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Aspects psychologiques des « Techniques Freinet »

Dans :  Formation et recherche › connaissance de l'enfant › 
Janvier 1960

Aspects psychologiques des « Techniques Freinet »
par C. COMBET

Dans son article paru dans le premier numéro de Techniques de Vie, M. Vuillet, Inspecteur de l'Enseignement Primaire à Mulhouse, nous rappelle que la pédagogie de l'Ecole Moderne est d'abord une pratique avant d'être une théorie ; qu'elle est d'abord une application avant d'être une réflexion. Et M. Vuillet reconnaît qu'il y a là quelque chose de choquant pour une mentalité rationaliste — mentalité d'après laquelle la réalité concrète ne peut être que l'expression et, finalement, le sous-produit de principes premiers ; pour toute pensée rationaliste — et il est bon de rappeler que cette pensée est véhiculée en France par la tradition scolaire, à tous ses degrés ; pour toute pensée rationaliste, la réflexion doit précéder l'action, la théorie pédagogique doit précéder la pratique pédagogique et, par là, lui conférer ses chances d'efficacité. C'est pourquoi, il y a en France tant de théoriciens, tant de philosophes qui écrivent de profondes réflexions sur le sens et la portée de l'éducation, mais ces réflexions qui ont une incontestable valeur (sur le plan de la pensée) restent lettre morte faute de s'appuyer sur des méthodes valables, faute de s'éclairer à la lumière d'une véritable pratique pédagogique.

Avec l'Ecole Moderne, nous assistons à un véritable renversement de vapeur. A l'origine de l'Ecole Moderne, nous ne trouvons pas une œuvre philosophique, une somme de réflexions, mais un véritable apprentissage pédagogique. Dans son école de Bar-sur-Loup, Freinet s'est trouvé seul en face d'un groupe d'enfants qu'il devait instruire et éduquer. Et les lectures qu'il avait faites à l'Ecole Normale, que ce fût Rabelais ou Montaigne, Rousseau ou Durkheïrn, ne lui étaient d'aucun secours lorsqu'il s'agissait pour lui de comprendre les enfants qui lui étaient confiés, de pénétrer leurs difficultés de toutes sortes ; et lorsqu'il s'agissait d'initier ces élèves à la grammaire, au calcul, à la composition française, les grands théoriciens de la pédagogie lui laissaient l'esprit plein de nobles idées mais les mains complètement vides.

Or, c'est peut-être par la main que débute et s'approfondit toute véritable éducation. La main nous met en contact avec le monde, avec la matière du monde ; elle nous ouvre au dialogue avec les choses beaucoup plus sûrement que ne le ferait la simple perception visuelle. Et je vois dans la valorisation de la main — valorisation qui s'exprime par la technique de l'imprimerie à l'Ecole, comme aussi par le dessin, la peinture, le travail manuel — un des fondements psychologiques les plus profonds de la pédagogie de Freinet. Que se passe-t-il, en effet, avec l'imprimerie à l'Ecole ? Au lieu d'être mis en présence de notions abstraites (lettres, syllabes) et purement verbales, l'enfant est appelé à manipuler des caractères ; la forme des lettres s'inscrit, en somme, au bout de ses doigts ; la lettre ne lui est plus étrangère, elle prend corps dans sa main, elle lui devient familière ; l'abstraction s'incarne en présence, une présence de plomb et d'encre qui persiste comme la pesanteur de la matière et comme la ferveur de l'enfant.

