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En deuil de leur dignité

Avril 1994

Le Nouvel Educateur n°58, avril 94                            éditorial
 

Il y a tant de sujets dont on aurait envie, dont il faudrait parler. S'inspirer du contenu de ce numéro d'avril, dont le dossier propose « des brèches pour apprendre et vivre au collège », et élargir la réflexion à la réforme des collèges ?

Traiter des raisons philosophiques qui nous conduisent à faire le choix d'enseigner et d'éduquer ?
Écrire sur la conjoncture politique, économique, cadre de vie actuel et futur des jeunes dont nous avons la charge ?
Les idées, les situations se bousculent et il serait possible de lis­ter quelques sujets et de proposer à chaque lecteur d'écrire son propre éditorial. Imaginez un instant...
Mais en ce printemps 1994, les rues, les places des villes connaissent les manifestations des jeunes, quelquefois débordantes de violence.
A quinze ou vingt ans, on ne peut pas ne croire en rien.
« S'il te plaît dessine‑moi un rêve, et je reprendrai confiance en mon avenir... » semblent exprimer lycéens et étudiants dans leur lucidité. On ne peut étudier et travailler dans une quiétude minimum indispensable que si l'on est le propre acteur de son devenir.
« Toute société qui prétend assurer aux hommes la liberté doit commencerpar leur garantir l'existence» écrivait Léon Blum.
Depuis 1946, le préambule de la Constitution affirme que chacun a le droit d'obtenir un emploi.
Actuellement, que mettent en oeuvre les adultes pour respecter ce droit ?
Nos enfants sont en train de perdre le droit au rêve.
Quel ravin entre deux printemps !
Celui de 1968 sous les pavés duquel miroitait la plage...
... Celui de 1994 sur le bitume duquel « fleurissent » l'exclusion, le racisme, les intégrismes, la drogue, la haine, la guerre, le sida, le chômage, le mal de vivre, le mépris.
Trop de jeunes se sentent aujourd'hui en deuil de leur dignité.
 
Nicole Bizieau
le 26.03.94