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La campagne d'Alexandre le petit

Octobre 2000

 

CHRONIQUE DE L'ÉCOLE ORDINAIRE

 

La campagne d'Alexandre le petit

 

Alexandre le petit a quitté pendant les vacances la banlieue parisienne et sa classe de perfectionnement. Il habite maintenant un village regroupé avec deux autres pour la scolarité des enfants : 3 écoles, 3 villages.

A la rentrée, il est un peu perdu ; les maîtres sont bien embarrassés : les effectifs sont chargés. Il a 8 ans, une petite taille, un petit niveau de cours préparatoire, mais il lui faut quand même une place assise. La directrice se dévoue et lui en trouve une dans son CM2.

Le premier jour il s'embête un peu. Il bouge sur sa chaise, bricole ses petites affaires. Ce n'est pas tolérable pour la directrice-maîtresse. Elle convoque le conseil des maîtres. Il reste une place dans la grande section de maternelle d'un autre village. La maîtresse veut bien l'accueillir. Alexandre le petit devient donc le grand de sa classe. Une promotion ! Ça se passe plutôt bien. Il est au calme. Il refuse quand même certaines activités trop bébé à son goût et n'apprend pas grand-chose.

Arrive par hasard le conseiller pédagogique qui s'étonne, va négocier avec la maîtresse du CE2 et alerte la commission de circonscription. Alexandre aura au moins des camarades de son âge avant de rejoindre la classe de perfectionnement de la ville voisine. Il "fait" des polycopiés de grande section de maternelle, participe un peu aux activités d'éveil, à l'éducation physique, se fait remonter les bretelles le jour où il apporte une souris...

La locomotive administrative s'ébranle. La Commission n'a pas encore reçu les tableaux d'effectifs. La décision d'affectation en classe de perfectionnement mettra un mois pour parvenir au CE2 (30 jours pour 9 km soit 300 m par jour).

Début novembre tout est réglé. Alexandre le petit prend l'autocar jusqu'au collège... Là il devrait sauter dans un bus pour rejoindre sa nouvelle école, où sa nouvelle maîtresse l'attendrait certainement si elle avait été prévenue... Mais il n'a pas bien compris; il visite le collège... Grâce au téléphone on finit par s'arranger : Alexandre est enfin dans la classe où il avait été "orienté" un an avant. Il progresse.

Pendant toutes ces (et ses) pérégrinations, ses parents ont fait preuve d'une empathie inoxydable ressemblant beaucoup à de l'indifférence : ils n'ont rien dit.

Heureusement, leur indignation éventuelle aurait pu retarder l'intégration scolaire de leur enfant...

 

Jean Louis Maudrin