Il est illusoire — nous en avons subi l'expérience — de s'adresser à l'esprit seul de l'enfant. Un psychologue de l'intelligence, aussi qualifié que Piaget, nous donne une fausse image de l'enfant lorsqu'il sépare radicalement, chez celui-ci, l'intelligence et la présence corporelle. Piaget constitue l'intelligence enfantine comme un objet d'étude absolument indépendant dont il entreprend de faire le tour. Et il promet de fausses joies à l'instituteur lorsqu'il nous apprend qu'à douze ans, l'enfant est capable, normalement, d'assimiler des notions particulièrement abstraites (notions d'inclusion, de dépendance, d'altérité, etc.). Piaget, éminent logicien, crée l'enfant à son image. En réalité, l'instituteur sait combien l'enfant, et même la plupart des adultes, restent attachés aux représentations concrètes des données abstraites. C'est dans cette expérience, justement, que s'enracine l'imprimerie à l'Ecole. Avec Freinet, l'enfant apprend à lire, à écrire et à penser avec la main. L'enfant de Piaget pourrait aussi bien exister sans bras ni jambes ni aucun support charnel ; de ce point de vue, le corps n'est que l'accident de l'esprit, Avec Freinet, au contraire, le corps devient source d'esprit, il devient l'instrument de notre proximité au monde.

D'aucuns s'effraieront peut-être, disant : « Cette pédagogie abêtit l'homme supérieur ; en réhabilitant la sensation, la perception tactile, en accordant au corps un rôle éminent dans la genèse de l'idée, cette pédagogie s'insurge contre notre idéal, à savoir que l'esprit doit de plus en plus se désolidariser de la matière et s'en affranchir. »

C'est un fait, Freinet se veut matérialiste. Il ne s'en cache pas. Il l'a proclamé bien souvent. Il suffit, pour s'en assurer, de relire l'ouvrage d'Elise Freinet : Naissance d'une Pédagogie Populaire. Les professions de foi matérialiste y sont nombreuses à toutes les étapes de la vie de Freinet. Mais il nous semble que cc matérialisme s'inscrit toujours en réaction contre la pédagogie abstraite et rationaliste de l'Ecole officielle. Le matérialisme de Freinet me paraît avoir beaucoup plus d'implications psychologiques et pédagogiques que métaphysiques. Ce qui révolte Freinet, c'est l'idée d'un enfant en soi, d'une entité enfantine hors de l'espace et du temps ; Freinet lui oppose la réalité de jeunes êtres en devenir, sensibles à tous les déterminismes de l'histoire, de la géographie, de la société et de l'hérédité, des êtres dont l'intelligence et la sensibilité sont tellement incarnées, tellement particulières que l'enseignement uniforme, préconisé par les directives officielles, devient désormais un leurre, une tromperie. L'enfant est ainsi reconnu et accepté dans son originalité vivante, unique au monde. Dans cette reconnaissance de l'enfant gît la fécondité même des Techniques Freinet.

Mais cette vision, celte intuition psychologique ne résout assurément pas les problèmes proprement pédagogiques qui s'imposent, Si l'enseignement, pour être efficace, se doit d'être individualisé, encore faut-il découvrir les méthodes, les techniques qui incarnent l'idéal dans la réalité. A Bar-sur-Loup, Freinet notait sur un carnet toutes les observations psychologiques qui s'imposaient à lui dans le contact quotidien avec ses élèves. Dans le même temps, il cherchait à coller aussi étroitement que possible à cette réalité humaine qu'il ne finissait pas d'observer et de décrire. La pratique psychologique et la pratique pédagogique coexistaient chez lui et s'interrogeaient mutuellement, se renvoyaient la balle. La fécondité des techniques Freinet, que ce soit l'imprimerie à l'Ecole, l'expression libre, les fichiers autocorrectifs, la coopérative scolaire ou la correspondance interscolaire, provient de ce qu'elles s'enracinent à fond dans la connaissance de l'enfant, de l'individu enfantin. On peut dire que la pédagogie de l'Ecole Moderne démontre incontestablement l'imbrication et le dialogue de la psychologie et de la pédagogie dans l'œuvre d'éducation.

Mais précisons bien notre pensée : il ne s'agit pas de psychologie didactique, encore moins de psychologie officielle, universitaire. C'est une psychologie qui se cherche elle-même à travers le contact affectif de l'adulte et de l'enfant, à travers l'observation des conduites et attitudes enfantines, observation à base d'intuition et de sympathie, essentiellement. Cette psychologie originale, personnelle, en marge des psychologies établies, possède tous les caractères d'une réalité vivante. En premier lieu, elle est d'une démarche hésitante, tâtonnante.

