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Les Dossiers Pédagogiques de l'Educateur n° 9 : L'exploitation pédagogique des complexes d'intérêts

Septembre 1965

Dossier pédagogique de l’Ecole Moderne n°9

Supplément au numéro 12 du 15 septembre 1965

 

L’exploitation pédagogique

des complexes d’intérêt

 

C.FREINET

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SOMMAIRE

1.                  L’exploitation pédagogique des complexes d’intérêt

4.                  Comment d’abord détecter les centres d’intérêt

5.                  L’exploitation pédagogique des centres d’intérêt

6.                  Le Fichier scolaire documentaire

9.                  La Bibliothèque de Travail

10.              La technique pédagogique d’exploitation des centres d’intérêt

 

L’exploitation pédagogique des complexes d’intérêt

C. FREINET

L’exploitation pédagogique des centres d’intérêt n’est pas seulement une technique de travail acclimatée à l’École par notre longue et patiente expérience, et aujourd’hui officiellement recommandée par les Instructions ministérielles, elle synthétise tout un renouvellement de la pédagogie qui ne part plus seulement de l’École et des règlements et programmes mais de la vie même de l’enfant dans son milieu.

Elle est un des volets du triptyque qui est à la base de l’École Moderne: expression libre, exploitation pédagogique des complexes d’intérêts, coopération dans tous les domaines.

Partant des « disciplines d’éveil » (histoire, géographie, sciences, étude du milieu), les I.O. du 15 juillet 1963 précisent :

« qu’elles ne devront pas faire, dans les classes de transition, l’objet d’un enseignement purement magistral ni d’une mémorisation systématique et imposée; elles seront une source d’intérêt, une réserve de thèmes dans laquelle on puisera pour motiver des activités dirigées, des enquêtes, des recherches individuelles ou collectives qui permettront de mettre en oeuvre d’une façon plus naturelle la lecture, le calcul, la rédaction, le dessin. L’enfant apprendra en même temps à regarder, à soutenir son attention, à se former par lui-même une représentation mentale ordonnée des faits et des choses ».

Voilà donc désormais la justification officielle de cette technique de l’exploitation pédagogique qu’il nous appartient de faire passer dans la pratique quotidienne de nos classes, dans les classes de perfectionnement et les classes de transition d’abord, dans les classes enfantines et préparatoires, mais aussi à tous les degrés supérieurs jusqu’aux CES et au Second degré.

Pour bien situer le problème, faisons un rapide historique de la question :

A. L’École traditionnelle n’a aucune raison de s’occuper d’une telle exploitation. C’est elle qui fixe souverainement, de l’extérieur, les thèmes de travail, conformes non aux besoins des enfants mais seulement aux exigences de l’École et des programmes.

La psychologie avait bien essayé d’enseigner que l’enfant est plus apte à accepter les leçons qu’on lui impose si elles éveillent son intérêt. Alors, les leçons commencent par une approche autoritaire vers cet intérêt. Le programme a prévu l’étude de l’orange: on fait reconnaître l’orange à l’odeur, au toucher, les yeux fermés, on soupèse, on fait rouler. Et l’on constate en effet que l’enfant s’intéresse davantage à l’orange et suit mieux la leçon.

Mais c’est tout: le principe reste souverain, de la leçon prévue longtemps à l’avance, et que nul intérêt véritable ne saurait déranger. Le Bohec citait l’exemple de son école : un ouragan sans précédent avait déraciné les arbres voisins. Pour lui, de l’École Moderne, cet ouragan était nécessairement au centre de toutes les préoccupations pédagogiques: examen des dégâts hors de l’École, étude des racines arrachées, mesures, poids, enquêtes auprès des travailleurs.

Mais son collègue a continué imperturbablement sur le thème prévu bien longtemps pour sa classe : le raisin et la vigne, dont aucun grain ne subsiste dans la région.

Or, cette technique scolastique reste encore à peu près généralisée: les arbres peuvent présenter leur feuillure neuve jusqu’aux fenêtres de la classe, l’odeur du lilas peut troubler un instant les sens subtils des élèves, les plantes peuvent pousser dans le jardin, tout cela n’est pas instructif parce que non scolaire : prenons le tableau scientifique Rossignol où tout est prévu et enseigné rationnellement. Mais les mots auront lamentablement remplacé la vie.

