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Compte-rendu du 4 avril 2009

 

Nous sommes accueillis à J2P, rue Petit.
 
Laurent Ott sur le chantier Pédagogie sociale, rappelle l’origine de ce chantier : étudier le champ de la Pédagogie Sociale ; celle-ci est présentée comme une entreprise « d’éduquer ensemble en dehors des institutions » ; elle relève d’une « éducation non-formelle ». Quels sont les facteurs qui rendent la PS pertinente ? Des acteurs très nombreux, des difficultés (rigidités, problématiques financières, la solitude, chacun un peu enfermé, peu disponible pour les projets collectifs.
 
Tour de table
Nguyen Nleu Mai : psychologue, vietnamienne étudiant l’education sociale, en stage dans un CMPP
Irène Xuan Phuong Nguyen, Sociologue association Orange Fleurs d’espoir, Vietnam
Chien, enseignant chercheur en sociologie, Vietnam, intéressé par le travail social, en particulier avec les enfants des rues.
Dababi Mélody : animatrice socio-environnementale (monitrice éducatrice de formation), Intermèdes Robinson (expérience antérieure à l’association « les enfants de la Bienvenue », dans le XIIIème- en lien avec l’ICEM)
Aurélie Cella : stagiaire éducatrice jeunes enfants, Intermèdes
Stéphanie Chalopin, Etudiante EFPP, mémoire co-éducation
Anabelle, maman non scolarisante, Traces
Frédéric Jésu : co-fondateur et administrateur de l’association J2P (Jaurès-Petit-Pantin) dans le 19e arrondissement de Paris, médecin pédopsychiatre de service public dans le Val d’Oise, vice-président de DEI-France (section française de l’ONG Défense des Enfants International)
Hélène Ott : administratrice
Yannick le Moal : ancien collègue de Laurent, directeur adjoint d’un CHRS, à Rennes
Nicolas Murcier : vice-président Intermèdes
Emilie Murcier : EJE
Sophie Audigier, secrétaire de l’association Intermèdes
Delphine Bodin : étudiante EFPP,effectuant stage à l’association Traces
Sophie Nédorezoff , Traces, projet à la Forge, se bataille pour réunir l’art et le social,
Jonathan Lévy : vice président de l’association Korczak,
Ewelina Mianowska, ass. Korczak, éducatrice spécialisée, polonaise, formation en sociologie, chargée d’étude à Saint-Denis ; travaille la question du soutien à la parentalité, la problématique des enfants de la rue, présentation du livre « pédagogie de la rue » un concept.
Yve Milles : éducateur spécialisé au chômage, aya            nt longtemps travaillé en psychiatrie (psycho-thérapie institutionnelle). Cherche à faire un travail conceptuel : rapprocher Freinet, Rogers, Oury …
Bernard Canillac : association Cafézoïde (enfants de 0 à 16 ans, mixité sociale, attirer d’autres populations hors du quartier, multitudes d’activités (la rue aux enfants par ex), une structure de proximité en difficulté financière.
Marie Labarrière : directrice d’un club de prévention spécialisée à Gennevilliers, travaillant sur les questions de décrochage scolaire, en lien avec V.Decker et L.Ott. Actions pour remotiver les enfants, thérapeute sociale (drogues)
Francine Têtu : travailleuse sociale à la CAF, ayant beaucoup travaillé des expériences de développement social local. Actuellement, elle est mobilisée par son institution pour la montée en charge du Revenu de solidarité active (RSA), nouveau dispositif. La CAF se désengage des actions collectives collectif pour se recentrer sur l’individuel.
Naïma Djili :   étudiante éducatrice jeunes enfants à l’EFPP.
Dominique Delattre : cinéaste.
Sébastien Bigourden : prof maternelle Pédagogie Freinet à St Denis
Catherine Chabrun : prof en cycle 3 et responsable des publications de l’ICEM
 
Ce qui émerge du tour de table :
 
 De la diversité et de la richesse des personnes qui composent ce « tour de table », émerge une sorte de point commun : une continuité plutôt qu’un hiatus entre un engagement professionnel, personnel et social.
 Il est intéressant aussi de constater que la plupart des acteurs associatifs ou professionnels communs ont fait état de la pesanteur des institutions, de la difficulté à faire reconnaître les initiatives, les expériences, la baisse de libertés pour les innovations dans les pratiques.
 
 Beaucoup d’acteurs présents font état de pratiques qui renouent avec des secteurs de l’action tels que la nécessité de revenir à une production matérielle et économique, la recherche des conditions d’une sécurité personnelle et groupale… qui rompent avec la manière libérale actuelle de présenter ces problèmes ; la pédagogie sociale peut utiliser les mêmes termes mais avec des sens différents ; elle peut contribuer à poser les conditions d’une pacification des relations qui permet au conflit d’être fructueux.
 