Le thème de l'expérience tâtonnée est tout à fait central dans l'œuvre et la pensée de Freinet. Pour Freinet, l'être vivant assimile ses expériences au cours d'un long et complexe processus d'essais et d'erreurs. L'erreur n'a pas une signification simplement négative. Elle peut être, tout aussi bien que la réussite, source de progrès. Erreur et réussite ne sont jamais ni complètes ni définitives, Elles témoignent seulement de la dimension de mobilité et d'incomplétude de l'existence humaine. A aucun moment de l'existence, on ne peut dire du vivant qu'il est ceci ou cela. L'être vivant est en perpétuelle transformation et ce que nous savons de lui n'a que la valeur d'esquisse provisoire. De là vient sans doute que la psychologie de Freinet n'a jamais trouvé d'écho en haut-lieu. Car, avec Freinet, la psychologie cesse d'être une science pour devenir un art. Et un art combien difficile ! La seule règle possible — qui est d'ailleurs plus une perspective qu'une règle simplement applicable — c'est que l'éducateur doit s'approcher autant que possible de l'enfant et que toute pédagogie n'est valable qu'à la condition de partir de l'enfant. S'approcher de l'enfant et partir de lui, ce sont là les deux grands mouvements, absolument solidaires et inséparables l'un de l'autre de la psychopédagogie de Freinet.

Une psychopédagogie de la proximité. Pour bien comprendre la valeur de cette expression, il est nécessaire d'opposer les méthodes de l'enseignement traditionnel à celles de l'Ecole Moderne. Plus exactement, il faut opposer les modes de présence du maître dans l'un et l'autre cas.

Sans arrière-pensée de polémique, sans porter encore de jugement de valeur, il faut reconnaître que, dans l'Ecole officielle, les rapports entre maîtres et élèves sont à base de distance et d'extériorité. Le maître est dépositaire de la science et du pouvoir. L'enfant est à l'école pour apprendre et pour obéir (la discipline, à base d'impératifs et de sanctions, constitue la plus grande part de l'éducation (?) morale à l'Ecole primaire). Même si le maître circule dans la classe, même s'il se penche par-dessus l'épaule d'un enfant pour souligner une faute ou indiquer la solution d'un problème, il reste à distance de l'enfant, hors de lui, au-dessus de lui. L'image du vase que l'on remplit, celle du poulet que l'on gave conservent leur actualité, si éculées soient- elles.

Il y a une cohésion profonde entre les différents aspects de l'Ecole officielle. Réfléchissons, par exemple, au phénomène du didactisme. Il implique l'humilité de l'élève défini par son ignorance et la supériorité absolue du maître défini par son savoir. De l'un à l'autre la distance est telle que le problème de la communication cesse pratiquement de se poser, résolu par la négative. Le maître fait sa leçon ; l'enfant retient ce qu'il peut ; la même leçon pour l'ensemble des élèves. Sans doute, le maître use d'un langage accessible à la moyenne des enfants et son enseignement porte sur des notions que l'enfant est normalement en mesure d'assimiler ; de là la relative fécondité des méthodes traditionnelles. Néanmoins, si le maître, perdant brutalement ses besicles, percevait soudain l'extraordinaire complexité de son auditoire, s'il lisait les pensées, les rêves, les désirs qui naviguent dans le cœur et dans la tête des gosses pendant simplement une heure de classe, il resterait frappé de stupeur et d'impuissance et conclurait immédiatement à l'entière inanité de son projet, (cf : Stephen Dedalus, instituteur au début d'Ulysse, de Joyce. Stephen est parfaitement conscient de la vanité totale de sa tâche qui consiste à rabâcher une leçon d'Histoire romaine en face d'enfants dont le cœur et l'esprit sont ailleurs.) Peut-être serait-il bon de faire la psychanalyse du maître d'école traditionnel. Jusqu'à quel point s'abuse-t-il ? Jusqu'à quel point est-il dupe des méthodes qu'il pratique ? Et qu'est-ce qui se cache derrière son amour de l'ordre, de la discipline, son culte de l'autorité (culte des grands classiques ou culte de soi-même) ? Questions brûlantes que nous soulevons seulement sans les traiter, car elles nous éloigneraient considérablement de notre propos.

