Raccourci vers le contenu principal de la page

Complicité des corps et des lieux

Dans :  Arts › Spectacle vivant › Arts › Arts plastiques › Arts › Principes pédagogiques › 
Février 2006

 

Points de vue...

... du côté de l'enseignante

 

Pour m’accompagner dans la mise en place de ce projet, la Conseillère pédagogique m’a conseillée dans les démarches administratives pour obtenir des subventions auprès de l’Inspection Académique et de l’ADIAM (Association Départementale d’Information et d’Actions Musicales, chorégraphiques et théâtrales) du Val d’Oise. Elle m’a mise en relation avec Annie Dumont, danseuse chorégraphe de la Compagnie des Epices dont j’avais pu apprécier le travail lors d’une intervention au Musée Départemental de l’Education de Saint-Ouen l’Aumône. La problématique de cette artiste et son parcours nous paraissaient correspondre tout à fait aux attentes du projet que je désirais mettre en place, un projet en liaison avec celui de création de mosaïques dans l’école qui traduisait l’étude environnementale menée au sein de ma classe de Grande Section. Ce projet accompagnerait donc ces recherches environnementales et plastiques, en permettant aux enfants d’appréhender différemment « l’espace proche » (classe, école) et les « environs immédiats ». Il reprendrait sous une autre forme les actions plastiques de la mosaïque (morceler, emboîter, isoler, fragmenter, accumuler) et mettrait en évidence la dextérité et la patience nécessaires aux mosaïstes.
L’aboutissement de ce projet devait se traduire par un parcours chorégraphique lors du vernissage des mosaïques.


 ... du côté de l'artiste

Le constat

Ma première rencontre avec l’enseignante se situe dans le cadre de son école, plus exactement dans sa classe et là, première constatation : mon corps doit se glisser dans ce mobilier scolaire non « ajusté » à ma taille. En tant que danseuse, cela provoque une friction à laquelle il est intéressant de répondre.
La deuxième rencontre, avec les enfants, se pose dans les mêmes conditions mais ce sont eux qui ne trouvent pas la place adéquate. Malgré un mobilier adapté, les corps sont serrés, mal positionnés, chevauchés, bousculés.
Classiquement, à partir de là, nous aurions dû les emmener dans un espace « libéré de toute contrainte » où les muscles se délient ou se tendent suivant l’état de chacun, où enfin ces corps enfantins existent et subissent moins. Mais au bout, tout redeviendrait comme avant : crispation, bousculade, lassitude. Il fallait trouver autre chose !

Les actions à envisager

Reprendre en considération les moments quotidiens, les scruter, les énumérer, les questionner (Comment est-on assis sur sa chaise ? Quelles sont les parties du corps qui touchent cette chaise ? Va-t-on se cogner à un objet en se déplaçant dans la classe ? Les autres sont-ils trop près de nous ? Nous gênent-ils ?), permet d’aiguiser son regard sur l’environnement et ses « locataires », puis d’accéder à une maîtrise plus fine de son comportement dans ces espaces réduits ; les faits et gestes journaliers deviennent des actes conscients, le corps retrouve une présence et l’état de danseur se prépare.
Puis ces faits et gestes vont se transformer en « mouvements » car nous allons ensemble les désorienter, les amplifier, varier leur vitesse, les additionner, leur donner un certain poids. Les enfants vont pouvoir interpréter leurs espaces quotidiens, des espaces générateurs d’inspiration pour la danse : la classe, les couloirs, les passages d’une pièce à une autre, les coins et recoins.

Cette recherche - la place du corps dans son environnement habituel - que poursuit la compagnie depuis un moment dans ses sensibilisations, trouve une connivence avec le projet de réalisation et d’installation de mosaïques dans les différents lieux de l’école. Un parcours chorégraphique va être créé simultanément avec la mise en place progressive des « tableaux » de mosaïque, un lien entre l’espace et le temps.
Les actions plastiques de la mosaïque vont donner les directions corporelles à appréhender. Lors du détournement des rituels établis par l’enseignante et les enfants, les parties du corps mises en actions vont être isolées, répertoriées puis reprises dans un ordre différent. Ces premiers actes dansés réalisés sous la forme de solos, seront ajustés, collés entre eux pour former des duos lors de l’exploitation des autres lieux scolaires.

 

Tous ces fragments chorégraphiques accumulés se retrouveront pour un parcours en extérieur au bord de l’Oise où, par contraste, nous travaillerons sur la continuité du mouvement, sa permanence dans le temps et la longueur des trajets.

Tous ces espaces vont apporter leur distinction pour enrichir cette danse. Cette richesse est transportable. Dans tous les lieux que cette danse rencontrera, le processus se prolongera.
 

    sommaire n° 120 Le corps et ses langages 
début de l'article 

suite de l'article