Dans un CEG, garçons et filles sont agités par les problèmes impératifs, familiaux, sociaux, intimes, de leur adolescence. Mais le programme porte l’étude de quelque auteur indifférent. Et là aussi, par habitude scolastique, on passe à côté de la vie.

Il y a heureusement, surtout au degré primaire et dans les petites classes, des progrès incontestables: peu à peu l’intérêt de l’enfant pénètre l’enseignement, le motive et l’anime, mais il reste tout à faire encore. Dans ce domaine aussi, le changement de technique de travail ne saurait résulter de l’initiative ou de la fantaisie du maître. Nous allons dire comment, techniquement, l’exploitation pédagogique des centres d’intérêt peut se substituer désormais à l’enseignement mécanique des leçons et des manuels.

B. Et puis, nous tenons à invoquer une éminente paternité, celle du Dr Decroly, le père des centres d’intérêt. Le Dr Decroly avait mis en évidence cette réalité pédagogique alors si révolutionnaire: l’enfant comprend mieux, étudie avec plus de plaisir et d’efficience, tout ce qui l’intéresse, et ce qui l’intéresse c’est sa vie, dans toute les incidences d’un milieu qui est l’élément dans lequel il baigne nécessairement, à moins qu’on l’en isole arbitrairement comme le fait l’École.

Mais le Docteur Decroly n’était pas enseignant, il était médecin et psychologue. L’idée ne lui était pas venue qu’on pouvait détecter les véritables intérêts des enfants au seul spectacle de la vie de ces enfants en classe et hors de classe. En scientifique qu’il était, il avait établi des listes de centres d’intérêt sur lesquels il allait axer tout son enseignement.

Les centres d’intérêt étaient nés.

Ils étaient, à l’École Decroly que j’ai connue à l’époque, de véritables centres d’intérêt. Le besoin de manger par exemple suscitait des recherches et des travaux dont la synthèse s’inscrivait sur des tableaux muraux qui étaient effectivement démonstratifs. Nous avons tout de suite adressé à ces centres d’intérêt le reproche qu’en dépit du fait qu’ils répondaient effectivement à des besoins des enfants, ils étaient, dans la pratique, au degré primaire notamment, entrecoupés d’intérêts plus vitaux, qui surgissent plus ou moins inopinément, mais n’en sont pas moins captatifs des potentialités d’attention des enfants.

Et nous pouvions alors émettre cette critique parce que nous venions de faire la découverte de l’imprimerie à l’École et du texte libre. Par eux, l’enfant exprimait ses vrais besoins dans son milieu, avec une gamme et une variété dont nul encore n’avait pu prévoir la richesse.

Mais nous nous heurtions du même coup à un problème extrêmement délicat, auquel achoppent encore tant d’éducateurs: celui du prêt à porter produit en série, ou de l’habit sur mesure, réalisé selon les goûts, les désirs et les besoins du client lui-même.

Decroly avait bien conçu ses centres d’intérêt, mais il les avait prévus pour le prêt à porter. Les centres d’intérêt, scientifiquement établis, jalonnaient les diverses étapes de la scolarité. On pouvait un mois, six mois ou six ans à l’avance préparer la matière et le déroulement des travaux suscités par ces centres d’intérêt. Et, ma foi, si le client était quelque peu gêné aux entournures, si la contexture ou la couleur des habits ne correspondaient pas toujours à la température ambiante, force était de s’en accommoder. II en résultait que, pendant des périodes plus ou moins longues, le centre d’intérêt cessait d’être centre d’intérêt pour devenir devoir scolaire, avec tout ce qu’il comporte d’inefficient et de maléfique.

L’éducation belge a produit ainsi, pour la pédagogie Decroly des centres d’intérêt, des manuels qui ne manquent pas d’ingéniosité, mais qui ne mobilisent que fort peu l’intérêt des enfants. Les maisons d’édition françaises se sont essayées elles aussi à la répartition des travaux par centres d’intérêt, sans qu’en soit vraiment améliorée la pratique scolastique des manuels et des leçons.