L'Ecole Moderne s'oppose radicalement à l'Ecole Traditionnelle, Ii y a incompatibilité foncière des points de vue. Les rapports sont renversés. L'enfant ne vient pas à l'école pour donner au maître l'occasion de faire une brillante démonstration de son savoir, de son adresse ou de sa force ; c'est le maître qui vient à l'enfant pour essayer de lui faire découvrir, par ses propres moyens, le monde de valeurs culturelles où s'inscrivent notre présence et notre action. Et dans ce cas, la qualité requise, pour l'instituteur, ce n'est pas l'amour de l'humanité en général, encore moins l'amour de la science ; c'est la sympathie pour chaque enfant en particulier ; sympathie qui est élevée à la dignité et à la valeur d'un véritable instrument de connaissance. Sur ce point, l'intuition de Freinet rejoint la pensée de philosophes aussi prestigieux que Bergson ou Max Scheler. La sympathie n'est pas comprise ici comme une réaction épidermique, superficielle, à la pensée d'autrui ; elle est ouverture en profondeur à cette présence, disponibilité, pouvoir d'accueil, souci. Et elle devient passion, avec tout ce que ce terme évoque de tyrannique et de partial, II se passe alors que la classe accapare le maître, met en jeu toutes ses puissances affectives et intellectuelles. Les tâches de l'enseignement, si asservi s santés, semble-t-il, prennent le sens d'une destinée et la classe devient l'espace d'une vocation, le lieu d'un authentique accomplissement humain, dont le meilleur signe est la joie qui transparaît dans le regard et le sourire du maître.

Mais faut-il encore parler du maître ? Il faudrait dire le compagnon, celui qui accompagne l'enfant et l'adolescent dans leur cheminement, dans leurs années d'apprentissage. Se penchant sur chacun d'eux pour individualiser au mieux son enseignement, ajustant et rajustant sans cesse ses méthodes pour chaque cas particulier, l'éducateur devient étroitement solidaire de l'enfant. Il devient l'ami, le confident, celui qui accueille sans réserve tout ce qui vient de l'enfant. C'est sur ce fond d'amitié, de proximité humaine, que les Techniques Freinet prennent tout leur sens.

Et en tout premier lieu, l'expression libre. Avec l'expérience de l'expression libre, nous constatons que, pour partir de l'enfant, il faut d'abord s'être approché de lui ; il faut d'abord que l'enfant sente autour de lui un climat de sympathie, d'accueil, de compréhension. C'est une condition essentielle pour que l'enfant s'exprime d'une façon personnelle. Si le texte libre, par exemple, n'est qu'un exercice parmi d'autres, s'il devient un simple élément d'une scolastique d'un nouveau genre, l'enfant se dérobera derrière des banalités d'usage. II faut que l'enfant sente — ne serait-ce que d'une façon très obscure — que la classe lui offre désormais la possibilité de s'extérioriser en toute confiance. Alors, le texte libre ou le dessin libre deviennent riches de sens et nous apparaissent, si nous savons les sentir et les déchiffrer, comme des sortes de miroirs de l'âme enfantine. Et si l'image qui nous parvient ainsi n'est pas claire et pose souvent plus de problèmes qu'elle n'en résout, c'est que l'âme enfantine est elle-même infiniment complexe et mouvante.

Avec l'imprimerie à l'Ecole qui fait rentrer le corps dans le circuit de la connaissance intellectuelle et avec l'expression libre qui permet à l'enfant d'extérioriser ses aspirations, ses rêves, ses tourments, ses conflits, nous tenons les deux techniques fondamentales des méthodes Freinet. Et si ces techniques s'avèrent particulièrement efficaces, c'est-à-dire grosses de possibilités éducatives, c'est qu'elles se fondent directement dans la psychologie — et non pas une psychologie de laboratoire — mais une psychologie au grand air.

