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logo ressource btn Les Jeux Olympiques modernes, enjeux politiques

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Dans :  Histoire-Géo › 
Mai 2011

 Les Jeux Olympiques, qui devaient essentiellement permettre la rencontre de la jeunesse mondiale, s'inscrivent de plus en plus dans la politique nationale et internationale.

 

La démarche de Pierre de Coubertin, en prônant la renaissance des J.O., relevait de la politique : en rassemblant des jeunes de tous pays autour du sport, il cherchait à jeter les bases d'une " paix internationale pratique ". Les règles servent en quelque sorte à "sacraliser" les Jeux.
entrée du CIO à Lausanne
 
 
 
 
 
 
La Charte Olympique
Elle établit dans son préambule les principes fondamentaux de l’olympisme, à savoir favoriser : « une société pacifique, soucieuse de préserver la dignité humaine », «l e respect des droits de l’homme », le refus de « toute discrimination ».
Le choix d’une ville organisatrice doit donc -selon la charte- répondre (outre la garantie de bonnes conditions techniques pour le déroulement des épreuves) à des exigences d’ordre philosophique :
• garanties de liberté d'entrée aux sportifs, représentants des comités olympiques, journalistes, touristes, etc ;
• absence de limitation d'ordre moral, politique, religieux au déroulement des épreuves ;
* et, désormais, l’approche des problèmes d’environnement.
 La coutume impose aussi une alternance entre les pays et les continents.
 
 En noir, les villes hôtes pour les Jeux d'été, en rouge pour les jeux d'hiver
À regarder la carte, l'Europe concentre la grande majorité des villes-hôtes, pourtant les États-Unis sont de loin en tête avec -entre Jeux d'hiver et Jeux d'été- neuf villes organisatrices, dont trois sélections pour Los Angeles.
 
 
Les cérémonies
En ouverture et en clôture des Olympiades, elles comportent un certain nombre d'éléments, destinés à affirmer  les valeurs de l’olympisme.
 
Musée de l'Olympisme, Lausanne

 

 

La cérémonie d'ouverture
Les éléments se déroulent suivant un ordre immuable :
- arrivée des officiels ;
- défilé des participants (athlètes mais aussi membres des fédérations sportives nationales, entraîneurs... ), chaque délégation est précédée de son drapeau national1;

 Selon les prescriptions. la Grèce vient en tête, puis les diverses délégations dans l'ordre de l'alphabet du pays organisateur, dont les athlètes entrent en dernier.
- discours prononcé par le chef de l'État de la ville-hôte, avec la formule officielle d'ouverture ;

-entrée du drapeau2 remis au maire de la ville par celui de la ville organisatrice précédente ;
- lâcher de colombes et hymne olympique (composé pour la 1re olympiade, exécuté régulièrement depuis 1952) accompagnant la montée du drapeau au mât olympique ;
- entrée du dernier porteur et allumage de la flamme ;
- serment des athlètes et des juges (apparu aux J.O. de 1920).

 

Serment des athlètes : " Au nom de tous les concurrents, je promets que nous nous présentons aux Jeux Olympiques en concurrents loyaux, respectueux des règlements et désireux de participer dans un esprit chevaleresque pour la gloire et l'honneur de nos équipes."

 

Serment des juges : " Au nom de tous les juges et officiels, je promets que nous remplirons nos fonctions pendant les présents Jeux Olympiques en toute impartialité, respectueux des règlements et fidèles aux principes du véritable  esprit sportif. "
 
 
La cérémonie de clôture
Elle a aussi un déroulement fixé par les règles, avec une fin particulièrement symbolique :
- le drapeau olympique descend et la flamme s'éteint.

- mais les spectateurs prolongent la fête en illuminant les gradins. Ce dernier geste représente bien l'histoire des Jeux modernes : la fête n'est pas finie puisque la nouvelle fête a déjà commencé. Pour marquer ce passage, le maire de la nouvelle ville organisatrice assiste à la cérémonie et celle-ci  présente un tableau lors du spectacle qui accompagne les moments officiels.

 

LES ÉTATS ET LEURS ATHLÈTES
 
La Charte précise bien qu’il s’agit d’une compétition entre athlètes et non entre pays, avec engagement par l’intermédiaire des CNO (Comité National Olympique).
 
Les Jeux Olympiques sont des compétitions entre athlètes et non entre pays. Ils réunissent les athlètes sélectionnés par leurs CNO respectifs.

Les CNO décident de l'inscription des athlètes .... (proposés par les Fédérations) .... non seulement pour les performances sportives de l'athlète mais aussi sur son aptitude à servir de modèle aux jeunes sportifs de son pays. 

