Dysharmonies, déficiences, incapacité, handicap

Conférence Marc Chatellier - Salon de Nantes 2008

Notes prises par un membre de l'IDEM44 le jeudi 27 mars 2008 lors du salon Freinet de Nantes

 

Conférence Marc Chatellier

 

Dysharmonies, déficiences, incapacité, handicap

 
Questions pour connaître le public. Beaucoup de personnes du milieu spécialisé (90%).
 
 

Se présente :

 

Instituteur spécialisé, travaille dans le secteur de l’adaptation scolaire.
Doctorat en sciences de l’éducation sur l’articulation de tous les enfants-élèves qui relèveraient du secteur de l’adaptation et de tous les enfants-élèves du secteur de l’intégration (ou maintenant, élève en situation de handicap).
 
 

I – Perspective historique qui a fait naître la notion de handicap

 

 
Cette notion n’est pas opérante aujourd’hui. Ce terme veut tout dire et rien dire.
 
 

Concept du handicap

 

Sur le plan juridique, la France a ratifié en 59 la charte de OMS qui donne une nomenclature du handicap. L’Education Nationale en 1988 et 1989, a confirmé la ratification et l’a précisée autour de trois termes
 
-          déficiences
-          incapacités
-          désavantages
 
Terme handicap : vocable qui pose une mesure à un temps T, exprime un état.
A partir de ce moment, le handicap devient « irréversible ». Insiste sur différence entre déficience (mesurable) et handicap (état figé).
- Claude Bernard et psychiatres : reconnaissent que le terme de handicap est flou et est non –opérant du point de vue thérapeutique (mesure d’état).
- Ce concept de « handicap » renvoie (thèse « Le normal et le pathologique » : Georges Tanguilène) à qu’est-ce qui définit la norme, et qu’est-ce qui définit le pathologique. Où est la frontière ? Sont-elles fixes ou ___________ ? Qui parle ? Qui dit, « lui il est normal, lui non », quel bien-fondé, sur quoi se base la classification ?
 
Question sur l’altérité : élément qui entre dans le système mais n’est pas comme les autres éléments du système.
Conséquence sur le sujet lui-même.
 
Evolution de cette notion : 1909 création écoles de perf.
En 67 : classe d’adaptation
En 74 : CPPN (classe préprofessionnelle de niveau)
En 76 : SES (section éducation spécialisée)
En 89 : SEGPA
 
Qui oriente-t-on dans ces écoles ? Enfants-élèves qui n’entrent pas dans les apprentissages et que l’on a du mal à classifier.
On parle de « débile » : « léger, profond » (graduation).
Entre 1897 et 1909, gouvernement voit bien que les enfants ne sont pas égaux face aux apprentissages, donc on demande à deux médecins (Binet et Simon), mise en place de la psychométrie.
Instrument scientifique pour distinguer enfants « normaux » et élèves qui ne le sont pas. On parle d’arriération, de débilité mentale.
 
Deuxième période qui suit :
Période psychiatrique (Dr Lagache) : troubles du comportement, comportements hystériques (jusqu’en 60-65) 
 
1968 : idée d’émancipation du sujet (Gilles Deleuze, Gattary…). Fondent le courant de l’anti-psychiatrie : on dénonce la posture de l’utilisation du qualificatif « handicap ». Tout le monde est sujet, plus de soignant, plus de soigné, tout le monde est pareil.
 
Post 68 jusqu’en 80 : approche sociologique (Bourdieu, Establet, Passeron…). Leurs travaux montrent que l’on a beaucoup plus de chances de réussir si on naît d’une classe favorisée. Donc école plus compliquée pour classes « inférieures ». Le terme de handicap pose aussi souci du point de vue sociologique : « handicap social ».
 
II – Décrire ce qui existe actuellement, les dispositifs, au sein de l’école élémentaire et collège
 
Dernière mouture de la classification de 89 :
-          Déficience (motrices, sensorielles, langagières ou cognitives) : mesurables et avérées médicalement. Dans représentations collectives, souvent associées à handicap physiques. Mais pas d’irréversibilité.
-          Incapacités : observables mais dont on ne peut pas préjuger de l’origine.
-          Désavantages : toute situation pour un enfant–élève liée à une dysharmonie (ensemble d’articulation entre développement cognitif, sensoriel, langagier, moteur) où la cohésion des 4 processus ne se fait pas de façon unitaire. Dysharmonie ne veut pas dire terrain pathologique (pas névrose, perversion…. Pas de thérapie, mais écarts entre performances réels et formes de comportement).
 
