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Le dialogue philosophique

Mars 2002

Le dialogue philosophique

ou comment apprendre à argumenter dès l’école primaire, comprendre le monde et se préparer à la citoyenneté.

 

Depuis quelques années, nous assistons à une sorte d’explosion dans le domaine philosophique. Au-delà des batailles d’écoles et de programmes, on parle par exemple beaucoup d’éthique, d’éthique des affaires, de bioéthique et d’éthique de l’environnement.

Notre société est chaque jour confrontée à de nouveaux défis relatifs à la mondialisation et à l’immigration, qui l’incitent à une réaffirmation de son caractère démocratique et à une identification des moyens permettant d’assurer à tous ses citoyens leur participation pleine et entière aux débats qui concernent le vivre-ensemble.

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C’est dans ce contexte qu’il faut comprendre le souci de nos sociétés occidentales qui entendent éduquer à la citoyenneté. Etre citoyen, c’est faire partie d’une démocratie, c’est à dire d’une communauté participante et réflexive, engagée dans une recherche à l’égard de ses problèmes et des choix qu’elle doit faire. Pour cela chacun doit faire partie du processus décisionnel au sein d’une société appelée à se questionner, se critiquer et se corriger. 

Le développement du jugement autonome et critique et de la conduite raisonnable constitue un préalable à cette participation et le dialogue philosophique avec des enfants apparaît comme un moyen privilégié de favoriser certains apprentissages indispensables à la participation citoyenne : « L’apprentissage de la délibération, du débat, de la prise de parole régulée ». Dans nos classes, déjà, les moments de parole font souvent affleurer une réflexion philosophique. 

L’école devrait permettre de se forger un esprit critique et créateur. Elle devrait aussi donner la capacité de développer une certaine logique, une certaine éthique et le respect d’autrui.. Elle a une grande responsabilité sociale puisqu’elle prépare les enfants à vivre dans une société démocratique. Elle doit remplir son rôle en aidant à l’évolution des mentalités et des attitudes, en s’humanisant et en s’adaptant aux besoins des enfants et la philosophie peut être un excellent moyen de parvenir à de tels résultats. Il ne s’agit bien sûr pas de parler de Kant ou de Platon aux enfants, mais de leur offrir la possibilité de poser les questions fondamentales qui les assaillent et d’être plus attentifs et réceptifs à leurs réflexions. 

La philosophie peut intervenir globalement sur les élèves en favorisant leur accès à une parole authentique, à des relations sociales élaborées. On peut par-là renforcer leur estime d’eux-mêmes et leur permettre de devenir des citoyens à part entière. Pour nous enseignants, la philosophie avec les jeunes enfants, peut-être une tentative pour promouvoir des vécus uniques, une pensée qui questionne, débat, critique, dialogue, crée et résiste, une expérience de pensée qui contribue à modifier ce que nous sommes. C’est aussi un moyen de nous amener à réfléchir et repenser notre vie, nos idées, nos concepts, nos certitudes, nos erreurs, qui provoque des doutes, des questionnements sur nous-mêmes, nos aptitudes dans la vie, notre pratique dans une salle de classe, notre façon de voir l’éducation comme un tout. 

« Notre conscience nous vient grâce au rapport à autrui, grâce à l’appartenance à une communauté qui a le pouvoir de faire émerger un « Je » parce qu’elle s’adresse à moi en disant « Tu » . Albert Jacquard 

Alors, pourquoi attendre les dernières années de la scolarité pour philosopher ? 

Sylvie Clerc

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