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Mars 2000
Documents de classes
Un quotidien en cycle II :
une journée de travail
Créer un quotidien de classe avec des enfants de CP et de CE1, qui entrent tout juste dans l’écrit, telle était l’ambition d’un groupe de 14 élèves et de leur instituteur, à la rentrée de septembre 1998. Un an plus tard, Mini-Piaf paraît tous les jours et sa diffusion dépasse largement le cadre de l’école. Pour cela, il a fallu mettre en place une organisation coopérative de la classe.
Tête de Piaf et Mini-Piaf sont dans un bateau
En 1993, lors de mon arrivée à l’école d’Ouzilly, un hebdomadaire d’école, rebaptisé tous les ans, a vu le jour. De 1993 à 1998, il a été géré par la classe de cycle III. Il a pris son nom définitif, Tête de Piaf, en 1995, suite à la volonté de tous, de marquer l’image de l’école, par la création d’un logo et d’un titre fixe. L’investissement des deux autres classes de l’école a énormément varié, d’une année à l’autre, en fonction de l’intérêt de leur enseignant pour celui-ci. A la rentrée 98, j’ai repris la classe de CP CE1, avec l’envie de me lancer dans l’aventure d’un quotidien, qui me semblait plus proche du rythme des enfants.
Un déclencheur d’écrits et de coopération
L’idée, au départ une lubie du maître, risquait fort d’être sans avenir, si les enfants ne l’avaient rapidement prise à leur compte. Mini-Piaf est né le 1er septembre, les premiers textes parlaient de la rentrée et des vacances. La maquette a pris forme, en même temps que naissaient les premiers écrits: une feuille A4 recto-verso avec sur la Une, les témoignages de la vie collective de la classe, rédigés par la classe entière en fin de journée et au verso quatre rubriques permanentes: les textes de vie, les histoires, la météo et le menu de la cantine (comme ça, à la maison, ils savent ce qu’on a mangé).
A partir de là, restaient à organiser le temps de la classe, pour que part belle y soit faite à l’expression libre des enfants et à l’émergence de projets de groupes, ainsi que l’organisation matérielle, pour que le journal soit prêt tous les soirs.
Très tôt, la classe s’est donné pour règles: que chacun essaye d’écrire au moins un texte chaque jour et que tout sera publié, que ceux qui savent écrire (les CE1 plus quelques CP) aident ceux qui savent moins, qu’on y pratique l’entraide pour la correction et l’enrichissement des textes, le maître ne pouvant pas tout faire (et n’en ayant nullement envie).
La mise en place du Quoi de Neuf, moment important du démarrage de la journée, où chacun prend ses marques dans le groupe, a permis d’aider au départ, ceux qui avaient l’impression de ne rien avoir à écrire, car tout le monde avait quelque chose à raconter, restait à aider à le mettre en forme.
Il a fallu aussi, apprendre à gérer soit même ses écrits, les outils de correction (J’écris tout seul de PEMF, dictionnaires en tous genres, répertoires personnels...), créer des affichages d’aide à l’écriture dans la classe, des tableaux pour organiser les passages à l’ordinateur pour saisir les textes, (un puis deux puis trois ordinateurs).
Des responsabilités ont aussi été mises en place pour les rubriques météo et cantine, pour les photocopies, les illustrations puis les photos (avec l’achat d’un appareil numérique), l’envoi par fax du journal (voir plus loin)... Ces responsabilités tournent chaque semaine, avec coformation du nouveau responsable par l’ancien.
Et le reste ?
Il n’est pas facile de mesurer le temps passé par chaque enfant à «travailler pour le journal» chaque jour, cela varie de 30 minutes à 1 h 30, plus si on ajoute le Quoi de Neuf, et le moment de présentation collective des écrits, le soir. Dans ce temps, il faut compter, ce qui est de la création, de la mise au point et le travail de saisie des textes.
Tous les enfants ne travaillent pas pour le journal en même temps. Cette activité fait partie de leur plan de travail quotidien, au même titre que le travail sur les fichiers (maths, français, éveil...) que leurs recherches personnelles et leurs activités de création. Ils gèrent, eux mêmes, l’organisation de leurs plages de travail personnel (environ la moitié du temps de la classe). Le reste du temps de la classe est occupé par les activités collectives, les ateliers décloisonnés de l’école, les différents projets en cours (théâtre, musique, sport, sorties...), les moments de travail par niveau (lecture avec les CP, math...)