 Les participants présents depuis la première réunion souhaitent que l’on prenne le temps de réfléchir ensemble à la finalité de cet atelier. Où allons-nous ?
 
Nous avions déjà abordé des idées de « travaux » comme des recherches et concertations sur des « concepts », ou un référencement de pratiques en milieu ouvert… Nous avions identifié des thèmes importants et « transversaux » dans toutes nos expériences :  Légalité, Argent et autonomie, Créativité sociale, Parentalité, Désaffiliation et perte de repères, Autorité….
 
 
A l’issue de ce chantier, nous retenons cette idée comme objet de travail et de production pour notre chantier.
 
 
Les quatre éducatrices de jeunes enfants en formation, présentes dans le chantier, précisent les motivations qui les amènent à participer à ce chantier de recherche (deux sont actuellement en stage dans des structures représentées dans le groupe : Traces et Intermèdes-Robinson)
 
 Elles mettent en avant le besoin qu’elles ressentent d’approfondir leur formation théorique et pratique autour de dimensions qui leur paraissent incontournables :
-        Comment prendre en compte la globalité de l’enfant ? Comment avoir une approche globale et en même temps locale dans nos pratiques ?
-        Investir dans l’enfance, un avenir.
-        Comment enrichir des formations par des stages qui se déroulent dans des milieux plus ouverts que les institutions traditionnelles de la petite enfance, de plus en plus hygiénistes et confinées ? Stéphanie parle à ce propos « d’empêchement de penser »
-        Comment ouvrir les pratiques éducatives sur la culturel créativité, la mixité des professionnels te des approches?
-        Comment réfléchir à nos pratiques personnelles en construction pour être plus « crédible », plus « solide » dans nos intuitions ? Il semble utile de se construire des argumentaires envers la hiérarchie et ne pas se laisser décourager dans nos convictions
 
 
Présentation du lieu d’accueil : l’association J2P (Jaurès-Petit-Pantin), gestionnaire d’un centre social et culturel dans le 19e arrondissement de Paris, les liens entre l’histoire de la structure et celle des espaces publics du quartier (entre l’avenue Jean Jaurès, la rue Petit et la Porte de Pantin) à partir desquels elle s’est déployée.
 
