ce débat existe aussi en Belgique.
Mais le fait que l’écriture reste au centre de l’apprentissage fait consensus. Consensus aussi sur le fait qu’il ne faut surtout pas passer par le code au début ! (en tout cas pas avec les adultes)
Il y a une langue écrite qui est un code en lui-même. Le signe fait tout de suite sens. Il n’y a plus vraiment en français de correspondance graphème-phonème. Les enfants sourds apprennent sans le son. La représentation de la lecture comme déchiffrage est encore trop présente. Il faut que l’enseignant ait une représentation claire de « Qu’est-ce que lire ? »
À partir d’un texte, on recherche des analogies pour mémoriser. Dans tous les cas l’écriture de textes reste centrale. En MNLE l’apprentissage du code se fait naturellement par la répétition, les analogies, les « C’est comme ... » Les apprenants vont découvrir qu’ils peuvent apprendre par eux-mêmes

Un outil qui permet de garder une trace des « C’est comme »

 

cou man  

ma cousine

le couteau

maman

le manteau

 
     

 

 

 

   

C’est important que ça vienne d’eux mêmes.

Attention, dans la langue française, 75 % des syllabes ont 3 lettres !

Autres outils
Les recueils de textes d’apprenants
Il y en a un par an. Ce sont des textes très simples, très beaux, qui peuvent faire un matériel de lecture très pratique pour les apprenants.

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Une séance d’alphabétisation

Au début de l’atelier : une personne fait la date, et une autre affiche les prénoms des présents. Ces rituels font émerger des « C’est comme » (beaucoup de prénoms en Ma. donc il faut regarder la fin du mot).

Un texte, rédigé collectivement à partir d’un Quoi De Neuf, va servir de base d’entrainement à la lecture. Le texte est écrit devant et avec le groupe, au tableau, mot à mot, pour provoquer les « C’est
comme ... »

Chacun choisit une activité en fonction de son niveau : écriture « obligatoire » ; lecture des recueils de textes ; fichiers LIRE de l’ICEM ( ici ) (A B : pour des pré-lecteurs pour développer capacité
d’anticipation, discrimination visuelle, repérage, ... ; C ; D vient de sortir) ; entrainement au graphisme ; reconnaissance des lettres avec matériel ; taper son texte ; étiquettes de chaque texte pour s’entrainer à remettre les étiquettes dans l’ordre ; une étiquette = une ligne de sens ; dictées-recherches : on dicte le mot, il cherche l’étiquette ; dictées à deux ; refaire des phrases avec les étiquettes ...
Le formateur accompagne ce travail.

Il est important de prendre un temps pour un bilan à la fin d’un atelier et au début de l’atelier suivant : qu’est-ce que vous avez fait à l’atelier dernier ?

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Quelques remarques en vrac

Quel matériel pour un cours d’alphabétisation ?
un porte-vues avec les textes collectifs, le petit journal, les tableaux des « C’est comme ... » ; un petit cahier d’écrivain

Penser à préciser pour chaque activité quel est l’objectif : si on lit ensemble un de nos textes, c’est de l’entrainement ; si on découvre le recueil des correspondants, c’est de la lecture-découverte.
Il est important de discuter sur les outils ; à quoi ça sert ? Comment on s’en sert ?
C’est de la co-construction, chacun apporte sa manière de faire, son mode d’utilisation.
Toujours accueillir l’imprévu !

Intervention d’une congressiste : dans mon association, il y a un bénévole par apprenant ; l’émulation du groupe manque !
Effectivement, l’interaction est importante. Des amitiés peuvent se lier. On apprend ensemble, on est poussé par les autres. Dans un groupe bienveillant, on avance beaucoup plus vite !

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FLE

Il n’y avait pas grand-chose qui existait en PF. L’idée était donc de développer une méthode naturelle de FLE.
Pour un débutant complet : on commence la première séance par les présentations. C’est ce qui va lui servir dans la vie courante, il y a urgence à l’apprendre.
On se vouvoie.
« Comment vous vous appelez ? Vous habitez où ? Vous avez des enfants ? ... »
On n’utilise pas de questions inversées !
Dès la première séance on part d’images, découpées dans des magazines, ou puisées dans une banque d’images, comme celle-ci très bien faite, avec de la mixité.