Par notre invention du texte libre, de l’imprimerie à l’École et de la correspondance interscolaire, nous avons adapté à nos classes l’idée géniale de Decroly; nous avons remplacé le prêt à porter par le sur-mesure et réalisé ainsi la véritable éducation basée sur les centres d’intérêt des enfants.

Comment d’abord détecter les centres d’intérêt ?

Pour connaître les intérêts majeurs des enfants, des psychologues ont mené des enquêtes.

Si ces enquêtes étaient prévues dans le milieu scolaire, elles étaient sans valeur, parce que l’enfant ne s’exprime pas en milieu scolaire traditionnel.

Si ces enquêtes étaient menées à l’École même, elles étaient conduites par questions posées à des enfants qui n’ont ni l’habitude de s’exprimer ni de critiquer. De toutes façons ces enquêtes n’atteindront que fort rarement les êtres véritables que l’éducation devra promouvoir, donc sentir et comprendre. Notre technique du texte libre, motivée par l’imprimerie à l’École et la correspondance constitue la nouveauté révolutionnaire qui change radicalement les données de notre travail en fonction des véritables intérêts des enfants.

Le texte libre n’était d’ailleurs, à l’origine, qu’un élément - mais déterminant - de cette explosion des intérêts enfantins. Dans le nouveau climat de la classe, suscité par notre pédagogie, le choix du texte par les élèves éclaire les intérêts dominants de la classe. Ces intérêts sont renforcés par la vie et le travail et aussi par les échanges interscolaires qui nous apportent la vie d’autres classes et d’autres milieux.

Il ne s’agit pas d’ailleurs à proprement parler de centres d’intérêt mais de complexes d’intérêt. Il arrive certes qu’un événement spectaculaire soulève l’attention de la masse des individus en suscitant une communauté de buts, une unanimité émotionnelle, des réactions de groupes qui mobilisent vraiment le maximum d’initiatives et de dynamisme. Quel que soit cet événement il faut alors l’exploiter au maximum parce que, de toutes façons, rien d’autre ne sera possible tant que durera cette totale mobilisation des énergies, qu’elle soit bénéfique ou non. C’est alors comme un torrent qui déferle dans la classe. On pourrait le prévenir ou lui faire barrage en calfeutrant portes et fenêtres, comme cela se pratique dans les classes traditionnelles. Mieux vaut nous engager dans le courant pour tâcher d’en orienter le cours.

L’intensité de ces complexes d’intérêts varie d’ailleurs considérablement selon les classes et l’âge des enfants : les tout petits, jusqu’aux cours préparatoire et élémentaire sont davantage accaparés par l’événement : un oiseau mort, une fleur nouvelle, le récit émouvant d’un camarade, le vent ou la pluie, l’hallucination d’un rêve font qu’une classe entière vibre intensément unie. A ces degrés l’exploitation des centres d’intérêt peut être presque permanente et animer toute la pédagogie.

I1 n’en est pas de même à partir d’un CM, et jusqu’au Second degré où le centre d’intérêt envahissant n’est qu’une exception.

II en résultera une forme variable selon les classes de cette exploitation des complexes d’intérêt.

L’exploitation pédagogique des centres d’intérêt

Détecter les centres d’intérêt est comme le premier acte de la nouvelle pédagogie. Il n’y aurait malheureusement pas de deuxième acte si, après cette explosion de vie, nous devions revenir aux méthodes scolastiques pour l’étude des diverses disciplines, si nous devions reprendre le manuel d’histoire et de géographie et pourvoir aux exercices classiques de calcul.

Si nous voulons que l’intérêt suscité porte ses fruits il nous faut trouver le moyen d’étudier français, vocabulaire et grammaire à l’occasion du texte libre; faire du calcul vivant sur la base des éléments que la nouvelle vie de la classe aura mis en valeur; étudier si possible histoire et géographie par rapport à nos observations de la vie du milieu; faire toutes expériences suscitées par les problèmes qui nous sont posés, dessiner, chanter selon l’inspiration née de ce renouveau d’affectivité et de sensibilité.

Quand nous y parviendrons à 100% ne serait-ce que très accidentellement, nous atteindrons à une sorte d’école idéale qui nous persuadera que la pédagogie moderne est vraiment possible, qu’elle est à notre portée. Nous en serons revivifiés.