Il y a 15 ans, diverses formes de sollicitude se sont manifestées en réponse aux risques encourus par les enfants qui jouaient dans la rue. Pourquoi jouaient-ils dans la rue ? Les enfants étaient logés misérablement. De plus, les origines culturelles des familles des enfants concernés (Afrique noire, surtout, mais aussi Maghreb et Sri Lanka) faisaient qu’une surveillance collective était habituellement attendue des parents.
La bibliothèque municipale était de ce fait très investie par les enfants qui venaient y faire leurs devoirs ou se détendre dans un espace vaste et accueillant. Mais cette présence non médiatisée devenait problématique.
La situation du logement était dégradée, aggravée par les marchands de sommeil ont sévi. Jusqu’en 2002, dans le proche quartier et là où se dressent maintenant les bâtiments neufs qui accueillent en rez-de-chaussée les locaux du centre social et culturel de J2P, il y avait des logements très dégradés, dangereux, indignes, infestés par les rats, où résidaient 65 familles, souvent nombreuses. Celles-ci ne payaient pas moins un loyer à la Ville de Paris. Il suffisait de visiter les appartements et les parties communes pour comprendre pourquoi les enfants et les jeunes préféraient investir la rue – avec tous les risques et dérives qui en résultaient - et la bibliothèque.
Les tensions entre les habitants, les mieux logés (dans les logements sociaux peu à peu construits) et les très mal logés, augmentaient cependant. L’occupation des espaces publics par les enfants et les jeunes en était le motif récurrent. L’idée fut de rechercher les moyens de dépasser collectivement ces tensions et de le faire « par le haut », par la solidarisation, c’est-à-dire en recherchant les moyens d’un possible « vivre ensemble » entre les habitants, dans un quartier marqué certes par la tradition des affrontements (guerre d’Algérie, bandes de jeunes) mais aussi par des évolutions démographiques et urbaines rendant les enfants et les adolescents à la fois nombreux et visibles.
Décision fut donc prise par différents habitants du quartier de créer une association « de développement social, économique et culturel » en lien avec les associations de locataires mais aussi avec différentes associations militantes engagées, localement et dans le 19ème arrondissement, dans des Collectifs de défense des mal logés. Les uns et les autres firent d’emblée le choix de la médiatisation de leurs actions.
L’appui de la bibliothèque et le développement des relations avec un proche foyer de travailleurs immigrés ont permis d’approfondir et de développer les relations de confiance engagées sur ces bases avec les parents mal logés et leurs enfants, et donc de mieux connaître leurs perceptions et leurs attentes en matière éducative et scolaire. Ils ont aussi permis d’obtenir le recrutement d’un des résidents du foyer en tant que médiateur au sein de la bibliothèque.
Petit à petit s’est créée une solidarisation croissante entre les habitants. Des rapprochements, une reconnaissance mutuelle, des initiatives ont permis de faire émerger des compétences, des potentialités bénévoles, des ateliers d’accueil des enfants, de soutien à leur scolarité, des occasions de rencontres et d’entraides entre parents, des projets avec (plutôt que pour) les jeunes. Une fête de quartier, organisée fin juin autour d’un vide grenier ainsi que de la mobilisation des moyens et de la valorisation des talents identifiés dans le quartier, a été mise en place et elle est devenue un RV annuel très apprécié (elle est doublée, depuis 5 ans, par une mini-fête de fin d’année sur une proche placette récemment réhabilitée). Le principe de sortir de chez soi pour échanger sur ce qui se passe s’est peu à peu répandu. La coopération locale, entre habitants, entre associations et même entre services publics, est devenue une façon plus habituelle d’analyser et de résoudre des problèmes.
Bien entendu, tout cela ne s’est pas fait sans difficultés, cafouillages, violences parfois (la coexistence d’une dynamique de revitalisation des liens sociaux et du trafic de drogues, par exemple, est porteuse de conflits d’occupation du territoire).
S’agissant de l’urbanisme et du logement, la décision politique prise dès 2001 par le nouveau Maire de Paris de faire de la réhabilitation du quartier Petit une action phare, exemplaire d’actions programmées sur l’ensemble de la mandature sur d’autres îlots d’habitats indignes et insalubres, fut bien entendu déterminante. Avec l’appui de la Ligue des Droits de l’Homme, de la Fondation Abbé Pierre, de Médecins Sans Frontières, la situation économique et sociale des familles mal logées a pu être précisée et toutes, sauf une, ont pu être relogées dans le parc social, à Paris ou en proche banlieue. Plusieurs d’entre elles sont restées en lien avec l’association J2P et sont venues, en 2007, fêter le 10ème anniversaire de sa création.
Par ailleurs, un nouveau projet d’aménagement urbain, rendu possible par la destruction des logements, a été lancé et l’association J2P a veillé à ce que les habitants, et notamment les familles, les enfants et les jeunes, soient informés et associés à la conception et aux principales étapes de ce projet.
De façon générale, l’association J2P a veillé – parfois de façon insistante – à ce que les uns et les autres puissent participer aux réflexions, aux propositions, aux choix d’activités, d’animation, de décoration à vocation collective – et pour commencer aux initiatives portées par l’association elle-même. Elle a eu à cœur, également, de mobiliser la mémoire des plus anciens habitants pour la faire connaître aux enfants et aux nouveaux habitants.
Au départ, l’association J2P ne disposait que d’un tout petit local, prêté par une association de locataires. Actuellement, elle dispose de 3 locaux, très proches, mais qui permettent une circulation de l’un à l’autre.
Depuis 2006, l’association J2P dispose d’un agrément de la Caisse d’Allocations Familiales et d’une convention avec le Département de Paris qui lui confèrent le statut et les moyens de fonctionnement d’un Centre social et culturel (7 salariés et de nombreux stagiaires, sans oublier environ 80 bénévoles réguliers). Il est cependant à noter que les financements alloués par la collectivité parisienne (qui est une Ville et un Département) le sont au titre des compétences départementales en matière de « prévention des inadaptations sociales » et de « prévention générale en direction des jeunes », ce qui est parfois rappelé à l’association quand certaines de ses activités semblent trop éloignées de telles missions. Aujourd’hui, toutefois, c’est surtout le désengagement de l’Etat, de ses services extérieurs ou de ses agences qui fragilise de nombreuses activités, notamment celles proposées aux habitant-e-s de migration récente.
A l’occasion de l’opération de réaménagement urbain, plus de 300 habitant-e-s, attiré-e-s par le développement de l’implantation à Paris de jardins partagés dans le cadre du programme municipal « Main Verte », ont écrit en 2005 au Maire du 19ème arrondissement pour qu’un proche terrain non constructible de 300 mètres carrés soit mis à leur disposition de façon à rejoindre ce programme. L’association J2P a relayé ce vœu et, depuis l’été 2007, gère sa mise en œuvre avec un groupe d’habitant-e-s. Le jardin partagé constitue désormais la quatrième implantation de grande proximité du centre social et culturel.
En attendant l’aboutissement du projet, les pratiques et le goût du jardinage ont été entretenus avec des enfants et des parents du quartier dans le cadre d’un partenariat avec le « Jardin passager » du Parc de la Villette et avec un proche jardin partagé soutenu par l’association « Cafézoïde ». Des jeunes ont participé dès l’été 2007 à la construction de la cabane de jardin, puis à l’été 2008, avec l’aide d’artistes, à l’édification d’un totem et à la décoration en mosaïque du point d’eau. Des classes d’école primaire, des centres de loisirs et des personnes de tous âges et toutes cultures participent désormais à la conception et aux plantations du jardin. Une grande fierté de toutes et tous est d’avoir réussi à faire pousser des cacahuètes cet été, avec les conseils d’une fidèle militante, d’origine malienne, de l’association. Fleurs, légumes et herbes aromatiques ont été partagés à l’occasion de moments festifs. Concours d’épouvantails, festivals de poésie et de slam et apéritifs de quartier sont au programme pour 2009.
Enfin, l’association J2P et son centre social et culturel suscitent et accompagnent l’émergence d’autres associations locales (associations de femmes, de pères, de jeunes, de solidarité franco-africaine, etc.).
Alors que les postures juvéniles et les affrontements entre jeunes du quartier ont été caricaturés par les médias au printemps dernier, ou réduits à une dimension de conflits « inter-communautaires », le centre social et culturel s’attache à ce que tous les jeunes puissent pousser la porte à tout moment, proposer des projets pour et pendant leurs temps libres, à être encouragés à les faire aboutir et, plus généralement, à trouver une place valorisante et acceptée dans les espaces publics, notamment en participant à leur embellissement (chantiers de décoration, fresques). Parallèlement, des groupes de discussions entre parents sont mis en place ou soutenus, le cas échéant en respectant initialement les spécificités culturelles et éducatives, avec cependant la perspective de rapprocher ces parents dès qu’ils seront en mesure de constater que, si leurs modèles de référence peuvent diverger, les questions auxquelles ils sont confrontés sont souvent proches ou communes.
Un Conseil d’animation composé d’habitant-e-s et d’associations du quartier a été mis en place fin 2007 de façon à ce que, au-delà du seul Conseil d’animation, ceux-ci puissent s’impliquer dans la proposition et la mise en place de projets – sans oublier les fêtes du quartier - , apporter des contributions, l’ouverture à de nouveaux réseaux, etc.
 
