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L’atelier d’écriture collective

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L’atelier d’écriture collective

ROSTRENEN
Stage Grand-Ouest août 2012
 
Une dizaine de personnes y ont participé sur trois plages de trois heures les 22, 23 et 24 août et témoignent ci-dessous de leur expérience.
***
 
« On écrit pour nourrir la poubelle
On s’y met à plusieurs
C’est pas les tables qui tournent mais les feuilles
Des histoires à tiroirs à pleurer de rire
Elle est goulue, goulue et pour l’alimenter, on griffonne une phrase, un mot sans s’appliquer. On attend la feuille qui vient avec impatience. On y découvre les perles, les jeux de mots… Le cerveau mâche les images et recrache les phrases. Et on pisse dans son froc de rire.
Ou pas.
Il y a des histoires qui disent des choses aux uns, qui s’attardent, s’appesantissent quand d’autres n’y entendent rien. Cette histoire là, qu’on écrit à plusieurs mains, la poubelle l’avalera, mais tous, nous l’aurons entendue.
Au début on a le cœur qui bat, on n’a pas l’habitude, on n’a pas la confiance, ni la patience. J’ai peur de ce qui va sortir de ce stylo. Les mots vont-ils dépasser ma pensée ? Vont-ils mettre mon âme à nue ?
Ouf, très vite, mes mots sont pris dans le flux des flots collectifs, emportés, brassés.
Ouf, ils deviennent ANONYMES.
Le petit fantôme bienveillant de Paul* nous chatouille délicieusement les synapses. Il se réjouit de chaque porte qui s’ouvre, de chaque clé forgée qui viendra garnir nos trousseaux d’éducateurs. Nous croisons parfois quelques monstres intimes et pervers qui s’échappent de nos billes. Malgré nous. Ou presque. Mais nos hennissements de rire les désarment instantanément. Et c’est à la poubelle qu’ils connaîtront leur dernier spasme. Nous laissant apaisés, disponibles à l’écriture. Libres.
Pas toujours facile d’écrire ensemble, de créer ensemble, mais la liberté est à ce prix, et le joie d’exister aussi. J’ai retrouvé le plaisir de sentir de l’intérieur à quel point un groupe mis en situation de bonne santé intellectuelle et affective était capable de créer et d’être plus que les membres qui le composent. C’est jouissif, étonnant surprenant.
Et puis ces mots s’envolent, disparaissent… Qu’importe ! « On n’est pas on devient » disait souvent Paul. Libres de tout attachement à nos productions, nous devenons autres, et c’est ce qui compte. Dites moi pourquoi cet atelier se fait si rare ?
Ecrire, imaginer une table sur ses pieds accrochée à l’antenne du toit, du Toit ça m’va.
Et la petite souris dans son tiroir se marre…
 
Paul le Bohec « Ah vous écrivez ensemble » (Documents de l’Educ mars 83)
                               «  Le texte libre… libre » (Odilon Ed. collection P4 Août 1996)