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Expression libre en mathématiques

Dans :  Principes pédagogiques › Techniques pédagogiques › 
Janvier 1981
EXPRESSION LIBRE EN MATHEMATIQUES
 
Expression libre en mathématiques ? Ça existe, ça, c'est possible ? Ce n'est pas seulement en français que ça se fait ? Il y a des moments privilégiés en classe, même en mathématiques, où l'expression peut éclore. Expression libre, débat. Voici quelques exemples.
 
I. 713705 = SOLEIL

En 5ème, une heure sur les quatre était consacrée au travail libre : - recherche libre ; recherche semi-dirigée à partir de fiches (F.T.C., O.C.D.L...) ou de matériel dans des ateliers ; - travail auto-correctif ; - calcul avec correction par mini-calculatrice de poche. Christine et Serge font des opérations et les vérifient avec la machine. Ils travaillent l'un en face de l'autre et, tout à coup, un des deux crie qu'il a écrit “soleil” sur la machine. Effectivement, Serge avait tapé 713705 et Christine, lisant à l'envers, pouvait voir SOLEIL

 Ce fut un moment extraordinaire. Le soleil éclairait vraiment la classe ! Les opérations furent vite mises aux oubliettes et ils ont recherché d'autres nombres formant des mots. D'abord au hasard, puis la recherche s'est peu à peu organisée, en cherchant d'abord quels étaient les chiffres qui correspondaient à une lettre.

De nombreux mots ont été trouvés, un panneau a été constitué et affiché, et d'autres élèves d'un autre groupe ont eu, eux aussi, envie de chercher et ceux-Ià ont utilisé le     (4) comme         (h).
 
 
les chiffres qui correspondent à des lettres sur une calculatrice :
zéro
0
0
o
un
I
I
i
trois
3
E
e
cinq
5
S
s
sept
7
L
l
neuf
9
6
g
 
Il. “MADAME ! J'AI RÊVÉ DES MATHS !...”
Un matin, Thierry est arrivé tout excité : "J'ai rêvé, et en me réveillant j'ai vérifié que ça marchait." C'était en 6ème 5, classe où l'on avait rangé tous ceux qui avaient eu le plus de difficultés en primaire. Thierry va donc, toute affaire cessante, expliquer aux autres, au tableau, ce dont il s'agit. Il écrit la suite des nombres naturels :
  ... et explique: "Je peux le faire n'importe où, ça marche toujours ! "
Tout le monde paraît aussi étonné que Thierry, chacun vérifie (pas sans mal, certains se trompent et n'y croient plus...). Bon, enfin, tout le monde en convient. Je n'aurais jamais pensé qu'aucun ne le savait, d'autant plus que, dans le C.E.S., la moyenne et même la moyenne des moyennes sont toujours à l'honneur.
Première piste. - Je leur demande donc de réfléchir à la façon dont sont calculées leurs moyennes et de comparer .
Deuxième piste. - Sylvie: "Est-ce que ça marche aussi pour des grands nombres ? "
( Décidément ces grands nombres ne doivent pas être comme les autres, pour eux. ) Vérifions. . .
Troisième piste. - "Même qu'ils soient pairs ou impairs ? " Ah ! On les observe : ils sont tous les deux pairs ou ils sont tous les deux impairs.
Moi : " Et leur somme ? " On calcule : elle est toujours paire, ça tombe bien pour la diviser après par deux !
Quelqu'un: " Et si on additionnait un pair et un impair ? " Ils s'embrouillent dans l'énoncé des résultats.
Zhora : " Et si on faisait une table de Pythagore ? " (Elle aime bien ça.)

 

 " Et si on en additionne plus de deux ? "
On essaie d'abord d'additionner dans l'ordre, puis certains s'aperçoivent que l'ordre n'a pas d'importance et qu'on peut les associer comme on veut (on revoit les mots “associativité” et “commutativité”, mais c'est moi qui les leur fais dire ; eux s'en fichent pas mal). Enfin, ils découvrent que les pairs n'ont aucune importance pour la somme. Il suffit de compter les impairs : 1,3, 5. . . la somme est un nombre impair. O, 2, 4, 6... la somme est un nombre pair. Tous l'ont vu, savent l'utiliser sans difficulté dans des exercices à rallonge qu'ils se fabriquent pour eux, pour le fichier auto-correctif et pour les correspondants. Mais aucun n'est capable d'énoncer correctement en entier la règle trouvée (semblable à celle qu'ils utiliseront en 5e pour le signe du produit de plusieurs entiers relatifs). Est-ce important ?
Voilà le déroulement d'une heure “privilégiée” de math.
Ça tient de la recherche libre {individuelle, puis collective), du débat, à partir d'un rien qu'on a saisi au vol et accepté. Mais combien de fois, par manque de disponibilité, par reste d'esprit “programme”, j'ai peut-être empêché l'éclosion de ce genre de choses ?
Et puis, malheureusement, Thierry n'a pas rêvé à nouveau de maths...
Jackie GARCES collège Marcel-Pagnol 81200 Mazamet