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Enseignants sanctionnés : Courrier de l'ICEM au ministre

Monsieur le Ministre,

 
Les réformes engagées depuis deux ans bouleversent considérablement l’école primaire. Ces bouleversements ne peuvent entraîner une efficacité accrue du système éducatif Français, comme en témoignent les nombreuses réactions de spécialistes de l’éducation, de scientifiques et d’anciens ministres de l’éducation Nationale. Cela inquiète une majorité d’organisations dévouées à l’enfance ainsi que la Ligue des Droits de l’Homme. L’ONU par l’intermédiaire du Comité des experts aux Droits de l’enfant a interpellé la France sur sa mise en oeuvre de la Convention internationale des droits de l’enfant justifiant l’action des directeurs d’école qui refusent le fichage des enfants dans Base Elèves.
 
Un certain nombre d’enseignants ont choisi de résister à la dégradation du service public d’éducation. Ces professeurs des écoles ou directeurs, forts de leur conscience professionnelle et de leur investissement personnel dans leur travail, ont choisi d’être en accord avec leur conscience.
Que reprochent ces enseignants dits « désobéisseurs » à ces mesures ?
 
1. Elles ont été prises sans concertation ni consultation.
 
2. Les recherches des quarante dernières années sur l’enseignement et la pédagogie ont été complètement niées et même méprisées.
 
3. La réduction de vingt-six heures à vingt-quatre heures hebdomadaires n’était revendiquée par personne, ni les syndicats d’enseignants, ni les fédérations de parents d’élèves, ni les partis politiques. Au contraire, les chronobiologistes recommandent depuis longtemps un allégement du volume horaire quotidien mais pas du nombre de jours ! Les expériences de semaine à quatre jours menées depuis plus de dix ans n’ont jamais établi une amélioration de l’efficacité scolaire.
 
4. Les programmes 2008, plus lourds en ce qui concerne l’enseignement du français et des mathématiques (ce qu’on appelle « les fondamentaux»), réduisent la part de la recherche, de l’expression, de la création, pourtant universellement reconnues comme indispensables aux apprentissages. Des notions de français ou de mathématiques, qui avaient été écartées des programmes parce que jugées trop difficiles, sont de nouveau imposées, sans qu'il soit tenu compte du temps nécessaire à l’appropriation de ces savoirs.
 
5. Les programmes précédents (2002 puis 2007), à peine mis en place, n’ont fait l’objet d’aucune évaluation. Il est souvent reproché à l’école de ne pas suivre l’évolution de la société : avec ces réformes, l’école fait un bond en arrière de plusieurs décennies !
 
6. Les deux heures d’aide personnalisée et les stages de remise à niveau, qui sont accompagnés de la réduction et de la transformation des missions des enseignants des RASED, ne réduiront pas la difficulté scolaire. Les deux heures hebdomadaires d’enseignement supprimées pour tous manquent aux enfants fragiles, lents pour parfaire leurs apprentissages. Elles manquent aussi aux enseignants qui sont contraints de diminuer les horaires de pratiques indispensables à un développement harmonieux de chaque enfant.
 
7. Les évaluations nationales CM2 passées en janvier ne pouvaient en aucun cas permettre de déterminer les compétences acquises puisque certains item portaient sur des points du nouveau programme non encore travaillés par les enfants à cette date. Dans les évaluations de CE1, le texte principal proposé aux enfants pour de nombreux items de français était destiné, par l'éditeur lui-même, aux enfants de cycle 3.
Des enseignants qui ont résisté à l’application de ces mesures, tout en continuant d’effectuer leur travail suivant leur conviction et leur savoir-faire sont menacés de lourdes sanctions : retraits de salaire, retraits de fonction de direction, notes pédagogiques bloquées, avancements retardés voire rétrogradation, etc.
 
Pourtant d’autres collègues s’étaient élevés, durant ces dernières années, contre des réformes ou des programmes : M. Marc Le Bris, Mlle Rachel Boutonnet ont écrit des livres et se sont exprimés dans les médias pour fustiger la loi d’orientation de 1989, l’apprentissage de la lecture par le sens, refusant ouvertement d’appliquer les programmes. Ces enseignants ont été honorés récemment par le gouvernement :
invitation à l’Elysée pour l’un, décoration de l’Ordre National du Mérite pour un autre. Quel sens faut-il donner à une telle valorisation de la désobéissance lorsque nos collègues sont lourdement sanctionnés pour des actions similaires ?
 
Que faut-il penser ?
 
Ne laissez pas, Monsieur le Ministre, la France sans une éducation créative, ambitieuse, émancipatrice sous couvert de réduire les dépenses.
Ne laissez pas, Monsieur le Ministre, la France sans un corps enseignant capable de réflexion, d’inventivité, de réactivité sous couvert d’autoritarisme.
 
Pour toutes ces raisons qui attestent du sérieux et du professionnalisme de ces enseignants, nous vous prions, Monsieur le Ministre, de bien vouloir demander aux Inspecteurs d’Académie de cesser toute poursuite envers des enseignants et directeurs d’école qui oeuvrent pour la France et son avenir, dans le respect des droits de l’Homme et celui des Droits des Enfants.
 
Dans cette attente, nous vous adressons, Monsieur le Ministre, l’expression de nos sentiments les plus respectueux.
 
Pour le Conseil d’Administration de l’ICEM,
La présidente, Muriel Quoniam

 

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Merci

Merci beaucoup de cet engagement de tout le mouvement PF aux côtés des résistants péda.
Dans le même temps, nous avons envoyé aujourd'hui une lettre au président de la république
À lire ici:

http://resistancepedagogique.org/site/

Sébastien Goyer, référent en Charente du réseau des enseignants
du primaire en résistance.

Bon travail! Votre message

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