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Edito Créations n° 117 Ecole en fêtes

Mars 2006
 

Créations n° 117  - Ecole en fêtes 

Publication mai-juin 2005 

Edito                        

 

La fête pas le show


A l’heure du superficiel, du tout prêt à consommer, du rendement dans tous les domaines, même dans l’éducation, que devient la fête ? Est-elle cantonnée aux rites déformés, à la routine sans enjeu, réduite à une activité préfabriquée ?

Les enfants d’Aizenay nous montrent le contraire. Dans leur « fête du livre » qui se reproduit chaque année, ils transforment l’espace et le temps avec les adultes qui les accompagnent. Et les murs parlent, enchantent notre regard. On découvre les livres-matières créés pour l’occasion qui rivalisent d’originalité et de beauté. On organise des spectacles de toutes formes mais toutes garantes d’humanité. On discute avec des artistes. La création est en fête.

A l’heure où les médias diffusent à longueur de temps des émissions fades et abrutissantes à destination des enfants et où les jeux numériques s’imposent, des auteurs et illustrateurs qui se succèdent chaque année à l’école invitent les enfants au rêve, à la poésie et conduisent leurs regards vers une culture authentique.

A l’heure où la lecture est menacée par ceux-là même qui prétendent venir à son secours, voir les orientations rétrogrades du ministère; à l’heure où les pouvoirs politiques et économiques organisent la misère culturelle, la fête du livre d’Aizenay nous rappelle la richesse du livre-jeunesse.

Les enseignants d’Aizenay ont d’abord donné à la BCD une place centrale dans l’école créant des habitudes à l’opposé de la pratique des manuels qui, en les morcellant, appauvrissent les textes et stérilisent l’imaginaire, et pas seulement celui des enfants. Chacun s’y retrouve pour différents investissements mais d’abord, les enfants y choisissent les livres dont ils feront partager peut-être la lecture aux autres, dans un moment de classe ou pendant la fête du livre, une semaine folle, pleine de moments de partage entre enfants, parents et enseignants. Il est clair pour nous qu’organiser une fête du livre dans une école est la preuve que le livre singulier est vecteur d’apprentissages, de pédagogie, de réussite et de fête.

Loin de la « Star académie » et des autres émissions « destinées à la jeunesse » qui prônent la compétition et fabriquent des stars stéréotypées, il faut proposer aux enfants une autre entrée dans la musique et la composition. A l’école d’Aizenay tous les enfants sont poètes, chanteurs et musiciens. Et ensemble, pour un moment de partage, ils s’unissent et coopèrent organisant un spectacle musical original, cette année la « fête de l’arbre » ou « vibr’arbre ».
Les enfants content pour des spectateurs attentifs, et même pour un seul spectateur comme parfois avec les kamishibaï. Certains conseillent de futurs lecteurs, pendant que d’autres dévorent des yeux et des mains, les nombreux livres posés sur les tables.

Dans une autre école à Rennes, faire un film incite à la fête permanente car ici aussi, il est question de création, de coopération et de réussite. Pendant ce temps Annik Sterkendries conçoit sa pratique artistique comme la fête du langage à laquelle elle fait participer les gens dans la rue ou les enfants lorsqu’elle intervient dans les écoles.

Nous adultes, enseignants associés aux parents, nous devons mettre en place des situations d’apprentissage qui contrent l’individualisme, les concours où le livre devient secondaire, la culture au rabais des fêtes commerciales, des situations qui contrent l’invasion des médias qui veulent nous faire adhérer avec leurs moyens phénoménaux au superficiel, au jetable, à l’uniformité. Nous devons au contraire offrir aux enfants des espaces de création, d’échanges, de coopération pour qu’ils les fassent vivre tant ils donnent à l’expression du monde le visage du plaisir d’être vivant, d’avoir les yeux ouverts et avides, et l’ envie de partager.

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