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"L'art dans les chapelles" - Des "balançoires"

 

Des "balançoires"

 Classe maternelle - Ecole de Silfiac

En septembre 2010, je débute dans une nouvelle école, celle de Silfiac, petite commune rurale du nord du Morbihan. Je suis en charge de la classe maternelle. Pour la première fois, non loin de l’école, la chapelle Saint-Laurent accueille  une oeuvre d'artiste dans le cadre du festival L’art dans les chapelles. Mes collègues et moi saisissons cette opportunité d'une ouverture culturelle aux portes de nos classes. Il faut faire vite, l’exposition sera démembrée, démantibulée à la fin du mois, du moins c’est ce qui nous est dit à ce moment-là. Mi-septembre, les médiatrices de L’art dans les Chapelles consacrent une journée pour nous expliquer, nous donner à voir.

Le matin, je me rends à la chapelle avec ma classe. Les enfants sont sensibles au travail de Yann Esnault. Ils s’emparent aussitôt d’une partie de son œuvre : deux balançoires suspendues au milieu de la chapelle. Ils sont à tour de rôle poussés, balancés. Des éclats de rire résonnent dans l’enceinte religieuse.
La technique de Yann Esnault consiste à modeler des tissus préalablement trempés dans de la cire colorée. Il en recouvre différents supports, comme les balançoires, et fabrique des mobiles géants. L’artiste se qualifie plus volontiers de sculpteur que de peintre.

Le lendemain de la visite, je montre les photos en classe. Les enfants commentent. L’après-midi, je demande aux moyens et aux grands de dessiner l’exposition. La balançoire ayant marqué les esprits, je me retrouve avec de nombreux dessins de balançoire voire de toboggans.

Je me souviens avoir été déçue par ces dessins très figuratifs qui n’avaient pas toujours de rapport avec le travail vu. Heureusement qu’une collègue bien plus expérimentée m’a dit avec humour : « Quand tu leur demandes de dessiner une sortie, ils dessinent le car ! »
Je dois apprendre, et cela d’autant plus avec des petits, à faire preuve de patience pour que ce qui doit émerger affleure tranquillement et faire jouer ma part du maître.

Quelques jours plus tard, je leur propose donc de tremper des tissus dans la peinture. Ensuite à eux de jouer ! Que faisons-nous de ces tissus ? Spontanément ils me proposent de les suspendre. Soit un tissu seul, soit plusieurs accrochés. Je me charge de faire les trous et de trouver la laine. Nous suspendons tous leurs travaux à une ficelle qui traverse la classe dans sa largeur. Le hasard les place au milieu du passage et certains sont à hauteur de main d’enfants. Ils donnent envie d’être touchés, balancés. De petites balançoires font leur apparition dans notre classe.

Quelque temps après, en dessin libre, des enfants ont l’idée de représenter ces tissus. Je suis ravie de l’évolution des dessins de balançoire «conventionnelle» du début aux dessins de balançoires qu’ils se sont créées.

Le travail se poursuit. Grâce aux médiatrices de L’art dans les chapelles, nous avons l’opportunité de faire venir Yann Esnault à l’école. Malheureusement, le budget ne permet qu’à deux classes de notre école de mener un travail avec l’artiste et Fanny, la médiatrice. Ce sont les enfants de maternelle qui sont "lésés". Ils peuvent néanmoins rencontrer l’artiste qui travaille sous leurs yeux, récréant les conditions de son atelier. Ils voient les gros blocs de cire fondre au bain-marie, la palette de couleurs des pigments qu’il y joint, les outils qu’il utilise. L’odeur, l’ébullition de la cire créent une atmosphère particulière comme celle d’une sorcière devant son chaudron! Pour clore cette belle journée, le préau se voit enrichi d’une œuvre offerte par l’artiste.

Fanny vient à trois reprises dans les classes élémentaires mais je réussis à négocier quelques créneaux pour que les enfants de maternelle expérimentent à leur tour. Ils trempent dans la cire chaude et pigmentée tantôt quelques tissus, tantôt des bouteilles de lait, tantôt des boîtes d’œufs…


  Nous les suspendons dans la classe. Encore de nouvelles balançoires…

Au mois de février, je montre à nouveau les photos de la visite, des étapes de notre travail. Les enfants sont capables de mettre des mots précis sur ce qu’ils ont vu et fait : la cire, l’ébullition, l’odeur, les pigments, les tissus, les balançoires et l’échelle suspendues de la chapelle.
Par-delà la frustration de ne pas avoir pu mener un travail aussi poussé que les classes élémentaires, le plaisir est néanmoins partagé.
Merci Yann. Merci Fanny.

Stellane Breton

 

Tableaux de tissus

Vitraux et Tissus peints

Sculptures

Le point de vue de la médiatrice

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