|
"La poésie on ne sait pas ce que c’est mais on la reconnaît quand on la rencontre." Jean L’Anselme
Contexte : Une classe de cycle 3 avec des enfants qui font leur deuxième année ou troisième dans la classe.
Une envie : permettre à tous les enfants de goûter, d’écouter, de lire, d’écrire, de dire des poèmes.
Un projet : la fête du livre d’Aizenay dont l’invitée est la Poésie.
Une certitude : les enfants aiment la poésie si elle n’est pas récitation, obligation et inaccessible.
La poésie est espace de liberté, de création, d’émancipation, d’expression libre.
Faire entrer la poésie dans la classe, c’est autoriser le rêve, donner à chacun le langage de la liberté, permettre à l’intime de jaillir.
Laisser entrer la poésie dans la classe
Tous les ans la poésie avait une place importante dans mes classes. Au congrès de Strasbourg, l’atelier proposé par Martine Boncourt a enrichi ma pratique. C’est ainsi que pour l’année 2009-2010, j’introduis un temps de découverte de poésies différent durant la première partie de l’année.
Des moments quotidiens de poésie
Afin de plonger les enfants dans un bain de poésie, régulièrement, chaque semaine en début d’année, un grand moment est consacré à la lecture de poèmes. Je mets à disposition des enfants une caisse de livres de poèmes. Caisse qui voit son fond renouvelé régulièrement grâce aux recherches des enfants en bibliothèque.
Pendant dix minutes ou plus, ils lisent les poèmes qu’ils veulent et quand l’un d’eux leur plait, ils le gardent pour nous le lire ou pour en demander une photocopie.
Puis vient un temps d’écoute et de partage des textes retenus. Ceux qui ne peuvent lire ce jour là sont prioritaires pour un autre jour car nombreux sont ceux qui ont envie de partager un poème.
Ensuite, quelques enfants donnent leurs impressions sur les poèmes lus. Suit un temps d’apprentissage collectif d’un poème choisi par le groupe : le but est d’apprendre à apprendre, de donner des appuis aux enfants qui éprouvent des difficultés à mémoriser une poésie ou un texte.
A d’autres moments et ceci tout au long de l’année, pas tous les jours mais presque, je leur lis un ou des poèmes. Après un petit temps d’échanges, ceux qui désirent avoir le poème dans leur cahier de poésie (recueil de poésies) m’en demandent une photocopie. Avoir de nombreux poèmes dans leur cahier leur permet de garder une trace, d’enrichir leur patrimoine et d’avoir une « banque de poèmes » pour en choisir un à apprendre.
Les livres et classeurs recueil de poèmes sont à leur disposition dans la classe.
Le contrat dans les classes de cycle 3 de l’école est d’apprendre un poème de son choix par quinzaine et de le présenter à la classe.
Ces moments de présentation permettent à des enfants de théâtraliser les poèmes, de se les approprier pour nous en faire cadeau. Des moments de plaisir intense, des moments savoureux… Le poème devient vivant et entre de toute sa force dans la classe, tous applaudissent.
Cet échange et la variété des poèmes présentés permettent une fois de plus d’enrichir le patrimoine de tous.
Ecrire de la poésie
Tous les matins, les enfants écrivent dans leur cahier d’écrivain des textes libres, certains, spontanément, écrivent des poèmes, comme chaque année.
Régulièrement, je leur propose aussi des moments d’écriture spécifiques, des temps où chacun doit écrire un texte poétique.
Ensemble, nous cherchons un thème. Nous mettons en commun des mots, cette recherche permet d’entrer dans un univers, de mutualiser des idées et du vocabulaire, un mot en appelant un autre. Puis les enfants écrivent librement. Certains n’entrent pas dans la forme poème mais peu à peu les textes évoluent et les barrières se lèvent pour la majorité des enfants.
Après ce temps d’écriture, nous lisons les poèmes : les enfants sont libres de lire, de montrer ou non ce qu’ils ont fait, je corrige à la demande.
J’écris moi aussi mon poème et je le partage avec eux. Il me semble important que l’adulte écrive lui aussi; trop souvent, nous demandons aux enfants de faire ce qui nous fait peur, écrire puis lire notre texte.
Ces temps de partage enrichissent l’univers de chacun.
| |
|
|
|
|
Poèmes
Les poèmes, on les trouve n’ importe où.
Le poème de l’épicière,
Je l’ai trouvé dans un pot de moutarde.
Le poème du chat et du soleil,
Je l’ai trouvé dans l’œil d’un chat.
Le poème du visage,
Je l’ai trouvé dans un cadre.
Les poèmes on les trouve
N’importe où, n’importe comment
Rond, petit, grand, carré,
Un poème, ça se trouve n’importe où, dans le monde.
Morgane R - CE2
|
|
|
|
|
|
La fête à la poésie
Puis arrive la préparation intense de la fête du livre.