Que nous faut-il pour que nous puissions accéder à cette exploitation pédagogique des complexes d’intérêt qui est, nous n’en doutons plus, la forme supérieure de l’École d’aujourd’hui et de demain ?

Avec l’ancienne pédagogie, tout est prévu d’avance, de Strasbourg, de Paris ou d’ailleurs : les textes à lire, les devoirs à faire, les calculs à exécuter, les opérations à étudier, les notions générales d’histoire ou de géographie.

Nul ne se préoccupe ni des désirs ni des besoins du maître, et c’est là la grande tare de cette école qu’elle fonctionne comme si les enfants étaient des robots destinés à obéir au maître.

Il en est de même d’ailleurs avec les manuels réalisés par centres d’intérêt. Là aussi, le lendemain de l’ouragan on étudiera imperturbablement les appareils de chauffage inscrits au programme.

Mais si nous voulons, nous, nous baser sur les intérêts véritables suscités, trouverons-nous l’aide et les directives techniques exigées pour l’étude des diverses disciplines ? Suffira-t-il d’improviser ? Et qui aura l’esprit et la main assez riches pour se tirer d’affaire en toute circonstance ? Si même la chose est possible en français et en calcul dans les petites classes, pourra-t-on enseigner ainsi, d’une façon valable les autres disciplines ?

A l’enseignement par les manuels, spécifique à l’École à tous les degrés, nous substituerons une méthode comparable à celle qu’emploient les adultes qui veulent se cultiver: expression et création, bibliothèque, libre recherche, comptes rendus et conférences.

Mais cela suppose évidemment que nos classes disposent d’un matériel permettant le travail nouveau. Il est évident que si, pour l’exploitation de nos centres d’intérêt, nous ne disposons d’aucune documentation spéciale, ni d’aucune possibilité de recherche et de travail, nous n’aurons en définitive comme recours que le retour aux manuels, ce qui serait la négation de nos efforts.

Il est évident que si l’étudiant ne dispose ni de bibliothèque, ni de salle d’expérience, ni de musée, ni de complexe audiovisuel, il n’aura comme ressource que le cours du professeur et l’étude du manuel.

Il ne suffit pas de proclamer la valeur d’une exploitation pédagogique d’un complexe d’intérêt - ce qui sera admis par tous les pédagogues, encore faut-il rendre cette exploitation pratiquement et techniquement possible dans nos classes. C’est ce que s’est appliquée à réaliser l’École Moderne.

Le fichier scolaire documentaire

Dans nos classes vivantes, nous avons à tout instant besoin d’un document ou d’un renseignement.

Le texte libre parle aujourd’hui d’un faucon qu’un voisin nous a apporté et que nous avons naturellement examiné de notre mieux. Mais nous aurions besoin d’une masse de renseignements. De. quelle famille est ce faucon ? Quels sont les autres oiseaux qui lui ressemblent ? Comment vit-il ? Où niche-t-il ? Comment sont ses serres ? etc...

Nous allons à notre Fichier scolaire documentaire dans lequel nous avons collectionné, au fur et à mesure que nous les trouvions, les documents se rapportant aux rapaces. Des feuilles de renvoi nous indiqueront les BT, les livres de bibliothèque, les manuels scolaires dans lesquels, en un clin d’œil, nous trouverons tous les renseignements dont nous avons besoin. Si nous avons des diapositives ou un film nous les utiliserons.

Si, presque instantanément, les enfants eux-mêmes peuvent extraire du Fichier une telle masse de documents, alors il nous est facile, sous la forme qui nous conviendra, de faire une leçon de sciences répondant à 100% à l’intérêt né vraiment de la vie des enfants.

Si nous avons choisi parmi nos textes libres un beau poème sur l’automne, nous voudrons savoir comment des écrivains et des poètes, placés dans des conditions similaires, ont chanté la nostalgie des feuilles jaunissantes et des premières neiges. Mais il faut que nous puissions trouver instantanément ces oeuvres dans notre fichier, pour les offrir aux enfants au moment précis où ils sentent le besoin de cette nourriture. Alors ces lectures leur seront à 100% favorables.