À l'occasion des Jeux de Rio (2016), le CIO est intervenu.

 

 

 
Mais la politique intérieure reste présente.
En 1968, (Mexico) les athlètes noirs Smith et Carlos manifestent, en levant le poing pendant la remise des médailles , leur prise de position envers la discrimination raciale exercée aux États-Unis. Ils seront exclus par le CIO, car la Charte impose la neutralité des participants.
 
Le rang dans le "tableau des médailles" intervient dans la politique sportive des pays, comme le montre l'exemple de la Grande-Bretagne.

 

 

 

 

 

 

 

De même les débats ne manquent pas autour de la prise en charge de la préparation des athlètes par leur état, parfois dès leur plus jeune âge, comme autour de la médiatisation des médailles.
 
 
Les délégations olympiques de tous les pays sont sélectionnées, préparées et encadrées comme des unités de commandos d'élite, surveillées comme des missions d'agents secrets à l'étranger, rémunérées sur des budgets d'État et mobilisées pour- défendre « l'honneur national », les « couleurs du drapeau » et représenter la « patrie » face aux autres nations [...] La course aux médailles, honneurs et titres, n'est plus une affaire d'individus. mais bel et bien une industrie d'État avec ses plans quinquennaux [ ... )
Revue Quel Corps N° spécial septembre 1988
Sur le vif
Ras-le-Séoul !
Séoul, ras-le-bol ! Non, c'est vrai, moi, chaque fois que j'ouvre mon transistor, on me balance une défaite à la gueule, un espoir bien français qui s'écrase, qui se fracasse en skiff, à vélo ou au fleuret. Dans les médias, je parle pas des émissions spéciales, les médailles sont tricolores ou ne sont pas. Vous pouvez me dire, vous, qui c'est qui a remporté la médaille d'argent dans le 200 m nage libre dames ? Ou la médaille d'or du pentathlon moderne ? Non, forcément : c'est personne, puisque c'est pas nous. (…)
Claude Sarraute3
Les media ne manquent pas d'amplifier cette assimilation entre le nombre de médailles et l'aura d'un pays en publiant et commentant les classements par nombre de médailles obtenues.
La télévision particulièrement, avec son audience mondiale, sert de caisse de résonance aux faits de
politique extérieure. Les Jeux serviront donc aux groupes ou états de moyen de :

• reconnaissance,
• exclusion ou punition,
• pression à travers les opérations
    de terrorisme comme à Munich (1972),
   de
boycottage (plusieurs pays occidentaux n’ont pas participé, en 1980, aux J.O de Moscou, l’URSS venant d’envahir l’Afghanistan).

Les rapports entre politique internationale et olympisme peuvent, malgré les injonctions nettes de la Charte olympique, donner lieu à des  débats bien éloignés des performances sportives et de la "paix internationale ".
Le cas de l'Allemagne
La participation de l'Allemagne aux JO est directement liée à son histoire politique. 1920, l'Allemagne se trouve exclue des Jeux avec les autres nations vaincues. Elle y revient en 1928, à Amsterdam,
1936,  le pouvoir nazi a très vite compris ce qu'il pouvait tirer d'une situation préparée avant son accession au pouvoir (le CIO élit la ville de Berlin au congrès de Barcelone en 1931).
 
Le sport fut à Berlin, du 2 au 15 août, la raison d'État, et la seule, toutes autres affaires cessantes. Que le sport ait été mis au service de la race, personne ne le contestera. A l'aide d'une manifestation athlétique d'intérêt et de participation mondiaux, le Führer et ses collaborateurs donnèrent aux peuples le spectacle d'une Allemagne régénérée physiquement et moralement, sûre d'elle-même, organisant à la perfection, donnant l’impression d'une race en parfait équilibre et en plein essor.
(.. ] Les visiteurs venus de l'étranger avaient l’impression d'assister à une gigantesque représentation théâtrale dont ils étaient aussi les acteurs ou les figurants.
L'Illustration, 1936.
« Héritage » de la Seconde Guerre mondiale, la partition de l’Allemagne ne s’impose que très lentement pour les instances olympiques.
Le CIO ne reconnaît, en 1951, qu’un seul Comité olympique pour laisser aux Allemands le soin de s’entendre entre eux.

Jusqu'en 1966, les Allemands concourent sous une seule couleur en présentant des délégations communes. Le CIO reconnaît (avant les gouvernements) le comité national olympique de RDA dont l'entrée officielle a lieu aux championnats d'Europe de 1966. Mexico, en 1968, marque aussi les premiers Jeux où les deux Allemagne se présentent officiellement séparées.4

 

 

Débats autour des Jeux de Pékin

En 2008, quelques mois avant l’ouverture des Jeux de Beijing, une polémique accompagne le parcours mondial de la flamme olympique. De nombreuses nations reprochent à la Chine les entorses aux droits de l’homme : emprisonnement d’opposants et surtout répression contre la révolte des Tibétains.