Les temps de lecture et écriture de poèmes deviennent encore plus réguliers et fréquents.
Chaque enfant ouvre un cahier pour ses poèmes - un cahier petit format réservé à leurs écrits poétiques -. Nous avons en classe un débat sur la poésie.
Chaque semaine de janvier à mars, ils écrivent des poèmes pour leur livre-matière, pour les décors, pour la fête du livre. J’utilise l’Almanach du presque poète de Bernard Friot pour puiser des idées de déclencheurs.
| |
|
|
Le débat en classe : La poésie pour moi, c’est :
- un moment en famille, du bonheur.
- s’exprimer, faire sortir ce qui est en soi
- elle se récite
- le souvenir de poésies dites, de mots, du bonheur, des moments de calme
- elle permet de s’exprimer sur la perte de quelqu’un
- elle inventée par le poète
- elle exprime le courage
- elle demande de réfléchir
- c’est réciter des mots
- imaginer, inventer
- imaginer sa vie avec des moments de tristesse, de joie ou de colère
- le poète invente ce qu’il veut
- c’est un mot et tout se forme autour
- pour la dire, il faut l’imaginer
- elle parle de la réalité
- elle vient du fond du cœur naturellement, et ensuite on l’améliore
- c’est jouer avec les mots
- ce n’est pas uniquement des rimes
|
|
|
|
Ce travail régulier avec des déclencheurs, des techniques permet de lever des obstacles à l’écriture spontanée que rencontrent certains enfants. Ecrire des poèmes devient un besoin pour plusieurs d’entre eux ; les textes à la manière de ou les pastiches de poèmes, utiles à quelques enfants au début disparaissent peu à peu pour laisser la place à la poésie.
L’écoute régulière de poèmes différents est source d’inspiration et de détournements.
| |
Poème
Dans mon armoire il y a,
deux stylos bille, un papillon,
une pince à linge, quatre fiches de maths,
une assiette avec des décorations dessus.
Dans mon armoire j’ai,
un texte pas tout à fait fini,
une montre qui a deux heures d’avance.
Dans mon armoire
il n’y a rien.
Amélia CM2 |
|
Un poème
Rouge comme le sang qui coule dans nos veines.
Bleu comme le ciel et l’eau.
Blanc comme les pélicans dans le ciel.
Noir comme la nuit sans les étoiles.
Jaune comme le soleil du matin.
Coraline CE2
|
|
Peu à peu les écrits se transforment, libérés, enrichis et dans les cahiers je vois fleurir des poèmes.
Les enfants partagent leurs écrits avec les parents lors de la fête du livre et de l’heure des parents, institution régulière dans la classe. Pour cette occasion, ils préparent des textes poèmes et des histoires afin d’avoir, devant les familles, le bonheur de lire son texte et d’être applaudi, l’envie d’écrire vient.
Vivre la Poésie donne un espace de liberté et l’intime jaillit au détour du texte.
| |
|
Enfant des rues
Je suis un enfant de la rue
Un enfant rue
Je suis un des poubelles
Un enfant poubelle
Je suis un enfant avec des droits
Un enfant de droit
Je suis un enfant rejeté
Un enfant aimé
Mais au fond de moi
Suis-je vraiment
Un enfant de la rue
Un enfant des poubelles
Un enfant laid
Un enfant Délaissé
Un enfant sale
NON
Au fond de moi
J’ai un gros cœur qui aime les gens comme ils sont
Propre
Sale
Beau
Laid
Riche
Pauvre
Pierre CM2
|
|
L’oiseau
Moi l’oiseau qui ne bouge pas
dans ce désert jaune soleil.
Moi l’oiseau qui ne vit pas ma vie
dans ce désert jaune soleil.
Toi le voyageur,
tu sens que je suis triste.
Toi le voyageur,
tu m’emmènes dans un pays verdoyant
où je pourrai
Vivre ma vie.
Agathe CM1
Un jour, j’ai trouvé un poème dans une fleur.
Il parlait d’un enfant amoureux.
Il peignait les arbres, les étoiles et le soleil.
Il était amoureux de la nature.
Mais un jour, il est mort
Romane CE2
|
|
| |
La poésie de tristesse
Mon oncle est mort, je l’ai vu mourir
Mais je n’ai pas pleuré.
Chaque nuit, je le vois
Chaque nuit, je l’entends
Je vais voir ma mère pour tout lui expliquer
Elle me répond que c’est mon imagination.
Je le vois et je l’entends
Car il restera toujours dans mon cœur.
Agathe CM1
|
L’enfant
L’enfant pense
que quand il grandira,
sa vie sera dans les nuages.
Il jouera avec les oiseaux,
rigolera des blagues avec les nuages,
racontera des histoires au soleil
s’amusera avec le ciel.
L’enfant pense quand il grandira.
Sa vie sera dans les nuages.
Morgane CE2
|
|
|
