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Traits, portraits, autoportrait et généalogie en maternelle

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Février 2000

 

 

Traits, portraits, autoportrait et généalogie en maternelle

 

A la suite de notre approche de la notion de généalogie présentée en seconde partie de ce témoignage, nous avons, entre autres choses, utilisé les portraits photographiés des enfants.


Après leur avoir proposé d’utiliser ces photos prêtées en les photocopiant, ceux-ci se sont souvenus d’un portrait visionné en diapositive, portait ressenti comme insolite parce que l’auteur avait superposé son portait photographié et un paysage.

Les enfants ont proposé plusieurs directions de recherche et les outils qui leur semblaient correspondre pour transformer leur photographie agrandie à la photocopieuse :
- colorer à l’encre ;
- créer un décor superposé avec l’encre qui respecte la transparence ;
- maquiller le portrait de graphismes à la craie avant de l’enduire à l’encre (nombre de couleurs au choix) ;
- employer entièrement ou partiellement la photocopie en la découpant, en la transformant pour l’insérer dans une composition personnelle.

Les enfants ont été incités à créer leur autoportrait en réfléchissant, tel Picabia, à leurs propres rêves, à ce qui leur est cher, à ce qu’ils aimeraient faire ou être : chevaucher dans les vagues marines, être un chef indien ou un clown, nager dans les couleurs. Les uns ont utilisé la photocopie de leur portait photographié, d’autres leurs trésors amassés (traces, empreintes diverses, dessins, graphismes affectionnés, matériaux divers, etc.). Les photos des enfants aux différents âges qu’ils ont rapportées de la maison nos ont replongés dans le temps passé. Mais les enfants se sont plu également à s’imaginer plus grand, à l’âge adulte.


 

J’avais apporté plusieurs séries de diapositives de portraits de famille. L’observation de ces derniers a conduit les enfants à aborder de nouveaux aspects du portrait. Après avoir fait l’inventaire des différents modes d’expression rencontrés depuis le début de notre travail (sculptures, peintures, dessins, photographies), les enfants ont remarqué que certains portraits photographiés étaient anciens. Ils ont en effet bien noté la couleur des photographies, la mode vestimentaire d’autrefois, la coiffure des femmes, le décor ainsi que la pose statique des sujets. Dans le même temps, ils découvraient un nouvel aspect de l’identité : la généalogie.

Les enfants se sont montrés alors impatients de faire le lien avec leur propre histoire familiale, en comptant par exemple le nombre de personnes qui pourraient figurer sur le portrait de leur famille (en général, la mère, le père et la fratrie). Ils ont, sur ma proposition, esquissé au crayon leur portrait de famille qu’ils ont accompagné de commentaires, lorsqu’ils le jugeaient nécessaire.

J’insiste sur le caractère volontaire de leur démarche: aborder ce sujet n’est pas sans présenter un certain risque pour les enfants et pour l’adulte, car le vécu familial n’est pas toujours clairement perçu par l’enfant. Le passage à la représentation peut s’avérer troublant et douloureux lorsque l’histoire familiale est entachée de tabous. Pour l’adulte enseignant demeure toujours un devoir de réserve.                                 

Les enfants ont découvert un matin mon propre album de photographies. Surprendre la maitresse dans sa chaise de bébé les a enchantés. Ils ont ensuite écouté mes commentaires et, peu à peu, l’histoire de ma propre famille. Pour clarifier mon exposé, j’ai fait appel aux enfants qui m’ont aidée à construire, sans le nommer, l’arbre de ma parenté.

Cette démarche nous a permis de dégager des notions complexes :
- la branche maternelle,
- la branche paternelle,
- les cousins,
- les ancêtres jusqu’aux arrière-grands-parents,
- la demi-fratrie,
- les divorces et les nouvelles alliances.

Aux différents stades de mon exposé, les enfants venaient prendre la place de l’un de mes parents et le lien de filiation était matérialisé par une corde. Chaque enfant avait les pieds posés dans un cerceau. Enfin, j’ai demandé aux enfants de poser les cordes sur le sol et de quitter leur place. Pour mieux appréhender l’ensemble du réseau familial ainsi matérialisé, celui-ci a été reproduit au tableau.Aussitôt, les enfants ont comparé cette trame à un arbre. Nous avons joué « à l’arbre » : les enfants volontaires ont présenté leur propre généalogie et cherché le degré de parenté des membres de leur famille.

 

 


Par la suite, il a été décidé que chaque enfant demanderait à ses parents des photographies pour les exploiter en classe :
- photographies chronologiques de la vie de chaque enfant ;
- photographies des membres de la famille ;
- un portrait de famille.

Les enfants, selon leur âge et leurs possibilités, ont classé leurs photographies. Les plus âgés ont construit leur arbre généalogique photographique. La famille élargie s’est ensuite répartie en deux tableaux annexes : la branche maternelle et la branche paternelle.

Les enfants ont emporté chez eux ces premières synthèses parfois très lacunaires. Les parents ont accepté de jouer le jeu en complétant l’arbre avec leur enfant (noms, liens de parenté, branche d’origine, etc.). Par la suite, les enfants ont décoré leur arbre au feutre, à la craie, à l’encre. Nous avons découvert d’anciens portraits de famille qui rappelaient ceux que nous avions vus en diapositives.

Mais le temps nous a manqué pour utiliser le portait de famille photographié sur un plan pictural. En revanche, les enfants ont adopté en modelage (terre cuite).

 

Les enfants ont pris plaisir à faire leur autoportrait pour l’offrir à leurs proches. Au contact d’œuvres d’artistes, mais également grâce aux échanges au sein de la classe, ils ont vu avec satisfaction leurs réalisations évoluer peu à peu, tout au long de l’année. Mais par leur genèse même, ces portraits et ces autoportraits ont en même temps aiguisé leur regard naissant d’une autre manière : se regarder soi et regarder les autres, c’est être attentif à autre chose, c’est écouter et comprendre que l’on peut être à la fois différents, et identiques, à la fois étrangers et frères.
    sommaire n° 90 Identité, Altérité  
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