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Monotypes, Rencontre avec Isabelle Gomond, peintre

Septembre 1997

 

 

Les monotypes

 

Dans cette partie de mon travail, j’ai gardé comme constante l’abstraction. Il me semble que l’empreinte, le transfert, les reports de matières donnent toujours des effets si particuliers qu’ils n’ont pas besoin de sens, de définition. Dans certains, l’esthétique s’affirme à part entière et je respecte cette vie en veillant à ne pas les enfermer dans un cadre formel. Pour d’autres, j’ai un cheminement différent à partir de ce que la matière me propose d’elle-même. Je suis alors encline à travailler la forme jusqu’à ce qu’elle devienne figurative. Cela fonctionne comme un sens supplémentaire, des ondes qui vont orienter différemment mon travail.

Le Poisson-symbolon

 

 

2ème passage

3ème passage

4ème passage

Il y a eu aussi plusieurs séries. Les personnages issus de références personnelles, lectures, cinéma, qui me sont chères et m’ont marquée : on peut se reconnaître à certains moments dans un "Gargantua" et à d’autres dans une "Juliette". Ils peuvent aussi surgir de mon passé… des chansons enfantines, c’est si vaste ! Les Poissons : je ne suis pas attachée au document réel, à la transposition de la nature, ça ne m’intéresse pas. J’ai davantage le désir de traduire des poissons qui n’existent pas, de trouver un graphisme qui crée le caractère. A travers leurs couleurs, leur assemblage sur la feuille, leur interpénétration avec le fond, leur façon d’agir, d’être dans la vie, chacun peut reconnaître le poisson qu’il pourrait être.

Je travaille en ce moment une série que j’ai appelée Civilisations. Elle est plus intimiste, tout à fait basée sur la sensation que nous sommes dans un système de spirale ascendante qui acquiert la technologie, les savoir-faire et qui "se casse la gueule", se pourrit de peur de trop bien faire. J’ai l’impression que nous sommes dans cette phase où, en même temps, on atteint des niveaux qualitatifs de vie et ressent une déshumanisation, un rejet de la capacité d’être et du faire de l’homme. Je m’interroge sans cesse sur ce que nous ont laissé les civilisations passées : des signes artistiques, calligraphie, fresques, des bouts d’objets un peu cassés, des énigmes en fait.

"Ce peintre a trouvé là une expression qui semble convenir à sa spontanéité, à son dynamisme, à sa fièvre de création, ce besoin de se découvrir elle-même et de tester son imagination en se mesurant à l’inattendu, en le faisant sien." Pierre Bellon, artiste peintre, Nevers.

Et c’est ce côté énigme, "partir à la quête de…", qui a déclenché cette étape de mon travail : chaque tableau décrit le petit morceau d’un énorme puzzle. Il va falloir chercher, retrouver des signes, aller d’un tableau à l’autre, les reconnaître, découvrir des analogies, comprendre, donner un sens. Lors de ma prochaine exposition – qui, j’espère aura lieu bientôt – j’aimerais voir les gens s’amuser dans une sorte de parcours, avancer, revenir et tout à coup saisir le sens de ce que j’ai voulu faire.
Comment expliquer qu’un monotype va vivre de façon individuelle. Tout en ayant l’air d’être dans une réflexion, dans un choix, je suis presque inconsciemment sensible à la matière, à ce qui se passe en dehors de moi. Il va donc être issu à la fois de mon projet et de la couleur, de l’outil qui vont s’imposer. Pour le même monotype, il peut y avoir deux ou trois empreintes mais aussi, huit, neuf ou davantage selon le besoin de le nourrir. Ça ne peut s’expliquer.

Les Poissons: multitude

Mais ce que je peux affirmer, j’en suis au 50ème de la série Civilisations, c’est ma quête des signes visibles, de l’héritage que nous avons reçu et que nous devons transmettre. Cela me permet de renouveler mon regard, de rebondir avec de nouvelles idées et mes mains vont s’autonomiser. Le point de départ, alors, va devenir illisible, parce que pris dans la matière, la composition et le thème, pour le regardeur, n’aura peut-être pas forcément d’importance.
Ce qui importe plus que tout, c’est la créativité qui est un parti pris et une quête à la fois. L’artiste est celui qui met des garde-fous, cherche à faire progresser l’esprit critique et l’évolution du groupe où chacun a son rôle, et, comme l’ont fait tous ces hommes et femmes, tel Jules Verne, par exemple, fait de nouvelles propositions à la société. Car c’est sur celles-ci que les humanistes, les sociologues, les scientifiques vont s’accrocher pour avancer.

 

Isabelle Gomond est née le 28 février 1960 à Paris.
En 1991 elle a pris la direction de l’école d’art Ellipse à Nevers avec Philippe Libois.
En 1995, elle crée sa propre école : l’atelier L’Eau sauvage à l’Isle-sur-la-Sorgue ave cThierry Savini.
Principales expositions
A Paris en 1986, 1987, 1989
1989 : galerie Le Vieux Pressoir, Deauville.
1960 : au Centre culturel Toulouse-Lautrec à Vélizy,
Galerie Diagondos à Clermont-Ferrand.
1991 : galerie Vision d’artiste à Nevers.
1994 : galerie Vision d’artiste, Utrillo et les peintres régionaux au Palais ducal de Nevers.

 

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