Des correspondants nous parlent de leur vie dans les montagnes du Massif Central. Ce qu’ils nous en disent nous fait éprouver le besoin de nous renseigner à fond sur le milieu dont nous avons la révélation. Nous ne trouverons à peu près rien dans notre manuel. Par contre, nous sortirons instantanément de notre Fichier documentaire des photos, des cartes, des graphiques; nous y trouverons des renvois aux BT correspondantes. Voilà de quoi nourrir d’une façon essentiellement intéressante et instructive les travaux à venir qu’il nous sera facile alors d’organiser.

On le voit, ce Fichier scolaire documentaire est comme l’élément central du matériel dont nous avons besoin ; il est le bureau centralisateur qui nous permet d’atteindre en un temps record le matériel dont nous avons besoin.

I1 ne saurait y avoir d’exploitation pédagogique de nos complexes d’intérêt sans Fichier scolaire documentaire.

Comment constituer, puis indexer et classer ce Fichier ? Un numéro spécial de notre Bibliothèque de l’École Moderne est sous presse qui donnera pour cette réalisation tous renseignements. Nous prévoyons seulement ici quelques indications de base pour que vous puissiez tous, sans plus attendre, commencer la constitution de votre Fichier.

Nous avions de grandes difficultés, il y a trente ans, pour trouver les documents nécessaires. I1 n’y avait à l’époque aucun périodique illustré, aucun documentaire, à tel point que nous avions dû entreprendre nous-mêmes des éditions qui étaient à l’époque un véritable monument, à peine dépassé.

La constitution d’un Fichier documentaire est aujourd’hui à la portée de tout le monde :

1°. Vous apportez, et vos enfants apportent les documentaires qui traînent sur toutes les tables et qui comportent des photos, parfois en couleurs, qui méritent d’être conservées.

Il vous sera plus difficile de trouver des textes car vous en aurez fort peu qui soient écrits dans un style à la portée des enfants.

Vous mettrez aussi dans votre fichier les documents chiffrés (graphiques, tarifs, etc...), qui peuvent vous être utiles.

Tous les enfants, pour peu que vous le leur demandiez, vous apporteront une variété infinie de cartes postales et de vues diverses et des pays étrangers. La documentation nous assaille aujourd’hui. Nous n’aurons même pas à la rechercher mais seulement à la classer et à la trier. Ce qui sera déjà un travail éminemment profitable.

2°. Mais attention, vos tiroirs et vos boîtes seront vite bourrés. Vous n’y aurez pas grand profit si vous ne savez y mettre de l’ordre, car vous ne trouverez jamais, au moment voulu, ce que vous désirez.

Une classification s’impose immédiatement.

Vous pouvez évidemment employer une classification de votre choix et vous penserez tout de suite à la classification alphabétique. Nous vous en recommandons une autre, la classification décimale, qui a été longuement étudiée et expérimentée dans notre mouvement et qui est une classification par centres d’intérêt.

Nous avions jusqu’à ce jour une brochure Pour tout classer et un Dictionnaire Index qui permettaient cette classification. Ces éditions, épuisées, sont en cours de réédition, sous une forme améliorée.

En attendant, je donne aux nouveaux venus â notre mouvement, le conseil suivant :

Procurez-vous 10 dossiers, ou 10 grandes enveloppes 21 x 27 sur lesquels vous inscrirez les grands titres de notre classification :

0- Notre travail. Notre correspondance
1. - Le milieu naturel
2. - Les plantes
3. - Les animaux
4. - Les autres sciences
5. - Agriculture et alimentation
6. - Travail et industrie
7. - La cité et les échanges
8. - La société
9. - Culture et loisirs
La nouvelle classification comporte en plus :
G. - Géographie
H. - Histoire

Vous inscrirez en haut et à gauche du document à classer le chiffre correspondant, et le titre ainsi indexé s’en ira automatiquement dans la chemise ou le dossier correspondant où vous serez sûr de le trouver quand vous en aurez besoin.

Le jour où, pour l’exploitation de votre complexe d’intérêt vous aurez besoin d’un document traitant des animaux vous êtes sûr que vous le trouverez au dossier n° 3 (à condition évidemment que vous l’y ayez placé).

