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Démarrer, continuer en Pédagogie Freinet ? Quelques interviews (2)

Dans :  

Barbara – 31 ans – T5

«  Je n’ai pas fait le choix de la PEDAGOGIE FREINET. Je suis venue ici pour voir ce que c’est exactement. J’ai passé quatre ans directrice d’un triple niveau. Ca a été difficile la première année, mais difficile aussi le dernière pour des questions d’ambiance.
En fait à l’IUFM où j’ai été formée, on m’a enseigné des techniques dont je découvre maintenant qu’elles viennent de la PEDAGOGIE FREINET. En T1, on reçoit les visites d’un conseiller pédagogique. C’est lui qui m’a dit que ce que je faisais ressemblait beaucoup à la PEDAGOGIE FREINET. Mais moi je ne voyais pas en quoi.
Pendant quatre ans, j’ai surnagé, j’ai inventé, j’ai bricolé, j’ai piqué des idées à droite à gauche, j’ai expérimenté. J’avais envie de voir ce que c’était que la PEDAGOGIE FREINET. Puis je me suis dit que puisque ce que je faisais y ressemblait, je pouvais essayer d’aller voir jusqu’au bout. Sauf que des bouquins sur internet, ça ne m’a jamais permis de comprendre la spécificité de la PEDAGOGIE FREINET. Un stage près de chez moi se mettait en place, pas cher, je me suis décidée à aller voir.
Je commence au bout de trois jours à voir ce que je vais prendre et laisser. J’ai déjà une petite idée. J’ai compris en particulier que la PEDAGOGIE FREINET ce n’était pas des techniques, mais plus un mode de vie dans la classe.
Je pense que je vais piquer un certain nombre d’activités, mais je ne suis pas encore prête à changer complètement de mode de vie pour plusieurs raisons : j’arrive dans une nouvelle école, je suis à trois-quarts temps et je vais partir en congé de maternité. De plus j’ai un simple niveau (CM2). Il me semble que la PEDAGOGIE FREINET est plus adaptée à un travail par cycle où on a les élèves trois ans, en classe unique ou dans une école à deux classes.
Dans l’école où j’étais avant, tout le monde me faisait confiance (enfants/parents), et puis j’avais tout le cycle3. Si j’avais gardé mon ancien poste, j’aurais pu prévoir de passer à la PEDAGOGIE FREINET sur deux/trois ans.
Là je vais mettre en place un QDN, l’écriture libre, et après la créamath de temps en temps. Pour le moment, j’éprouve le besoin de garder la sécurité des progressions. J’espère pouvoir convaincre peu à peu les collègues de me donner un double et même un triple niveau d’ici quatre/cinq ans.
 
 
 
Cécile - 42ans – T6
« Avant même d’avoir fait le choix de la PEDAGOGIE FREINET, j’ai fait le choix d’être instit  qui est une reconversion. Avant, je travaillais dans la brocante après une fac de droit.
Je me suis intéressée à l’école suite à une énorme divergence de point de vue avec l’instit de mes enfants à l’école maternelle. Avec l’aîné ça se passait plutôt bien, par contre avec le deuxième il y avait de grosses difficultés. J’ai commencé par me poser des questions : est-ce l’enfant, est-ce moi ? Puis, je me suis aperçue que la moitié de la classe était en difficulté : tensions internes, pleurs pour aller à l’école le matin… Je pouvais accompagner tout cela car j’étais en congé parental.
J’avais des tas de copines instits qui m’ont donné l’envie de passer le concours. Dans mon idée, c’était évident que l’enfant que l’enfant devait être au centre des apprentissages. J’ai fait la connaissance de Freinet à l’IUFM. J’ai assisté au Congrès de Nantes et j’ai fréquenté le GD35 (quelquefois).
Je suis très partisane de la formation personnelle puisqu’on ne nous la donne pas, il faut se former soi-même. Maintenant, je vais être titulaire dans la même école. Avant j’étais TRS, c'est-à-dire que je changeais de niveaux tous les ans. Je suis très favorable à la culture d’école.
C’est difficile de savoir ce que l’enfant doit savoir et quand on peut l’évaluer. Plus t’as d’expérience, plus tu as de recul, plus tu vois l’horizon. Au départ, j’avais le nez dans le guidon. La PEDAGOGIE FREINET correspond à la façon dont j’ai envie de faire avec les enfants et surtout le fait qu’ils soient au centre, que l’on soit au niveau de ses besoins, de ses attentes. Pour le moment, mes élèves sont acteurs, je voudrais qu’ils deviennent auteurs. Je pars encore beaucoup trop de moi.
A la rentrée, je vais avoir un CM1/CM2. Même si je suis toute seule à mettre la PEDAGOGIE FREINET en place, je vais avoir les enfants deux ans, ce qui est favorable à la mise en place de la PEDAGOGIE FREINET. S’agissant de travail en équipe, je crois pouvoir en entraîner d’autres enseignants dans mon sillage. Par petites touches au départ. Et l’on peut travailler aussi avec ceux qui ne font pas du FREINET, ou qui ont l’impression de ne pas en faire. J’ai pu voir dans leur classe des outils qui me laissent à penser qu’on n’en est pas loin.
Je vais adhérer au GD35, car j’ai besoin de partage et d’étayage. De plus, je ne vais avoir que seize élèves et ça m’encourage aussi. J’ai vraiment l’intention d’y aller progressivement, je ne pars pas en croisade. Ce qui m’intéresse c’est que l’enfant progresse et aille bien. La PEDAGOGIE FREINET favorise cela.
Il y a un autre point qui me plait dans la PEDAGOGIE FREINET, c’est qu’elle a fait ses preuves dans les milieux défavorisés. Je suis pour l’école publique. Je n’adhèrerais pas à une école FREINET privée. Je suis favorable à l’accès de tous à l’école, surtout aux enfants dont les parents ne réfléchissent pas forcément à la pédagogie et à l’éducation. »
 