Ministère de l’EN a voulu la disparition des classes ghettos. A partir de 90, on a décidé de séparer ce qui relevait du système de l’adaptation du système de l’intégration.
De 1987 à 2005, on parle de l’intégration des enfants handicapés. Si intégration, cela signifie qu’ils sont « dehors », et que l’on veut les faire venir « dedans ».
Depuis 2005, on parle de scolarisation des enfants en situation de handicap.
En 1975, Simone Weill fait une loi reconnaissance des droits aux personnes handicapées : toute personne a droit à formation continue, marché du travail… comme tout autre citoyen.
On est passé d’une logique de dedans-dehors, à tout le monde dedans.
Ce qui veut dire personnel qualifié et posture professionnelle adaptée. Or actuellement, postes de personnes non-qualifiées (AVSI, EVS…). On met les enfants, les parents et les enseignants en danger.
Ce qui est important, c’est le regard que porte l’adulte sur ces enfants.
 
De 2 ans et demi à 6 ans, il n’existe aucun dispositif, aucune structure pour accueillir ces enfants.
Actuellement, l’intégration se fait au bon vouloir des maîtres et maîtresses.
 
 

Pour le 1er degré :

 

Mise en place des CLIS. Accueille enfants-élèves avec même types de soucis (en théorie). Normalement 4 CLIS par circonscription : pour déficients auditifs (partiel ou total), déficients visuels, déficients moteurs, autres (déficients « cognitifs »).
 
 

A partir du collège :

 

UPI : unité pédagogique d’intégration., normalement devait reproduire classification CLIS (dans les textes). Il y en a 9 dans le département. Or, actuellement les UPI accueillent tout le monde.
 
L’accueil est donc pensé de 6 à 16 ans. Après, il n’y a plus rien.
Pour adolescents déficients auditifs brillants, sortie de 3ème sans possibilité de suivre une scolarité au lycée normale. Solution : CNED.
 
Permanence du regard psychométrique : qui revient en force, logique mercantile (proposition : rééducation du trouble de la cognition).
Appel au psychologue scolaire pour des évaluations, donc utilisation de la psychométrie. Qui ne sont plus ceux de Binet-Simon, mais ce sont quand même des dispositifs qui mesurent.
 
III – Quelque soit la déficience, notion d’altérité, singularité du sujet apprenant.
 
Enfant-élèves en situation de déficience, incapacité, dysharmonie, est quand même un sujet apprenant.
Que repère-t-on chez ces sujets ? Les mêmes caractéristiques qu’un élève « ordinaire » :
-          même type de développement psychique (capable de dépasser le stade de la curiosité primaire, stade de l’égocentrisme…). L’école doit leur permettre de s’émanciper.
-          Sujet (comme pour reproduire le système grapho-phonétique), peut s’en saisir pour les faire siens
-          Sujets qui sont dans la même structure concernant la frustration : ce qui ne est insupportable est d’être confronté à son erreur, de même qu’un élève « ordinaire ». Symptomatiquement, cela peut prendre des formes plus aigues, mais c’est le même processus.
-          Sujets soumis à la même dialectique que sujet ordinaire : ce qui est dur, c’est de passer du principe de plaisir au principe de réalité. Ce qui passe à travers la voix du maître peut être castrateur.
-          Sujets chez qui la théorie des stades de Piaget est opérante (stade sensori-moteur, stade opératoire, stade pré-formel (manipulation binaire et introduction d’une troisième variable), dernier stade).
Questions :
 

 

 

Savoir si vous incluez problème de maniaco-dépression ou schizophrénie (pour ados), que peut-on faire pour eux ?
Reprécise qu’il parle du monde scolaire. Dysharmonie ne relève pas du stade de la pathologie. Adolescent scolarisé dans structure pour cela n’est pas handicapé, mais malade.
 
Programme d’Enrichissement Instrumental (PEI). Travaille sur un Rased, ce programme est moins rigide que d’autre (rapport aux théories de Piaget…). Permet de se mettre dans une position critique sur rapport à élève, condamne la dérive actuelle, mais cet outil peut être utilisé correctement. Ne pas caricaturer ces démarches.
MC dit qu’il faut se méfier des processus d’apprentissages qui ne se réfèreraient qu’à Freud. Même s’il faut réfléchir sur le côté psychanalytique. Il faut lire la « littérature » consacrée à ces thèmes. Intérêt du PEI mais dénonce l’utilisation qui en est faite actuellement.