Cette première classification peut vous suffire pour vos débuts. Nous vous recommandons tout particulièrement l’usage des dossiers et plus particulièrement des dossiers suspendus dont l’emploi est aujourd’hui presque généralisé dans les bureaux: le dossier porte une bande métallique avec encoche qui le maintient dans la boîte classeur. Vous avez tous vu des classeurs métalliques dans les bureaux. C’est ce que nous réalisons. La CEL vend une boîte classeur 21 x 27 et des dossiers suspendus qui, pour un prix très abordable introduiront dans votre classe un fichier qui sera un véritable outil de travail (voir photo p. 9).

Mais quand mon répertoire 3 sera bondé, que j’aurai garni ainsi pour ce même chiffre 2 ou 3 dossiers suspendus, ma classification ne deviendra-t-elle pas fouillis puisque je devrai compulser 300 documents peut-être pour trouver celui qui me convient ?

Alors intervient le véritable avantage de la classification décimale.

Ce dossier 3, nous allons le subdiviser en 10 sous-dossiers et nous aurons :

30. Généralités et étude du corps
31. La santé de l’homme
32. Les mammifères
33.Les oiseaux
34 Les reptiles et les batraciens
35. Les poissons
36. Les insectes (articulés)
37. Les autres articulés
38 Les mollusques
39 Autres animaux

Il vous suffira de vous familiariser avec la lecture de la classification. Vous ne lirez pas 38, mais 3.8. Le document à classer va au 3, et dans le 3, il va au 8. Lorsque vous chercherez un document vous lirez de même: 1 2. 3. Puis arrivé au 3 vous lirez : 3.0, 31, 3.2, 3.3. C’est là que vous aurez le document.

Vous verrez plus tard qu’on peut subdiviser à 3, 4, 5 et 6 chiffres. Mais : avec 1 chiffre vous aurez déjà 10 dossiers avec 2 chiffres vous aurez 100 dossiers, ce qui vous suffira pendant longtemps. Vous n’aurez peut-être même pas avantage à compliquer cette classification. Il ne s’agit pas là en effet d’un fichier où l’on recherche un document donné. Nous ne recherchons pas un document particulier, mais toute la documentation se rapportant à un centre d’intérêt, et il n’y a pas d’inconvénient pour nous à ce que l’élève passe en revue une collection donnée pour chercher ce qui lui convient.

Commencez donc immédiatement votre fichier. Nos publications à venir vous apporteront toutes explications complémentaires.

(Remarquer que ce fichier documentaire ne vous empêche pas la constitution et l’usage d’autres fichiers de références, sur carton 10,5 x 13,5 ou même plus petits, qui vous permettront de classer BT, manuels scolaires, etc... Vous n’avez qu’à vous référer pour tout cela à ce qui se fait dans le commerce).

La Bibliothèque de Travail

Notre collection BT constitue actuellement une documentation incomparable, qui, en bien des cas, peut vous suffire pour l’exploitation de vos complexes (surtout si vous possédez en plus la collection Suppléments BT (SBT) qui la complète. Nos BT apportent en effet une documentation directement utilisable pour un millier de centres d’intérêt. C’est dire que, pour presque tous vos centres d’intérêt, vous trouverez une documentation valable dans nos BT et SBT. C’est pourquoi ces deux collections s’imposent dans toutes les classes qui veulent baser le plus possible leur enseignement sur les intérêts majeurs des enfants dans leur milieu.

Avec le Fichier scolaire et les BT vous avez déjà une base sûre qui va vous permettre du bon travail. Vous complèterez cette documentation :

- par nos B T Sonores et le service de prêts de bandes magnétiques, organisé par notre commission d’échanges sonores. (Écrire à P. Guérin, BP 14, Ste-Savine, Aube).

- Par la télévision, la radio-scolaire et le cinéma, dont l’apport est loin d’être négligeable.

- Par les documents divers, dépliants, photos, bandes sonores, reçus par échanges de nos correspondants.

Avec tout cela vous aurez une école riche dont vous pourrez tirer le maximum.

La technique pédagogique d’exploitation des centres d’intérêt

Nous apportons du nouveau dans nos classes.

