Françoise Vassort est partie en classe de mer à Quiberon, en avril, avec sa classe : pour ses 23 CP/CE1 parisiens, c’est une rupture avec le quotidien de la famille, de la ville et de l’école, potentiellement riche en sujets de découverte. Une exposition a été organisée au retour. Le compte rendu de sa réalisation nous permet de comprendre l’interaction entre l’expression des enfants et la part de la maîtresse pour une meilleure construction des connaissances.
Au retour de Quiberon, on fixe comme objectif une exposition, au mois de juin, pour les parents et les autres classes. Elle sera l’expression sous toutes les formes (textes, dessins, maquettes, photos, vidéo...) des découvertes, des expériences vécues, des connaissances acquises pendant le séjour et après. Ce sera le travail freinétique des six semaines à venir.
Je propose la reconstitution collective de l’emploi du temps de la semaine à Quiberon. Ce travail de mémoire permet aux enfants de se replonger dans des situations vécues et les aide à dépasser les souvenirs impressionnistes et les « c’était super ! » spontanés. Ils vont pouvoir ainsi fixer ce vécu par des textes, des dessins et partir à la recherche d’informations complémentaires pour prolonger cette expérience et développer des connaissances.
L’emploi du temps de la semaine à Quiberon a rempli peu à peu le tableau. On a maintenant sous les yeux la liste de toutes les activités et visites effectuées. Chacun choisit son thème et les groupes se forment. On inscrit toutes les propositions sur une grande feuille.
On y travaille chaque jour en classe et le samedi, on décloisonne avec les deux autres classes de CP /CE1 de l’école avec lesquelles nous sommes partis (c’était un projet de tout le cycle 2). Le groupe qui travaille sur Carnac va dans la classe de Danièle, le groupe qui travaille sur la pêche à pied et les animaux de l’aquarium va chez Rachel, le groupe qui travaille sur l’excursion à l’île aux Moines, les différents aspects de la côte (plage, falaise...), est dans ma classe.
Les enfants expriment leurs sujets d’intérêt et je les aide à structurer des propositions. Au fur et mesure les activités s’organisent :
- un groupe va à la BCD chercher des livres sur la mer ; on cherche tout ce que l’on a dans notre coin bibliothèque, on en rapporte aussi de chez soi. On trie les documentaires, les albums…
- Kévin propose de faire un abécédaire de la classe de mer. Cinq enfants s’inscrivent. Ils commencent leur recherche de mots (A comme aquarium... G comme gobi un poisson qu’on a pêché... « Françoise, est-ce que catamaran s’écrit avec un K ? Non. Dommage, on ne trouve rien pour K ! »)
- Romain présente au Quoi de neuf un livre documentaire sur les animaux du bord de mer. Il me demande de lire les quatre pages sur le macareux moine (parce que la veille Augustin avait lu une poésie qu’il avait trouvé sur le macareux). Tous les deux, ils vont faire un panneau sur le macareux. Leur texte commence ainsi : « Un oiseau que l’on aime mais que l’on n’a pas vu à Quiberon. »
- Carina propose un livre d’histoires de mer imaginaires dont les poissons sont les héros ; quatre enfants s’inscrivent dans son groupe.
- Marine a construit un menhir en carton avec son père. Elle le présente au Quoi de neuf. Afflux d’inscriptions pour construire des menhirs. Il y aura un mini champ de menhirs à l’expo !
- Akim qui n’est pas parti en classe de mer avec nous, mais qui a pu aller à la mer le week-end du 8 mai, a rapporté un sac de coquillages qu’il présente aussi au Quoi de neuf. Il a aussi rapporté des cartons pour fabriquer des menhirs.
- Thomas a apporté une vidéo du « National Geographic » sur la faune des récifs coralliens. Discussion après la projection. Trois enfants écrivent un texte pour l’expo et pour le journal.
- Ha Young prépare un courrier pour les correspondants : un texte qui raconte ce que l’on a fait, des photos, une carte de Quiberon…
- Clara propose qu’on écoute la cassette de « Leïla et la baleine ».
- certains lisent des livres sur la mer sans s’exprimer pour le moment.
- je propose de réaliser un album « Je me souviens » - comme celui que les Maternelles ont fait - dans lequel chacun pourra écrire et dessiner son plus beau souvenir de Quiberon.
Avant le 9 juin, beaucoup d’autres idées ont émises. Les propositions en entraînent d’autres et les connaissances se construisent dans ce travail interactif.
Quelle a été la part du maître ?
- Être à l’écoute des enfants, de leurs centres d’intérêts.
- Impulser un travail de construction des connaissances faisant appel à la mémoire des enfants pour leur permettre d’analyser, de comprendre, de structurer ce qu’ils ont vécu.
- Assurer dans la classe l’organisation matérielle qui leur permettra d’y parvenir.
- Proposer des informations qui permettent d’approfondir ou d’enrichir leurs recherches, aider à la synthèse des connaissances.
C’est une pédagogie qui s’élabore dans un va et vient constant entre l¹expression/création des enfants et le travail guidé de l’adulte. Pas de programme pré-établi mais des compétences qui se construisent à travers ce projet : en lecture, production d’écrits, découverte du monde, autonomie, initiative, socialisation.
Françoise Vassort
Institut Parisien de l’École Moderne