Au départ, la personne décrit comme un enfant qui apprend à parler donc elle commence par un mot, et le formateur fait la phrase. C’est l’apprenant qui choisit l’image donc il part de quelque chose qu’il connaît. Puis il écrit le texte de son image, le relit. Le savoir se construit petit à petit.
Peu à peu, les apprenants se détachent des images et vont pouvoir raconter leur vie. Mais ces images permettent de se lancer. C’est souvent difficile, il y a un conflit de loyauté pour des personnes qui sont en France mais n’ont pas envie d’être là. Certaines ont des blocages vis à vis de l’apprentissage de la langue. Donc ne rien imposer, y aller tout doux, à partir de choses qu’ils choisissent. Très souvent les gens pleurent. « C’est difficile ».

Une séance de 1h30 dans un groupe complètement hétérogène (mélange des groupes FLE et alpha) :

Les bénévoles s’emparent de ce qui est dit. Ils notent au tableau tout le vocabulaire découvert dans le QDN et elles rajoutent des choses (familles de mots, points de grammaire).
Les gens qui ne savent pas bien lire et écrire mais qui parlent participent mieux que ceux qui savent lire mais sont en FLE. Donc les groupes des alpha sont valorisés.

La lecture se fait à partir des textes de la fois d’avant. Tout le monde a tous les textes.
On fait soit de la lecture tous ensemble, en reprenant la prononciation, ... , soit avec un petit groupe par bénévole. Même les alpha ont leur texte à lire.

C’est un travail individuel.
On sort tous les outils (voir ci-dessous), et chacun écrit son texte, au besoin en dictée au formateur.
Quelqu’un qui a parlé pendant le QDN peut écrire son texte.
Pour le travail de « grammaire », ça peut être intéressant de demander : « comment ça se passe dans votre langue ? » Par exemple, dans certaines langues, il n’y a pas de conjugaisons ou pas d’articles.
Mais en avoir conscience est une chose, et le faire ... c’est une discipline !

 

Un manuel de FLE ?
En MNLE, pas besoin de manuel. Mais s’il en faut un, celui-ci est sans doute le plus indiqué :

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Les outils d’écriture

Les Petits livres des éditions Célestines (voir ici ) peuvent être faits avec des adultes, mais attention, il faut les taper, pas les faire manuscrits, c’est trop dur. Une police qui marche très bien : Comic
Sans MS. C’est une écriture ronde très lisible.

Une contribution de Robert Jeannard, membre du secteur Adultes :
Au contraire de ce qui est dit ici, je pense qu'il est plus facile de commencer par les faire manuscrits : pas besoin d'ordinateur, on termine la séance d'écriture avec les petits livres en main. Si on a une photocopieuse sous la main, chacun repart avec non seulement son petit livre mais ceux des autres. Pas de "devoirs à la maison" pour le formateur !
Qu'est ce qui est "trop dur"? L'écriture manuscrite? Il me semble que c'est un objectif à ne pas perdre de vue, même à l'époque des claviers et des écrans, et que beaucoup d'apprenants peuvent prendre plaisir à calligraphier leur petit livre. Après la séance, on peut valoriser les productions en les mettant en ligne, comme livres à feuilleter.
Exemples: Souvenirs de Brice, Souvenirs de la délinquance ou Le magnifique lampadaire.
Il suffit alors d'envoyer les liens par textos aux apprenants pour qu'ils puissent regarder leurs petits livres sur leurs téléphones et les montrer à leurs amis.

 

 

 À la fin de l’atelier, les bénévoles prennent en photo tous les textes des apprenants, puis font le compte-rendu de l’atelier et tapent les textes pour l’atelier suivant.
Ils remplissent également une feuille avec les remarques de lecture ou de didactique faites pendant la séance.

 

Alors que la fin de l’atelier approche, un congressiste demande : « que répondez-vous finalement à votre question qui était le titre de votre atelier ? "Est-ce que la PF est transférable avec les adultes ?" »
Oui évidemment, avec l’adaptation à des spécificités (temps, ...). Il est certainement utile d’interroger nos pratiques au regard des fondements théoriques de la PF. C’est, entre autres, ce travail qui sera proposé sur le forum, travail d’autant plus possible et légitime que les échanges sur les pratiques seront nombreux.

 

 

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