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Le mini projet théâtre : un outil souple et adapté

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Décembre 2001

 

Les contraintes du travail en milieu ouvert obligent souvent à mener des projets sur des temps très brefs. Ce qui peut apparaître au départ comme un handicap, n’est-il pas au contraire un moyen de travailler dans un temps plus proche de celui de l’enfant ?

 
 
Quand on travaille avec des enfants en dehors des institutions, on est dans une situation pour le moins paradoxale vis à vis de la démarche de projets. D'un côté le travail en milieu ouvert est un merveilleux bouillon de culture de projet : l'adulte, fidèle à son poste, y collecte sur le vif les petites idées, les petits désirs et les grands besoins d'une population enfantine, dont l'âge varie toujours beaucoup (3-16 ans). D'un autre côté, tout est plus difficile : des enfants qui vont et qui viennent ; des enfants qui changent d'idée, qui se brouillent entre eux, rendent bien difficile le déroulement classique d'une pédagogie de projets.
 
Et pourtant, la qualité est toujours aussi nécessaire, plus encore peut être, quand c'est de l'image de soi devant les autres et dans son milieu direct dont il s'agit.
 
Dans le cadre du travail de la Maison Robinson, en milieu ouvert, nous avions développé l'année dernière un projet théâtre filé sur l'année. Le résultat avait été décevant, les groupes d'enfants s'effilochaient et finalement quand, en fin d'année, à l'occasion d'une fête de quartier, il avait fallu montrer le résultat du travail poursuivi, ce qui avait été montré était aux yeux des enfants peu satisfaisant : juste quelques "impros" sans lien entre elles.
 
Cette année, nous ne désirions pas reproduire cette expérience ; c'est donc à partir de la rencontre d'une actrice résidant dans le quartier que la possibilité de « refaire du théâtre » à la Maison Robinson a pu être évoquée de nouveau. Mais comment faire ? La proposition de Cécile a été de réaliser un véritable projet de création théâtrale, mais sur une durée courte et d'une façon intensive.
 
C'est donc en moins de trois semaines que s'est « montée » à la Maison Robinson une petite pièce inspirée de l'histoire du Petit Prince ; comme les enfants le souhaitaient, c'est un vrai petit travail d'acteur qui leur était demandé jusqu'à leur texte à lire et à apprendre. Chose étonnante même des enfants de 8 ans, en difficulté en lecture par ailleurs, s'y sont attelés.
 
Bien entendu, des problèmes ou conflits dans le groupe n'ont pas manqué de poser quelques difficultés ; dans le cas de ce mini-projet théâtre, les enfants ont eu tendance au départ à vouloir rejeter K. K. est en effet un enfant étrange de six ans qui parle à peine ; pour attirer l'attention des autres, il fait volontiers « le singe ». Les enfants ont craint rapidement que K. risque de compromettre la représentation. Bien entendu, ils n'apercevaient pas forcément, en cours de route, que bon an mal an, K. s'acquittait bien plus régulièrement qu'eux de son travail d'acteur et que pour l'occasion, il disait son texte. C'était quasiment la première fois que nous entendions sa voix. Depuis ce travail théâtral, on l'entend un peu plus.
 
Enfin est venue la représentation ; les parents et les voisins étaient dûment informés directement ou par voix d'affichage. On a aussi pris soin de donner un programme à chaque spectateur et même aux passants, la représentation ayant lieu sur la pelouse centrale de la cité.
 
Cécile avait apporté un soin extrême au maquillage ; les costumes étaient simples mais plein de couleurs et de reflets (ah les tissus arabes à paillettes ! Ils constituent une base inimitable et pas trop chère pour tout costume de spectacle).
 
Ce que nous retenons pour la suite : rapidité et qualité ne vont pas si mal ensemble…
 
Pour l'avenir nous retenons dans le cadre qui est le nôtre le principe du mini-projet. Le mini projet ne nous semble pas à l'analyse un projet au rabais mais surtout un projet adapté au temps des enfants.
 
Je sais qu'en milieu scolaire la durée est possible : le groupe est captif, en fin de compte… Pour autant, je me demande si je ne vais pas adopter le même principe de fonctionnement dans ma classe : ramasser le temps, lancer un projet intensif mais de durée réduite (trois semaines), quitte à faire plusieurs projets dans l'année. C'est peut être en rentrant dans un temps plus proche de l'enfant qu'on peut aider celui-ci à mieux appréhender la globalité d'une action collective.
 
Laurent OTT
enseignant à Longjumeau (91)
Auteur de "L'école au piquet" (Albin-Michel 2001) 



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