« La répression est de pire en pire car nous entrons dans la phase cruciale des Jeux. Ce qui leur importe, c’est de faire taire le petit peuple opprimé de la Chine. Des milliers de gens sont déjà en prison, dans les hôpitaux psychiatriques ou dans les camps de travail. Cela a un lien direct avec les Jeux olympiques. »
Hu Jia (condamné à 3 ans et ½ de prison)
Cité par Ouest-France, 6/04/08

 

 
On note ainsi autour du circuit de la flamme dans plusieurs villes du monde :
* une présence policière importante,
* de nombreux incidents,
* une large exploitation par les média internationaux.
 
La présence policière existait déjà lors du passage de la flamme à Paris en 2004
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Des titres:
            Une flamme pour les Droits de l’homme
La flamme des Jeux Olympiques arrive demain à Paris. Au lieu de briller comme un signe d'espoir, hélas ! elle éclaire un drame.
(Ouest-France, 6/04/08)
           
        L’odieux et le burlesque
Il ne faut pas compter sur le CIO pour exiger le respect de sa propre éthique. Il est donc bon que les populations se substituent à lui.
(Le Nouvel Observateur, 10/04/2008)

Plusieurs prises de position se dégagent :
* majoritairement, l’opinion internationale condamne la Chine,
 
 
« en prenant l’initiative d’une répression de grande ampleur au Tibet, à la veille de l’ouverture des Jeux Olympiques, ce sont bel et bien les Chinois qui ont choisi la provocation et l’épreuve de force.
Le gouvernement de Pékin veut les Jeux et l’argent des Jeux : je veux dire la pleine reconnaissance internationale à ses propres conditions, c’est-à-dire le droit d’imposer un régime dictatorial et policier à sa population. Car les Tibétains ne sont pas les seuls à pâtir de ce régime : les musulmans ouigours, les prisonniers politiques, les intellectuels, etc."
Jacques Julliard
«Le Nouvel Observateur» 10/04/2008

 

* En Chine, la télévision occulte ou déforme les manifestations, et la presse prend violemment position contre les medias occidentaux :

Les medias occidentaux déforment l’image de la Chine
Des rédacteurs et journalistes chinois de renom condamnent la presse occidentale
(titres cités par EDITOWEB MAGAZINE, 11/04/2008)

* Les athlètes tiennent à ne pas être pris en otages et veulent pouvoir marquer leur position de citoyens. Leurs propositions sont loin d’être approuvées par les instances olympiques, au nom de la non-politisation.
 
« Si les athlètes veulent réellement faire état de leurs opinions, très bien, mais n’oublions pas également que le droit de ne pas s’exprimer existe. Les athlètes ne devraient ressentir aucune obligation morale à ne pas prendre position. (…) Les athlètes sont des gens matures et intelligents. Ils sauront ce qu’ils peuvent ou ne peuvent pas dire. En cas de doute, le CIO et les CNO sont là pour les guider.»
Jacques Rogge, président du CIO, 10/04/2008
* Le CIO, par l’intermédiaire de son président, exprime un point de vue prudent.
 
« J’ai déclaré à plusieurs reprises que le CIO considérait comme sage l’attribution des Jeux à Pékin et nous n’avons aucun regret (….)Il s’agissait d’une énorme plus-value d’accorder au cinquième de l’humanité les J.O »
 
(Cité dans «Le Parisien», 4/04/08)
Il rappelle par ailleurs au gouvernement chinois ses promesses d’améliorer les droits de l’homme, engagement moral pris lors de l’attribution.

 

 1. En 2000, à Sydney, les deux Corée ont défilé sous le même drapeau.
 2. Inventé en 1914 par P. de Coubertin, le drapeau olympique est utilisé pour la première fois en 1920 à Anvers pour symboliser la paix revenue, les anneaux représentent les cinq continents, les couleurs sont celles qui servent de base à tous les drapeaux nationaux et le blanc est symboles de paix.
3. Chroniqueuse française née en 1927. Elle a collaboré au quotidien Le Monde. Depuis 1995, elle participe à des émissions sur France Inter, Europe1, France2
4. 1991 marque la réunification des Comités Olympiques allemands

Source : 
BT2 n°242, Les Jeux Olympiques modernes, une spirale sans fin, Décembre 1991
Crédit iconographique : 
Fond de carte Académie d'Aix-Marseille Photos : P.Carpentier, A.Dhénin, B.Monthubert
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