En particulier, ce qui fait la richesse de l'expression libre, c'est que celle- ci peut acheminer l'éducateur au cœur même de l'expérience vécue par l'enfant. Et sur ce point, je pense que le dessin libre est plus révélateur que le texte libre car le langage des couleurs et des formes est beaucoup plus naturel à l'enfant que le langage d'idées et de mots. La danse libre est certainement très révélatrice aussi de la façon dont l'enfant habite le monde : a-t-il une attitude d'affrontement ou de fuite ? Fait-il l'expérience du chaos (désordre des gestes) ou, au contraire, atteint-il à l'harmonie supérieure des rythmes cosmiques (prédilection pour la courbe qui s'enfante elle-même) ...il y a là des perspectives fécondes pour la psychologie.

Avec l'imprimerie à l'Ecole, avec l'expression libre, avec aussi les méthodes d'enquête, l'accent est mis sur le vécu, c'est-à-dire que l'enfant prend l'initiative d'une tâche qu'il conduit jusqu'au bout. Les méthodes traditionnelles développent chez l'enfant l'automatisme et la passivité : toutes les initiatives partent du maître ; l'enfant est réduit au rôle d'exécutant docile et appliqué. L'expression libre, au contraire, favorise l'originalité de l'enfant ; elle le conduit tout naturellement à assumer sa part de responsabilité dans la classe. Elle est un facteur de personnalisation. L'enfant apprend à parier en son propre nom. Nous sentons ici la valeur de formation morale inhérente à l'expression libre, valeur qui trouve son meilleur épanouissement dans l'expérience coopérative. Cette expérience, développant le sens social de l'enfant, le mettant en contact avec des problèmes pratiques et lui donnant l'occasion de discuter publiquement, nous apparaît comme la base même d'une éducation civique authentique.

Par là, nous fermons le cercle de ces quelques aperçus de la pédagogie de Freinet. La pratique de l'Ecole Moderne nous renvoie à l'examen de ses fondements psychologiques. Mais cet examen lui-même, nous ramenant à la réalité vivante de l'enfant, nous situe de nouveau en plein cœur de l'œuvre éducative, en cet instant où s'ouvre devant les jeunes le champ de leur activité humaine (1).

 

(1) D'une discussion sur ce texte avec des instituteurs est apparue l'objection suivante : entre le type de l'instituteur traditionnel et l'éducateur engagé dans les voies de l'Ecole Moderne, n'y a-t-il pas place pour un « troisième homme » ? C'est-à-dire, n'existe-t-il pas des instituteurs qui réalisent, à travers des méthodes classiques d'enseignement, cette proximité affective de l'enfant qui définit le point de départ de l'éducation selon Freinet ?

Effectivement, il y a une masse d'instituteurs qui se trouvent a mi-chemin de J'Ecole Moderne. Nous dirions volontiers qu'ils en possèdent l'esprit sans en pratiquer les techniques. Leur action est incomparablement plus formatrice que celle des maîtres traditionnels au sens strict ; mais nous comprenons mal qu'ils en restent là. Il nous semble impossible de conduire jusqu'au bout le projet d'une classe visant au meilleur épanouissement de l'enfant sans déboucher un jour sur les techniques de libre expression et de coopération scolaire. Nous craignons que l'amour de l'enfant dont se réclament bien des instituteurs ne demeure trop captatif : ils aiment l'enfant à leur image et, par les voies d'un enseignement en définitive scolastique, ils l'acheminent trop rapidement au rationalisme adulte.

Les techniques de libre expression témoignent d'un amour d'autrui vécu comme " Laisser- être", selon la perspective de Heidegger, Laisser-être ne signifie pas laisser aller, abandonner l'enfant à l'anarchie de ses désirs et au hasard des circonstances. C'est, dans le cas qui nous occupe, ménager autour de lui un climat favorable à l'auto-création de sa personnalité, le préparer à des rencontres humaines qui. au cours de l'adolescence, l'ouvriront à une sphère de valeurs supérieures.

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