Pour l’association J2P, la connexion avec le chantier « pédagogie sociale » est importante, en termes d’échanges et de transmissions de pratiques, d’accueils croisés d’habitant-e-s, d’enfants, de jeunes, de stagiaires - voire de correspondances entre les enfants des différents lieux et de « voyage-échanges ».
 
Selon Gilles Clément, jardinier, c’est dans les espaces dévalorisés qu’on peut retrouver des richesses. Exemple de plantes qui investissent des friches ... A transférer en écologie sociale, retrouver des richesses de création, de motivation, d’investissements, des attentes d’enfants de jeunes peuvent y trouver leur compte.
 
Au Vietnam
Irène expose la situation historique et le contexte des actions associatives au Viêt-Nam qu’elle met en œuvre ; il s’agit de bâtir au Vietnam un réseau avec ses expériences sociales.
Le projet est complexe du fait d’un faible développement des structures médico sociales ; il s’agit donc de susciter et soutenir des projets qui puissent assurer une éducation auprès des enfants handicapés (en particulier du fait de l’agent Orange, déversé par les américains pendant la guerre).
Un procès en ce qui concerne l’agent Orange non pas vis-à-vis de l’Etat (les USA ne répondent pas de leurs actes) mais vis-à-vis de l’entreprise de production (Monsanto) n’a abouti qu’à des indemnités dérisoires. Pourtant l(‘infection est toujours présente dans les eaux et nappes phréatiques. Un projet de tribunal populaire est en cours ; mais quelle prise en compte vis-à-vis de la multinationale ?
 
Mais ces projets doivent avoir une dimension « holistique » ; ils doivent ouvrir à la créativité et à la valorisation des compétences des enfants (qui aujourd’hui se débrouillent souvent seuls dans les rues) et contribuer à leur propre financement par une production économique et écologique (plantes médicinales)
Il convient aussi de consolider et soutenir les liens avec les parents, ouvrir ces jardins aux enfants non handicapés (ruches et miel).
De ce fait cet atelier intéresse doublement ces deux associations vietnamiennes : comme lieu de stage et de formation, comme lieu de ressource pour trouver des idées de développement économique et écologique des projets.
 
Prochaine rencontre :
à la Forge TRACES avec barbecue le 13 juin
Ordre du jour : réflexion en grand groupe et en atelier autour d’un projet d’offre de formation