Vous n’aviez naguère pour toute richesse que sept ou huit manuels - même s’ils sont beaux et modernisés - et l’aridité des devoirs et des leçons. Avec nos techniques :

- vous aurez l’apport incomparable des enfants en expression libre et en réalisations techniques et artistiques ;
- un fichier documentaire qui vous apportera la riche nouveauté du monde qui vous entoure ;
- une collection BT qui, à elle seule, autorise désormais une autre pédagogie ;
- des BT Sonores et des diapositives.

QU’ALLEZ-VOUS FAIRE DE CES RICHESSES ?
COMMENT LES EXPLOITEREZ-VOUS ?

a) Si même vous n’avez pas encore modernisé votre classe, réalisez au moins le texte libre, menez des enquêtes pour l’étude du milieu, laissez parler les enfants. Vous découvrirez là les thèmes les plus fertiles pour les leçons que vous aurez à faire. Et si même, pour ces leçons, vous avez encore recours aux manuels, vous habituerez vos enfants, et vous vous habituerez vous-mêmes, à un emploi intelligent de ces manuels, en cherchant toute documentation complémentaire qui rendra vos leçons plus vivantes et plus utiles.

b) Si vous ne vous sentez pas encore assez sûrs de vous pour aborder ce que nous appelons les leçons a posteriori essayez tout de suite les conférences d’enfants qui sont désormais à votre portée.

Avec nos BT, enrichies par le Fichier documentaire, vos enfants n’ont que le choix parmi les thèmes possibles.

Vous programmerez les BT, vous chercherez dans le Fichier les renseignements complémentaires; l’auteur de la conférence écrira aux correspondants, aux organismes ou aux personnalités susceptibles de le renseigner.

Au soir dit, quand la préparation est terminée, dessins ou cartes exécutés, diapositives ou films préparés, l’élève fait sa conférence. Après quoi les questions des enfants et les mises au point du maître assurent la valeur pédagogique de cette pratique.

c): nous faut d’ailleurs considérer pour ainsi dire deux degrés :

Le CP et CE, l’exploitation d’un centre d’intérêt est encore relativement facile, où le maître n’est pas trop ligoté par les programmes et les horaires et peut s’attarder le cas échéant sur les travaux qui intéressent vraiment les enfants.

2°. Les CM, Fin d’Études, CEG et Second degré. A ces degrés, nous l’avons déjà marqué, les centres d’intérêt ne sont qu’exceptionnellement envahissants. Ce sont plutôt des pistes qui surgissent, se dessinent, et sur lesquelles nous pourrons avancer plus méthodiquement.

 

Ce qui veut dire que, dans ces classes, il n’est plus indispensable d’exploiter le centre d’intérêt au moment où il surgit. Cette exploitation ne peut d’ailleurs que très rarement se faire au pied levé. Nous la préparerons pour les travaux à venir.

Nous avons ainsi dans nos classes une multiplicité de pistes qui répondent à la variété des complexes d’intérêt. Et c’est en tenant compte le plus possible de cette variété que nous pourrons ordonner et motiver nos divers travaux scolaires.

Nous n’en avons pas spécialement contre les manuels scolaires en tant que livres, ni même contre les leçons. L’essentiel serait que les uns et les autres ne prétendent pas imposer de l’extérieur aux enfants ce pourquoi ils ne se sentent ni attrait ni besoin. Mais il y a sûrement possibilité de parvenir à ces degrés à une pratique pédagogique qui parte nécessairement des intérêts des enfants, qui puise dans les richesses nouvelles que nous possédons la nourriture qui leur est essentielle pour que, avec la collaboration du maître, dans un climat culturel nouveau, nous atteignions à une forme nouvelle d’école au service de la vie.

Nos boîtes et bandes enseignantes nous seront pour cette entreprise, d’un très grand secours. Elles nous permettent de préparer méthodiquement le travail dans le cadre des programmes, et même en fonction des examens.

Et, peu à peu, par l’expérience collective, nous mettrons au point, tous ensemble, les véritables techniques de travail de l’École Moderne.

C. F.

Dans l’Éducateur n° 6 (15 Novembre 1954)
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