Séverine - 39 ans – PES
« Pour ce qui est de la façon dont je suis arrivée à la PEDAGOGIE FREINET, je devrais d’abord dire que le fait d’être instit est une reconversion. J’étais commerciale dans le carton. Mais les questions d’éducation m’ont toujours passionnée.
Au départ, j’étais plus attirée par Montessori dont l’approche est plus sensorielle et calquée sur le rythme de l’enfant. Il s’agit de créer un environnement favorable sur lequel l’enfant s’appuie pour s’orienter. L’idée de liberté et de plaisir est très présente.
Moi, je ne me positionne pas sur une orientation définitive en direction de telle ou telle pédagogie. Je vais avoir des CM2 et Montessori n’est pas adaptée dans ce cas. Et puis Montessori est privé alors que FREINET c’est plus dans la mouvance du public. A l’IUFM de Chartres (28), on nous a très peu parlé de la PEDAGOGIE FREINET.
J’ai aussi eu des contacts avec le GFEN. C’est encore autre chose, c’est plus une vision égalitaire et sociale de l’accès au savoir, et une culture de la bienveillance de l’enseignant. Je suis aussi imprégnée des idées du GFEN.
La PEDAGOGIE FREINET a une approche plus concrète au moyen des outils.
C’est ce que j’en perçois actuellement. Dans le 44, il n’y a pas de GFEN, alors que le mouvement FREINET est présent. Il ne m’est pas possible de démarrer sans garde-fou. Ce stage est un garde-fou. Je pose des jalons, j’installe des sécurités. J’ai besoin d’adhérer à l’ICEM et à un GD. J’ai besoin de soutien.
Ca a l’air difficile d’entrer en PEDAGOGIE FREINET, de mettre en œuvre tout ce qu’on voit ici ; et en même temps, c’est enthousiasmant, c’est grisant. J’éprouve un plaisir fou à être là. Il y a un projet de société. C’est tellement différent de la société de consommation. Il y a ici des gens qui ont envie de construire autrement.
Et je me dis aussi : je suis angoissée de débuter. L’approche évènementielle de FREINET, c’est aussi hyper angoissant. C’est l’impression d’un truc hyper ambitieux.
On en discute entre nous. Par exemple en mathématiques, je vais commencer par petites touches. Les GD et l’ICEM c’est hyper important car on peut y rencontrer des personnes relais qui sont des tremplins. C’est à travers les stages futurs que je vais me consolider, à travers des échanges.
Après, il y a toujours la question : t’es en stage, il y a quelque chose de très fort qui te nourrit qui fait contraste avec l’école où l’on va rencontrer la solitude la pression de parents. Suis-je assez solide pour faire face          ?
Je ne suis pas venue là en me disant : je vais être FREINET. Je veux que mes élèves soient heureux, alors FREINET peut-être, mais peut-être pas seulement.
Le côté enfermant de Montessori m’a déplu. N’y a-t-il pas un risque comme cela dans la PEDAGOGIE FREINET ? Et pourtant j’y ai rencontré des gens hyper ouverts, hyper adaptables…Mais est-ce que la PEDAGOGIE FREINET évolue ?
J’ai toujours des réserves par rapport au fait de mettre : « tous mes œufs dans le même panier ».
 
Propos recueillis par
 Francine Tétu
Rostrenen le 24 août 2012
Stage Grand-Ouest