Un outil au service de la communication
Dans un premier temps, nos lecteurs ont été les parents des enfants (chacun emporte le soir un exemplaire du journal, qui est relié le lendemain avec les autres pour constituer le livre de vie de chaque enfant). Cela a permis de créer un lien fort, entre la classe et les familles, chacune étant informée de ce qui se passe en classe.
Mais, pour que la dynamique, engendrée par Mini-Piaf, ne s’essouffle pas au bout de quelques semaines, il fallait que le journal soit diffusé, plus largement. Par internet, nous avons lancé un appel à échange, et nous avons proposé notre journal aux correspondants des années précédentes.
Aujourd’hui, Mini-Piaf est tiré à 30 exemplaires: 21 pour les enfants, (cette année CP CE1 CE2), 7 pour les correspondants, 1 pour l’OCCE et 1 pour le CLEMI. Nous le faxons tous les matins à 7 autres écoles (dont une en Espagne et une en Angleterre). En échange, nous recevons les journaux (quotidiens, hebdos ou mensuels d’une dizaine d’écoles.
Xavier Gaillon, Ecole d’Ouzilly (86)
Documents de classes
Une journée de classe ordinaire
8 h 45, les premiers élèves arrivent, ils s’installent, s’occupent de leur responsabilité de la semaine, rejoints jusqu’à 9 h par leurs copains. Les animaux sont changés et nourris, les plantes arrosées. Édouard, aidé par un grand, lit et tape le menu de la cantine dans le cadre prévu, quand il a fini, il appelle Karen, qui est en train de remplir les tableaux de la météo, pour qu’elle saisisse ses mesures pour le journal. David et Valentin relèvent la boîte aux lettres d’Internet en lisant rapidement les messages et Sandra envoie le journal par fax.
9 h 10, le Quoi de Neuf commence, le fer à cheval circule de main en main, celui qui l’a, parle. On y raconte sa vie de tous les jours, ce qu’on a vu ou entendu, on y montre des objets qu’on a apporté, on pose des questions. Tout cela donnera matière à la production des textes.
9 h 30, tout le monde est à sa place, on établit le programme de la journée. Chacun dit ce qu’il veut écrire dans la journée et avec qui, on l’inscrit sur un tableau. On regarde ce qui est prêt à être tapé pour le journal du jour.
9 h 45, chacun se met au travail. Commence alors la saisie des articles, les enfants gèrent les passages à l’ordinateur avec le tableau des textes prêts (un code permettant de savoir ce qui est écrit et corrigé). Je suis alors à la disposition de tous pour aider, corriger...
11 h les CP font des ateliers de lecture avec moi ou avec Sandrine, l’aide éducatrice de l’école, ils travaillent sur les textes de la Une de la veille: lecture puzzle, accordéon de lecture, lotos de textes... et profitent de la disponibilité d’un adulte pour améliorer leurs textes et apprendre à se servir des outils d’écriture.
12 h, en général le verso du journal est prêt à être tiré.
L’après-midi, à 15 h 30, on rédige ensuite le ou les articles de la une, en fonction de l’actualité de la journée, le responsable des photos propose ce qu’il a fait, on scanne les documents pour illustrer les textes et on tire le journal. Les textes personnels du jour sont présentés à la classe et discutés.
16 h 30 les enfants repartent, les CP savent qu’ils ont la une à lire à la maison pour le lendemain, certains enfants vont à l’aide aux devoirs, où ils liront le journal entier avec Sandrine. Dans la plupart des familles, le journal sera lu ensemble.
un journal du réseau d’échange
Xavier Gaillon est membre du groupe Ecole Moderne de la Vienne (IDEM 86)
Un outil d’intégration des nouveaux
L’organisation de l’école (trois classes de la maternelle au CM2) depuis deux ans, fait, qu’au troisième trimestre, les GS passent dans ma classe, le matin, et les CE2 dans la classe des CM1 CM2. Les enfants de GS, arrivant dans la classe, ont tout de suite été intégrés, par les copains. Écriture d’histoire à plusieurs, dictée de textes personnels aux grands, tutorat pour les prises de responsabilité, la saisie des textes, ont été le quotidien de la classe pendant ce trimestre.
Cette année, les CP sont entrés naturellement dans le travail du journal (et le reste), riches de leurs premières expériences de l’année précédente.
L’itinéraire d’un texte
Le « quoi de neuf ? » du matin.
C’est le moment où les idées de textes vont surgir du quotidien raconté par chaque enfant. Ceux qui le désirent prennent la parole. Il dure de 15 à 30 minutes
Le tableau des textes
du journal.
Chacun sait ce qu’il a à faire dans la journée : écriture, correction-enrichissement, saisie des textes…
Sur la photo, Sandra inscrit son travail sur le planning du journal
A tour de rôle, chaque enfant va taper son texte et envoie le suivant. Les plus jeunes demandent de l’aide à ceux qui savent. Tous ont maintenant l’habitude de se servir du traitement de texte et ça va vite. Je passe vérifier l’orthographe et la mise en page, avant le tirage.
Mise au point et correction
Quand un texte est rédigé, il est accroché au mur, je passe régulièrement récupérer les textes et je fais une première correction : les mots encadrés sont à chercher dans les dictionnaires et les répertoires, les expressions soulignées, dans les autres textes déjà corrigés, le journal et les textes références de la classe. Je redonne le texte à l’enfant, qui le corrige et me le rapporte, on discute des fautes qui restent et j’écris sur un Post-it, les mots et expressions qui sont importantes à retenir. Il corrige et éventuellement recopie son texte si le brouillon n’est pas assez lisible, puis il colle son Post-it sur une affiche dans la classe (voir page IV).
L’étude de la langue
Les mots du Post-it sont recopiés, le vendredi, sur la feuille d’apprentissage de chaque enfant. Chaque jour, un moment est consacré au travail d’apprentissage des listes de mots et expressions personnelles des semaines précédentes (voir article de Michel Barrios dans le Nouvel Éducateur n° 67 de Mars 1995).
Les CP travaillent régulièrement sur les textes de la une, à partir de jeux de lecture, d’accordéon, de logiciels où sont rentrés les textes...
(voir l’article de Danièle de Keyser dans le Nouvel Éducateur n° 105 de Janvier 1999)
Itinéraire d’une histoire
Les histoires inventées par les enfants, outre leur publication dans Mini-Piaf, sont aussi placées dans la boîte à histoire du site web de l’école. Elles sont ainsi proposées à tous, pour être continuées, modifiées, réutilisées ou enrichies.
Angélique et Emeline écrivent une histoire
dans le coin bibliothèque
Certaines ont fait l’objet de publication sous forme de petits livrets illustrés, dans lesquels les textes ont été traduits en anglais, en espagnols, en allemand et en portugais par nos correspondants.
Le journal du Père Noël, écrit collectif de décembre 1998, a également été imprimé sous forme d’un livre, déposé à la bibliothèque nationale et vendu au profit de la coopérative.
couverture d’un livret en 5 langues
La « Une »
la Une du 14-12
La Une est rédigée collectivement le soir vers 15 h 30. On commence par passer en revue ce qui a été important dans la journée : le travail, le courrier reçu, les messages arrivés qui nous ont intéressés...
Pour chaque sujet, je prends en note les idées des enfants et on passe à la rédaction de l’article que je tape ensuite rapidement à l’ordinateur, puis on discute de la mise en page et des illustrations.
la Une du 16-12
Parmi les autres rubriques...
La rubrique « A la cantine » nous a permis d’avoir des échanges culinaires avec l’école de Riec sur Bélon : l’année dernière, nous avons goûté les nèfles et ils ont reçu du Tourteau fromager.
(voir documents de classe n°6 du Nouvel Éducateur n°106)
Cette année, la rubrique « météo » a pris plus d’importance, nous participons à une liste d’échange de relevés par Internet, avec des écoles de France, d’Ouganda, d’Australie, du Canada, des États-Unis, d’Italie, de Suisse et du Brésil. Occasion d’échanger photos, textes et observations en provenance de milieux très différents du nôtre.
A consulter sur le site de l’école : http://www.freinet.org/creactif/ouzilly
rubrique nos échanges météo
Des numéros spéciaux bilingues
Dans le cadre du programme Comenius, nous correspondons, au niveau de toute l’école avec une école de Santander en Espagne.
L’année dernière au mois de juin, onze élèves et deux enseignants sont venus à Ouzilly, pour une dizaine de jours. Nous avons alors réalisé une édition quotidienne de Mini-Piaf, bilingue. Lors de la classe de mer commune à toute l’école et au groupe des correspondants espagnols, le travail quotidien des enfants: photos, dessins, textes... était traduit dans les deux langues et mis en page pour le journal et le site de l’école. Un album regroupant le journal, les photos et dessins du séjour a été édité par nos copains de Santander.
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